Eltanin

Eltanin

Learn Humanity
Nous sommes actuellement le 29 Avr 2024, 01:10

Le fuseau horaire est UTC+1 heure [Heure d’été]




Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 132 message(s) ]  Aller vers la page Précédent  1 ... 5, 6, 7, 8, 9
Auteur Message
 Sujet du message:
MessagePublié: 14 Juin 2006, 20:39 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
Après bien du temps (et le temps, c'est de l'argent), voici donc la suite de Traumenschar, écrite et postée en retard, mais postée tout de même!! Désolé... Sachant que j'ai une dizaine de chapitre d'avance, là , je devrais pouvoir tenir deux petits mois sans trop de faux pas!! Encore pardon!! Aimez-moi!! :cry:

______________________________


2. Atlantide.
DragonNoir se pencha une énième fois au dessus du précipice. Les vagues s’écrasaient sur les falaises d’Etretat, et il dut fermer les yeux pour éviter le vertige. Au bout de quelques secondes, il les rouvrit et resta un instant à  contempler l’horizon, évitant au maximum de baisser les yeux.
« On ne va pas rester plus longtemps ici, DragonNoir ! ragea Q-Po derrière lui. Il est grand temps de rentrer, maintenant. De plus, on ne sait même pas si Mistrophera ne profitera pas de cette échappée Normande pour s’en prendre à  nous. »
DragonNoir se retourna vers Q-Po, songeur, puis lui posa la question qui lui brûlait les lèvres depuis le saut des quatre Trauméniens : « Est-ce que la mort de ton propre frère ne t’attriste pas ?
-Pas le moins du monde. » répondit immédiatement Q-Po, en fixant son compagnon dans les yeux. DragonNoir décela un soupçon de vérité, mais il doutait de la sincérité des paroles de Q-Po.
« Séphira me manque, pourtant, dit-il finalement en tournant son regard vers la mer. J’espère qu’elle n’a pas de problèmes, où qu’elle soit.
-Je doute que Séphira se laisse faire, si tel est le cas, répondit Q-Po. DragonNoir ?
-Oui ? marmonna-t-il.
-Nous irons la chercher, comme nous le faisons pour Séphy-Roshou. Puisque la technique de Magnum est applicable, nous irons la chercher. »
DragonNoir observa Q-Po, absorbé par des pensées qu’il n’aurait pas dû avoir. Il détourna les yeux, fixant l’herbe haute qui poussait sur les bords de la falaise. Un brusque coup de vent lui coupa la respiration.
« Je commence à  douter de tout cette comédie. Nous n’avons eu que des problèmes depuis le début des envols, nous avons perdu un groupe entier par précipitation, nous avons perdu Hilde, nous avons perdu Séphira, nous avons perdu Hitomi, et maintenant, qui allons-nous perdre ? Qui ?
-Personne. Ils ne sont pas perdus, juste égarés, apaisa Q-Po.
-Mais dis-moi quel est l’intérêt d’envoyer à  la mort des dizaines de personnes pour en sauver une autre ? »
Q-Po ne répondit pas. Le silence s’interposa entre eux, un silence épais, palpable. Seules les vagues et leur sonorité mousseuse osaient le briser. Une nouvelle rafale de vent vit voleter le trench-coat de Q-Po. DragonNoir finit par s’excuser.
« Nous sommes fatigués, répondit Q-Po.
-Ce n’était pas une raison suffisante pour douter de notre entreprise. Si on commence à  mettre en doute les raisons de notre engagement, autant tout laisser tomber immédiatement. »
Mais au fond de lui, DragonNoir n’était effectivement plus sûr de rien. Un nouvel univers s’écroulait autours de lui, et il voyait tour à  tour ses camarades disparaître, sans qu’il puisse y faire quoi que ce soit. Il lui tardait de retrouver Séphy-Roshou, pour en finir au plus vite et aller chercher Séphira. Il irait lui-même.
Mais pour le moment, il devait déjà  préparer le prochain voyage. Ensuite, lorsque les préparatifs seront terminés et les Trauméniens briefés, il tentera sa chance. Il fit demi-tour, dos à  la falaise, et annonça :
« Appelle Aran Valentine pour la prochaine mission. Ensuite, nous irons récupérer les corps. J’espère que les équipements de plongés sont prêts. »

[center]*
* *[/center]

Sans attendre, le grand prêtre se posta entre la foule, qui hésitait entre rire et étonnement, et leva de nouveau les bras, comme pour les protéger. Mais pour protéger qui ? se demanda DarKenshin. Nous, ou eux ? Elle n’eut pas le temps pour chercher la réponse : le prêtre commença à  parler d’une voix forte.
« Ydja soit loué ! Ydja, notre Dieu !
-Loué soit Ydja, répondit la foule d’une seule voix. Déon ä Adja !
-Vous tous ici réunis avez assistez à  sa venue. À leurs venues. Voici les quatre élus envoyés par Ydja pour l’accueillir. Leurs corps serviront de réceptacle pour notre Dieu, et Ydja sera ainsi avec nous, incarné dans notre Cité, maintenant et à  jamais !
-Loué soit Ydja ! » hurla la foule, ivre de joie et buvant les paroles du grand prêtre avec avidité. Ils venaient de trébucher, le grand prêtre leur avait tendu la main avec ses mensonges, et ils s’y raccrochaient avec ferveur. Guillaume, lui, songea avec pertinence que quelque chose ne tournait pas rond.
« Malheureusement, l’attente n’est pas terminée pour nous, humbles mortels. Ydja, afin d’être certain d’obtenir un organisme sain et apte à  contenir sa toute puissance, doit soumettre ces quatre individus à  une ultime épreuve ! »
Le prêtre se retourna vers les quatre Trauméniens, les bras écartés. Il en imposait, dans son immense toge qui amplifiait sa stature et le moindre de ses mouvements. Il laissa planer le silence, pour accroître l’intensité dramatique de la scène, puis acheva son discours d’une voix rauque mais forte.
« La sphère. »
Un murmure d’étonnement parcouru la foule, la calmant de son effervescence précédente. Le grand prêtre sourit intérieurement.
La sphère était une des épreuves qu’endurait le citoyen lambda qui voulait accéder au statut de prêtre, grand prêtre ou qui se désignait comme nouveau prophète d’Ydja. Il était alors conduit dans une immense salle close où flottait une sphère d’un liquide inconnu, probablement de l’eau, et devait plonger entièrement dans cette sphère ondoyante. Une fois à  l’intérieur, il ne pouvait en sortir que six jours plus tard.
Mort ou vivant.
Les rares personnes qui ressortaient vivantes de cette épreuve étaient alors considérés comme des représentants d’Ydja et adulés jusquâ€™à  leur mort. Depuis l’arrivée de Kevin Jolios au poste de grand prêtre, personne n’avait réussit à  vaincre la sphère. Il s’assurait que les gagnants ne sortent pas de la pièce vivants.
« Euh, excusez-moi, mais je crois qu’il y a méprise… » commença Viper Dragoon. Le grand prêtre le foudroya des yeux. Il venait tant bien que mal de se tirer d’un problème inattendu, et voilà  maintenant que ces fauteurs de troubles voulaient contrecarrer ses explications dûment improvisées.
« Qu’y a-t-il, illustre élu de Ydja ? réussit-il à  dire sans laisser transparaître sa rage.
-Nous ne sommes pas…
-â€¦à  l’aise, devant tout ce public. » termina DarKenshin en haussant la voix pour couvrir celle de Viper Dragoon. Ses trois compagnons, ainsi que Jolios, la regardèrent. Sans se démonter, elle poursuivit d’un ton las :
« Ce voyage jusquâ€™à  vous nous as éreintés. Nous désirerions nous reposer un peu avant de passer à  l’épreuve de notre Dieu Ydja. Nous aimerions partir avec toutes les chances de notre coté lorsque viendra l’heure de l’épreuve de la Sphère. »
La foule poussa une ovation d'approbation, et DarKenshin lança un sourire ravi à  l’assemblée. Le grand prêtre, fulminant intérieurement, mais soulagé de ne pas avoir été démasqué publiquement, exécuta un nouveau demi-tour et leva les bras.
« Les quatre élus d’Ydja désirent se reposer ! Je vais les conduire en personne dans leurs appartements. Dès ce soir, l’un d’eux entrera dans la sphère pour y passer l’épreuve. Prosternez-vous une dernière fois devant leur grandeur !! »
Et le peuple se courba obligeamment.

[center]*
* *[/center]

« Commissaire ? C’est moi ! »
Serge avait regretté d’avoir allumé son portable dès l’instant où il l’avait fait. Néanmoins, il ne pouvait pas se permettre de passer à  coté d’une info que lui donnerait l’appareil. Même s’il avait longtemps été réfractaire à  l’idée de ce téléphone de poche, mouchard de poche selon ses dires, il s’y était tout de même habitué.
« Qu’est-ce qu’il y a, encore ? soupira-t-il en reconnaissant la voix de Détroit.
-C’est au sujet du kidnapping à  la morgue, euh…
-Je me doute bien que tu ne vas pas me parler du temps qu’il fait ! Vous avez chopé le type qui a volé les corps ?
-Non, mais nous avons un portrait robot. »
L’accent de fierté qui dégoulinait de cette phrase donna la nausée à  Thourn, et il se força à  retirer son doigt de la touche raccrocher. Après tout, si le portrait robot était celui d’un homme aux longs cheveux, habillé en noir et un air froid et détaché, ça pourrait l’intéresser.
« Des détails ?
-Un grand type, chevelure châtain, yeux bleus ou verts, mais clairs. Sociable et…
-Oui, donc rien à  voir, pensa Serge à  voix haute.
-Rien à  voir avec quoi, commissaire ?
-Avec rien ! »
Il roula des yeux en regardant autours de lui, s’énervant tout seul pour avoir crier au téléphone dans un endroit public. Il avait en horreur tout ceux qui parlaient fort à  leurs portables, dans la rue, dans le métro, au restaurant, au supermarché, et il ne voulait pas faire la même chose. Il ferma les yeux.
« Commissaire ?
-Quoi ? dit-il toujours les yeux clos.
-Vous enquêtez sur quoi exactement ? Toujours sur Larbaud ou bien sur autre chose ? Vous êtes partis sans rien dire, et…
-C’est une ancienne affaire. Une affaire qui pourrait avoir un rapport avec Larbaud, avec les corps volés et bien d’autres choses. Mais moins tu en sauras, mieux ça vaudra. »
La vérité, c’est qu’il n’avançait pas. La conversation avec la fleuriste n’avait rien donné, et elle ne se souvenait évidemment pas de la personne qui avait été cherché les fleurs. Et Brest était une grande ville. Serge se voyait mal faire le tour de toutes les habitations du quartier pour demander si, par hasard, un membre de la famille était allé à  Nantes pour un enterrement.
« Un cul de sac…
-Pardon commissaire ?
-Écoute, je serais encore absent quelques temps. Je suis relativement loin, pour le moment, et je n’ai encore rien trouvé de probant. Tout tourne bien au commissariat ?
-Oui, on se débrouille, mais…
-Au poil, impec.
-Je peux vous aider, commissaire ? »
Serge réfléchit un moment. Il n’était pas utile, vraiment pas utile d’utiliser ce gamin pour cette enquête. C’était son enquête à  lui, et le douloureux souvenir de son ancien équipier assassiné au tout début de cette immense affaire lui revint en mémoire.
« Non, il vaut mieux pas. »
Puis, soudainement, une idée lui vint. Il avait lâché prise dès qu’il avait obtenu des informations intéressantes à  Nantes, mais il y avait certainement d’autres pistes qui sortiraient de cette ville. Il n’avait pas tout vu, là -bas.
« Détroit ?
-Oui commissaire ?
-Finalement, j’ai peut-être un boulot pour toi… »

[center]*
* *[/center]

La porte se referma sur le visage écarlate de la jeune fille qui venait de leur servir un véritable banquet. Mais malgré ce semblant d’opulence, leur liberté s’avérait limité : La salle, aussi belle soit-elle, n’était rien de plus qu’une prison dorée. Comme pour confirmer, un cliquetis de serrure les informa qu’ils étaient maintenant en sécurité.
Coincés.
Viper Dragoon s’approcha d’une table abondamment envahie de mets tous plus appétissants les uns que les autres, attrapa un petit four et le goba sans attendre.
« Mmmmmhh ! ‘achement bon !
-Nous sommes coincé dans un monde qui nous est inconnu, et tout ce à  quoi tu penses, c’est manger ? s'irrita Pythagore en lui retirant un autre amuse-gueule des mains.
-Quitte à  être en prison, autant se goinfrer.
-Bel état d’esprit… »
DarKenshin, assise dans un des luxueux fauteuils qui parsemaient la salle, avait le regard perdu dans le vide. Elle réfléchissait à  cet endroit, à  ce qu’elle avait vu, et à  la machination à  laquelle ils venaient de prendre part malgré eux. Et toute cette histoire ne lui plaisait pas beaucoup.
Lorsque l’équipe avait été formée, tout d’abord, elle s’était engagée aux cotés de Pythagore et Viper Dragoon de mauvaise grâce. Non qu’elle avait rechigné à  mourir, bien au contraire : Mistrophera et son attaque l’avait décidé à  se rendre plus utile encore au sein des troupes de Traumen.
Mais elle avait compris immédiatement que ce nouveau voyage, cette nouvelle mission dans un pays des morts, n’allait pas être de tout repos avec les engueulades incessantes entre deux de ses équipiers : Pythagore et Viper Dragoon, encore eux, ne cessaient de s’asticoter mutuellement, multipliant les coups vaches et les insultes.
Dalisc avait été désigné d’office comme quatrième membre, par Q-Po lui-même, parce qu’il ne s’impliquait pas assez dans la tache qu’on leur avait confié. Comme il était d’humeur maussade et renfermée, il n’ajoutait pas à  l’ambiance particulièrement bruyante de ce nouveau groupe, mais semblait conférer à  DarKenshin un statut de nourrice pour adolescents à  problèmes. Et Les problèmes ne faisaient que commencer.
« Allez, Dalisc, prends-en un peu ! C’est gratuit !
-Non.
-Tu vois, s’avança Pythagore. Il est du même avis que moi.
-Non.
-Je crois qu’il se contente de répondre non à  tout ce qu’on lui dit, résuma Viper Dragoon en continuant de s’empiffrer. Et bien reste dans ton coin.
-Oui. »
Dalisc s’accroupit sur ses talons et resta immobile. DarKenshin jugea bon de recentrer la situation, et elle prit la parole à  son tour.
« Et si nous faisions quelque chose de plus constructif que de nous chamailler et manger ? Ça pourrait être une bonne idée, non ?
-Je suis d’accord, répondit Pythagore en jetant un regard en coin à  Viper Dragoon. Il faut trouver un moyen de sortir d’ici.
-Pas forcément, répliqua l’autre en s’arrêtant enfin de manger. Pourquoi ne pas suivre ce que disait ce mec qui nous a accueilli ? »
Le problème, songea DarKenshin, c’est que nous ne connaissons pas ses véritables intentions. Elle secoua la tête et expliqua son point de vue aux autres.
« Il doit être une sorte de prêtre, ou de grand pontife religieux, dans ce monde. Et à  voir sa tête lorsque nous sommes apparus, je pense que ce n’était pas nous qui étions attendus en haut du temple.
-Mais il a dit que… commença Viper Dragoon.
-Il est évident qu’il a brodé autour de notre arrivée à  une vitesse fulgurante, pour ne pas perdre la face devant la foule qui nous avait vu débarquer. Ce qui m’inquiète le plus, c’est cette histoire de sphère, d’épreuve. »
Un silence gêné s’installa, seulement perturbé par la mastication intensive d’un Viper Dragoon qui avait trouvé des ailes de poulets esseulées. DarKenshin prit une longue inspiration et résuma à  voix haute la situation, pour tenter d’y voir plus clair.
« Bon, nous sommes tous morts, nous sommes tous dans une cité où les gens se sont noyés…
-…et où le ciel est fait d’eau ! ajouta Pythagore en regardant Dalisc qui ne s’offusqua pas de s’être fait voler la découverte.
-Donc une citée engloutie, oui, rectifia DarKenshin.
-Peut-être est-ce là  la fabuleuse Atlantide ? Vous savez, la civilisation engloutie ? Celle dont on n’a jamais retrouvé la trace, et tout !
-C’est possible, Viper. »
Viper releva le menton, souriant, content de lui.
« Et nous voilà  maintenant prit pour des élus d’un Dieu étrange d’ici, poursuivit DarKenshin, et soumis à  une épreuve qui peut nous donner la mort. Une autre mort. Et donc nous entraîner dans un autre pan de réalité, comme Séphira Strife ou Hilde. »
La disparition des deux Trauméniennes avait longuement fait hésité DarKenshin lors du départ de cette nouvelle mission. Serait-elle la prochaine ? Se retrouverait-elle projetée dans un autre au-delà  ? Les rejoindrait-elle ? Mais ce qui l’inquiétait le plus, c’était de tomber dans un de Ses pièges.
« Nous sommes maintenant coincés dans une pièce où nous devons attendre qu’on vienne nous chercher pour passer l’épreuve, sans possibilité de visiter la ville ni de chercher des informations sur Séphy-Roshou. De plus, rien ne nous interdit de penser que nous ne sommes pas tombé tout droit dans les bras d’un des hommes de Mistrophera. »
Elle se tut un instant.
« Je crains que nous ne soyons pas très bien partit, conclut-elle.
-Oui.
-En gros, on est dans la panade. » commenta Viper Dragoon en jetant une pique de brochette par-dessus son épaule. Puis une idée lui vint.
« Mais si jamais cette épreuve nous donnait les connaissances d’Ydja ? Et que nous devenions réellement les réincarnations de ce Dieu ? Avec ça en poche, nous pourrions savoir si oui ou non Séphy-Roshou est passée par ici !
-C’est… » DarKenshin tourna et retourna l’idée dans sa tête durant de longues minutes. « C’est possible, finit-elle par dire. Mais c’est aussi risqué : Cette épreuve peut-être mortelle.
-Et nous pouvons toujours utiliser nos pilules si le besoin s’en fait sentir ! dit Pythagore.
-Mais nous ne savons pas ce qu’il y a à  l’intérieur… » soupira DarKenshin en se passant une main sur le visage. Mais il faut bien faire quelque chose, de toute façon. Nous n’allons pas rester ainsi, les bras croisés, à  attendre que le temps file. Je vais me porter volontaire la première, en espérant que ces trois là  puissent se débrouiller sans moi le temps de l’épreuve. Elle releva la tête, décidée, mais Pythagore la devança.
« Je suis volontaire pour la sphère. »
Elle n’en cru pas ses oreilles. Viper Dragoon, la mâchoire tombante, était tout aussi abasourdi. Il en lâcha une tranche de jambon.
« C… Comment ? bégaya-t-il.
-Je veux bien y aller. Après tout, mon personnage Trauménien est un ange…
-…avec la coiffure de Yu-Gi-Oh… marmonna Viper Dragoon.
-…et j’étais tellement immortel sur le forum, avec mes claquements de doigts, que je devrais pouvoir m’en sortir sans trop de bobos. »
Devant le manque de réaction de ses compagnons, il éclata de rire et compléta sa pensée d’une voix tellement sincère que DarKenshin en fut toute retournée.
« Et puis, nous sommes aussi là  pour prendre des risques, non ? C’est ça être un Trauménien dans l’âme ! »
Un instant, un tout petit instant, DarKenshin s’autorisa un élan d’admiration devant ce gamin qui se lançait sans réfléchir vers l’inconnu. Un instant, elle se sentit fière d’être avec lui, dans ce groupe. Un instant, elle le respecta. Elle aima ce groupe.
Et l’instant plus tard, où Viper hurla qu’il était le seul homme à  pouvoir se mettre une banane dans le nez – et en faisant la démonstration de son talent – DarKenshin reprit son avis initial sur l’état mental de ce groupe.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 09 Juil 2006, 16:41 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
3. Épreuve.
Toujours aux aguets, Sylvain Detroit se pencha aussi discrètement qu’il l’espérait et s’assura que les deux personnes qu’il filait étaient toujours assises. Ceci fait, il se renfonça dans son siège en morigénant. Est-ce qu’ils allaient s’évaporer ? Sauter par la fenêtre du train ou s’enfuir en volant ? Ils ne se doutent même pas de ma présence.
Allez, une dernière fois, au cas où…

