Eltanin

Eltanin

Learn Humanity
Nous sommes actuellement le 14 Mai 2024, 21:47

Le fuseau horaire est UTC+1 heure [Heure d’été]




Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 11 message(s) ] 
Auteur Message
 Sujet du message: Vide
MessagePublié: 03 Mai 2005, 17:12 
Hors-ligne
Troubadour autiste
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 08 Avr 2005, 08:43
Message(s) : 653
VIDE

Lors des obsèques du Pape Jean XXV, Florian se trouvait par hasard devant sa télévision. Une grippe qui lui était tombée dessus en même temps que la déprime du mois de novembre. Après avoir passé plusieurs heures à  tenter de griffonner sur sa table à  dessin, il avait fini par renoncer. Dès qu'il se concentrait un peu, des points blancs lui dansaient devant les yeux et son crâne devenait le repère d'un groupe d'un joueur de grosse caisse en délire. Le jeune homme abdiqua donc, posa son crayon, et alla s'affaler sur son canapé qui gémit sous le poids pourtant léger de son propriétaire.
Le satellite avait beau être une merveilleuse invention, il n'améliorait en rien la qualité des programmes. Après avoir subi une heure et demis de feuilletons divers et variés, prêt à  s'endormir d'ennui, le malade zappa sur la chaîne d'informations pour découvrir une foule en imperméable se presser sur la place Saint-Pierre, dans l'espoir d'apercevoir la dépouille de leur énième saint père. Divers journalistes pêchaient ça et là  des commentaires solennels, qui marqueraient cette journée historique.
"C'est tellement beau", expliquait une grosse dame dont le maquillage dégoulinait tant sous l'effet de l'émotion que de la pluie. "Tout le monde est uni. C'est cela la religion."
Florian n'aurait pas pu être plus d'accord avec ce qui avait été dit. Mais pourquoi, alors, fallait-il attendre l'agonie et la mort d'un pontife sénile pour que les croyants connaissent ce grand mouvement de solidarité et d'union prêché par leur livre ? Solidarité qui, d'ailleurs, dureraient autant de temps que l'intérêt des médias pour les affaires du Vatican. Cette réflexion ne volait certes pas bien haut mais avait le mérite d'être fondée, et d'être restée sans réponses depuis plusieurs siècles.
Il se trouva justement que, en ce treize novembre deux mille vingt-six, cette interrogation fut éclaircie.
Elle le fut très précisément alors que l'on s'apprêtait à  sortir le corps de Jean XXV pour l'exposer aux yeux de la foule. Brusquement, celle-ci se divisa spontanément en deux, tandis qu'un silence impressionnant se faisait sur la place. Les caméras de cent trente chaînes de télévisions se braquèrent d'un même mouvement vers les pèlerins. Parmi eux, s'avançait quelqu'un. Aux yeux de Florian, il s'agissait d'un jeune homme au teint pâle, le visage encadré par une chevelure châtain et ébouriffée. Il avançait tranquillement, au milieu du rassemblement. Il ne portait qu'un jean et un T-shirt, mais ne semblait nullement incommodé par l'averse qui continuait consciencieusement à  tomber sur la scène. Même le bruit des gouttes semblait s'être estompé. Ce silence, pourtant, n'avait rien d'oppressant, non. C'était le vrai silence, le grand silence du début du monde. Les silences qui l'avaient suivi n'en n'avaient été que de médiocres dilutions.
Florian détourna les yeux de sa télévision. Pourtant, la scène continuait de se dérouler sous ses yeux, comme s'il avait été présent. Il comprit que c'était le cas, il était présent.
- Non... C'est encore plus grand... Tout le monde est présent.
Oui. Il le sentait à  présent. Ils étaient tous à  côté, quel que fut leur nombre. Tous les êtres humains de la création, tout ce qui vivait, et qui avait eu, un jour ou un autre, l'intuition vague que quelque chose au-delà  de leur entendement devait exister. Tout le monde.
Le garçon inconnu était à  présent sorti de la foule. Il alla se placer aux côtés de la dépouille du Pape qu'il examina, une expression indéchiffrable sur le visage. Mais sereine, ça, ça ne faisait aucun doute. Après plusieurs battements d'éternité, il se tourna vers l'assemblée des vivants.
- Je suis là , dit-il très simplement. Vous ne souffrirez plus.
Florian se retrouva assit dans son salon, très droit, la télécommande à  la main.

