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[center]"Tu veux une chambre pour ce soir, Balthazar ?"[/center]
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Goldie o'Gilt peut être considérée comme un cas unique dans l'univers de Disney. Il est significatif que seuls quelques auteurs se soient risqués à la mettre en scène, tant elle va à contre-courant de l'univers Disney en général, fait de caractères simples et joyeux, de situations figées, et surtout d'une certaine aseptisation sentimentale.
Pourtant, Goldie est un personnage tout ce qu'il y a de plus central. Elle a été présentée par Carl Barks, le créateur d'Uncle Scrooge Mc Duck, ce vieillard avide que l'on connaît chez nous sous le nom de l'oncle Balthazar Picsou, mais aussi d'une grande partie de son environnement : Grand-Mère Donald, les Rapetou, Miss Tick, Gontran Bonheur, tout ça et tant d'autres éléments encore, c'est du Carl Barks !
Et cet auteur ne dessina qu'une seule et unique histoire mettant Goldie en scène.
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La première apparition de Goldie dans une histoire de Barks.[/center]
Goldie est souvent ignorée au profit de Brigitte, "la" prétendante au coeur de Picsou, et ce n'est pas un hasard. Monomaniaque et excessive, Brigitte facilite la tâche à tous les scénaristes Disney... ce qui n'est pas le cas de Goldie.
L'histoire de celle qui a parfois été renommée en France "Doretta Dorémi" est simple :
Maîtresse du Blackjack Saloon, en Alaska, pendant la ruée vers l'or, elle s'est très vite intéressée à un pionnier farouche et économe, un jeune canard de vingt-neuf ans, ayant longtemps parcouru le monde... Balthazar Mac Picsou. Elle l'invita à dîner, profita de l'occasion pour le droguer et lui vola de l'or. Picsou, se réveillant à l'extérieur, dans le froid et la neige, n'apprécia guère la plaisanterie et fonça au Blackjack Saloon pour se battre avec ses complices et enlever la jeune fille, avant de la séquestrer, la contraignant à travailler pour lui, à regagner son or comme lui l'avait obtenu : à coups de pioche.
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Le rapt de Goldie, sous le crayon de Barks.[/center]
Rarement on aura vu Picsou se conduire de manière aussi négative : poussé dans les tréfonds de la paranoïa, puis emporté par la colère, il fait dans la violence sans retenue, défonçant littéralement la racaille du Blackjack Saloon, à tel point que la censure de l'époque effectua des coupes sombres dans le flash-back qui est au coeur de la première aventure avec Goldie (une première pour Carl Barks, plutôt habitué des récits naïfs).
Puis, sous couvert de justice, il réduit pendant tout un mois Goldie en esclavage. Il est inquiétant, mais logique, de penser que la plus grande partie de leur attirance mutuelle s'est nouée pendant cette relation de cohabitation et de domination.
Barks ne reprendra plus le personnage, mais Don Rosa, l'un des dessinateurs Disney les plus talentueux, s'en servit comme l'un des principaux points d'ancrage de la vie de Picsou.
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Détail d'un tableau de Barks.[/center]
Goldie est le seul personnage Disney récurrent à avoir une connotation sexuelle. A ce titre, elle est dotée d'une poitrine, contrairement à la majorité des canards, ce qui est doublement intéressant : attribut de séduction, les seins sont également une aberration anatomique chez les volatiles. Dessinés discrètement chez Don Rosa, ils vont au-delà de l'oiseau, se rapprochent de l'être humain. On quitte ici la dimension de personnage enfantin perpétuellement souriant pour arriver à quelque chose de touchant, de sensible, de "réel".
Pour revenir à la facette sexuelle de la demoiselle, elle se spécialise à l'occasion dans les regards langoureux et les phrases ambiguës : pas seulement celle qui ouvre cet article, mais aussi "Tôt ou tard, il se traînera à mes pieds", "D'habitude, dans leurs rêves, les autres me mettent plus en valeur", etc, etc.
D'ailleurs, les retrouvailles de Picsou et de Goldie à "l'époque moderne" (les années 60, perpétuellement) se déroulent toujours selon le même schéma : d'abord effrayé, Picsou se rabat rapidement sur la colère, ne sachant comment réagir aux avances d'une vieille dame qui lui montre très clairement qu'elle est toujours intéressée.
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Goldie, avant de se révéler un pilier d'une conception adulte d'un personnage destiné aux enfants, est d'abord une caricature de la femme fatale amoureuse des bijoux...[/center]
Pour moi, Goldie représente toute la tragédie de la vie de Picsou sous la plume de Barks et surtout sous celle de Don Rosa. Car derrière des dehors humoristiques, c'est
un personnage bien triste, un vieillard qui a anéanti sa vie au profit d'un coffre-fort géant bourré d'or, qui a chassé sa famille... qui aurait pu connaître l'amour avec Goldie. Dans la première histoire où Don Rosa la fait apparaître, elle conclut par "Picsou est surtout riche en souvenirs. Et les souvenirs sont comme ces chocolats : gelés par le temps, inchangé depuis des décennies, mais toujours aussi bons après toutes ces années". Longtemps après, au sein de son oeuvre phare "La Jeunesse de Picsou", le même auteur nous livre une scène bien plus amère : au terme de leurs péripéties amour-haine, Goldie envoie un courrier à Picsou. "Quand il aura lu cette lettre, il comprendra... et il me reviendra".
Picsou n'ouvrira jamais l'enveloppe.
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Une possibilité jamais réalisé.[/center]
"C'est dangereux de penser qu'il y a quelqu'un dans ce monde pourri que je pourrais... que je peux..."
C'est sur cette pensée que Picsou laisse tomber la missive dans la neige.
Un site qui révèle tout ce qu'il y a à savoir sur Goldie o'Gilt la Brillante :
http://www.sullivanet.com/duckburg/loves/goldie.htm
Une galerie de fan arts où le talent n'est hélas pas à la hauteur du caractère touchant de certaines situations :
http://www.sullivanet.com/duckburg/myart/hearts1.htm