Il s’inclina sur le coté et vit une place vide à  l’endroit où devait être l’homme. Il se redressa, prit de panique. Un frisson glacé lui mordit la nuque. Avec un air de rien affecté, et peu naturel, il se leva pour aller aux toilettes – qui se situaient à  l’opposé de la direction qu’il prenait – et passa à  côté de ses cibles.
Le jeune homme reprit sa place après avoir rangé un livre dans son sac, à  coté de lui. Il regarda passer Sylvain Detroit, qui lui adressa un sourire forcé et se mit presque à  courir pour rejoindre sa place.
Aran Valentine regarda Nina et haussa les épaules.
« Il y a des fous, parfois.
-Et bien plus près qu’on ne le croit, ajouta Nina en souriant. Je te rappelle que nous sommes des voyageurs de l’au-delà  !
-Chut ! Pas si fort ! »
Nina lui tira la langue.
« Tu penses que quelqu’un me prendrait au sérieux, si je disais que nous nous dirigions vers Paris pour aller mourir et retrouver une amie, selon toi ? »
Aran admit sa défaite et se gratta la tête. Ils étaient partis dès le coup de fil de DragonNoir, car il ne voulait pas que ce policier revienne poser des questions embarrassantes. Ils seraient dans la capitale quelques temps, puis repartiraient sur Dijon une fois la mission achevée, si Nantes était toujours risqué.
« À quoi tu penses ? demanda Nina en lui prenant la main.
-Oh, à  rien de particulier.
-Tu mens mal.
-Je sais. »
Il garda tout de même le silence. Elle n’insista pas. Aran leva les yeux rapidement et croisa le regard de l’individu qui ne cessait de les surveiller depuis le début. Les yeux disparurent derrière un dossier.
« Le moins qu’on puisse dire, ricana Aran, c’est qu’il n’est pas très discret.
-Qui donc ?
-Le mec qui n’arrête pas de nous surveiller. »
Cette fois-ci, Nina prit un air affolé, et jeta des regards alarmés autours d’elle. Aran lui attrapa le bras et lui intima silencieusement de se calmer. Elle s’exécuta, à  contrecÅ“ur. Le souvenir de cet inquiétant commissaire lui revint à  l’esprit.
« Qui est-ce ? demanda-t-elle.
-Certainement pas le flic qui est venu chez toi. Mais c’est peut-être un de ses collègues, qui doit nous suivre. » Aran resta un instant plongé dans ses pensées, puis déclara, sincèrement déçu : « Et le pire, c’est qu’il a mis un bleu pour nous suivre ! Il nous prend pour des personnes insignifiantes ou quoi ?
-On ne peut pas aller chez DragonNoir alors ?
-On n’a pas trop le choix tout de même, répondit Aran. Si on va chez moi, le résultat sera pareil : Le commissaire viendra nous voir là -bas.
-Mais nous aurons protégé le reste des Trauméniens. »
Aran plongea son regard dans celui de Nina, puis acquiesça.
« En attendant, on va tout faire pour le semer. Tu connais le métro parisien ?
-Un peu, oui, répondit Nina.
-Tu saurais t’en sortir, seule ?
-J'arrive à  changer de gare entre gare de Lyon, Montparnasse et Austerlitz, quoi.
-Bon, en conclut Aran. Il faudra que tu apprennes sur le tas alors. Il ne pourra pas nous suivre tout les deux, surtout si nous prenons des chemins différents. Tu t’en crois capable ?
-Je saurai m’en sortir seule, si je sais où je vais. » dit-elle sans attendre.
Aran, impressionné par la détermination de sa partenaire, ne put réprimer un élan de fierté. Un sourire naquit sur son visage, et il ajouta.
« Tant mieux, parce que je n’y connais pas grand-chose non plus. »

[center]*
* *[/center]

DarKenshin dévisagea longuement le grand prêtre. Celui-ci soutint son regard, de longues minutes durant, et personne ne disait un mot. Même Viper Dragoon, qui avait délaissé son délire fruité pour s’asseoir avec les autres, gardait le silence, intéressé.
« Reprenons, finit-elle par dire. Vous dîtes que vous savez pertinemment que nous ne sommes pas des Dieux, mais que vous nous gardez quand même emprisonnés ici pour préserver la foule de cet avènement raté, c’est bien ça ?
-Exactement. »
Le grand prêtre soupira, comme s’il sentait soudainement l'accablement le gagner. Il sembla réduire de volume.
« Vous n’êtes manifestement que de simples humains morts noyés, et vous avez atterris ici, en haut du temple, par le plus grand des hasards. De ce fait, la foule a cru à  un miracle.
-Un miracle que vous avez orchestré, dit DarKenshin.
-Plus ou moins, admit le prêtre. J’avais prédit l’arrivée d’une entité surpuissante, et vous êtes arrivés. Je peux vous dire que je me suis manifestement trompé, mais il faut que je garde la face aux yeux du peuple, et pour ce faire…
-…vous avez besoin de nous, n’est-ce pas ? » termina Pythagore. Le grand prêtre se tourna vers lui et sembla le voir pour la première fois. Puis il sourit. Un sourire abattu.
« Exactement. »
Il leur expliqua brièvement en quoi consistait l’épreuve de la sphère, leur indiquant que les survivants à  cette expérience se voyaient dotés d’une omniscience infinie, passée, présente et future.
« Je sais que les risques sont grands, ajouta-t-il. Je ne vous cache pas que rares sont les personnes qui ont survécus à  la sphère.
-N’ayez crainte, nous sommes… …particuliers, l’informa Viper Dragoon avec un regard mystérieux. Nous ne périrons pas. »
Pythagore ricana doucement, et Viper Dragoon lui jeta un Å“il noir.
« J’ai cru voir, oui, reconnu le grand prêtre. Vos enveloppes corporelles ne ressemblent pas aux nôtres. Vous semblez plus réels.
-Plus réels ? répéta DarKenshin.
-Si nous acceptons, l’interrompit Viper Dragoon, est-ce que ceux qui ne passeront pas l’épreuve seront libres de vaquer dans la cité ?
-Et bien, je pense que c’est possible, oui. Si vous assister à  l’entrée et à  la sortie de vos compagnons, lorsque ce sera le temps. »
Viper Dragoon regarda tour à  tour les autres Trauméniens. Ils s’éclipsèrent pour en débattre entre eux, un peu plus loin. Ils parlèrent à  voix basse, la pièce n’étant pas assez grande pour permettre un semblant d’intimité.
« Je ne le crois quâ€™à  moitié, avoua Pythagore.
-Pareil, marmonna Dalisc en regardant ses doigts.
-En même temps, dit Viper Dragoon, s’il nous permet de nous balader en ville, on est trois à  avoir le champ libre ! Et je serai en plus débarrassé de toi.
-C’est moi qui vais être tranquille, rétorqua Pythagore.
-Bon arrêtez vous deux ! »
Kevin Jolios se tourna vers le groupe avec un Å“il inquiet et curieux. DarKenshin regretta d’avoir haussé le ton, mais les débordements de Viper Dragoon et de Pythagore devenaient rapidement insupportables. Elle en était presque venue à  apprécier le dévouement de Pythagore à  aller se jeter dans la sphère.
« Bon. Je pense que nous n’avons pas le choix, de toute façon. Il risque de se braquer si nous refusons, et de nous laisser enfermé ici jusqu’à â€¦ » Elle hésita. « Jusquâ€™à  ce qu’il le décide, ou que nous nous lassions.
-Nous pourrions sortir par la force ? proposa Viper Dragoon.
-Oui, mais terminé les recherches discrètes sur Séphy-Roshou, et bonjour la pagaille. »
Viper Dragoon baissa les yeux.
« Si Pythagore est toujours d’accord, il ira dans la sphère. De notre coté, nous trois, nous irons glaner des informations. Nous aurons six jours, le temps de l’épreuve. Avec un peu de chance, nous trouverons ce que nous cherchons durant ce laps de temps, et ainsi, lorsque Pythagore ressortira, nous repartirons. »
Tout le monde acquiesça.
« Dans l’éventualité où l’épreuve tourne mal, n’hésite pas à  avaler la pilule. Un autre ira dans la sphère, et nous recommencerons. D’accord ?
-C’est d’accord.
-On accepte le plan du grand prêtre, menteur ou non ?
-On accepte ! » répondirent en chÅ“ur Viper Dragoon et Pythagore. Dalisc se contenta de murmurer un oui.

[center]*
* *[/center]

Pulsar-San referma le congélateur et inscrivit Pythagore sur l’ardoise accrochée à  celui-ci. Derrière lui, DragonNoir, le Ionisateur Fou et RazaëlAurélie regardaient les appareils, alignés et ronronnants, avec amertume. Chacun était perdu dans de sombres pensées : le Ionisateur Fou songeait à  la manière de parler seul à  seul avec DragonNoir, RazaëlAurélie songeait à  K-Ro et à  tous les Trauméniens disparus, et DragonNoir songeait à  la prochaine mission ainsi quâ€™à  Séphira Strife.
« Quel spectacle déprimant, dit DragonNoir.
-N’est-ce pas ? acquiesça le Ionisateur Fou. Mais ceux-ci reviendront, il n’y a pas à  s’en faire, n’est-ce pas ?
-Sauf s’ils ne reviennent pas. » déclara RazaëlAurélie d’une voix morne. Elle avait perdu tout son entrain et sa folie naturelle. Elle s’était réfugiée chez elle, en Alsace, après l’enterrement, prétextant avoir besoin de temps. Durant de nombreux mois, elle n’avait fait que se morfondre, et avait finalement décidé récemment de rejoindre le groupe des Trauméniens sur Paris, pour se redonner le moral.
Elle était arrivée après le départ de Mistrophera.
« Toujours aucunes nouvelles de K-Ro ? demanda-t-elle.
-Comme je te l’ai dit, Youfie est partie à  sa recherche, mais nous avons également perdu sa trace après son départ, dit DragonNoir.
-Mais il ne faut pas perdre espoir ! calma le Ionisateur Fou.
-Je vais me servir un verre d’eau. » répondit-elle en s’en allant, la tête basse. DragonNoir fit un pas pour la suivre mais le Ionisateur Fou le retint.
« J’ai à  te parler. »
DragonNoir regarda RazaëlAurélie passer la porte et la refermer doucement, et se dit qu’il ne l’avait jamais vu aussi déprimée et abattue. Il se promit en son for intérieur de surveiller son état dans les jours à  venir. Il s’inquiétait.
« Qu’est-ce qu’il y a, LIF ?
-Je crois qu’Hitomi nous a révélé une chose très importante, juste avant de partir. »
Le Ionisateur Fou s’assit sur le sofa, relégué dans un coin de la pièce pour laisser la place aux nombreux congélateurs. DragonNoir s’assit à  coté de lui, dubitatif. Il lui avait raconté les derniers mots d’Hitomi, et manifestement, le Ionisateur Fou avait cogité de son côté. Ce que n’avait pas eu le temps de faire DragonNoir.
« Voilà , commença le Ionisateur Fou. Hitomi nous a dit que nous avions tous, à  plus ou moins grande échelle, des capacités latentes. C’est même ce que rechercherait Mistrophera, selon elle.
-Oui, elle nous a même poussé à  les développer. Je suppose que c’est ce que nous faisons lorsque nous passons de vie à  trépas, mais…
-Pas du tout. » stoppa le Ionisateur Fou. DragonNoir baissa les mains, expirant la fin de sa phrase dans un soupir interrogatif. Le Ionisateur Fou reprit de plus belle, sourire aux lèvres. Il était sûr de saisir un point capital.
« Enfin, si, dans un sens, nous dominons nos pouvoirs en mourrant. Mais Hitomi est… était capable de s’en servir ici, sur Terre. Elle était capable de s’en servir vivante.
-Comme Mistrophera, ajouta pensivement DragonNoir.
-Exactement ! Tu veux un autre exemple ? Les pilules de Hilde. »
DragonNoir réfléchit intensément à  ce qu’il venait de lui dire.
Hilde avait été créer ces pilules alors qu’elle était morte. Elle s’était servie de ses compétences de Trauménienne pour les fabriquer, et elle les avait ensuite ramenées dans le monde réel pour que nous…
« Comment a-t-elle fait pour les faire venir jusqu’ici ? s’exclama DragonNoir, prenant subitement en compte que ces pilules pour ressusciter n’étaient même pas censées exister.
-Voilà  où je veux en venir… »
Il lui tendit quelques pilules de la réserve et DragonNoir en prit une entre ses doigts. Elle avait tout pour être réelle. Elle était matériellement réelle, mais avait pourtant été imaginée. Il la tourna et la retourna entre ses doigts, l’examinant de près comme il ne l’avait jamais fait. La couleur bleutée, la poudre contenue dans le réceptacle en gélatine, tout semblait pourtant vrai.
« Hilde les a ramené du royaume des morts sans même s’en rendre compte, simplement parce qu’elle était partie pour créer ces pilules et nous les ramener. Elle n’a jamais réfléchit au fait qu’elle n’allait pas pouvoir transférer des objets de la mort à  la vie, mais pourtant…
-…elle l’a fait, termina DragonNoir en redressant la tête.
-Elle a ramené ces pilules des morts, elle a créée ces pilules à  partir de rien. »
DragonNoir digéra l’information. Cette idée ne lui était jamais venue à  l’esprit, et pourtant il avait passé des heures à  réfléchir au pourquoi du comment de ces voyages dans l’au-delà , et même au fonctionnement de telles pilules.
« L’imagination, dit DragonNoir. C’est l’imagination qui est notre pouvoir.
-C’est aussi ce que je pense, dit le Ionisateur Fou. Et c’est notre imagination qui intéresse Mistrophera, car il sait que nous sommes des personnes inventives, qui peuvent être capables de bien pire avec de l’entraînement. Pas seulement de voyages dans l’au-delà , mais bien plus de possibilité s’ouvrent à  nous.
-Comme quoi ?
-Comme réussir à  faire passer de notre imaginaire à  la réalité l’appareillage adéquat pour surveiller nos troupes envoyées dans le monde des morts, par exemple. Avec un peu de maîtrise, ça devrait être possible, et nous pourrions établir une communication entre eux et nous sans trop de mal. Nous économiserions ainsi les pilules. »
DragonNoir vit une surprenante pluie d’idées et de possibilités traverser son champ de perception. Il n’avait pas assez pensé aux dernières paroles d’Hitomi, et à  présent il s’en voulait. Mais rien n’était perdu. Avec ce que venait de lui dire le Ionisateur Fou, il lui fallait maintenant l’appliquer, et ainsi…
La porte s’ouvrit et RazaëlAurélie entra avec un verre d’eau. Elle avait pleuré, encore, car DragonNoir remarqua ses yeux rouges. Elle renifla. DragonNoir, excité par ce qu’il venait de découvrir, se leva d’un bond et couru jusquâ€™à  elle, avant de lui prendre les mains. Il plongea son regard dans le sien, et lui annonça :
« Je te jure que je vais les retrouver. Tous. Nous allons tous les retrouver, Raza. Nous allons les retrouver, et les ramener, je te le promets. »
Pour toute réponse, RazaëlAurélie éclata en sanglots.

[center]*
* *[/center]

La sphère luisait.
Aucune lumière artificielle n’éclairait la petite salle où se trouvaient les Trauméniens, le grand prêtre Kevin Jolios, et deux servantes. Pourtant, la salle baignait dans une lumière bleutée de toute beauté, et donnait une lumière tamisée et reposante à  la scène.
Debout devant la sphère, dos à  ses compagnons, Pythagore se faisait enlever un à  un ses vêtements par les deux jeunes femmes qui semblaient à  peine sorties de l’adolescence. Malgré leur relative jeunesse, elles étaient sérieuses et exécutaient leurs mouvements selon un rituel longuement répété.
Elles masquèrent l’intimité de Pythagore par un immense pagne immaculé, qu’elles nouèrent autour de sa taille sans effort. DarKenshin avait son cÅ“ur qui battait à  tout rompre, et elle sentit un sourire naître sur ses lèvres alors qu’elle songeait à  son véritable cÅ“ur qui, lui, ne battait certainement plus.
Elle avait peur pour Pythagore, malgré elle.
« Es-tu prêt ?
-Je suis prêt. »
Les derniers mots qu’ils entendirent de Pythagore, avant bien longtemps. Les deux servantes s’écartèrent, les têtes baissées en signe de
soumission
respect, et Pythagore s’avança. Sa silhouette se découpait sur le bleu de la sphère. C’était une boule de liquide transparent, qui ondoyait en apesanteur, défiant toute logique. On pouvait y voir à  travers, mais DarKenshin pressentait que ce qu’on y voyait n’était pas le véritable décor derrière la sphère, mais un autre.
Un autre monde.
« Puisses-tu trouver Ydja dans la sphère. » tonna le grand prêtre en poussant doucement mais fermement Pythagore, qui se laissa faire. Le première réaction de DarKenshin aurait été de tout arrêter. Elle avait un mauvais pressentiment, et toute cette mascarade ne lui plaisait plus. Elle ne voulait pas perdre quelqu’un d’autre.
Mais elle se retint. Les sacrifices étaient nécessaires, bien que difficiles à  accepter. Pythagore, lui-même l’avait dit, était capable de s’en sortir. Alors elle lui fit confiance, juste un peu, mais assez pour le laisser s’enfoncer dans l’eau translucide qui flottait devant eux. Elle perçut un mouvement à  sa gauche et retint Viper Dragoon.
Celui-ci lui lança un regard alarmé. Avait-il eu le même sentiment de malaise qu’elle ? Elle secoua lentement la tête, et il se détendit. Ils se tournèrent vers Pythagore.
« Déon ä Adja ! » psalmodia le grand prêtre.
La main de Pythagore effleura l’eau et il sentit qu’elle était tiède. Pas chaude, pas froide, mais juste à  la bonne température. Il repensa aux bains de son enfance, cette chaleur, la mousse avec laquelle il jouait, et son esprit s’emplit de bonheur. Sa main entra dans l’eau, et le reste ne tarda pas à  suivre.
Pythagore disparu dans l’eau, ne laissant que des remous en cercles troubler la sphère.
Kevin Jolios ferma les yeux, et sourit pour lui.

[center]*
* *[/center]

Guillaume se rendait chez lui, après une dure et longue journée à  ne rien faire. Cet emploi de surveillant au musée avait cet inconvénient non négligeable : Ne rien faire devenait un art. Oh, bien sûr, il surveillait les tableaux de noyades célèbres, les sculptures d’hommes en train de couler, et tout le reste. Mais le nombre de voleurs – et de visiteurs, à  proprement parler – était si faible que son travail se bornait à  empêcher les statues et autres Å“uvres de s’enfuir par dépit.
Alors il ne faisait rien. Toute la journée. Durant la pause de midi, il reprenait une activité normale, côtoyait à  nouveau des personnes vivantes et se mettait, lui aussi, à  vivre. Le soir, à  la fin de sa journée, il se mettait à  nouveau au diapason de la vie. Mais il y avait toujours quelques minutes où Guillaume Spelvis se retrouvait sans moyens, désemparé, assourdi par le bruit, agressé par les mouvements.
Et c’est à  cet instant que le voleur en profita.
Guillaume sentit son épaule craquer en même temps que la lanière de cuir de sa besace, et puis il vit le sol se rapprocher dangereusement. Le premier réflexe de quiconque aurait été de mettre ses mains devant lui pour se protéger, mais lui préféra s’accrocher à  son sac. Il entraîna le malfrat dans sa chute. Malheureusement pour lui, ce dernier fut plus rapide que Guillaume, encore sonné par toute cette précipitation, et il arriva le délester de ses biens avant de prendre la fuite, suivit d’un Guillaume clopinant.
« Merde… Je ne l’aurais jamais… »
Pourtant, il continuait, bousculant la foule. Le voleur avait disparu de ses yeux. Tu parles d’une course poursuite, songea Guillaume en haletant. Son sac ne contenait rien de précieux, mais il détestait se faire voler, ou perdre quelque chose lui appartenant. Mais il finit tout de même par abandonner.
Soudain, de nombreuses exclamations de surprise furent poussées, un peu plus loin. Guillaume se traîna péniblement – son épaule lui faisait mal, ainsi que le coude sur lequel il était tombé – jusqu’au centre d’attention. Et là , ce qu’il vit le surprit agréablement.
« C’est votre sac ? » lui demanda DarKenshin en le voyant si mal en point, le voleur assommé à  ses pieds, sous un Viper Dragoon souriant.