Les jours qui suivirent se déroulèrent comme au ralenti. Il était arrivé. Tout le monde en parlait. Il ? Eh bien le Messie, celui que l'on attendait. Lui. Qu'il soit apparu sur la place Saint Pierre n'était que de peu d'importance. Il était le Sauveur que toutes les religions attendaient en secret, celui qui aide et qui guéri, celui qui délivre de la souffrance. Il ne fallu pas longtemps pour se rendre compte que nul ne l'avait vu de la même façon. Pour l'un, c'était un grand vieillard au visage sévère, pour d'autre une mince Africaine au sourire radieux. Il était aussi multiple qu'il y avait d'espoirs, et Il était unique. Son action commença. Doucement, tranquillement. Il suffisait qu'on le lui demanda pour qu'il arrivât. Il se dirigeait vers celui qui l'avait appelé, le regardait un instant avant de se pencher vers lui, de lui dire, pour lui seul, les mots qui lui faisaient défaut depuis toujours.
Florian assista à  ce phénomène, de nombreuses fois. Il était en compagnie de gens, et Il arrivait, on l'attendait depuis toujours, bien entendu. La personne qu'il laissait derrière lui se retrouvait transfigurée. Et, peu à  peu, le miracle s'étendit. Des conflits cessèrent. Des gens cessèrent de mourir, des peuples se mirent à  s'entraider. Ce n'était pas l'avènement du Royaume d'un Dieu sur Terre. La Terre devenait enfin humaine.
Depuis plusieurs années, la mère de Florian souffrait d'une maladie incurable des os, qui n'était pas mortelle, mais handicapante. Lorsqu'il rendit visite à  ses parents, quelques jours après ce qu'on ne pouvait appeler que l'Evénement, le jeune homme eut l'impression que sa mère se déplaçait à  plusieurs mètres au-dessus de lui. Du fait de son fauteuil roulant, il la dépassait pourtant de quatre bonne têtes.
- Il est venu tu sais, pépia-t-elle d'une voix espiègle, après le repas. Si tu avais vu la tête qu'a fait ton père ! Mais moi je l'attendais depuis longtemps, déjà .
- Qu'est-ce qu'il t'a dit ?
La femme secoua la tête. Ses traits étaient d'une beauté à  couper le souffle.
- Non. Il faudra que tu lui parles. Ca ne servirait à  rien, sinon.

