Eltanin

Où vas-tu, Gilgamesh ? La vie que tu poursuis, tu ne la trouveras pas. Quand les dieux ont créé l'humanité, ils n'ont réservé aux hommes que trépas, et ils ont retenu la vie entre leurs mains. Gilgamesh, que ton ventre soit repu. Jour et nuit, réjouis-toi, fais la fête chaque jour, jour et nuit, danse et joue de la musique. Que tes vêtements soient propres ; lave-toi la tête et le corps longuement ; contemple donc l'enfant qui te tient par la main, et que ta compagne se réjouisse contre ton sein ! Ce sont là  les loisirs de l'être humain.


Plus de deux milliers d'années avant Jésus-Christ, quatre mille six cents ans et des poussières avant l'heure où je vous écris, le souverain Gilgamesh régnait en Mésopotamie. De l'homme, nous savons peu de choses, mais il nous a laissé sa légende...
Nous connaissons Gilgamesh, au début de l'histoire, comme un tyran intransigeant, qui se mue en héros sous l'impulsion de forces qui le dépassent. C'est donc à  un parcours de rédemption que nous assistons là , mais également à  une tragédie, puisque la quête du personnage principal est sans espoir : il poursuit la chimère de l'immortalité. Or il n'appartient pas aux hommes d'exister sans mourir...
L'Épopée de Gilgamesh est peut-être bien le premier conte philosophique, fourmillant de détails relatifs à  des imageries terrestres et surnaturelles, émaillé d'affrontements où les sortilèges tiennent une aussi grande place que la violence brute. Le récit est fortement teinté de pessimisme, non seulement par les évènements dramatiques et leur dénouement, mais également par l'affaiblissement progressif de Gilgamesh, illustration de la victoire de la vieillesse.

Rédemption? C'est là  une lecture à -travers le philtre judéo-chrétien. À lire: l'adaptation de Robert Silverberg chez l'Atalante.

Les tablettes de Gilgamesh sont aussi le premier récit religieux écrit par la main de l'homme et le premier à  faire mention du Déluge.

Darly oublie surtout le personnage d'Enkida, archétype à  plusieurs degrés qui semble augurer des figures encore très lointaines de la némésis et du bon sauvage (coucou, Huxley). Plus sympathique à  mes yeux que Gilgamesh, son compagnon et ami semble établir avec lui un lien profond, touchant, voire amoureux. C'est la relation Enkida/Gilgamesh qui sera à  l'origine de la prise de conscience profonde de la mort par Gilgamesh et de la seconde partie de sa quête.
Une histoire très poétique, avec tout le charme des anciens mythes : influence permanente des modes de vie nomade et sédentaire sur le récit, action de forces vagues et variables, monstres et prodiges. Le courage et le désespoir au coeur de l'épopée me paraissent magnifiques en dépit de leur simplicité.

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Je pense que tu fais référence à  Enkidou... C'est le compagnon du héros, sa Némésis mais sans lui, sans sa mort, Gilgamesh ne serait jamais parti en quête. En-dehors des personnages spécifiques et sa propre projection dans un processus narratif, il est nécessaire de considérer la structure du mythe dans son ensemble.

Pour les bédéphiles, une excellente adaptation chez Poisson Pilote (Dargaud), parue en deux tomes et en édition intégrale sous le titre Gilgamesh.