[center]*
* *[/center]

« Qu’est-ce que c’était que ces quatre énergumènes ? » tonna une voix qui fit sursauter le grand prêtre. Il se tourna et se retourna plusieurs fois, reconnaissant le propriétaire de cette voix et les menaces incluses dans la question.
« Non ! Pas maintenant ! Je ne… Non… » bredouilla Jolios, penaud.
Il marcha de long en large dans son cabinet personnel, scrutant le moindre mouvement. La pièce était grande mais relativement vide, et la voix semblait venir de partout et de nulle part à  la fois. Kevin Jolios, haletant d’avoir cherché en vain, finit par s’asseoir sur une chaise pour reprendre son souffle et son calme.
« Vous avez terminé votre petit manège ? demanda la voix
-Oui, se résigna à  répondre le grand prêtre.
-Quand ferez vous preuve d’un peu de sérieux lors de nos discussions, Jolios ? »
Depuis des mois et des mois, cette voix avait été en sa compagnie sans qu’il en connaisse l’auteur. Les mots, les consignes, les ordres déboulaient de partout, parfois ici, parfois au temple, parfois chez lui. Mais à  chaque fois, il se sentait comme obligé d’obéir, comme si une menace sourde pesait sur chacun des mots prononcés.
« Je répète donc ma question : Qui sont ces quatre personnes que vous avez fait apparaître en haut du temple ?
-Je n’en ai aucune idée, je ne les ai jamais vu, pour tout dire. Je… je pense que ce sont des noyés, comme vous, comme moi, comme nous tous ici.
-Non, pas comme tous. » rectifia la voix, pensive.
Kevin Jolios, les mains agrippées à  ses genoux, les serrant à  en faire blanchir les articulations, n’osa rompre le silence instauré par la voix. Il n’avait jamais le dessus dans les conversations avec elle, mais il ne pouvait s’empêcher de courber l’échine lamentablement. Une fois la voix disparue, il se haïssait pendant de longues minutes.
« Pourtant, reprit-elle, vous avez semblé très convaincant avec cette histoire d’élus, d’épreuve et avec la sphère.
-J’ai rebondis du mieux que j’ai pu. »
Nouveau silence. Le grand prêtre ouvrit la bouche.
« Puis-je vou…
-Et si jamais l’un d’eux se révèle être bien plus qu’un simple noyé ? l’interrompit la voix. Que deviendra mon plan, dans ce cas là  ?
-Je ne sais pas… » répondit franchement le grand prêtre.
L’idée avait tout pour plaire : La voix avait demandé au grand prêtre d’annoncer la venue du Dieu de l’Atlantide, et ce Dieu devait être incarné par un simple nigaud auquel on avait promis monts et merveilles. Une fois celui-ci déclaré divinité, le grand prêtre assurait son avenir, et la voix le sien. Tout deux auraient eu satisfaction.
Mais avec l’arrivée de ces quatre imposteurs.
« Nous pourrions essayer de les faire rentrer dans la combine ?
-Ou bien tous les tuer avant qu’ils ne révèlent ce qu’ils sont vraiment.
-Je leur ai déjà  demandé de ne pas dire un mot à  propos de leur condition d’élus. »
La sueur perla sur le front ridé du grand prêtre, tandis qu’il sentait que la voix réfléchissait à  la situation, et éventuellement à  la sentence à  prendre face à  son initiative hasardeuse. Il retint sa respiration.
« Aucun d’entre eux ne sortira vivant de la sphère, Jolios. C’est bien compris ? Aucun. »

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 23 Juil 2006, 11:10 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
4. Flâneries non constructives.
« Ouais ! De la sole ! J’adore la sole ! »
Sans même attendre que le plat soit posé sur la table, Viper Dragoon vola un filet du poisson et en goba la moitié, qu’il mâcha bruyamment. Devant le regard courroucé de DarKenshin, il s’arrêta, avala tout rond le morceau et reposa ses couverts sur la table. Dalisc, de son coté, ne leva même pas la tête.
« Ne vous en faites pas, leur dit Guillaume. Vous avez sauvé mon sac avec tout ce qu’il y a dedans, alors je vous dois bien ça, madame DarKenshin.
-Alors je peux en reprendre ? demanda Viper Dragoon.
-C’est DarKenshin, simplement, répondit-elle. Mais il nous est foncé dessus, je ne pouvais faire autre chose que de l’arrêter.
-Nous chavons tout de chuite compris qu’il était louche ! » postillonna Viper Dragoon avec énergie. DarKenshin se servit et tendit le plat à  Dalisc, qui refusa poliment.
« Je suis désolé, dit Guillaume en s’asseyant avec eux. Je n’ai que de la sole.
-Ce n’est rien, Guillaume, dit DarKenshin. La sole est tout de même délicieuse.
-Mais c’est un plat de pauvres, on en trouve partout, répondit-il en se servant. Je comprends que votre ami n’ait pas voulu en prendre. Je peux aller acheter du bÅ“uf, ou du poulet si vous voulez ? »
DarKenshin repensa fugitivement aux tables débordantes de nourriture qui se trouvaient dans leur prison dorée.
« Du poulet, che cherais pas contre !
-Non, ça ira, répondit DarKenshin. Dalisc est simplement un peu grognon, mais il aime la sole, j’en suis sûre. N’est-ce pas Dalisc ?
-Non. »
DarKenshin soupira.
« Ne t’en fait pas, s’il a faim, il en prendra.
-Est-ce que je peux vous poser une question, en tant qu’élus d’Ydja ? »
Ça recommence, songea DarKenshin. À partir du moment où ils avaient été relâchés dans les rues de la citée, ils n’avaient cessé d’être harcelés par un peuple féru de religion. Tout le monde ne les reconnaissait évidemment pas, car seuls ceux du premier rang autour du temple avaient discernés leurs traits. Mais le mot passait vite, ainsi que leur description.
Ils avaient réussi à  trouver un coin tranquille, loin de toute l’effervescence due à  leur présence, lorsque le voleur avait déboulé sur eux. DarKenshin avait cru trouver par la suite, en la personne de Guillaume, un homme qui ne les vénèrerait pas comme tant d’autres.
« Nous t’écoutons ?
-Qu’est-ce que ça fait d’être prit pour des demi-Dieux ? »
Il leur sourit. DarKenshin ne sut quoi répondre. Se moquait-il d’eux ? Que risquaient-ils en leur répondant qu’ils n’étaient pas de vrais représentants de leur Dieu ? Ils avaient fait le serment de garder le silence à  ce prêtre, mais ce dernier semblait peu recommandable, contrairement à  ce jeune homme qui respirait l’insouciance.
Mais il faut se méfier des premières impressions, se dit-elle. La tension avait monté d’un cran, avec la question, et Viper Dragoon attendait lui aussi la réponse de sa compagne pour enfourner sa prochaine bouchée. Dalisc avait relevé ses yeux de ses doigts et fixait Guillaume avec méfiance.
« Comment ça ? répondit prudemment DarKenshin.
-Vous n’êtes que des humains qui sont morts noyés ailleurs, et vous êtes atterri au mauvais endroit, au mauvais moment, n’est-ce pas ?
-Qu’est-ce que te fais dire ça ? dit Viper Dragoon.
-L’intuition, en quelque sorte. Je ne crois pas à  cette histoire de Dieu, d’avènement et autres balivernes de ce type. De mon vivant, j’étais déjà  comme ça. »
Il s’arrêta pour boire une gorgée d’eau puis, voyant le désarroi des trois Trauméniens, il ajouta en souriant :
« Ne vous en faites pas ! Vous avez trouvé le bon filon, avec ce job, si vous réussissez à  survivre à  l’épreuve de la Sphère, bien évidemment. Après, ça sera Bonheur et Jours Fastes jusquâ€™à  la fin de cette nouvelle vie, tout frais payés.
-Ce n’est pas ce que… commença DarKenshin.
-…ce que vous désirez ? Mais le grand prêtre s’en fout, de ça. Ce qui compte, c’est ce qu’il désire lui, et ce que désire le peuple. Le peuple désire l’avènement d’Ydja, et le grand prêtre fera tout ce qui est en son pouvoir pour le lui donner. Ensuite, il se mettra bien au chaud dans un coin, avec pour statut l’homme qui a fait apparaître un Dieu.
-Mais quel rapport avec nous ? Nous ne sommes que des…
-Viper ! »
Viper Dragoon regarda le visage contrarié de DarKenshin et laissa la phrase en suspend. Il reposa sa fourchette et s’essuya la bouche, semblant réfléchir. Guillaume sourit de plus belle, et resservit Viper Dragoon généreusement.
« Je ne dirais rien à  personne, faite-moi confiance. Vous m’avez aidé, et je vous aiderai en retour. Je ne suis pas là  pour m’attirer votre colère, que vous soyez des Dieux, ou des humains. Bien que le terme humain me paraisse également inapproprié pour vous. »
DarKenshin garda le silence.
« Qu’est-ce qui me fait dire ça ? demanda Guillaume. Vos vêtements, vos airs mystérieux. Et votre attitude. N’importe qui, dans la cité, aurait agit différemment de vous : Quelqu’un de la basse classe aurait peut-être attrapé le voleur, mais il m’aurait certainement fait payé pour retrouver mon bien. Quelqu’un de la haute société, lui, ne se serait même pas abaissé à  arrêter le criminel, et dans le cas contraire, aurait gardé le sac pour lui. »
Il s’arrêta, puis s’étonna de lui-même.
« Mais qu’est-ce que je raconte ! Les aristos ne traînent même pas dans ce quartier, ils ont certainement peur de contracter le virus de l’amabilité. »
Et Guillaume éclata de rire. Les trois Trauméniens s’entreregardèrent, dubitatifs, et attendirent patiemment que leur hôte se calme. Une fois ceci fait, il s’essuya les yeux en leur expliquant son hilarité.
« J’ai en horreur les nobliaux et autres bourgeois de cette cité. Ils me sortent par les yeux, avec leurs grands airs et leur richesse qu’ils étalent à  qui veut la voir. Ils m’énervent. Et je ne perds jamais une occasion de le dire à  voix haute.
-Nous aurions pu être de leur coté, dit DarKenshin. Nous pourrions vous dénoncer.
-Et vous ne le ferez pas, parce que vous venez d’arriver. Peut-être vous rangerez-vous avec eux, plus tard, lorsque vous saurez où vous en êtes. Mais il est encore trop tôt. »
Il se tourna vers Dalisc, qui détourna précipitamment le regard.
« C’est aussi pour ça que vous êtes méfiants. Vous vous méfiez de moi, du prêtre, vous vous posez des questions sur tout le monde, mais ça passera. Oh, peut-être que vous finirez par me dénoncer, et je finirai mes jours en prison. Ça ne sera pas la première fois.
-Vous êtes quelqu’un d’étrange, Guillaume, finit par dire DarKenshin en souriant.
-Ça non plus, ce n’est pas la première fois qu’on me le dit. »
Il lui adressa un clin d’œil, et d’un coup la pression retomba. Dalisc s’adossa à  sa chaise, Viper Dragoon termina – enfin, selon l’avis de son propriétaire – son assiette, et DarKenshin se détendit sensiblement. Le jeune homme n’était peut-être pas totalement de leur coté, mais suffisamment pour qu’ils se permettent de se laisser aller.
« Vous avez l’air de connaître beaucoup de choses sur cette ville et ses habitants.
-Je me débrouille, approuva Guillaume en se servant à  boire. Pourquoi, vous recherchez quelque chose en particulier ? Ou bien quelqu’un ? »
DarKenshin jugea bon d’attendre encore avant de lui poser des questions en rapport avec la nature exacte de leur venue ici. Ils avaient encore cinq jours avant la sortie de Pythagore, et elle préférait être sûre que cet homme pouvait être digne de confiance. Elle lui envoya un sourire charmeur, et lui répondit :
« Une auberge où passer la nuit ? »

[center]*
* *[/center]

« Déjà  deux jours que tu te trouves là -dedans. » dit Jolios en effleurant la sphère de ses longs doigts. Le liquide ondoya et lui renvoya son reflet déformé.
La lueur bleutée pulsait, maintenant, à  l’intérieur de la sphère. Depuis que Pythagore avait été aspiré, la température avait augmentée, ainsi que l’activité dans le globe qui flottait. Mais Jolios avait beau passer de temps à  autre, il ne voyait rien d’autre que les murs derrière le liquide, et rien à  l’intérieur.
« Deux jours, c’est déjà  pas mal, non ? Il serait temps que tu ressortes. Et mort, de préférence. Puisque ton destin est de mourir, déjà . »
Il fit un nouveau tour, dans l’attente d’une réponse. Ou d’un cadavre inanimé qui se ferait brusquement expulser de la sphère. Mais rien.
Je vais finir par croire que je vais devoir agir. Je te laisse deux autres jours, petit humain. Après quoi, je prendrais ton destin en main.
Kevin Jolios sortit de la pièce, irrité.
Derrière lui, la sphère émit une nouvelle pulsation.

[center]*
* *[/center]

La sonnette s’entendit de l’extérieur, et Serge guetta l’arrivée de quelqu’un. Personne ne répondit. Un chat apparu sur le coté de la maison et fixa le commissaire avec arrogance, comme la plupart des chats. Thourn s’accroupit et tendit la main. Le chat recula, méfiant, sans cesser de le fusiller du regard.
« Minet ! Viens là  minet… »
Serge Thourn agita la main, et le chat continua de le regarder méchamment. Thourn se sentit un moment presque mal à  l’aise, comme si le chat voulait l’hypnotiser. N’importe quoi, Serge, depuis quand les chats hypnotisent les flics ? Et il se répondit presque aussitôt : Depuis que les flics recherchent des morts qui s’enfuient, des mecs habillés en noirs qui font des trucs bizarres et côtoient l’étrange au jour le jour.
Était-ce encore une coïncidence, le hasard ou cette bizarrerie quotidienne qui l’avait poussé à  écouter cette jeune fille chez la fleuriste ? Il avait abandonné cette piste, la vendeuse de fleurs ne sachant rien de précis sur l’identité de la détentrice de la carte. Et, alors qu’il flânait dans les odeurs avant de s’en aller, la jeune fille était entrée.
« Bonjour Amanda, avait dit la fleuriste.
-Salut ! Je voudrais un bouquet de n’importe quoi, c’est pour la fête de ma… mère. »
La fleuriste l’avait conseillée, et Serge tendit l’oreille, sans même y penser. Elle avait alors demandé des nouvelles d’une amie à  la jeune fille.
« Oh non, avait répondu Amanda. Aucunes nouvelles. Mais c’est bien son genre, à  Caro : Même lorsqu’elle est chez elle, elle n’en donne pas, alors c’est pas une fois partie à  Nantes qu’elle va me prévenir de quoi que ce soit.
-J’espère qu’il ne lui est rien arrivé de grave.
-Non, je ne pense pas. Elle allait à  un enterrement, mais elle avait prévenu que ça allait peut-être durer un moment. Bon, je dois y aller, ça fait combien ? »
Serge était sortit, et avait attendu la jeune fille dehors, sous un crachin typiquement breton. Il lui avait alors simplement demandé l’adresse de son amie, et Amanda s’était exécutée en voyant la plaque de police.
« Elle a des problèmes ? s’était-elle inquiété en l’emmenant sur place.
-J’espère que non.
-Elle va en avoir ?
-Je veux simplement lui poser quelques questions, rien d’important. » avait répondu Thourn. Amanda l’avait alors conduit jusqu’ici et s’était éclipsée. Thourn avait sonné et attendu, sans réponse.
Et le chat n’approchait toujours pas.
« Si tu avais des lasers à  la place des yeux, je serais déjà  cramé. » dit Thourn en se redressant. Le chat feula longuement et s’enfuit en crachant sur le commissaire. Sale bête, songea-t-il en appuyant de nouveau sur la sonnette.
« Bon, marmonna-t-il à  voix haute, contenant son humeur massacrante. Ils doivent travailler, ces gens-là , comme tout le monde. Je vais attendre ce soir. »
Il s’installa au volant de sa voiture et entreprit de surveiller la maison.

[center]*
* *[/center]