Florian se tenait devant un cinéma, l'air perplexe. Il ne rêvait pas. Même dans ce multiplex ultra-moderne, on ne proposait que des films vieux de près de deux mois. Il hésita un instant avant de pousser les portes vitrées et de se diriger vers la guichetière, une brune piquante qui l'accueillit d'un petit signe de tête.
- Oui monsieur ?
- Mademoiselle, j'aurais une question au sujet de votre programmation.
- C'est à  dire ? Il y a un problème ?
- Pas vraiment mais... Les films qui passent commencent à  dater, non ?
La jeune fille eut l'air prise au dépourvu.
- Oui, c'est vrai. Mais d'après M. Béchaud, le directeur, nous n'avons rien reçu de neuf ces derniers temps.
Florian balbutia un vague au revoir avant de foncer au bureau de presse le plus proche. Sans accorder un regard au propriétaire des lieux, il avança vers l'étagère consacrée aux actualités cinématographique.
- Anthologie... Rétrospective... Hommage...
Il fallait se rendre à  l'évidence : aucun cinéaste n'avait produit quoi que ce soit depuis des semaines. Le dessinateur leva les yeux au plafond, se balançant sur ses talons. Une idée, ou plutôt quelques mots commençaient à  se former dans son esprit. Il jeta un regard circulaire autour de lui, redoutant presque de trouver ce qu'il cherchait : le rayon librairie du magasin. Celui-ci se situait au fond de la boutique. Un grand panneau bleu signalait les sorties du mois. Florian compta trois livres disposée dans l'étagère normalement destinée à  accueillir une dizaine d'ouvrages.
L'idée se mettait en forme, en mots. Elle parlait avec une voix ancienne et profonde, qui venait du plus profond des entrailles du garçon.
Celui-ci releva la tête avec horreur, et dévisagea le libraire qui lui rendit son regard avec perplexité. Il fallu à  Florian un miracle de sang-froid pour ne pas se mettre à  hurler. Il se retourna et sortit en chancelant de la boutique. Une fois dehors, il se mit à  courir aussi vite que ses jambes le lui permettaient, indifférent aux protestations qu'il soulevait. Il atteignit son appartement en quelques minutes, ferma la porte à  clé, et s'assit à  sa table à  dessin. Son crayon à  la main, il se pencha sur une feuille de papier Canson vierge. Des traits de charbon maculèrent bientôt la feuille, brisant son harmonie, tandis que prenaient vie tour à  tour des chats ailés, des femmes armées d'épées, des hommes aux yeux tristes. Florian sentait la sueur couler le long de ses tempes mais continua de dessiner.
Il ne s'arrêta que lorsque la feuille fut entièrement remplie de créature fantasmagoriques, qui couvaient leur créateur d'un regard rassurant. Celui-ci rejeta son crayon à  l'autre bout de la pièce. Il avait envie de pleurer.

- Attend-moi !
Florian accéléra. Cette partie de la ville était particulièrement laide. Sa course l'avait amené, il ne savait comment, sur le pont de l'Alma. Ce qui était sûr, c'est qu'il avait couru pendant très longtemps. Mais ses pensées avaient fini par le rattraper. A bout de souffle il se laissa tomber à  genoux. Derrière lui, les pas se rapprochèrent.
- S'il te plaît, ne t'approche pas.
Il obéit et s'arrêta. Florian se retourna pour le dévisager. Il n'avait pas changé, bien entendu, depuis qu'il l'avait vu sur la place Saint Pierre. Et, comme de raison, la pluie tombait.
- Pourquoi tu ne veux pas ? Tu sais que tu es dans les derniers ? Peut-être le dernier.
Le dessinateur sentit des larmes brûlantes lui rouler le long des joues.
- Tu sais. Tu dois le savoir. Il n'y a plus de littérature, plus de musique, plus de peinture. C'est depuis que tu es arrivé.
Il observa Florian un court instant.
- Bien sûr que oui. Vous l'avez déjà  compris il y a longtemps, tout cela, non ? La sublimation, ce terme existe depuis près de deux siècles.
- Je sais... Je sais. Mais il y a plus que cela. Tu ne peux pas nous enlever... tout ça !
- Florian. L'art est, depuis le départ, le moyen qu'on trouvé les hommes de communiquer avec cette part d'eux-mêmes qui n'est pas exprimable, ce vide qui les détruit un peu tous les jours. L'art est une berceuse que l'on chante à  sa souffrance. Et je...
- Tu peux combler cette souffrance. En quelques phrases, tu peux faire en sorte que nous cessions d'avoir mal !
Cette dernière phrase avait été hurlée. Il se contenta de hocher la tête, gravement.
- Oui.
- Mais je ne peux pas exister sans cela, moi. J'ai besoin de grands bateaux de verres qui partent pour des pays où le soleil ne se couche pas, j'ai besoin de sons que l'on ne peut pas comprendre, j'ai besoin...
- Parce que tu es encore incomplet.
- Mais, complet, ce ne sera plus moi !
- Si. Seulement tu ne le sais pas encore.
Florian enfonça ses ongles dans son visage. Il le regarda presque avec chagrin.
- Arrête de te faire mal, s'il te plaît.
- C'est toi qui me fait mal.
- Non. C'est toi qui veut garder ton mal. Parce que tu es encore petit.
- Je sais. Je sais.
La voix du jeune homme n'était plus qu'un murmure.
Alors le Messie, le Sauveur s'avança d'un pas. Alors Florian, sans un cri, enjamba la rambarde du Pont de l'Alma et plongea, la tête la première, dans l'eau noire, prêt, si jamais il était encore conscient après le choc, à  prendre une grande inspiration liquide.
- Pour atteindre l'inaccessible étoile...

_________________
There is no room for '2' in the world of 1's and 0's, no place for 'mayhap' in a house of trues and falses,
and no 'green with envy' in a black and white world.


Dernière édition par Jalk le 03 Mai 2005, 21:36, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 03 Mai 2005, 19:46 
Hors-ligne
Zombie
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 29 Avr 2004, 03:00
Message(s) : 581
Localisation : Québec, Canada
Le vilain DragonNoir fait de la pub pour ta fic sur MSN.

Donc voilà . J'ai lu.

C'est bien. Très bien même...

J'aime bien l'idée que "le Messie" soit différent aux yeux de chaque personne (malgré que je sois athée). Et que sa présence fasse disparaître l'art sous toutes ses formes.

euh... je suis obligée de faire un commentaire plus constructif? ^^;


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 03 Mai 2005, 20:00 
Hors-ligne
Saumon qui remonte le fleuve
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 01 Mai 2005, 00:50
Message(s) : 177
Le vilain DragonNoir fait de la pub pour ta fic sur MSN.

Donc voilà . J'ai lu.

... je vais innover pour la suite, quand même. C'est un beau texte, surtout dans la thématique :!:
je ne sais que dire de plus. Ah oui, en fait : merci pour ce partage.

_________________
La première règle est : il est interdit de parler d'Eltanin !

Quand les larmes et le sang n'auront plus aucun sens, j'irai prier, si j'y pense. © Lenorman


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 03 Mai 2005, 20:50 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
Le vilain DragonNoir fait de la pub pour ta fic sur MSN.

Donc voilà . J'ai lu.

8)

... bref.

Pas que sur MSN, la réclame, j'en ai aussi fait dans l'Horloge Parlante. Parce que cette brève nouvelle m'a beaucoup, beaucoup frappé. Plus fort qu'aucune des autres oeuvres de ta part que j'aie déjà  parcouru. Les nouvelles des entreprises "Les Personnifications Anthropomorphiques Réunies" étaient excellentes (mention spéciale à  "Distraction", dont la chute me plaît), j'avais été quelque peu dérouté par celle qui se finit "en queue de poisson" et j'avais apprécié, sans plus, les aventures de Deliah, mais ce texte... ce texte...
Ce texte m'a touché comme rarement un écrit le fait. J'ai souvent ressenti beaucoup d'émotion à  la lecture d'une nouvelle, d'un roman. Je n'aurais pas dévoré tant de livres si la chose écrite ne m'avait pas perturbé et dérangé autant que ravi. Mais une telle affinité avec le propos, ça faisait très longtemps. Depuis "L'assassin royal" de Robin Hobbs, en fait, dont les artifices simples (la narration à  la première personne associé à  un cheminement très douloureux du héros, Fitz Chevalerie, et à  une prose justement axée sur les sensations et la souffrance) avaient provoqué chez moi une implication quasi viscérale.
Trêve de divergences sur ma "compatibilité émotionnelle" avec l'oeuvre. Pour être plus constructif :

D'abord, il reste quelques erreurs de ce type, indignes de ta plume :
Jalkie a écrit:
le malade zappa sur la chaîne d'informations pour découvrir un foule en imperméable se presser sur la place Saint-Pierre

Entacher un aussi beau texte d'un tel faux pas, ça se rapproche du péché... du moins pour les totalitaristes de la langue française tels que votre serviteur.