Concentration.
Tout réside dans la concentration.
Il faut que je croie à  ce que je fais, malgré tout ce que j’ai appris avant. Il faut que je croie à  ce qui était auparavant impossible, à  pouvoir faire jaillir du feu de mes doigts, à  faire apparaître mon sabre du vent entre mes mains, à  posséder une force herculéenne, il faut que je croie être capable de tout cela.
Non.
Je
suis capable de tout cela !
Il ouvrit les yeux, et ne constata aucun changement. Pas d’épée, pas de feu, pas de nouvelles capacités, rien. DragonNoir soupira et se laissa tomber le lit. Il regarda le plafond.
Comment y arriver ? Comment mettre en pratique ce que nus a dit Hitomi ? Comment réaliser ce que veux le Ionisateur Fou ? C’est impossible.
Il se redressa, retrouvant sa position accroupie, et se frotta les yeux sous ses lunettes. Il essayait depuis plusieurs heures de se servir de son imagination comme catalyseur de pensée, mais ne parvenait à  rien. Il avait beau se concentrer, tendre ses muscles, bander son esprit, rien n’y faisait. Il n’arrivait à  rien de probant.
« Il n’y a pas de raison ! Je dois y arriver. Si c’est possible de le faire sans y penser, comme Hilde, alors il doit être possible de le faire consciemment !
-Seulement si tu y crois vraiment. »
DragonNoir se tourna vers la porte, d’où provenait la voix, et vit le visage de Q-Po qui le regardait d’un air sévère. Il lui fit signe d’entrer. Une fois la porte refermée sur l’extérieur, Q-Po s’assit à  même le sol, en tailleur, et fixa DragonNoir. Ce dernier se sentit presque honteux de s’être essayé à  cette expérience seul. Ce qui était bien le but du regard de Q-Po.
« Je ne suis arrivé à  rien.
-Bien évidemment, dit Q-Po d’un ton sec. Tu n’y crois pas, comment pourrais-tu y arriver sans y croire ?
-Je… Je ne sais p…
-Alors crois-y ! Il ne suffit pas de se concentrer, de vouloir y croire : il faut imaginer. Toi qui ne cesse d’écrire maint et maint textes, qui délire on ne peut plus adroitement, qui a un imaginaire suffisamment développé pour inventer toutes sortes de créatures, tu n’arrives pas à  croire à  ce qui nous arrive depuis maintenant plus d’un an ! »
DragonNoir, les yeux baissé, garda le silence.
« Nous voyageons dans d’autres mondes, Raphaël. Certains meurent et reviennent à  la vie, ce n’est pas rien ! Mais toi, tu n’y crois pas.
-Si, se défendit DragonNoir. Si j’y crois, j’ai même…
-Tu gères le tout ? Tu envoies les gens en mission, tu as fait de ton appartement un énième lieu de réunion, mais tu ne crois pas à  ce qui nous arrive. Ce que tu fais, c’est une simple fonction de gérance. Tu gères les troupes, mais tu ne crois pas, au plus profond de toi, que tout ceci est la réalité. »
Q-Po serra les dents et, presque sans effort, fit apparaître une longue antenne au dessus de sa tête, et un pompon rose apparu dans un ‘plop’ imperceptible. DragonNoir regarda la sphère rose et poilue se balancer.
« Moi, j’y crois. » dit simplement Q-Po.
Le pompon de Moggle disparu subitement, et Q-Po expira longuement. DragonNoir continuait à  fixer le vide, fasciné.
« Je n’arrive pas encore à  le faire tenir longtemps, mais il y a quelques jours, je n’arrivait quâ€™à  faire apparaître un truc tout mou au bout d’une antenne qui finissait par plier et tomber sur ma figure.
-C’est impressionnant, mais comment…
-Il suffit d’y croire. J’ai saisi le sens des paroles d’Hitomi, et je me suis entraîné avec Arkh, lorsqu’il est venu me demander si ce qu’il avait comprit était juste.
-Arkh aussi…?
-Oui. Est-ce que tu veux te joindre à  nous ? Nous pourrions nous aider mutuellement, plutôt que de faire ça dans notre coin, comme des sales mômes protégeant un secret. »
DragonNoir accepta sans hésiter.
« Mais n’en parlons pas encore autour de nous, dit-il. Il faut que nous puissions maîtriser un tant soit peu nos aptitudes avant d’appliquer cette idée aux autres.
-Tu reprends immédiatement ton rôle e chef, dès que tu reprends confiance en toi, hein ? railla Q-Po. Pourquoi ne pas faire des séances collectives ?
-Je ne préfère pas.
-Alors nous demanderons ce qu’en pense Arkh. S’il se déclare en ta faveur, nous n’en ferons quâ€™à  trois, pour débuter. Mais si ça marche, il faudra convertir le maximum de personne, d’accord ? »
DragonNoir hocha la tête, d’un air résolu.
Il espéra sincèrement arriver rapidement à  maîtriser son imaginaire.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 28 Déc 2006, 12:34 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
5. Frédéric 1er dit Barberousse.
Un soleil inexistant éclairait la magnifique cité Atlante, conférant à  la journée qui venait de débuter une saveur assez agréable. Il faisait doux, et les tenues des habitants étaient décontractés et plutôt courtes, à  ce qu’avait pu en juger Viper Dragoon. Les trois Trauméniens avaient été surpris de la brusque différence de température entre un mois d’octobre frisquet sur Terre et le climat estival qui régnait ici.
« Il fait tout le temps chaud, comme ça ? demanda Viper Dragoon en reluquant une demoiselle aux jambes fines.
-Non, nous avons des saisons, comme partout, répondit Guillaume en souriant. Nous sommes en plein été indien, mais la saison en cours est l’automne.
-Comme nous, alors ! dit joyeusement Viper Dragoon. Mais je préfère largement votre automne au notre, de ce que je peux en voir… » Il ponctua sa phrase d’un rire graveleux, et Guillaume l’accompagna. Il s’était lié d’amitié avec Viper Dragoon, dont il adorait les facéties, la joie de vivre et le franc-parler.
« À peine quatre jours que nous sommes là , et plus personne ne nous remarque. » dit DarKenshin, sans regret. En effet, ils marchaient dans la rue au milieu des passants, et rien de semblait les distinguer des autres, mis à  part leurs vêtements. Ils s’étaient affublés d’habits locaux pour éviter de porter en permanence un panneau ‘Divinité en balade’ sur le dos, et cette astuce semblait fonctionner.
« En même temps, ajouta Guillaume avec un sourire en coin, je ne vous conseille pas d’aller faire un tour dans l’avenue principale, même fringués comme vous l’êtes. Eux ne vous ont pas oubliés, croyez-moi… »
Il s’approcha de la jeune femme et lui indiqua discrètement un homme assis sur un banc, un autre accoudé à  un bar et une fille qui se remaquillait dos à  eux. DarKenshin croisa son regard dans le petit miroir de la fille, et celle-ci cessa précipitamment toute activité avant de pénétrer dans l’immeuble le plus proche.
« Nous sommes suivis ? s’étonna la Trauménienne.
-Surveillés, pour être plus exact. Le jeune homme au banc était celui que Dalisc a bousculé sans le vouloir dans l’entrée de mon immeuble. Tu l’avais reconnu, Dalisc ?
-Non.
-Quant à  l’autre, il était dans le parc que nous avons traversé il y a dix minutes.
-Je n’avais rien vu, avoua DarKenshin.
-Les riches. Ce sont eux qui les payent pour vous observer, et leur rendre un rapport sur le moindre de vos faits et gestes. Où que vous alliez, ils le savent. Qui que vous rencontriez, ils le savent. À leurs yeux, vous devez être plus important encore que tous leurs biens. »
Un silence s’installa, pendant que les trois Trauméniens, abasourdis, digéraient les informations révélées par leur nouvel ami. DarKenshin pesta contre son manque de vigilance : Elle n’avait pas remarqué un seul instant la présence de ces pisteurs durant leurs investigations.
Ils venaient de passer quatre jours, depuis le départ de Pythagore pour la Sphère, à  poser des questions à  tout va, sans se soucier des éventuelles retombées de leurs questions. Leur couverture, qu’ils pensaient correcte faute d’être infaillible, se voyaient lézardée sérieusement par les dernières paroles de Guillaume.
« Mais pourquoi ? demanda Viper Dragoon.
-Parce que ça les amuse, certainement ! Comment vous expliquer… La vie ici est assez morose, quoi que vous puissiez en penser. Les journées se succèdent et se ressemblent lamentablement. Les pauvres, la classe moyenne, comme moi, n’ont pas le choix et subissent le train-train quotidien et morne sans possibilité de répliquer. Mais les autres… »
Il laissa la phrase en suspend. DarKenshin vit du coin de l’œil la fille de tout à  l’heure qui ressortit de l’immeuble, mais accoutrée différemment et avec un petit chien : elle venait de reprendre son poste.
« …ils y remédient comme ils peuvent, c’est ça ? termina DarKenshin.
-Exactement. Ils s’amusent de tout ce qui sort de l’ordinaire, et si c’est au dépend d’autrui, alors il n’en seront que plus heureux.
-C’est répugnant, dit simplement Viper Dragoon en regardant ses pieds.
-Vous êtes la meilleure attraction de ces derniers jours, pour ces fumiers. Et ils ne comptent pas vous lâcher de sitôt. »
Ils bifurquèrent au coin d’une échoppe et se retrouvèrent face à  une jeune fille dâ€™à  peine vingt ans, tout sourire, qui devait précisément les attendre. Guillaume reconnu immédiatement la fille au décolleté généreux qui s’était penché au balcon, le jour de l’arrivé de ses nouveaux amis. La fille de riche.
« Mon père a finalement décidé de m’envoyer à  votre rencontre, malgré son inquiétude de me savoir seule au milieu d’une foule d’inconnus. Mais j’ai su trouver les mots justes pour le faire plier, comme à  mon habitude. »
La jeune fille avait une voix fluette et claire, haut perchée même, mais le timbre était doux et nullement incisif. Son ton était certes hautain, et on devinait son statut en examinant plus attentivement son allure et ses manières. Malgré tout cela, Guillaume trouva qu’elle ne dépareillait pas exagérément parmi la populace du lieu.
« C’est pourquoi, poursuivit-elle, je me retrouve devant vous, ô élus d’Ydja, avec une requête de mon père vous invitant à  participer à  notre déjeuner dans nos humbles appartements, quelques rues plus loin. »
Les paroles donnaient l’impression de question, mais le ton employé trahissait l’ordre. Cette jeune fille a l’habitude de se faire obéir, songea brièvement DarKenshin, avant de réfléchir à  la situation. Elle aurait volontiers accepté l’invitation du noble s’il n’y avait eu Guillaume. Elle savait que ce dernier ne portait pas particulièrement les aristocrates locaux dans son cÅ“ur, et craignait de devoir rompre toute relation avec lui une fois le repas accepté.
Mais Guillaume lui-même lui donna la solution :
« Je pense qu’un refus ne sera pas toléré, dit-il avec une hargne qui semblait simulée. Mes amis, si jamais vous désirez me revoir, vous savez où je loge, n’est-ce pas ? Vous serez toujours les bienvenus, à  condition d’aimer les conditions modestes. »
Sur ces paroles, il fit demi-tour. Viper Dragoon alla lui parler quelques instants, puis revint en haussant les épaules. Il expliqua aux autres que Guillaume n’était pas fâché, mais qu’il avait seulement quelque chose d’urgent à  faire. Et qu’il leur souhaitait une bonne journée à  tous.
Mais DarKenshin avait sentit autre chose. Il avait vu que Guillaume n’avait pas osé regarder en face la demoiselle, ni même la défier comme il l’avait fait tant de fois durant ces quatre jours avec des imprudents qui avaient eu l’audace de montrer leur mépris des pauvres devant lui. Il s’était éclipsé. Il avait fuit, et cela n’était pas dans les habitudes de Guillaume.
La jeune fille sembla un instant déçu de ce départ précipité. Mais elle ne pouvait pas le laisser paraître et c’est donc avec un sourire radieux qu’elle dit finalement :
« Je m’appelle Judith. Judith Barberousse. Suivez-moi. »

[center]*
* *[/center]

La Sphère était surveillée nuit et jour. D’ordinaire, deux simples servantes se chargeaient de monter la garde durant des heures près de la Sphère. De longues heures qui passaient lentement, et où les occupations se bornaient à  compter le nombre de fissures sur une dalle, le nombre de dalles au sol, ou le nombre de minutes qui leurs restaient avant de passer le relais à  d’autres servantes.
Mais lorsqu’elle était occupée, la Sphère était plus étroitement surveillée : deux gardes armés étaient ajoutés aux servantes, et celles-ci étaient relayées plus souvent, pour éviter les fatigues inutiles. Il s’agissait d’accueillir dignement un éventuel demi-Dieu, ou de pouvoir porter un cadavre gorgé d’eau, le cas échéant.
Parfois, cette promiscuité entre gardes testostéronés et servantes pulpeuses donnait lieu à  des accidents. On se souvenait encore d’une orgie organisée entre les quatre gardiens de la Sphère, qui s’était mal terminée : l’occupant de la Sphère, mort, était retombé sur une des servantes et lui avait brisé la nuque, et en tentant de la secourir, un des gardes était par malheur entré dans la Sphère à  son tour. Depuis, les tours de gardes étaient plus courts et des inspections surprises avaient lieu, de temps à  autre.
Le grand prêtre Kevin Jolios se servit de ce prétexte pour entrer dans la salle, une nouvelle fois. Les deux jours s’étaient écoulés sans autres changements, sans expectorations de corps sans vie, et Jolios commençait à  croire que l’adolescent allait réussir l’épreuve.
Et cette idée l’inquiétait.
« Tout se passe bien, ici ? » demanda-t-il en entrant dans la salle. Les quatre gardiens hochèrent la tête. Ils étaient sages, et avaient gardés leur position. Jolios n’espérait pas qu’ils soient restés silencieux tout le temps, car chacun sait que les pas d’un nouvel arrivant s’entendait de loin, depuis cette salle.
« Je vous ai apporté de quoi vous requinquer, dit Kevin Jolios en sortant quatre gobelets et une fiole d’un liquide ambré.
-Mais, commença un des gardes, grand prêtre d’Ydja, nous ne pouvons…
-Vous pouvez, vous pouvez, dit Jolios en esquissant un sourire. Ce n’est pas comme si je ne vous avais pas trouvé en état de garder la Sphère. »
Les deux servantes acceptèrent la collation sans rechigner, et avalèrent l’alcool avec plaisir, avant de regagner leur place. Le premier garde se fit servir, mais le second restait méfiant. Il flairait le piège du grand prêtre qui désirait s’assurer de l’assiduité de son personnel, et hésitait à  la marche à  suivre.
« Allez-y, je vous dit ! insista le grand prêtre.
-Mais je…
-Au nom d’Ydja, c’est un ordre ! »
Le garde prit le verre, plus par réflexe de défense que par envie, et l’avala d’un trait. Nul n’ignorait que le grand prêtre désirait l’obéissance aveugle de ses adeptes, et surtout pas ceux qui le côtoyaient le plus souvent. Kevin Jolios, ravi, reprit les verres et rangea le tout dans les plis de sa toge.
Ce furent ces derniers mouvements que virent les deux gardes et les deux servantes, avant de tomber dans le brouillard opaque de l’inconscience. Ils s’écroulèrent lentement, comme au ralenti, s’affaissant contre le sol telles de vieilles baudruches percées. Et le silence s’installa dans la salle.
Une fois assuré de l’inactivité de ses victimes, Jolios alla à  la sphère et scruta une nouvelle fois l’intérieur. Mais il n’y voyait rien. Il ragea une nouvelle fois contre ces quatre arrivants imprévus qui avait réduit à  néant plusieurs années de labeur. Si seulement ils étaient apparu une journée plus tôt, ou plus tard ! Ou même une heure ! J’aurais eu le temps d’annoncer mon faux Dieu et de le mettre au pouvoir, et tout ceci aurait été beaucoup, beaucoup plus simple.
Il serra les dents et alla vers le garde le plus poche pour lui emprunter sa lance. Lors des autres tentatives pour devenir représentant d’Ydja, les participants étaient tous décédés après une ou deux journées d’épreuve. Les plus résistants, ou les véritables prophètes, étaient restés jusqu’au quatrième jour. Jusquâ€™à  ce que Jolios s’occupent d’eux, de la même façon qu’il comptait s’occuper de Pythagore maintenant.
Il enfonça la lance dans la sphère, et n’obtint aucune résistance. Il la retira, attendit quelques secondes, puis recommença à  divers endroits. Le liquide translucide se brouilla de part en part, sous les impacts de l’arme, mais à  aucun moment elle ne recracha le corps de celui qui l’habitait.
De rage, Jolios jeta la lance à  travers la Sphère. Elle ressortit sans encombres de l’autre coté et alla se fracasser contre le mur en face. Mais le grand prêtre d’Ydja avait déjà  quitté les lieux, en proie à  une fureur quasi-incontrôlable. Tous ceux qu’il avait tués dans la Sphère pouvaient être visibles de l’extérieur, mais pas celui-ci, et Jolios commençait à  croire au véritable statut d’élu d’Ydja.
Et il commençait à  prendre peur.
À prendre peur de ce Dieu, à  pendre peur d’Ydja. Et surtout, à  prendre peur de la réaction de son associé lorsqu’il découvrira que le prétendant au titre de Dieu était toujours dans la Sphère. En vie.
Et qu’il risquait de réussir l’épreuve.

[center]*
* *[/center]

Un corbeau croassa depuis le lustre, faisant sursauter Viper Dragoon qui couina de surprise. DarKenshin l’obligea à  cesser de l’étreindre au bras, tout en regardant en l’air. Trois corbeaux étaient perchés sur le lustre d’entrée, dans le hall, et on pouvait en discerner d’autres dans les pièces adjacentes.
Les croassements conféraient au lieu une atmosphère étrange.
« C’est normal, tout ces corbeaux ? demanda DarKenshin au serviteur qui leur avait ouvert et qui les déshabillait en silence.
-Le maître adore les oiseaux. » répondit poliment le majordome.
DarKenshin frissonna. Elle avait cru entendre Le maître des oiseaux, mais son imagination lui avait joué un tour. À moins que ça ne soit le lieu qui la perturbe au plus haut point. Elle songea brièvement à  Pythagore, espérant pour qu’il s’en sorte.
« Si vous voulez bien me suivre. » dit le majordome de sa voix monocorde. Il semblait se répandre un peu plus à  chaque parole prononcée.
Il les conduisit à  une salle immense, richement décorée. Des tableaux gigantesques accrochés aux murs, de grandes sculptures antiques, et de nombreux banc recouverts de velours carmin réservés au visiteurs.
Une salle d’attente, devina DarKenshin.
« Mon maître va arriver d’un instant à  l’autre. Si vous voulez bien m’excuser. »
Le majordome disparut sans attendre d’éventuelles questions, et les trois Trauméniens se retrouvèrent seuls. La fille de leur nouvel hôte les avait abandonnés dès le hall d’entrée ou le majordome avait prit le relais, sans plus d’explications.
« Vous pensez que c’est une bonne idée ? finit par dire Viper Dragoon en examinant une huile représentant deux hommes se faisant torturer par un diable quelconque.
-D’être ici ? précisa DarKenshin. Nous n’avons pas déniché une seule information intéressante depuis quatre jours que nous sommes là , alors peut-être qu’avec ce changement de classe, nous obtiendrons… »
Elle s’interrompit. Viper Dragoon ne l’écoutait que d’une oreille distraite. Il regardait toujours la peinture, mais semblait plutôt perdu dans ses pensées. Il dit à  voix basse, presque un murmure embué de culpabilité
« J’espère que Guillaume ne nous en veux pas. »
DarKenshin allait répliquer quelque chose lorsque la porte par laquelle ils étaient entrés s’ouvrit avec force sur un homme d’une haute stature, avec un port altier incontestable malgré ses vêtements sans fioritures. Une magnifique barbe rousse lui ceignait le menton et rendait son visage avenant, malgré son regard assez froid.
« Bienvenus à  vous, ô élus de notre Dieu à  tous, Ydja. Déon ä Adja !
-Déon ä Adja. » répétèrent les trois Trauméniens. Ils avaient acquis ce réflexe en accompagnant Guillaume durant ces quelques jours. La formule était un équivalent de Loué soit Ydja dans une langue morte, comme le latin sur Terre. La réponse espérée était la répétition de cette louange.
L’homme paru surpris de leur réaction, comme s’il s’était préparer à  les corriger sur la réponse à  donner. Puis il sourit et hocha la tête, visiblement satisfait.
« Je suis Frédéric 1er dit Barberousse, se présenta-t-il. Laissez-moi vous conduire à  ma table pour déjeuner. Ma fille, Judith, nous y rejoindra. Je suis honoré et heureux que vous ayez accepté de vous joindre à  nous. »
DarKenshin opina et suivit Frédéric 1er dit Barberousse dans le hall d’entrée. Derrière elle, Dalisc se leva aussi silencieusement quâ€™à  l’accoutumée et se joignit à  Viper Dragoon à  la suite. Ils prirent une autre porte de sortie et pénétrèrent une nouvelle salle, qui était trop large pour être un couloir mais qui en avait la longueur.
Ils marchaient à  pas lents.
« J’espère que vous n’êtes pas trop dépaysés par votre brusque arrivée dans notre belle cité d’Atlantide ?
-Aucunement, répondit DarKenshin. Nous nous sommes magnifiquement adaptés à  vos mÅ“urs, comme vous avez pu le constater tout à  l’heure. »
Barberousse tiqua mais ne s’attarda pas sur ce point. Il conduisait la marche d’un pas assuré, et comptait bien garder la tête de la conversation également.
« J’ai appris que vous recherchiez quelqu’un, est-ce vrai ?
-Vos informateurs vous ont bien renseigné, acquiesça DarKenshin sans se départir de son sourire.
-Vous savez quelque chose sur Séphy-Roshou ? demanda précipitamment Viper Dragoon en rattrapant le groupe de tête.
-Séphy-Roshou ? répéta lentement Barberousse. Non, ça ne me dit rien. Mais je peux certainement m’informer à  ce sujet. »
Un corbeau passa au-dessus de leurs têtes.
« Pourquoi avez-vous autant de corbeaux ?
-Ce sont les seuls animaux que j’ai trouvé ici en arrivant, leur dit Barberousse. Je ne sais pas pourquoi. Les autres animaux sont, comme nous tous, morts noyés. Et ils sont rares.
-Vous savez que vous êtes tous morts, alors ? » en conclut DarKenshin. Barberousse parut amusé de la remarque.
« Évidemment, pensiez-vous que nous nous croyions dans un cycle de réincarnation, ou quelque chose comme ça ? Il s’agit bel et bien d’un Paradis, ici. Ou d’un Enfer.
-Un au-delà , dit Viper Dragoon.
-C’est le mot, oui, approuva Barberousse. Mais c’est un au-delà  spécial, je dois l’avouer : Nos corps sont matériels. Nous ne sommes pas des esprits, comme j’avais pu le croire lors de ma première… …vie.
-Votre première ? répéta DarKenshin.
-Oui. Ici aussi, nous vieillissons. Et nous mourrons. »
La confidence laissa les Trauméniens pantois. Il s’imaginaient mal un monde où les morts mourraient à  nouveaux, et encore moins l’endroit où ceux-ci allaient par la suite.
« Mais où atterrissez-vous une fois morts ?
-Ici, répondit simplement Barberousse.
-Et lorsque vous mourrez ici ?
-Ici. »
DarKenshin se sentit un peu perdue. Barberousse eu un petit rire amusé et leur expliqua le principe :
« Une fois notre vie vécue dans la cité d’Atlantide, nous renaissons ailleurs, dans la cité. La plupart du temps au même âge où nous sommes morts. Et ceci le plus ordinairement du monde. Une sorte de réincarnation infinie. L’éternité.
-Mais vous vous souvenez de votre vie précédente ? voulu savoir Viper Dragoon.
-Non. Mais il suffit de consigner sa, ou ses, vies dans un livre, et il se peut que certains souvenirs reviennent… » Il sourit d’avance : « â€¦à  la vie !
-C’est dingue, ça ! s’exclama Viper Dragoon.
-Mais alors il n’y a aucune véritable naissance ici. » en conclu DarKenshin. À cette remarque, Barberousse se raidit subitement, et son sourire disparu. Sa marche se fit également plus rigide, et DarKenshin se demanda s’il elle n’avait pas fait une bourde en posant cette question. Elle tenta de se rattraper.
« Dans vos autres vies, vous vivez exactement la même chose ?
-Non, pas du tout, répondit Barberousse. Il se peut que vous ayez été voleur une vie, volé une autre, ou pauvre une fois et riche une suivante. Tout est aléatoire, apparemment. »
Il répondait, mais DarKenshin avait décelé un soupçon de rancÅ“ur dans sa voix. Ils avaient perdu des points avec lui à  cause de sa remarque, et elle regretta de ne pas avoir tourné sept fois la langue dans sa bouche avant de parler. Mais le mal était fait, et DarKenshin devait songer à  avancer dans sa quête.
Avant que ça n’empire…
« Qu’allez-vous faire à  propos de notre amie ?
-Votre ami ? Vous parlez de ce garçon chez qui vous logiez ? Il y a quelque chose à  lui donner en compensation, peut-être ? »
Viper Dragoon se souvint de l’irritation de Guillaume à  toute manifestations, bénéfiques ou non, de la part des gens aisé, et intervint rapidement :
« Non non, ce n’est pas de lui dont nous parlions, mais de notre amie avec un ‘e’. Elle s’appelle Séphy-Roshou, comme nous vous l’avons dit tout à  l’heure.
-Ah oui, cette Séphy-Roshou, je me rappelle. Je demanderai à  mes informateurs de chercher à  son sujet. Nous aurons des résultats peut-être après le déjeuner. Nous y sommes. »
Ils s’arrêtèrent devant une porte et Barberousse se tourna vers eux, avec un immense sourire aux lèvres. Il semblait avoir passé l’éponge sur la remarque de DarKenshin et reprit son visage aimable.
« Si vous êtes d’accord, nous poursuivrons cette discussion à  table. »
Puis il poussa la porte sur une salle à  manger luxueuse, dans laquelle les Trauméniens passèrent nombre d’heures à  discuter avec lui et sa fille.