Ensuite, point de détail, les dates de sortie des films.
Le cinéma est une industrie aux délais à  la fois longs et aléatoires. L'effet de l'arrivée du Messie n'aurait pu causer un arrêt aussi universel de la production de longs métrages. Ils auraient pu s'arrêter, certes, mais là , c'est trop régulier à  mon goût... enfin, c'est du chipotage, on peut justifier facilement ce point en disant que ce sont les derniers films dont la réalisation avait été effectuée avant l'avènement mystique qui sont sortis deux mois avant la découverte de Florian.

En vrac :
- Incipit peu frappant, mais qui remplit son office sans trop de problèmes, et qui met en confiance le lecteur (il se sent l'espace d'un instant en terrain connu) plutôt que de le ferrer sèchement.
- Contexte quasi-contemporain bien sous-entendu et indication aussi fluide qu'efficace de la date et donc de la qualité d'anticipation de ce récit (bien que ce soit ici quasi anodin).
- Fluide, facile à  lire, pas un mot de trop. Et pourtant, tu mets pas mal d'adverbes, félicitations, d'habitude, ils surchargent les textes au lieu de les servir. Pas ici : chaque terme est à  sa place.
- On retrouve l'idée d'un élément surnaturel dont la vision change selon les gens, très bien employée ici... et je gage que ce n'est pas la dernière fois que l'on tombera sur ce concept chez toi.
- Peinture des personnages aussi rapide que bien brossée.



A mon humble avis, Jalk, tu t'es surpassé.

_________________
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 03 Mai 2005, 21:44 
Hors-ligne
Troubadour autiste
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 08 Avr 2005, 08:43
Message(s) : 653
Eh bien tout d'abord merci à  tous... Non, avant ça Déhennounet, pour te faire mentir, je vient de corriger mon abominable faute d'orthographe. Ensuite, désolé de commencer par le superficiel, mais ce que tu m'as dit sur les adverbes m'a fait très plaisir, je travaille sur leur emploi depuis un moment. Savoir que j'ai commencé à  changer leur abus en signe stylistique distinct me remplit de joie.
Pour le reste, eh bien je ne sais que dire (pour le moment) sinon des banalités. Pour sacrifier aux poncifs, je tiens à  dire qu'il a été écrit pendant l'orage qui s'est abattu sur Paris cet après-midi. Que je l'avais en tête depuis un moment. Que le Messie a, pour Florian, la tête d'un type croisé dans le métro. Que pour le moment, ce texte est encore trop "d'un bloc" dans ma tête pour que je puisse raisonner froidement dessus.
En tout cas, savoir qu'il aura pu toucher des gens, non des moindres (oui, j'exècre la flatterie) est un compliment que je saurai apprécier à  sa juste valeur. :)

_________________
There is no room for '2' in the world of 1's and 0's, no place for 'mayhap' in a house of trues and falses,
and no 'green with envy' in a black and white world.


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 03 Mai 2005, 23:46 
Hors-ligne
Padawan familier
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 08 Avr 2005, 11:00
Message(s) : 71
Citer:
K. dit :
Le premier paragraphe de ce Jalk est assez mauvais. Continuons.
K. dit :
Par exemple :
K. dit :
"Oui. Il le sentait à  présent. Ils étaient tous à  côté, quel que fut leur nombre. Tous les êtres humains de la création, tout ce qui vivait, et qui avait eu, un jour ou un autre, l'intuition vague que quelque chose au-delà  de leur entendement devait exister. Tout le monde."
K. dit :
Le "tout le monde" est de trop, vraiment de trop, cela achève (dans tous les sens du terme) un paragraphe déjà  médiocre.
K. dit :
Non, le style est vraiment trop maniéré, je n'aime pas du tout.
DragonNoir dit :
Le début n'est pas des meilleurs, las... tu bénéficies d'un très bon sens critique, décidément, tu vois les failles qui m'échappent.
K. dit :
Tout cela est beaucoup trop expéditif. Je vais l'imiter un peu : "Tout à  l'heure je suis sorti dehors. Elle était là . Elle ? Oui, elle, la fille que j'aimais. Nous nous regardâmes un instant. Puis elle se retourna. Espérant qu'elle ne s'en aperçoive pas, je la suivis. Le sentait-elle ? Une excitation malsaine m'animait, me poussait à  continuer. Elle tourna au coin de la rue."
K. dit :
Je pourrais écrire toute la soirée des conneries comme ça, ça n'a aucune valeur littéraire...
K. dit :
Sinon, les histoires à  la "Jean-Pierre fait ci, Florian fait ça", c'est un peu dur à  avaler en 2005, je trouve.
DragonNoir dit :
Hum, la date n'a pas valeur universelle... pourquoi ne pas dire que les adverbes ne sont plus à  la mode depuis les années 70 ?
K. dit :
"Il fallait se rendre à  l'évidence : aucun cinéaste n'avait produit quoi que ce soit depuis des semaines."
>> Ha ha, parce qu'un film se produit la semaine qui précède sa sortie ? Hum...
DragonNoir dit :
Oui, ça, je l'avais repéré.
DragonNoir dit :
Extrait de ma critique : "Ensuite, point de détail, les dates de sortie des films.
Le cinéma est une industrie aux délais à  la fois longs et aléatoires. L'effet de l'arrivée du Messie n'aurait pu causer un arrêt aussi universel de la production de longs métrages."
K. dit :
Non, ce que je veux dire, c'est qu'il ne suffit pas de dire qu'un personnage fait des choses et de mettre des dialogues de temps en temps pour écrire des fictions supportables, sans quoi n'importe quel tâcheron de plume qui rédige les potins dans Paris Match serait prix Nobel de littérature, hmm ?
K. dit :
Bon, regarde.
K. dit :
"Il hésita un instant avant de pousser les portes vitrées et de se diriger vers la guichetière, une brune piquante qui l'accueillit d'un petit signe de tête.
- Oui monsieur ?"
K. dit :
Est-ce qu'il raconterait cette scène anodine de cette façon-là  s'il (Jalk) voulait écrire une lettre à  quelqu'un racontant sa dernière excursion au cinéma...?
K. dit :
"J'hésitai un instant avant de pousser les portes vitrées et de me diriger vers la guichetière, une brune piquante qui m'accueillit d'un petit signe de tête.
- Oui monsieur ?"

>> Bof, on s'en fout...
DragonNoir dit :
Mmmh, oui...
K. dit :
De toute façon, c'est des conneries, j'ai rencontré Jésus pas plus tard que tout à  l'heure et il n'a rien à  voir avec tout ça.
DragonNoir dit :
Tu pourrais la poster, ta critique de son texte, ça l'aiderait à  progresser, le Jalk...
K. dit :
Je vais copier-coller cette conversation.
DragonNoir dit :
Alors, j'ajoute : il subsiste des verbes mal conjugués, Jalkie, tu n'as pas assez relu.
DragonNoir dit :
Et quelques virgules manquent.
K. dit :
Il y a trop de points. De toute façon. Je n'aime pas. Ce style-là .


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 04 Mai 2005, 00:05 
Hors-ligne
Troubadour autiste
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 08 Avr 2005, 08:43
Message(s) : 653
Eh bien merci pour cette critique qui n'a fait que souligner des erreurs qui me sont déjà  coutumières. :)
J'aurais juste quelques points à  souligner pour ma déf... Non, pas ma défense en fait, quelques points à  souligner. Je ne sais pas, Bonjour, si tu as lu le très beau livre de Vincent Jouve intitulé L'effet personnage et qui explique mieux que je ne saurais faire qu'il est tout à  fait possible d'écrire des textes à  la "Jean-Pierre fit ceci, Florian fit cela". Je ne me réclame d'aucun courant en particulier, mais il se trouve que ce style-là  me convient, et je suis de ceux qui pensent, à  tort ou raison, je l'ignore et je m'en moque, que le style n'est pas un effet de mode.
D'autre part, quelques-unes de tes critiques relèvent quand même beaucoup de l'impressionisme et tes tournures phrases me semblent très universelles ("c'est médiocre", "ça n'a aucune valeur"...). Enfin, c'était une conversation MSN et pas un post rédigé j'en suis conscient, et il y a longtemps que je ne me formalise plus de ce genre de formulation ;).
Ceci dit j'ajouterai un chef d'accusation : Déhenne, je ne me suis pas relu du tout. Pas de raison particulière, si ce n'est que je hais ça et que mon bêta-lecteur préféré n'était pas là  aujourd'hui.
En tout cas merci, il y a certains points que je tenterai d'améliorer mais beaucoup d'autres que je ne changerai pas.