[center]*
* *[/center]

Sylvain Detroit, avant de faire ses armes dans la police auprès du commissaire Thourn, avait été journaliste dans le genre de revue à  sensations que les gens adorent. Il avait attendu des années le jour béni où il pourrait se montrer au grand jour. Comme tant d’autres reporters sur le terrain, il attendait son moment de gloire.
Son Scoop.
Et sa chance était arrivée un jour, à  la faveur d’un monstrueux crash aérien. Il avait eu la chance de retrouver l’unique survivant sur une île bien éloignée du lieu où ils effectuaient les recherches. Et il avait alors atteint les plus hautes marches du métier, gratifié de nombreuses récompenses, et il a rapidement mit à  contribution sa toute nouvelle célébrité.
Un an après cette ascension, il passait les portes du commissariat où Thourn, réhabilité bon gré mal gré, officiait en maître. Il l’avait assisté sans arrêt depuis cette époque pas si lointaine, tout en sachant pertinemment qu’on l’avait associé à  Thourn dans le seul et unique but de se débarrasser de lui.
Pour satisfaire à  son caprice de célébrité, au moment où Sylvain pouvait se permettre de demander la lune sur un plateau et espérer vraiment la recevoir. Voilà  pourquoi il s’était retrouvé avec son statut d’auxiliaire du commissaire, sans jamais avoir fait le métier auparavant, et qu’on l’avait mis dans le pattes de la bête noire de la police.
Serge Thourn.
Ses enquêtes étaient étranges, ses réactions étaient étranges, ses gueulantes, même, étaient étranges. Tout était étrange, chez cet homme. Mais malgré ça, Detroit avait accepté son autorité et avait docilement exécuté tout les ordres que Thourn lui avait balancé, plus ou moins méchamment, à  la figure.
Et encore aujourd’hui, assis au volant d’une voiture de location qui avait fait plus de kilomètres que Sylvain n’en avait fait en une vie, il obéissait aux ordres de son supérieur qui avait une nouvelle fois déniché une affaire étrange pour s’occuper.
« J’espère seulement que ça ne va pas lui coûter sa place. » dit-il à  son volant, sans cesser d’observer le portail où était entré la jeune fille brune à  la tresse il y a plus d’une heure. Il avait eu de la chance, et ça pouvait se reproduire.
Sylvain n’avait pas eu de mal à  les retrouver une fois le train e gare, et il les avait, aussi discrètement qu’il le pouvait, suivi jusqu’au métro. C’est alors qu’il s’était vu obligé de changer de tactique : Il était découvert. Ses deux cibles s’étaient séparés, et elles s’étaient mises à  courir chacun de leur coté.
Après une ou deux secondes d’inertie totale, Sylvain s’était lancé à  la poursuite de la jeune femme, espérant qu’elle moins apte à  le semer. Mais il n’avait pas prévu l’agilité presque féline dont elle faisait usage lors de ses déplacements, se glissant entre les groupes de passants, courant, et lui échappant au fur et à  mesure que le temps passait.
À la station Oberkampf, il l’avait perdue de vue. Il se doutait qu’elle avait rallongé sciemment son itinéraire afin de le confondre, et cela avait marché. En désespoir de cause, il avait fait les grands lieux de la capitale parisienne en version souterraine : Austerlitz, Gare de Lyon, Gare du Nord, Gare de l’Est, Invalides, Montparnasse, et bien d’autres.
C’est en ressortant à  la place de l’étoile que la Chance, avec un immense C majuscule et lumineux – voire stroboscopique, lui avait sourit : Il s’était déniché une vieille voiture de location à  bas prix avec son argent personnel, et comptait faire le tour de Paris une ultime fois, avant de laisser tomber, en désespoir de cause. Et soudain il avait aperçu la jeune fille qui marchait à  vive allure, manifestement arrivée au bout de son parcours.
La suite était d’une simplicité extrême : il l’avait de nouveau suivi, avec un luxe de précautions pour éviter de l’alerter. Ils avaient traversé la place des Ternes, rejoint l’avenue de Wagram pour finalement se diriger – grâce à  un post-it que suivait Nina à  la lettre – dans une des rues adjacente. Il regarda où elle sonnait, puis se gara non loin, afin de pouvoir garder en vue le portail où un jeune maigrichon à  lunettes et aux cheveux longs était venu l’accueillir.
« Bon, qu’est-ce qu’il fait, son copain ? » s’impatienta Detroit en tapant contre le volant, qui émit un grincement de protestation. Il retint un second coup, pas sûr qu’un morceau de la voiture ne chute à  cause de la secousse. Il voulait être bel et bien sûr que cet endroit n’était pas une simple halte mais leur lieu de rendez-vous, avant d’appeler Thourn.
Détroit se retourna et se baissa brusquement, dans un concert de craquement. Aran Valentine marchait sur le trottoir d’en face, scrutant autour de lui un éventuel pisteur. Détroit compta jusquâ€™à  vingt, puis risqua un Å“il. Le jeune homme était face à  la porte, et passait un coup de fil. Sylvain sourit lorsque la même personne lui ouvrit le portail et le fit entrer.
« À mon tour de téléphoner. »

[center]*
* *[/center]

« Et j’en terminais avec cet immonde mécréant, mettant un terme à  ses agissements d’un coté et accomplissant ma vengeance de l’autre. »
« Judith, je te rejoindrai bientôt. »
Guillaume termina la lecture de l’ultime chapitre de son autre vie, et referma le livre. Ça n’avait pas marché. Il s’était mis à  relire ses passés pour tenter d'endiguer le roulement continu de ses pensées, mais le fait est qu’il songeait toujours à  elle, à  cette fille si belle, si gracieuse, si désirable, qui était venu lui enlever ses nouveaux amis.
Il était rentré chez lui en colère, il avait passé un bon moment à  tourner en rond tout en marmonnant dans sa barbe inexistante des insultes à  l’encontre de ces ‘saleté de vermines de riches’ ou des ‘tares congénitales d’aristos’. Puis, une fois la rage déversée verbalement, son image lui était venue en tête, sans qu’il sache pourquoi.
Et depuis, il ne cessait de la revoir s’avancer, de la revoir leur parler, de la revoir agiter sa main de cette façon si particulière. Il n’avait pas osé lui parler, parce qu’il se doutait que son ton et sa rage contenue aurait eu le dessus sur l’émerveillement qu’elle lui procurait. Alors il avait préféré fuir, mais il ne pouvait pas fuir ses souvenirs.
« C’est pas vrai ! s’énerva-t-il. Ça ne peut pas être elle, je ne peux pas être tombé amoureux d’une personne de la haute ! Hors de question ! »
Il ouvrit à  nouveau le livre de ses histoires vécues, et y trouva la description de la jeune fille qui avait été tué sous le joug d’un tyran, un noble aux manières violentes. Les deux apparences correspondaient sensiblement, et il se mit à  croire.
À espérer.
Se pourrait-il que…

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 03 Jan 2007, 13:16 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
6. Pythagore = Ydja ?
Un pied.
Un mollet, ensuite.
Le genou passa sans mal, également.
Puis, plus haut, ce fut une main, suivie très vite d’un bras.
Et enfin, il fut sortit.
Pas de fatigue en lui. Pas de faim non plus, malgré tout ce temps de jeun. Pas d’impatience, ni d’irritation. Rien de tout cela. Il sortait encore plus nu qu’il y était entré.
Il ressentait tout ce qui se trouvait autour de lui. Sa vision était devenue un sens autrement plus puissant que celui de ses congénères. Il voyait le passé, le présent et le futur de ce monde, de cet au-delà , et des gens qui le peuplaient. Il pensait ce qu’ils pensaient. Il dormait, mangeait, souffrait, parlait, vivait, mourait, tout cela en même temps.
Il était eux.
Il fit quelques pas et regarda derrière lui : la Sphère miroitait mais il lui semblait que son éclat s’était atténué. Ou peut-être était-ce son esprit qui s’était habitué. Il se regarda ensuite. Aucun changement notable, car ils étaient tous intérieurs. Son corps nu était sec et il ne laissait pas de traces de pieds humides derrière lui.
Sans même relever les yeux, il dit :
« Levez-vous et allez annoncer au grand prêtre mon avènement. »
Les deux servantes et les deux gardes se levèrent avec précipitation et sortirent dans un silence paniqué. Il se retrouva seul. Il ferma les yeux et se retrouva un infime instant à  nouveau dans la Sphère, en compagnie de cette personne qui l’avait accompagné durant ces six jours de méditation.
Celui-ci hocha la tête.
Et Pythagore ouvrit les yeux.

[center]*
* *[/center]

Le drap se souleva et enveloppa Q-Po. Ce dernier grogna et le retira sans trop de mal, mais DragonNoir avait disparu. Q-Po fit une roulade en avant et se cogna contre le lit.
« Est-ce que ça va ? demanda DragonNoir en s’approchant.
-Merde, où étais-tu passé ? dit Q-Po en se frottant la tête. Je t’ai complètement perdu de vue durant un instant.
-Il a été plus rapide que tes yeux, répondit Arkh. Il était simplement derrière toi. Moi j’ai réussi à  la voir. »
DragonNoir et Q-Po levèrent les yeux sur Arkh, qui se tenait dans un coin du plafond, maintenu simplement par la force de ses bras et de ses pieds. Il redescendit en se concentrant aussi doucement qu’il le put, mais manqua de résistance pour y arriver et s’écroula sur le lit.
« Heureusement que j’avais prévu ça.
-Nous sommes encore loin du compte, dit DragonNoir en s’asseyant. C’est à  peine si nous arrivons à  manifester nos pouvoirs qu’il faut en plus y ajouter un manque cruel d’endurance.
-Et d’habileté. » ajouta Arkh en lissant ses cheveux longs et blancs. Il arrivait à  maintenir son apparence Trauménienne sans trop de mal, à  présent. Des trois présents dans cette chambre, il était celui qui avait le plus progressé durant le court laps de temps d’entraînement qu’ils s’étaient attribués.
Il sembla se rendre compte de son aspect, justement, et il redevint humain en un fragment de seconde. DragonNoir le regarda en souriant, fier de lui. Arkh lui rendit son sourire, tandis que Q-Po jetait le drap tueur en boule dans un coin de la chambre.
« Est-ce qu’on considère que nos expériences sont assez concluantes pour qu’on se lance à  plus grande échelle dans l’entraînement ? demanda-t-il.
-Pas encore, trancha DragonNoir. Je veux dire… Je pense qu’il faudrait qu’on arrive mieux à  les maîtriser avant de déclencher une véritable division de combattants. De plus, il s’agirait d’être apte à  pouvoir enseigner aux autres la marche à  suivre.
-En gros c’est non, résuma Q-Po non sans ironie.
-Je ne comprends pas, dit Arkh. Personne ne nous apprend, à  nous ? Pourquoi les autres auraient-ils droit à  un système d’éducation abouti alors que nous n’avons rien ? »
DragonNoir baissa la tête. Un silence embarrassé s’installa.
« C’était de l’humour, avoua Arkh sans un sourire.
-En même temps, il n’a pas vraiment tort, ajouta Q-Po. Nous arrivons bien à  nous dépatouiller sans précepteurs, alors pourquoi pas eux ?
-C’est ce que j’essayais vainement de souligner. »
DragonNoir resta les yeux dans le vague, à  fixer ses pieds. Ils avaient raison, c’était évident. Mais en même temps, il voulait tellement les conduire tous aussi rapidement que possible à  la connaissance, qu’il préférait étudier à  fond ces nouvelles capacités avant de les donner à  tout le monde.
De plus, il se méfiait de certains. Le pouvoir donné à  tous, c’était pour DragonNoir comme un forum modéré par les membres. Autant donner une mitraillette dans les mains de tout le monde. Il ne voulait pas ça.
« Bon, c’est d’accord, DragonNoir, finit par dire Arkh. Je me range sans jouter, cette fois-ci. Je n’ai ni l’envie ni le temps d’un défi en bonne et due forme.
-Nous attendons ? »
Q-Po et Arkh regardèrent DragonNoir, qui finit par se redresser et les fixa d’un regard assuré à  travers ses lunettes. Il hocha la tête.
« Nous attendons. »
Derrière la porte, Lord Satana se retira prudemment, sur la pointe des pieds. Il ne voulait pas que le plancher et les lattes de bois grinçantes le trahissent. Une fois en sécurité, dans la cuisine désertée et silencieuse, il se permit un marmonnement d’insatisfaction.
Comment peut-il se croire au dessus de nous ? De quel droit a-t-il jugé bon de nous évincer de cette quête d’aptitudes nouvelles ? Le pouvoir entre de mauvaises mains rend fou, mais il ne se rend pas compte que le fou, c’est lui.
Son poing s’abattit violemment sur la table, faisant trembler les couverts laissés là  après la fin abrupte de l’euphorie des Trauméniens. Il n’avait pas l’habitude de se laisser ainsi aller à  la colère, ni à  tout autre sentiment ‘visible’. Mais actuellement, il se sentait comme…
…possédé.
« Il est hors de question que je le laisse nous diriger tous… »

[center]*
* *[/center]

Le grappin tinta sur le balcon avec un bruit si perçant que Guillaume cru que la moitié de la cité l’avait entendu. Il rentra la tête dans les épaules mais aucune personne ne débarqua en criant « Qui est là  ? ». Il se détendit et souffla longuement pour calmer son cÅ“ur qui battait la chamade.
Il avait finit par prendre une décision, le lendemain du retour des Trauméniens chez lui. Ils avaient passés la journée avec les riches et étaient tout de même revenus chez lui après tout ce luxe. Guillaume n’osait pas se l’avouer, mais il était content que ces trois-là , même s’ils n’étaient pas des réincarnations de Dieux, ne soient pas devenus méprisants.
Et puis, ce soir, ils étaient partis voir le grand prêtre pour savoir ce qu’il advenait de leur ami retenu dans la Sphère. Celui-ci aurait dû en sortir d’un instant à  l’autre, mort ou vivant. Ils l’avaient donc laissé à  nouveau seul, chez lui, et Guillaume s’était soudainement mis en quête d’une corde et d’une attache pour escalader. Il savait où logeait la jolie fille de l’autre fois, celle à  laquelle il n’arrêtait pas de penser.
Il l’avait vu sur son balcon.
Guillaume tira deux fois sur la corde, puis grimpa agilement les quelques mètres. Il sauta la balustrade et s’accroupit de l’autre coté. Pas un bruit. Il risqua un coup d’œil, mais la rue restait déserte. Personne ne l’avait vu.
Il fit face à  la porte fenêtre qui donnait sur une magnifique salle. Tout était noir, et Guillaume songea – à  juste titre – que tout le monde devait dormir. Il força la serrure sans mal et s’introduisit dans la maison, prenant bien soin de tout remettre à  sa place pour éviter d’attirer l’attention de l’extérieur.
Toutes les portes intérieures étaient ouvertes, ce qui facilité sa progression. Il parvint à  un bureau où il aperçut par la porte entrebâillée le maître des lieux : Barberousse, assit à  son bureau, consultait des documents d’un Å“il intéressé. Guillaume jaugea inutile de forcer la chance en traînant dans le coin plus que de raison, et suivit le couloir.
Une autre pièce était éclairée.
Guillaume regarda bien autour de lui, que personne ne le surprenne, puis colla son visage au sol, pour regarder sous la porte. Il vit deux pieds nus marcher en direction du lit, puis disparaître. Ensuite, la lumière s’éteignit. Guillaume se redressa.
Des pieds de femme.
Son coeur battait à  nouveau dans sa poitrine, mais pas par peur. Par excitation. Il le sentait gonfler en lui, et le rouge lui monta aux joues. Il vérifia à  nouveau que personne n’arrivait dans le couloir, et s’assura une retraite rapide le cas échéant dans le placard non loin de là . Il soupira longuement.
Était-ce elle ? Ou bien était-ce la femme de l’homme au bureau ? Ou une cousine, une servante ! En réalité, ça pourrait être n’importe qui. Ça pourrait même être des pieds d’homme. Comment savoir ? Comment en être sûr ? Il n’y a pas trente six solutions…
Guillaume attendit prudemment quelques minutes, puis ouvrit la porte le plus silencieusement du monde. La clarté d’une bougie éclaira brièvement son visage, ainsi que l’œil de celui qui l’observait dans la pénombre, derrière lui.

[center]*
* *[/center]

Un soupir abattu résonna dans la pièce vide.
Le bureau de Kevin Jolios, grand prêtre d’Ydja.
Bien mal en point.
Assit à  même le sol, la tête entre les mains, il soupirait longuement en espérant que le corps inanimé du jeune garçon sorte de cette Sphère. Il fallait qu’il soit mort. Il avait tant de fois prier Ydja et tout les Dieux existants pour que cet être trépasse durant l’épreuve. Il en était même venu à  y croire, presque.
Jolios se demandait de plus en plus fréquemment s’il n’y avait pas vraiment un Dieu, ici, dans le royaume des morts de l’Atlantide.
Il soupira à  nouveau. Il aurait déjà  dû être sur place, à  contempler la venue d’Ydja, ou bien à  regarder avec dédain le cadavre du malheureux. Il songea un instant aux autres personnes qui étaient apparues avec lui. La femme et les deux autres adolescents.
Il frissonna.
Ils vont venir, se dit-il. Ils vont venir me voir avec lui, avec Ydja, pour me montrer que c’était vraiment lui l’élu, et qu’il possédait maintenant la toute puissance, la plus pure connaissance du monde.
Ydja saura que j’ai tenté de le tuer.
Ydja saura ce que j’ai manigancé.
Et Ydja se vengera.