_________________
There is no room for '2' in the world of 1's and 0's, no place for 'mayhap' in a house of trues and falses,
and no 'green with envy' in a black and white world.


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 04 Mai 2005, 17:14 
Hors-ligne
Supérieur
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 01 Mai 2004, 11:57
Message(s) : 1161
Je ne demande pas à  ce genre d'écrits d'être stylistiquement recherchés. Au contraire, qu'ils se laissent lire facilement met le lecteur dans le même état d'esprit que l'auteur lorsqu'il rédige d'un jet spontané (si tu dis ne pas avoir relu, tu dois l'avoir écrit sur un impulsion).
Je pense que l'on devient vite conscient du côté "ridicule" de certaines formulations (les phrases courtes, effet psychologiquement torturé bon marché), mais que l'on peut néanmoins continuer à  les utiliser, sans véritablement se prendre au sérieux. *Ici*, je trouve qu'elles s'accordent agréablement avec le contexte de messie/croyance naïve.

Quant à  la disparition du cinéma et de la littérature, je dirais que ça donne un côté "conte philosophique". Il est évident que cela manque de réalisme : pourquoi *précisément* l'Art ? La venue du Messie devrait théoriquement avoir des répercussions bien plus profondes, ou en tout cas bien plus générales sur la nature humaine, qui ne sauraient se limiter à  des domaines aussi... pittoresques. Cela rompt clairement avec tous les artifices de réalisme dispersés au début du texte. Néanmoins, je trouve ce contraste 'plaisant'. C'est un moyen de couper court avec une "analyse sociologique de l'évolution des mentalités" et d'illustrer joliment sa pensée.

Il est cependant navrant de terminer sur une note aussi banale, aussi "passe-partout" que le suicide. Ce procédé, utilisé à  outrance et (donc) totalement décrédibilisé, sonne comme une conclusion facile pour une inspiration qui n'a pas su trouver son terme. Dans ces cas-là , mieux vaut laisser en suspens (et ainsi conserver l'essence évanescente de l'idée initiale) que de "boucher" le texte par un pareil lieu commun.

_________________
Spoiler! :
N'oubliez jamais que vous êtes unique, comme 7 milliards d'autres humains sur Terre.


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 04 Mai 2005, 19:12 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
Permet-moi de croiser le fer une fois de plus avec toi, très cher. Car je ne suis pas du tout d'accord avec la plupart de tes dires. :wink:



Arkh a écrit:
Quant à  la disparition du cinéma et de la littérature, je dirais que ça donne un côté "conte philosophique". Il est évident que cela manque de réalisme : pourquoi *précisément* l'Art ? La venue du Messie devrait théoriquement avoir des répercussions bien plus profondes, ou en tout cas bien plus générales sur la nature humaine, qui ne sauraient se limiter à  des domaines aussi... pittoresques.


Ces autres conséquences ayant été illustrées par le texte - avec brièveté, certes, parce que tel n'est pas le thème principal de la nouvelle, mais elles n'en sont pas moins là  -, je considère la remarque comme nulle et non avenue.
Relis donc :

Jalk a écrit:
Des conflits cessèrent. Des gens cessèrent de mourir, des peuples se mirent à  s'entraider. Ce n'était pas l'avènement du Royaume d'un Dieu sur Terre. La Terre devenait enfin humaine.


De plus, le texte demeure un récit à  court terme ; seuls les premiers effets de l'arrivée du Messie sont ici relatés.



Arkh a écrit:
Il est cependant navrant de terminer sur une note aussi banale, aussi "passe-partout" que le suicide. Ce procédé, utilisé à  outrance et (donc) totalement décrédibilisé, sonne comme une conclusion facile pour une inspiration qui n'a pas su trouver son terme. Dans ces cas-là , mieux vaut laisser en suspens (et ainsi conserver l'essence évanescente de l'idée initiale) que de "boucher" le texte par un pareil lieu commun.


Va-t-on en finir une bonne fois pour toutes avec ce genre de vision ? "Ouah, c'est cliché", "Cette situation est totalement stéréotypée", etc... les vieilles images n'ont pas toujours tort et la plupart des lieux communs sont véritables. En ce sens, l'artiste devrait davantage se préoccuper, à  leur endroit, de les transcender que de les éviter.

_________________
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 05 Mai 2005, 15:26 
Hors-ligne
Supérieur
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 01 Mai 2004, 11:57
Message(s) : 1161
Par manque de réalisme, j'entendais l'absence de répercussions sur l'environnement du protagoniste. La guichetière et le libraire semblent parfaitement indifférents à  la situation ; la presse, quant à  elle, se cantonne à  d'innocentes rétrospectives, comme s'il s'agissait d'une simple "période creuse" -et écriture et journalisme sont-ils donc des domaines si éloignés pour que l'un disparaisse sans même que l'autre n'en ressente les effets ? Un monde en pleine mutation, où "les conflits cessent, les gens cessent de mourir" (comme tu cites - des *premiers effets*, dis-tu ?) ne laisse la vie continuer son train-train comme si de rien n'était. Mais je pense que tout ceci est volontairement hyperbolique, comme pour souligner une sorte de prescience chez le héros et augmenter la force du texte en l'isolant du commun des mortels : il semble vivre un délire purement subjectif. Ce que je trouve "beau".

Par ailleurs, n'ai-je pas laissé entendre que le texte reposait sur un agencement judicieux de différents clichés ? Alors que le reste est bien structuré, le suicide final fait tâche, "superflu" ; on pourrait sans mal se passer de cette pseudo-conclusion, qui peut s'appliquer à  tout texte présentant un individu un tant soit peu désespéré (la situation me fait souffrir ? pas envie de lutter, je me suicide. J'en aurais presque honte *pour le personnage*). Cela n'a rien d'un point culminant de l'action dramatique ; c'est plutôt une clôture facile, que je taxerai de "nihiliste et sans réelle signification" - cette expression est de toi.

_________________
Spoiler! :
N'oubliez jamais que vous êtes unique, comme 7 milliards d'autres humains sur Terre.


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 05 Mai 2005, 20:14 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
Je crois que c'est Pratchett qui a écrit, dans "Strate-à -gemme" (par ailleurs un roman que j'ai trouvé pénible par la surabondance de détails et de situations sans aucun rapport direct jetés avec précipitation dès les premières pages, comme si l'auteur voulait nous prouver que, tel X-or, il n'avait besoin que de quelques secondes pour exposer tous les détails de l'univers qu'il avait imaginé), une phrase assez marrante :
"Un bon conseil : ne retournez jamais les propos des gens contre eux."
Il semblerait que le personnage de Pratchett qui prononce ces mots n'aie guère le sens de la joute. Le fin du fin consiste à  pousser l'interlocuteur face aux failles de sa propre logique et à  remettre en question des postulats erronés (c'est l'école Socrate). Enfin bref, ici, tout mon paragraphe est hors sujet, car employer l'une de mes expressions ne faisait que rajouter du piment à  ton texte. J'aime bien écrire de jolis mots inutiles, à  l'occasion. :mrgreen:

Je me contenterai de te répondre qu'à  mon sens, la question du suicide en tant que solution de facilité n'est que ton interprétation liée à  la perception que tu as de cet acte.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 02 Juil 2007, 03:21, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
Afficher les messages publiés depuis :  Trier par  
Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 11 message(s) ] 

Le fuseau horaire est UTC+1 heure [Heure d’été]


Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 6 invité(s)


Vous ne pouvez pas publier de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum

Recherche de:
Aller vers :  
cron
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction et support en françaisHébergement de site