Quelqu’un toqua à  la porte, et le grand prêtre d’Ydja cria. Il se mit péniblement debout, conscient de la situation. Deux choix s’offraient à  lui : Tomber sur les compagnons du jeune homme et sur Ydja, qui le châtiera de ses péchés, et tomber sur celui qui lui avait demandé de mettre toute cette affaire en route.
Dans les deux cas, il était perdu.
Il chercha rapidement un moyen de s’échapper. La sortie secrète de son bureau était accessible, et il s’y engagea. Il poussa son armoire avec difficulté, mais finit par rendre sa fuite possible. Les coups à  sa porte redoublèrent. Il passa par l’interstice juste au moment où la porte de son cabinet personnel volait en éclats.
Il entendit les voix des compagnons de l’élu.
« Merde, il est pas là  !
-Il n’a pas pu allez bien loin. » dit la femme.
Puis il entendit la voix d’Ydja. La voix de celui qui était entré dans la Sphère, et qui venait d’en ressortir. Vivant.
« Il est derrière, là -bas.
-Tu es sûr Pythagore ?
-Certain. »
Kevin Jolios se mit à  courir dans la pénombre du tunnel creusé à  même la roche. Un courant d’air frais balaya son visage trempé de sueur. Il n’osa pas se retourner, même quand la lumière environnante s’éclaircit. L’armoire venait d’être ôtée de son emplacement originel.
« Il est là -bas ! »
Jolios entendit un fracas épouvantable et tenta d’accélérer. Malheureusement pour lui, n’ayant pas l’habitude de courir, il perdit l’équilibre et heurta un coté de la caverne avant de chuter lourdement sur le sol. Il se redressa, secoua la tête pour se remettre les idées en place, puis décida de se remettre à  courir. Mais bientôt ses pieds ne touchèrent plus terre.
DarKenshin le soulevait sans forcer.
Et elle souriait.
« Alors comme ça, il paraît que vous tuez tout ceux qui risque d’arriver au statut de Dieu, c’est bien cela ? »
Kevin Jolios espéra alors sincèrement que le Dieu en lequel il n’avait jamais cru était clément et pardonnait facilement.

[center]*
* *[/center]

La bougie qui se consumait lentement n’éclairait pas suffisamment pour que Guillaume soit visible dans la pièce. Néanmoins, avantage non négligeable, il arrivait à  discerner les meubles, les objets sur le sol, et ainsi évitait de faire du bruit en se déplaçant. Il se pencha au dessus du lit, mais n’arriva pas à  voir les traits de la personne qui y était couché.
Il recula et fit le tour. Mais lorsqu’il fut au pied du lit, une voix haut perchée, légèrement apeurée, le fit sursauter :
« Qui est là  ? Papa, c’est toi ? »
C’était bien la voix de la fille qui était venu chercher ses amis quelques jours auparavant. La fille dont il ne cessait de revoir le visage, en rêve.
Et elle se trouvait là , à  quelques centimètres de lui. Il entendait sa respiration rapide, paniquée par la présence d’un être inconnu à  ses cotés. Il avait envie de la rassurer, de se présenter, de lui dire de ne pas s’inquiéter. Mais il n’en fit rien. Guillaume resta paralysé au pied du lit, et elle restait allongée sans bouger non plus.
« Papa ? » répéta-t-elle.
Elle se redressa et Guillaume se jeta à  terre. Il l’avait enfin vu.
C’était bien elle.
Elle était encore plus belle que dans son souvenir.
« Papa, arrête, tu sais bien que je n’aime pas que tu viennes me voir. »
Guillaume ne répondit pas. Il y eut un silence, puis il l’entendit lisser sa couverture de ses mains. Un sentiment de honte l’enveloppa. Que faisait-il ici ? Qu’allait-il lui dire ? Qu’allait-il faire ? Pourquoi cette idée de s’introduire dans une propriété privée lui paraissait-elle si saugrenue à  présent ?
« Je croyais que tu m’avais promis que tu ne recommencerais plus. Tu m’avais dit que c’était la dernière fois, papa… »
Mais de quoi parle-t-elle ? se demanda Guillaume en respirant le plus doucement possible. De nouveau des bruits de draps qu’on lisse, qu’on frotte. Il n’osait pas risquer un Å“il. Il l’imaginait assise sur son lit à  scruter la pénombre. Et il n’était pas loin de la vérité. Il tourna la tête vers la bougie, mais il restait encore du temps avant que celle-ci ne se noie sans sa propre cire. Il failli se lancer lorsqu’elle recommença à  parler d’une voix plaintive.
« Tu me promet que c’est la dernière alors ?
-Je ne suis pas ton père. » lança-t-il sans réfléchir.
Silence pesant.
Il l’entendit remuer sur son lit, et se prépara mentalement à  l’intercepter si elle courait vers la porte. Mais elle ne semblait pas vouloir bouger de nouveau.
« Qui es-tu alors ? »
La voix n’était plus aussi triste qu’avant, mais elle ne paraissait pas avoir peur de l’intrus. En réalité, Guillaume songea que cette vox était bien plus ferme que la sienne, alors qu’il avait la position dominante de celui qui connaît tout de la situation présente.
« Je me suis introduis chez vous pour… »
Il hésita un instant.
« …pour vous voir, finit-il par dire. Je voulais vous voir.
-Me voir ? s’étonna Judith. Quelle idée ridicule. Tout le monde peut me voir s’il en fait la demande, ou dans la rue quand je sors. Pourquoi être venu en pleine nuit et avoir prit tout ces risques ?
-Je ne sais pas. » répondit Guillaume franchement.
Judith ne sut quoi ajouter. Elle s’attendait à  tout autre chose d’un inconnu mâle découvert dans sa chambre au milieu de la nuit. En fait, elle s’attendait à  tout sauf à  une discussion de ce type.
« Tu ne sais pas ? répéta-t-elle.
-Non. En fait, j’ai eu l’impression que c’était la chose à  faire. Te voir. Je… J’ai l’impression de te connaître, enfin… De t’avoir vu. Si, je t’ai déjà  vu mais… enfin… »
Il s’embrouillait plus qu’autre chose. Il n’était pas à  l’aise. Il aurait aimé se lever, se montrer, lui dire qu’il pensait à  elle depuis qu’il l’avait vu au détour d’une rue, lui dire de s’en aller avec lui loin de tout, lui dire qu’elle est merveilleuse, et tant d’autres choses. Mais tout cela semblait si surréaliste. Quelle serait votre réaction si quelqu’un vous sortait tout cela en pleine nuit, sans que vous sachiez qui il est vraiment ?
« Il y a d’autres façons de me courtiser, vous savez, dit-elle avec un sourire. En plus, si vous bafouillez, je ne comprends plus rien.
-Je suis désolé.
-Ah non, ne vous excusez pas en plus ! Je croyais avoir au moins affaire à  quelqu’un de dur, de courageux. Si vous vous excusez, ça gâche tout. »
En quelques instants, elle avait retourné la conversation à  son avantage, et elle la menait d’une main de maître. Mais elle s’était détendue. Et du coup, lui aussi. Elle émit même un léger rire en reprenant la conversation :
« C’est drôle, dit-elle. Je n’aurais jamais cru que ça soit si plaisant de se faire surprendre par un inconnu dans son lit.
-Peut-être ne sommes-nous pas si inconnus que ça… » répondit-il en posant sa tête contre le pied du lit. Ils regardaient tout les deux au plafond, leurs visages si jeunes, si beaux, baignés dans la lumière orangée d’une bougie en fin de vie. Le spectacle était magnifique.
Mais il fut de courte durée.
La porte s’ouvrit brutalement et claqua contre le mur. Judith poussa un cri lorsqu’un corbeau passa très près de sa tête et alla se poser sur le meuble, près de la bougie, en face des deux jeunes gens. L’oiseau semblait les regarder avec haine. Surtout Guillaume. Ce dernier se redressa sans quitter la bête des yeux. Il n’avait que trop traîné.
« L’histoire se répète, alors… » dit une voix derrière eux.
Les deux se retournèrent simultanément et firent face au visage boursouflé de colère de Frédéric 1er Barberousse, qui se tenait dans l’embrasure de la porte.
Le corbeau s’envola, souffla la bougie avec ses ailes, et on put voir l’œil remplit de haine de Barberousse qui brillait encore malgré le noir.
Guillaume hurla.

[center]*
* *[/center]

Un écran s’éteignit.
D’autres s’allumèrent.
Le concert d’image avait quelque chose de fascinant. D’hypnotisant. Pour un quelconque quidam, il n’aurait rien reflété de particulier. Des décors fixes, parfois des personnages en train de marcher, ou parler. Des écrans de télésurveillances classiques, qu’on trouve dans n’importe quel immeuble, dans une pièce réservée à  cela, la plupart du temps celle du chef de la sécurité.
Mais dans cet immeuble spécifique, qui ne se trouvait nulle part et pourtant partout, le chef de la sécurité était également le chef tout court. Pas le patron, non. Le Patron était en dessous de Lui. Mistrophera dirigeait tout depuis les hautes sphères de Son pouvoir grandissant. Et Il surveillait les écrans avec avidité.
Sa main pianotait distraitement sur le clavier de l’ordinateur qui jouxtait Son siège en cuir, et Son regard passait d’un écran à  un autre aussi rapidement qu’Il le pouvait. Il porta Sa main à  une télécommande, et tous les écrans ne firent plus qu’un. Un seul immense écran quadrillé qui diffusait les images d’un homme au téléphone.
Le commissaire Serge Thourn semblait recevoir de bonnes nouvelles. La caméra le suivit tandis qu’il marchait de long en large dans la rue de Brest, puis on le vit entrer dans sa voiture et démarrer le moteur. Les pneus crissèrent lorsqu’il partit en trombe. Mistrophera appuya une nouvelle fois sur quelques boutons de Sa télécommande, et les écrans reparurent.
Thourn et sa voiture filant à  toute allure n’en devinrent qu’un parmi tant d’autres.
Mistrophera eut un rictus de contentement.
« Voilà  qui devrait les retenir encore un moment… » dit-Il simplement.
Son regard s’attarda encore sur un écran où deux hommes discutaient, l’un vieux et sec, et l’autre majestueux et musclé. Le son n’était pas de mise, et la discussion entre Loki et Albert Fish resta aussi silencieuse que la salle.
Il tourna légèrement la tête et Il regarda ensuite un autre écran. Son écran préféré, ces derniers temps. Il misait énormément sur ce qui allait se passer dans les prochaines heures, sur ce moniteur braqué sur un appartement parisien en plein effervescence.
Sur cette télévision, Lord Satana réfléchissait dans la cuisine.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 06 Jan 2007, 14:25 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
7. Changement d'opposant.
« Alors tu es vraiment un Dieu, maintenant ?
-Je suis Ydja. Je suis le peuple Atlante. Je suis tout être vivant en ces lieux.
-Dingue, ça.
-Est-ce que tu te rappelles ce qu’il y avait dans la Sphère ?
-La Sphère était le catalyseur, et j’incarne dorénavant cette puissance.
-Dingue, ça. Il cause même comme un Dieu, maintenant. Avec des énigmes et tout !
-Tais-toi un peu, Viper ! J’essaye de comprendre ce qui lui est arrivé. J’espère qu’il n’est pas possédé.
-C’est sûr qu’il y a de la place dans sa tête, c’est tout vide.
-Pythagore, quand nous sommes arrivés, tu étais déjà  sorti. Depuis combien de temps avais-tu émergé de la Sphère ?
-Le temps n’a aucune importance. Le passé est inutile.
-Jolie Philosophie.
-Est-ce que tu as vu ou appris quelque chose d’intéressant dans la Sphère ?
-Je suis omniscient.
-En plus, il a enrichi son vocabulaire.
-Est-ce que Séphy-Roshou est passée dans ce monde ?
-…
-Hello ! Y a quelqu’un ?
-Ne le touche pas, Viper ! On ne sait jamais quelles pourraient être ses réactions. Il n’est pas dans son état normal.
-Ça c’est sûr. Mais je le préfère comme ça. Plus silencieux.
-Prends-en de la graine.
-Dalisc, cette remarque n’était pas obligatoire.
-Les gars ?
-Oui ?
-Fermez-la.
-Séphy-Roshou n’est pas ici. Elle n’a jamais mis les pieds dans ce monde.
-Où est-elle ?
-Viper Dragoon !!
-Ça pourrait marcher, non ?
-Elle est dans un autre au-delà . Je ne peux en dire plus.
-Tu parles d’un omniscient.
-Autre chose, Pythagore ? Des infos, une piste ? Sinon on repart. Avec de la chance, tu retrouveras ton état normal en quittant ton enveloppe charnelle Trauménienne.
-La vie. La mort des citoyens de l’Atlantide. Un cycle perpétuel. Un cercle. L’infini. Le cercle ne peut être brisé. Il ne l’est que si la destinée n’est pas de mise…
-Je pige rien.
-Chut !
-…on ne peut forcer la destinée à  se plier. Kevin Jolios a tenté de rompre la destiné. Il sera châtié. Le jugement d’Ydja va s’abattre sur lui.
-Kevin Jolios ? Qui est Kévin Jolios ?
-Le grand prêtre qui parle et officie en mon nom, et qui se sert de moi pour arriver à  ses fins. Il est mauvais.
-Le grand prêtre d’Ydja ? Il a tenté quelque chose sur toi, c’est ça ?
-Dans la série Flipper le Dauphin, au moins, le petit garçon comprend tout du premier coup. Là , c’est flou, hein…
-Kevin Jolios attend son heure.
-Bon, allons-y.
-Maintenant ?
-Nous allons aller le voir immédiatement. Guillaume nous attendra encore un peu, mais cette histoire de destinée m’interpelle. J’espère qu’il n’a pas mis en péril la santé mentale de Pythagore, et si c’est le cas, il va nous aider à  le remettre d’aplomb.
-On le laisse là  ou pas ?
-Il vient avec nous, bien entendu. Tout le monde est prêt ?
-Allons-y !
-Non.
-Je vous accompagne. Le mouvement, même en arrière, est un signe d’avancement.
-Vivement qu’il redevienne normal, finalement. Il me gave, là . »

[center]*
* *[/center]

Les yeux dans les yeux, Pythagore/Ydja et Kevin Jolios se fixaient intensément. Mais les regards n’étaient pas les mêmes : Celui du futur ex-grand prêtre d’Ydja étaient bien loin de refléter l’assurance, et suintaient d’une peur poisseuse. DarKenshin, plongée dans les souvenirs de la discussion au retour de Pythagore, maintenait Jolios sur une chaise. Si celui-ci s’était démené comme un beau diable au départ, il avait cessé tout remue-ménage inutile.
« Laissez-moi… Je ne voulais pas… Je ne savais pas… »
Viper Dragoon regardait Pythagore, mal à  l’aise. Il ne reconnaissait plus son compagnon. Il n’était plus le même, depuis son étrange passage dans la Sphère de ce monde. Et ce nouveau Pythagore ne lui plaisait que moyennement. Il était bien trop sûr de lui, bien trop sérieux et sévère.
Et ce regard était effrayant.
L’esprit du prêtre était à  la limite de prendre la fuite, selon Viper Dragoon. Il éprouvait presque de la pitié pour cet homme, maintenant qu’il était face à  son destin. Mais quoi qu’on en dise, Viper Dragoon ne jugeait pas Pythagore, ou Ydja, apte à  procéder à  de tels traitements envers quiconque.
« Pythagore, ça va peut-être aller, maintenant, non ?
-Il mérite la peur qui le submerge.
-Mais il ne mérite tout de même pas que tu l’approches de si près, tellement ton odeur est répugnante ! »
Pythagore ne releva pas la blague vaseuse. L’ancien Pythagore se serait jeté sur moi, même avec ce type de conneries, songea Viper Dragoon avec amertume. Il soupira. Le semi Dieu qui avait prit la place de son ami lui plaisait de moins en moins. DarKenshin reprit les rennes de la conversation :
« Pourquoi avez-vous tenté de le tuer ? Qu’est-il devenu exactement ?
-Il est… Il est Ydja ! ânonna le grand prêtre avec difficulté. Il est l’incarnation toute puissante d’une divinité en laquelle je ne croyais pas !
-Je crois qu’il a fondu un plomb, annonça Viper Dragoon.
-Je ne croyais pas en lui, et maintenant il va me pulvériser pour mon ignorance et mon irrespect envers lui ! Tout comme l’instigateur de toute cette mascarade ! »
Les Trois Trauméniens se regardèrent.
« Quel instigateur ? tempêta DarKenshin en soulevant littéralement Jolios de terre. Ça veut dire qu’il y a quelqu’un d’autre derrière tout ça ?
-Non… Je veux dire oui… Je ne sais pas…
-C’est précis, marmonna Viper Dragoon.
-Pythagore, pourrais-tu deviner, ou savoir, avec ta connaissance infinie, qui a dirigé le grand prêtre contre toi ? »
Les regards convergèrent vers Pythagore qui, et Viper Dragoon le vit clairement, se sentit un instant complètement perdu. Son visage passa fugitivement de sérieux à  abasourdi, puis reprit son nouveau faciès fermé.
« Je n’arrive pas à  voir clairement qui a préparé ce guet-apens. » dit-il simplement. Viper Dragoon sourit en revoyant pour la première fois la véritable apparence de Pythagore.
« Pas la peine d’être un Dieu pour trouver ce genre de renseignement. »
Dalisc arborait un sourire inhabituel, lui qui d’ordinaire masquait la totalité de ses émotions par une mine patibulaire de première catégorie. Il jouait avec les extrémités de sa ceinture de kimono, et les regardait tournoyer.
« Tu sais quelque chose, s’étonna Viper Dragoon.
-Petit un : Notre suspect doit forcément avoir espionné le prêtre, ou être en relation avec lui même si ce dernier ne connaît rien de son patron. En gros, il l’espionne. »
Dalisc envoya un coup de pied sauté sans élan dans l’armoire et deux appareils étranges en tombèrent. L’un des deux ressemblait à  une webcam, mais un ancêtre très éloigné, quant à  l’autre il s’agissait simplement d’une enceinte. Dalisc retomba dessus, réduisant en miette les deux preuves.
« Mais pourquoi tu…
-Pas besoin de ça pour retrouver le coupable, poursuivit Dalisc imperturbable. Petit deux : notre suspect doit connaître les passages secrets qu’empruntaient ses délégués, pour les suivre où qu’ils aillent et intervenir si besoin. »
Il s’écarta de l’entrée du passage où Kevin Jolios avait tenté de s’enfuir et montra le sol. Sur celui-ci, on pouvait apercevoir de multiples traces de pas entrecroisées : Celles de Jolios, reconnaissables à  leur forme particulière, celles de Viper Dragoon qui avait été repêcher le sinistre individu dans les catacombes, et une troisième trace.
Des serres d’oiseau.
« Quel volatile irait se perdre dans les méandres des sous-sols d’une telle ville ? Demanda Dalisc. Petit trois : Un test de mémoire. Qui ici a assez d’argent pour se permettre une surveillance d’une telle ampleur, et qui adore les oiseaux ? »
Dalisc sourit.
« Frédéric 1er Barberousse ! » dirent à  l’unisson Viper Dragoon, DarKenshin et le grand prêtre, aussi ahuri par le recoupement de Dalisc que les autres. Seul Pythagore, regardant le sol, ne dit rien. Une main se posa sur son épaule.
Celle de Viper Dragoon.
« Allons, continue de croire en toi, au moins, sinon tu disparaîtra, Petit Dieu. »

[center]*
* *[/center]

C’est impossible… Je ne peux pas entendre ce que j’entends… Non… Ce sont des illusions auditives, des hallucinations de mon esprit embrumé… Mon inconscient, qui s’évertue à  créer des fantasmes de voix pour m’embrouiller et me contraindre à  les écouter… Ces voix… Des voix familières… Mais qui n’ont jamais existées…
Je suis réel.
Elles non.

[pOUrqUOI nOUs IgnOrEr ?]
Parce que vous n’êtes pas vraiment elles ! Vous n’êtes pas vraiment là  ! Vous ne pouvez pas me parler ainsi, dans ma tête ! Ici, c’est la réalité ! Ce n’est pas un
[cOntE ?]
Ce n’est pas un conte, non. Ce n’est pas une histoire. Ces jeunes filles, elles, faisaient partie d’une histoire, d’une mystification inventée de toute pièce par des jeunes à  l’imagination fertile…
[tOI ?]
Oui moi. Nous, même, si on inclue tout ceux qui ont contribué à  développer puis maintenir ce délire, et… Mais qu’est-ce je fabrique ?! Je me parle ! À moi ! Il n’y a personne !
[sI, nOUs sOmmEs là , cOmmE nOUs l’AvOns tOUjOUrs ÉtÉ…]
Vous n’êtes pas réelles. Vous n’êtes pas réelles !
[cOmmEnt tE pArlErIOns-nOUs sI nOUs n’ExIstIOns pAs ? rÉflÉchIs Un pEU, vOYOns, trAUmÉnIEn.]
Ne m’appelez pas ainsi… Nous ne sommes pas sur Traumen… Nous sommes vivants, ici. Nous sommes humains. Nous sommes
[dEs trAUmÉnIEns. dEs trAUmÉnIEns pOUr lE rEstE dE vOtrE vIE.]
Non…
[OOOOhh sI. C’Est d’AIllEUrs pOUr çA qUE tU pEUx nOUs EntEndrE, nOUs cOmprEndrE, Et nOUs AImER pOUr cE qUE nOUs sOmmEs…]
Et vous êtes quoi exactement ?
[tOn clAn dE fAn-gIrl, cElUI qUI t’A AImÉ Et sOUtEnU sUr trAUmEn Et qUI tE sErA dÉvOUÉ À jAmAIs…]
…
[tU rEstEs scEptIqUE ?]
Je ne sais pas quoi penser… Tant de choses étranges nous sont arrivés, ces derniers temps, et je…
[tU nE sAIs plUs ExActEmEnt qUOI fAIrE, nI À qUI tE fIEr ?]
Et je devrais me fier à  une voix qui résonne dans ma tête, c’est ça ? Je devrais faire confiance à  une bande de délurées névrotiques qui, dans une époque révolue, me vouaient un culte sans bornes ? Même si tout ceci appartenait au monde virtuel, et que nous ne sommes plus dans ce monde mais dans la réalité ?
LA RÉALITÉ !!

[DrAgOnnOIr AgIt cOntrE vOtrE IntÉrÊt.]
Et alors ? Même s’il lui prenait l’envie de nous doubler, qu’est-ce que je pourrais y faire ? Il a des informations que nous ignorons, mais je ne vais pas aller jusquâ€™à  me battre contre lui juste pour les obtenir ! Il fait…
…ce qu’il croit bon de faire.

[sEUl dAns sOn cOIn ? En vOUs mEttAnt À l’ÉcArt ?]
Il n’est pas seul, il est avec Q-Po et Arkh.
[Et EUx sOnt dIgnEs dE cOnfIAncE, c’Est cElA ?]
…
[tU sAIs qUE nOUs AvOns rAIsOn, Et qUE nOUs nE dÉsIrOns qUE tOn bOnhEUr, cOmmE À l’ÉpOqUE dE fEU trAUmEn…]
Ils complotent contre nous, vous croyez ?
[Ils nE fOnt qUE çA… Et Il n’Y A qU’Un sEUl mOYEn d’Y rEmÉdIEr…]
Je dois prendre le contrôle de la situation. Je dois devenir le nouveau dirigeant de l’équipe de sauvetage de mon amie, Séphy-Roshou. Je dois détrôner DragonNoir et prendre sa place de leader…
[tOI sEUl pEUt Y ArrIvEr, lOrd sAtAnA…]

[center]*
* *[/center]

Une porte close, telle l’esprit complètement hermétique qui se trouvait derrière.
Hurlement.
Une porte close, scellée par une énorme clef d’un trousseau qui pend encore au trou de la serrure d’acier. Aucune trace de rouille, ni d’usure par le temps. La porte, la serrure et la clef. Toutes les trois servent fréquemment.
Halètement.
Rien à  voir de plus qu’une porte close, de ce coté-ci. Seuls les bruits qui en émanaient pouvaient faire comprendre que ce qui était intéressant se trouvait de l’autre coté de cette entrée. De l’extérieur, rien à  voir. Mais à  l’intérieur…
…la douleur.
Un nouveau morceau d’étoffe retomba sur le sol, avec ses congénères. Il retrouva ainsi un autre bout de manche, ainsi que diverses loques brûlées ou imbibés de sang. Un pied en pantoufle, qui dénotait nettement ave l’ambiance de torture et de lamentations qui régnait dans la pièce, écrasa les frusques qui jonchaient le sol.
Un nouveau cri fusa, accompagné d’un autre. Plus féminin.
« Arrête ! »
Du sang coula le long du pied qui touchait à  peine le sol. Un pied nu, sale, face aux deux pantoufles. Celles-ci étaient surmontées d’une robe de chambre couleur lie-de-vin, brodée d’or. Elle semblait assez coûteuse. Et elle l’était vraisemblablement.
Au dessus des deux pieds nus (l’autre étant simplement caché par la robe de chambre luxueuse), il n’y avait rien d’autre que des mollets, puis des cuisses. Tachées. Balafrées. Ensanglantées. L’une des cuisses était même encore perforée par une longue aiguille qui la traversait de part en part.
« Arrête papa !! »
Les pantoufles se détournèrent des pieds torturés et firent face à  Judith, qui était au sol dans sa jolie nuisette. Enchaînée avec de lourds anneaux de fer rouillés. Elle aussi était pieds nus, car elle avait été tirée du lit sans avoir eu le temps de mettre ses pantoufles. Elle avait été tellement choquée de voir son père dans un tel état de fureur, puis étonné de voir le visage de Guillaume dans le rôle de son visiteur nocturne, que ses pantoufles avaient été reléguées loin, loin dans son esprit.
Les pantoufles richement décorées furent recouvertes de la robe de chambre. Elle traîna sur le sol, se salissant, mais Frédéric Barberousse n’en avait cure. Il approcha sa main du visage de sa fille pour lui caresser la joue, mais elle se détourna : sa main bourrue était maculée de sang séché.
« Tu sais ce que je pense des personnes assez malignes pour s’introduire chez moi alors qu’elles n’ont pas été invité… dit-il d’une voix calme.
-Je… Je l’ai invité ! C’est moi qui lui ai dit de ven… »
La claque résonna dans la pièce et le silence se fit. On discernait sans mal la trace des doigts sur le visage de Judith, à  la fois par la rougeur du coup et par les traces de sang que Barberousse y avait laissé. Judith baissa la tête et se mit à  sangloter.
« Laiche-la… »
Barberousse pivota sur ses pantoufles et se releva. Il fixait Guillaume de son regard de fou. Le même regard qu’il avait eu en entrant dans la chambre, avec le corbeau, et en l’envoyant valser contre le mur. La bougie était retombée sur Guillaume, et ce dernier avait cru que la douleur du choc était la plus grande qu’il n’avait jamais subi.
Mais c’était sans compter sur la séance de torture qui avait suivit.
« Qu’est-ce que tu as dit, le môme ?
-Laiche-la tranquille… » Guillaume se mit à  tousser, découvrant sa mâchoire où manquaient de nombreuses dents. Il cracha un caillot de sang sur le sol, manquant de peu la pantoufle de son tortionnaire.
« Tu veux que je la laisse tranquille ? répéta Barberousse avec la patience et la voix qu’on applique face à  un enfant attardé. Mais tout ceci est de ta faute ! De ta seule et unique faute ! Tu n’as quâ€™à  t’en prendre quâ€™à  toi ! »
Sa main effleura le torse dénudé et lacéré de Guillaume, et s’arrêta sur une partie à  vif, juste sous le mamelon. La chair rose brillait, et Barberousse enfonça avec délectation ses doigts sous la peau. Guillaume rejeta sa tête en arrière, se cogna contre le mur où il était attaché et hurla. Le hurlement fut interrompu par un violent coup du plat de la main sur sa gorge, puis Frédéric 1er Barberousse lui attrapa les joues d’une seule main.
« Ce n’est pas à  elle que je vais m’en prendre, mais à  toi, mon Guillaume. Crois-le où non, mais ce n’est pas la première fois… »
Le trousseau de clefs tinta, derrière lui. Un corbeau, placé sur une des poutres du plafond, croassa de mécontentement. Ou bien était-ce un avertissement ? Dans tout les cas, Barberousse se tourna vers la porte au moment où un pied la traversait, la réduisant en miettes sans mal. Des échardes de bois retombèrent autour de Barberousse.
Le pied qui avait défoncé la porte resta en place. Un pied nu. Puis il décrivit un arc de cercle, toujours en hauteur, et alla rejoindre son complice de toujours au sol.
« Désolé, nous sommes en retard. »
Derrière Dalisc, qui venait de briser la porte, Viper Dragoon agita la main en souriant. Mais ce qui fit le plus peur à  Barberousse, ce ne fut pas la force de Dalisc, ni la joie de Viper Dragoon, ni même de revoir Pythagore en vie.
C’étaient les yeux de DarKenshin qui le firent reculer.

[center]*
* *[/center]

Frédéric 1er dit Frédéric Barberousse fut élu roi d'Allemagne le 4 mars 1152 en succédant à  son oncle Conrad III, et couronné empereur romain germanique en 1155, sur la Terre Originelle.
Fils de Frédéric de Hohenstaufen, duc de Souabe, et de Judith de Bavière, de la dynastie rivale Welfs, Frédéric est issu d'une des principales familles d'Allemagne, faisant de lui un choix acceptable pour les princes électeurs. En 1147 il épouse Adélaïde de Vohbourg, divorcés en 1153. En 1156 il épouse Béatrice de Bourgogne. Ils eurent cinq enfants : Frédéric duc de Souabe, Henri VI, Othon, Conrad, également duc de Souabe et Philippe 1er de Souabe.
Il mena plusieurs expéditions en Italie entre 1154 et 1177.
Au cours de la première, il fut couronné empereur à  Rome par le pape Adrien IV, après avoir pris le contrôle de la commune Romaine qui aspirait à  renouer avec le modèle républicain antique. Arnaud de Brescia, autorité spirituelle qui déniait au pape tout droit de gouverner la ville fut supplicié.
A l'été 1158, il entreprend une expédition plus conséquente. Après un mois de siège il impose des conditions sévères à  Milan défaite. En novembre 1158, il réunit à  Roncaglia une assemblée de juristes et de représentants des Cités italiennes afin de clarifier la situation des droits régaliens relevant de l'Empereur. Le Nord et le Centre de la péninsule s'étaient en effet émancipés de la tutelle impériale depuis le règne de Conrad III.
En 1162, dans un contexte de schisme pontifical, devant l'insoumission persistante de Milan, celle ci est à  nouveau assiégée et détruite avec le concours de cités voisines opprimées par les Milanais. Les Villes alliées à  Milan se virent imposées des conditions strictes (Brescia, Plaisance...)
Cela ne désarme pas les oppositions et dés 1164 la Ligue de Vérone, puis en 1167 la Ligue Lombarde ruine la politique impériale en Italie.
En 1166-1167 Frédéric Barberousse cible Rome après avoir pris Ancône où l'empire byzantin avait repris pied. Recouronné par l'antipape Pascal III, son armée est décimée par une épidémie. Il ne revient qu'en 1174 avec une armée bien moins forte, et après l'échec des négociations de Montebello en 1175, il est défait à  la bataille de Legnano par la ligue.
Revers politique plus grave que la défaite militaire, il céda aux exigences papales d'Alexandre III mais parvint à  le désolidariser de la cause des cités lombardes. Frédéric embarqua pour la troisième croisade (1189) avec Philippe Auguste et Richard 1er d'Angleterre.
Il se noya en traversant la rivière Saleph en Cilicie dans le sud est de l'Anatolie.

Frédéric est le sujet d'une légende de héros endormi, qui dit qu'il n'est pas mort, mais endormi avec ses chevaliers dans une cave dans les montagnes de Kyffhäuser en Thuringe, en Allemagne, et que lorsque les corbeaux cesseront de voler autour de la montagne il se réveillera et rétablira l'Allemagne dans son ancienne grandeur. En accord avec l'histoire sa barbe rousse a poussé à  travers la table auprès de laquelle il est assis. Ses yeux sont à  demi clos dans son sommeil, mais de temps en temps il lève la main et envoie un garçon voir si les corbeaux ont cessé de voler.

-extrait de Winkipédia, encyclopédie en ligne.

[center]*
* *[/center]

La salle était petite, et il n’y avait en apparence aucun moyen de s’enfuir. Mais avec un adversaire comme Barberousse, qui avait réussi à  tromper le grand prêtre d’Ydja et une bonne partie de la communauté, il fallait se méfier. Il connaissait les passages secrets de la ville, et sa demeure devait en être truffée.
Et c’était de plus un habile manipulateur.
« Oh ! Les élus d’Ydja ! Que venez-vous faire dans mon humble demeure ? »
Mais selon DarKenshin, ces quelques mots censés les apaiser sonnaient des plus faux. Elle se borna donc à  le regarder sans ciller. Barberousse n’en fut que plus mal à  l’aise. Il parut soudainement se rendre compte de l’énormité de la scène.
Il se trouvait souillé de sang, un sang qui n’était de plus pas le siens, avec sa fille enchaînée dans un coin de la pièce et un jeune homme violenté attaché dans un autre. Les apparence ne jouaient évidemment pas en sa faveur, mais il espéra encore un instant pouvoir faire vaciller le jugement qui se montait dans l’esprit des Trauméniens.
« Je suis dans mon droit, dit-il simplement. Cet homme s’est introduit chez moi en pleine nuit et je l’ai découvert dans la chambre de ma fille. Il ne…
-Est-ce là  une raison pour le torturer ? trancha DarKenshin.
-Il ne… commença Barberousse.
-C’est à  vous que je pose la question, Frédéric 1er dit Barberousse, reprit DarKenshin.
-Et j’espère pour vous que vous ne l’avez pas tué. » ajouta Viper Dragoon dont la gaieté s’était mué en colère sourde lorsqu’il avait vu l’état de Guillaume.
Je ne pourrais pas les convaincre, en conclut rapidement Barberousse. Mais au fond de lui-même, il souriait. Il y avait bien longtemps qu’il s’était rangé de toutes ces activités surréalistes, et il était grand temps de leur montrer que Barberousse n’était pas un homme comme les autres. Oh non…
Il lui fallait juste un peu de temps pour retrouver ses acquis.
« Ne pensez-vous pas plutôt que ça serait à  Ydja de juger ? »
Barberousse leva la main vers Pythagore, qui recula.
Il n’avait cessé de gamberger depuis la démonstration de Dalisc, chez le grand prêtre. Ce dernier avait découvert et mis en relation tant de choses, si simplement, alors que lui… Il n’avait pas été capable de grand-chose. Pourtant, il était bien un Dieu, non ? Ou un demi-Dieu, au moins ! C’est ce qu’avait dit le grand prêtre en l’emmenant à  la Sphère.
Qu’il allait être la réincarnation d’Ydja.
Des bribes de souvenirs lui revinrent en mémoire. La conversation qui
n’avait pas eu lieu
s’était tenu dans la Sphère. La conversation avec
lui-même
le Dieu Ydja qui lui avait embrouillé l’esprit. De quoi avaient-ils parlé ? La mémoire exacte lui manquait, mais il se rappelait de plein de détails : La chaleur du lieu où il se trouvait, le calme ambiant.
Pythagore réfléchissait.
Il ne voyait pas ses compagnons combattre Barberousse, qui avait finalement réussit à  éveiller ses pouvoirs latents. Il ne voyait pas Dalisc étranglé par la barbe de Barberousse qui proliférait sans cesse. Il n’entendait pas Judith hurler de terreur, ni Viper Dragoon lui crier dessus pour qu’il intervienne. Il ne sentait pas les milliers d’ailes de corbeaux qui affluaient sous les ordres de leur maître pour becqueter les intrus.
Pythagore était plongé dans ses pensées.

[center]*
* *[/center]

« Qui êtes-vous ? »
Et toi, qui es-tu ?
« Êtes-vous celui que tout le monde ici appelle Ydja ? »
Crois-tu que je le suis ?
« Vous répondez toujours par d’autres questions ? »
Sembles-tu vouloir sans cesse m’en poser ?
« Écoutez, monsieur… Ou madame. C’est vrai, en fait : Votre voix pourrait appartenir aux deux sexes, je n’arrive pas à  discerner les intonations ! »
Est-ce dérangeant ? Préfèrerais-tu que je sois un homme ? Ou une femme ?
« Je ne sais pas. Comme vous voulez. Mais qu’est-ce que c’est que cette conversation ? Qui êtes-vous à  la fin ? »
Je ne suis qu’une idée.
« Une idée ? »
C’est cela.
« Mais une idée n’a pas de vie ! Une idée, c’est… c’est de l’imaginaire ! De l’abstrait ! »
Il suffit de lui insuffler la vie. Il suffit d’y croire.
« Et pouf, comme ça l’idée peut vivre, et parler ? »
N’en suis-je pas la preuve vivante ?
« On tourne en rond, là . »
Le rond est l’infini. L’infini est la vie.
« La Sphère où je suis entré, c’est donc… »
Tu as compris.
« On peut donc considérer que vous êtes Ydja. Ou l’idée d’Ydja, n’est-ce pas ? »
On peut.
« Je peux vous demander un service, alors ? J’ai besoin de ressortir de cette Sphère vivant dans cinq ou six jours. Je ne sais déjà  plus combien de temps j’y ai passé. »
Tu es pourtant mort, non ?
« Oui, bien sûr, mais… Je veux dire, en ressortir dans la même vie que celle-ci. Ou la même mort, si vous préférez. »
Il te suffit d’y croire, et l’idée de rester en vie vivra à  son tour.
« Je ne comprends pas… Si je meurs de faim, ou autre, je n’ai pas le choix ! »
Tu peux choisir d’avoir faim.
« Mais bien sûr que non ! Ou je peux avoir soif ! Six jours sans boire, je dois forcément mourir de déshydratation, même plongé dans une Sphère de liquide… …étrange !
Sans vous offenser, bien sûr. »
Pas de mal.
« Alors vous pouvez me sauver ? »
Toi seul le peux.
« Mais c’est important ! Je suis là  pour sauver quelqu’un ! Je ne dois pas mourir ! Enfin… Pas re-mourir, sinon mes amis qui m’attendent vont perdre leur temps précieux en même temps que le mien ! Aidez-moi ! »
Si tu crois que je suis Ydja, alors je le serais. Si tu crois que je suis un délire de ton imagination, alors je le serais.
Si tu crois que le temps passe lentement, il s’allongera. Si tu crois qu’il passe vite, il accélérera.
Si tu crois en ta survie, tu survivras. Si tu crois mourir, tu mourras.
Si tu penses être l’élu, alors…

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 06 Sep 2007, 13:17 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
8. Départ calme, arrivée mouvementée.
Avant. Bien avant.
Guillaume entretenait une liaison avec Judith, la servante d’un noble dont la puissance et la notoriété était en pleine ascension. Il l’avait vu pour la première fois alors qu’elle devait faire les courses pour son maître, et il l’avait accosté. Ils avaient papoté de choses et d’autres, et ils s’étaient revus.
De nombreuses fois.
Elle avait fait le mur pour aller le retrouver, le soir, chez lui, et passer la nuit avec celui- qu’elle aimait. Le coup de foudre, comme on dit. Des semaines, des mois s’étaient écoulés. Leur liaison devait rester secrète. Si on apprenait qu’une des domestiques d’un puissant seigneur de la Cité Atlante fricotait avec un homme de la basse société, le résultat aurait pu être terrible. Et pour elle, et pour son maître.
Frédéric 1er Barberousse finit malheureusement par s’en apercevoir.
Il s’évertuait d’ores et déjà  à  prendre le contrôle de l’Atlantide, dans cette ancienne vie, pas exactement de la même façon, mais le but était le même : Dominer cette cité, cet au-delà , par l’intermédiaire d’un prêtre qui serait à  sa merci. Son plan allait presque aboutir, lorsqu’il découvrit les deux amants dans la chambre de la servante.
Barberousse avait pour réputation d’être un homme violent. Il battait souvent ses serviteurs, sans raison réellement valable. Il était craint et respecté par ceux-ci, mais la moindre bourde leur valait moult dommages physiques. Judith n’était pas dans le lot. Non qu’elle n’avait jamais commis de maladresses, mais Barberousse se montrait étrangement clément envers elle.
Jusqu’au jour où il la découvrit en compagnie de Guillaume, dans sa chambre à  coucher. Il se mit dans une colère noire, et réduisit le mobilier à  néant. Puis il s’attaqua à  Guillaume, mais Judith s’interposa, ce qui calma Barberousse. Ils parvinrent à  un accord : Judith devenait la servante attitrée de Barberousse, et Guillaume pouvait repartir sain et sauf. Guillaume voulait refuser, mais Barberousse était fort et Judith le savait.
Elle accepta.
Les mois défilèrent, mais les sentiments entre les deux amants restaient les mêmes, malgré le fait qu’ils ne se voyaient plus. Guillaume l’avait pourtant approché de nombreuses fois en s’introduisant dans la demeure de Frédéric 1er dit Barberousse sans se faire remarquer, mais c’était un jeu plutôt dangereux.
Le rang de Judith avait effectivement changé : Elle ne s’occupait plus du tout des mêmes taches, et était devenue une sorte d’esclave de Barberousse. Elle exécutait le moindre de ses ordres, et il l’avait même plusieurs fois obligé à  s’offrir à  lui physiquement. Et il s’était également mit à  la battre.
Un jour qu’elle avait simplement renversé la bouteille d’eau de vie qu’il lui avait demandé, il lui avait fracassé la nuque sur le rebord de sa table de chevet et elle en était morte sur le coup. Il était resté de longues heures dans sa chambre à  la contempler. D’un certain coté, il l’avait aimé.
Son corps fut enterré sans cérémonies dans son propre jardin.
Guillaume n’eut vent de cette affaire que très tard. La rumeur parvint un jour à  ses oreilles, propagée par les autres valets de Barberousse, et des idées de vengeances jaillirent en lui. Il se mit en tête de monter une opération de représailles et la mit en route le plus tôt possible. Deux jours plus tard, il se rendait chez lui.
Il le trouva dans son bureau, en pleine conversation avec Kevin Jolios. Un Kevin Jolios jeune, et pas encore rentré dans les ordres d’Ydja. Guillaume ne connaissait pas Kevin Jolios, et ne s’intéressait que de très loin à  la religion, mais il saisit rapidement les tenants et les aboutissants de la conversation qu’il parvint à  entendre.
Les deux hommes parlaient de domination. Les deux hommes parlaient de suprématie. Les deux hommes parlaient de l’avènement d’un faux Dieu, un faux Ydja, un pantin qu’ils manipuleraient dans l’ombre et à  qui le peuple de la Cité Atlante vouerait un culte sans bornes. Les deux hommes parlaient de conquête, de pouvoir, de règne sans fin à  travers les cycles des vies.
Guillaume avait toujours eu pour optique sa propre personne. Amoureux, il avait élargit ce champ personnel à  Judith, désirant tout autant la protéger que se protéger lui-même. Ce n’était pas un héros, ni un rédempteur bravant le destin pour sauver la veuve et l’orphelin. C’était simplement Guillaume Spelvis, citoyen, a qui on avait retiré son amour et qui bouillait de se venger. Alors si, en plus, il pouvait éviter une mésaventure à  la cité…
Sans plus attendre de détails, il entra dans le bureau l’arme au poing.

[center]*
* *[/center]

La barbe rousse serra son emprise sur la gorge de Viper Dragoon. Mais celui-ci était plus fort que ne l’avait prévu son adversaire. La puissance de Barberousse était conséquente, mais celle du Trauménien l’était bien plus. Mais Frédéric 1er dit Barberousse l’ignorait, et ceux-ci savaient pertinemment que leur avantage résidait dans la surprise.
Seul Pythagore restait en retrait. Il pensait. Il songeait. Il réfléchissait. Son... …homologue lui avait parlé. Son esprit, peut-être, ou bien était-ce réellement une divinité qui avait eu une conversation avec lui. Il ne savait pas. Mais ce à  quoi il cogitait concernait autant Ydja (ou ce qui lui avait semblé être Ydja) que ce qu’il se passait avec ses compagnons.
Si tu crois que je suis Ydja, alors je le serais. Si tu crois que je suis un délire de ton imagination, alors je le serais.
Il se repassa mentalement la conversation. Il sentait que la solution se trouvait dans les quelques mots échangés avec le Dieu. Ou avec son subconscient. Devant lui, Dalisc combattait les corbeaux à  coups de poings et de pieds. Les cadavres des volatiles s’étalaient à  ses pieds, mais il en venait toujours plus. Et Dalisc commençait à  fatiguer.
Si tu crois que le temps passe lentement, il s’allongera. Si tu crois qu’il passe vite, il accélérera.
La barbe de leur ennemi envoya DarKenshin au tapis. Elle grogna de douleur, puis envoya un DragSlave vers Barberousse, qui fut arrêté par une myriade de corbeaux qui perdirent la vie. D’autres semblèrent apparaître de nulle part.
Si tu crois en ta survie, tu survivras. Si tu crois mourir, tu mourras.
Pythagore entrevit une idée. Une seconde, une seule seconde, il comprit comment faisait Barberousse pour contrôler sa barbe et ses oiseaux, comment retourner la situation à  leur avantage, comment être sûr que Séphy-Roshou n’était pas passé par cet au-delà . Il frôla même la méthode que DragonNoir cherchait à  mettre au point. L’espace d’un instant, Pythagore détenait tout. Mais cette seconde de gloire s’envola.
Si tu penses être l’élu, alors…
« …alors je le serais. » termina Pythagore à  voix haute, sans même s’en apercevoir. Il leva une main devant ses yeux. Il rayonnait. Pas seulement de puissance, mais il rayonnait comme un véritable divinité telle qu’on les représente : illuminé par la lumière sacrée.
Il venait de saisir le concept.

[center]*
* * [/center]

« L’imagination… » répéta une nouvelle fois DarKenshin. Pythagore approuva vivement. Elle songea qu’après tout, pourquoi pas ? Si on prenait en compte le fait qu’ils s’étaient suicidés pour venir dans un monde où des âmes s’entretuent pour obtenir le pouvoir, la maxime ‘je pense donc je suis’ ne passe pas pour saugrenue.
« Et c’est Ydja qui t’a appris ça ? demanda-t-elle.
-Ça fait trois fois que tu me poses la question, répondit Pythagore un rien lassé. C’est l’entité dans la Sphère qui m’a donné cette indication, mais je ne sais pas exactement ce qu’il y avait dedans. Je suppose que c’est ce que ce peuple appelle Ydja, mais en réalité il s’agit simplement de ce qu’on pense qu’il y a dedans. »
DarKenshin regarda Pythagore avec des yeux où l’incompréhension se faisait grandissante. Il soupira.
« Si tu crois en un Dieu unique, alors c’était Lui dans cette Sphère. Si tu penses qu’il s’agit d’Allah, alors c’est Lui qui y était. Si tu estimes qu’il s’agit juste d’une âme égarée, alors il ne sera qu’une âme égarée. » Il fit une pause. « Ça pourrait même être Superman si tu y crois suffisamment !
-Encore l’imagination ?
-Exactement. »
DarKenshin se retourna et regarda la salle complètement dévastée. L’ancienne annexe de torture de Barberousse était complètement éventrée et un pan du plafond s’était écroulé. Sur le sol, des dizaines de corbeaux morts faisaient un tapis de plumes noires tachées de sang : Celui des corbeaux, celui de Guillaume, mais aussi de Barberousse.
« L’imagination… » songea DarKenshin en revoyant les images du combat qui venait de se dérouler. Elle revoyait Pythagore auréolé d’une lumière immaculé qui mettait à  mal sans effort Barberousse, qui arrachait sa barbe, qui faisait s’évaporer les corbeau, et qui les sauvait tous d’une mort ici, ce qui aurait signifié un cycle de réincarnations sans fin.
Elle regarda à  ses pieds le corps sans vie de Barberousse. Sa barbe avait reprit une taille normale, et son visage tellement congestionné par la haine était redevenu un faciès calme et presque amical. D’ici peu, le cadavre serait enterré et un autre Barberousse ressurgirait ailleurs dans la cité.
« L’imagination, hein… »

[center]*
* *[/center]

Judith embrassa Guillaume sur le front et sortit de la chambre à  tâtons. Ses blessures n’étaient pas graves à  proprement parler, mais elles étaient nombreuses. Elle les avait nettoyées avec soin et avait pansé ses plaies. Et peu à  peu, des bribes de souvenirs lui étaient revenus. Ils s’étaient connus avant. Ils avaient été amants. Ils s’étaient aimés.
Elle avait pleuré en le soignant, et il avait eu un court accès de conscience où il l’avait consolé en l’étreignant faiblement.
« Je ne te reproche rien, lui avait-il dit. Tu n’es pas responsable. Pour se venger de moi, il a fait en sorte de t’adopter alors que tu n’étais qu’une enfant. Je n’ai à  en vouloir quâ€™à  moi-même : Je ne t’ai pas retrouvé assez vite pour te préserver. »
Il s’était endormi ensuite, une larme coulant lentement sur sa joue. Une larme de regret, mais aussi de joie d’être enfin dans les bras de celle qu’il avait tant chéri dans une vie passée, et qu’il retrouvait enfin.

« Est-ce qu’il va bien ? »
Judith se retourna vers Viper Dragoon qui avait attendu dans le couloir. Elle laissa sa main glisser sur le bois de la porte, les yeux dans le vide, et répondit :
« Il s’en sortira. Mais son corps est lacéré de part en part, et il a perdu du sang. Beaucoup. Il lui faut un maximum de repos.
-Bien sûr. »
Viper Dragoon regarda la porte avec tristesse. Il s’en voulait de ne pas être arrivé plus tôt et éviter toutes ses souffrance à  celui qui les avait accueilli les bras ouverts lors de leur arrivée dans ce monde. Il soupira lentement, perdu dans ses pensées. Puis il sentit qu’on le prenait par le bras : Judith l’entraînait vers le salon.
« Ne vous en faites pas, je prendrais soin de lui, maintenant qu’il est avec moi ! »
Elle le gratifia d’un sourire joyeux, et Viper Dragoon lui en fit un en retour. Il avait espéré pouvoir le voir de nouveau en bonne santé d’ici à  ce qu’ils repartent pour la vraie Terre, mais il était rassuré de le savoir entre les mains d’une fille telle que Judith.
Barberousse était peut-être un monstre, mais il l’avait bien éduquée. Et on ne change pas un cÅ“ur comme celui de Judith.

[center]*
* *[/center]

Dalisc entra dans le salon et regarda ses trois compagnons, avant de secouer la tête négativement. Viper Dragoon frappa du poing sur la table, mécontent.
« Tout ça pour rien, dit DarKenshin.
-Tu es sûr d’avoir tout épluché ? »
Dalisc s’assit à  table à  coté de Pythagore, en face de DarKenshin et Viper Dragoon. Judith trônait en bout de table, mais elle écoutait aussi attentivement la réponse :
« Ce type avait une mine de renseignements assez conséquente. Des dossiers par milliers, des rapports, des fiches. Il y a une salle annexe avec ses archives, elle est immense. Mais, comble de bonheur, tout est classé, donc la recherche ne m’a pas prit tant de temps que ça, au final.
-Et il n’y avait rien sur Séphy-Roshou ?
-Rien du tout, répondit-il catégoriquement. J’ai examiné tous les relevés dans les deux mois qui ont suivit sa mort, et il n’y a pas d’apparitions suspectes dans l’Atlantide, ni de désastres marquant. Connaissant Séphy-Roshou, elle est tout autant capable d’emprunter un faux nom pour se montrer discrète et de réduire tout un quartier en miette dans la même matinée, alors… »
Les Trauméniens rirent de bon cÅ“ur, tout en sachant pertinemment que Dalisc disait la vérité. DarKenshin se leva et engloba du regard ses trois compagnons.
« Et bien nous n’avons plus rien à  faire ici. Nous allons repartir et informer les autres que cette piste-là  était elle aussi un cul-de-sac.
-Au moins, nous n’aurons pas été ennuyés par Mistrophera ! ajouta gaiement Viper Dragoon. Il ne nous aura pas mis de bâtons dans les roues, ha ha ! »
Il posa un pied sur la table, mit ses poings sur ses hanches et prit la pose. Pythagore donna un léger coup de pied dans la table et Viper Dragoon s’écroula dans un cri de surprise, puis de douleur. Tandis qu’ils recommencèrent à  se chamailler, DarKenshin rejoignit Judith.
« Est-ce que ça va aller pour vous deux ?
-Ne vous en faites pas, je suis largement capable de m’en sortir toute seule maintenant. Nous avons des serviteurs et tous seront heureux de savoir que leur maître est partit en rendez-vous ailleurs durant quelque temps. »
Elle sourit.
« Nous allons mettre son cadavre avec les autres dans la crypte et attendre qu’il revienne à  la vie, tout simplement.
-Ne va-t-il pas chercher à  se venger une fois de nouveau dans la Cité ? »
Judith prit une expression inquiète et haussa les épaules. Elle ne pouvait rien y faire, de toute façon, et elle ne désirait pas passer sa vie à  traquer son ancien père d’adoption.
« Il ne saura pas ce qu’il s’est passé, intervint Dalisc. J’ai parcouru ses journaux, et il est noté à  chaque début de vie qu’il lui faut relire ses anciens carnets pour se rappeler. Il ne saura pas ce que Guillaume lui a fait, ni que nous sommes venus l’arrêter, sauf s’il lit ses journaux.
-Alors nous brûlerons ce passé et nous recréerons un nouveau Barberousse. Nous le retrouverons et nous en ferons quelqu’un de bien.
-Quelqu’un à  votre image en somme… »
Les regards convergèrent sur Guillaume qui se tenait, pantelant, sur le pas de la porte. Il était toujours mal en point mais il avait reprit des couleurs. Judith se précipita pour le soutenir et il passa un bras autour de ses épaules.
« Je voulais vous voir une dernière fois avant que vous ne repartiez. »
Viper Dragoon lâcha Pythagore et alla serrer la main de Guillaume. Celui-ci sourit faiblement, mais sincèrement.
« Je savais bien que vous n’étiez pas comme les autres. Vous n’êtes peut-être pas des Dieu, mais vous en avez le pouvoir.
-Le pouvoir de l’imagination. » dit Pythagore en regardant DarKenshin, qui hocha la tête. Même s’ils n’avaient pas réussit à  trouver Séphy-Roshou, ils avaient tout de même une information à  partager avec les autres.
« Tous à  vos pilules ! hurla Viper Dragoon en levant la sienne à  bout de bras.
-J’espère que vous retrouverez votre amie ! cria Judith en agitant la main.
-Et vous, soyez heureux ! leur répondit DarKenshin. Vous êtes prêts ?
-Oui !! » répondirent Pythagore et Viper Dragoon. Dalisc, lui, répondit non, mais il prit la pilule tout de même.
Et, dans un éclat de lumière, ils disparurent.

[center]*
* *[/center]

Le couvercle s’ouvrit sur un monde éblouissant, et DarKenshin plissa les yeux pour tenter de voir quelque chose. Puis deux mains vinrent l’attraper sous les aisselles et la tirer au dehors, au clair, au chaud. Elle inspira longuement, libérant ses poumons encore froids. Les images qu’elle entrevoyait au travers de ses yeux pas encore habitués à  la luminosité ambiante n’étaient que silhouettes et représentations floues de la réalité.
Elle ne reconnut donc pas Gorgon_Roo qui l’aidait à  marcher jusquâ€™à  la porte. Il l’adossa à  un meuble, la cala le plus confortablement qu’il pu, et alla s’occuper d’un autre congélateur qui remuait faiblement. DarKenshin émit un gémissement.
« Ne parle pas, pas tout de suite, lui dit Gorgon_Roo en soulevant Pythagore de la même façon qu’elle. Tes fonctions vitales reviennent à  un état normal, mais il leur faut quelques minutes. Sois… …gnnh… …patiente. »
DarKenshin ferma les yeux. Elle entendit distinctement les pieds de Pythagore traîner sur la moquette de l’appartement de DragonNoir, comme les siens l’avaient faits. Gorgon_Roo posa Pythagore près d’elle et celui-ci grogna. Elle entendit un autre couvercle s’ouvrir et Viper Dragoon expira bruyamment.
« Ben merde ! éructa-t-il avant de tousser. Ça c’est fort !
-Ne parle pas, lui intima Gorgon_Roo en l’aidant à  sortir.
-Pourquoi es-tu seul ici ? » demanda DarKenshin en ouvrant les yeux un peu plus à  chaque secondes. Elle avait remarqué l’absence de tous les autres Trauméniens, contraste saisissant par rapport à  l’arrivée des autres groupes qui étaient accueillis avec hurlements, chants et pleins d’autres bruits divers.
« Il se passe quelque chose. » répondit évasivement Gorgon_Roo en asseyant Viper Dragoon près des deux autres. Il se releva et regarda le dernier congélateur qui restait inerte. Il se tourna vers DarKenshin.
« Ne me dîtes pas que vous l’avez perdu là -bas ? Pas encore un, non…
-Non. »
Dalisc émergea lentement de l’appareil et tomba en avant, rattrapé de justesse par DarKenshin et Gorgon_Roo. Les quatre Trauméniens étaient revenus. Un coup sourd retentit de l’autre coté du mur, accompagné d’un hurlement étouffé. Les Trauméniens regardèrent dans la direction du bruit, et Gorgon_Roo fit une grimace. Il attrapa la main de DarKenshin et la serra dans les sienne.
« Maintenant, il faut me faire confiance. Suivez-moi sans discuter.
-Qu’est-ce qui se passe ici ? demanda DarKenshin.
-Ça serait trop long à  vous expliquer. »
La voix de DragonNoir, plus puissante et plus claire que d’ordinaire, résonna à  travers le mur : « Ne m’oblige pas à  m’en servir à  nouveau, Satana ! ». Des hués de désapprobations lui répondirent, et les Trauméniens fraîchement ressuscités entendirent les échos d’un nouvel affrontement. Gorgon_Roo serra la main de DarKenshin un peu plus fort.
« Je t’en supplie, viens avec moi. Je vous explique… non ! »
Gorgon_Roo tenta d’attraper la jambe de Viper Dragoon qui s’était levé et allait vers la porte. Il avait récupéré rapidement et rétorqua sèchement :
« Il est hors de question que je laisse qui que ce soit faire du mal à  mes compagnons de Traumen et que je reste à  rien faire, Gorgon.
-Ce n’est pas ça ! répondit l’intéressé en se relevant. Il s’agit de… »
Viper Dragoon ouvrit la porte. Il aperçut les deux troupes face à  face. Il aperçut DragonNoir dont l’accoutrement était à  moitié virtuel. Il aperçut Satana qui brillait de rage. Il aperçut TheMaker inconscient adossé au mur. Il aperçut les dégâts sur les meubles dans le couloir. Il aperçut la haine entre les membres de Traumen.
Et il entendit Gorgon_Roo lui dire :
« Il y a une guerre civile qui se joue ici… »
Et, dans le silence tout relatif qui précède les gigantesques et meurtrières batailles, trois coups se répétèrent à  la porte d’entrée.

[center]*
* *[/center]

Serge Thourn reprenait son souffle après avoir grimpé les étages et attendit qu’on lui ouvre, accompagné de Sylvain Detroit.





FIN DE L’ÉPISODE 7 : NOYADE EN EAUX TROUBLES.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 26 Sep 2007, 19:00 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
TRAUMENSCHAR








ÉPISODE 8 :
MYTHOLOGIE ROMAINE
ET GRECQUE.



1. Séparations.

« N’empêche, des volcans, il y en a aussi en France.
-Ferme-la, Night-Beast. » dit une voix sévère derrière lui.
Night-Beast croisa les bras et regarda par le hublot : L’aile blanche de l’avion survolait une épaisse couche de nuages, mais il devinait qu’en dessous, la France et ses habitants défilaient. À ses cotés, Wee-Ree-Cat se cramponnait aux accoudoirs et son teint rappelait étrangement la couleur de l’avion.
« Malade ? demanda Nigh-Beast.
-Ugh… » La réponse de Wee-Ree-Cat était sans équivoque. Ses doigts se mirent à  tapoter nerveusement les repose-bras, signe qu’il préférait se taire de peur que toute ouverture buccale provoque une remontée de petit déjeuner. Il gémit encore faiblement une ou deux fois, puis ferma les yeux.
« C’est toi qui le saoule, Night-Beast, dit à  nouveau la voix d’homme derrière lui.
-Oh, Aran, si tu pouvais être un peu plus chou, répondit Night-Beast. Parle-moi un peu plus comme si j’étais ton fils et non un étranger !
-Je préfère encore égorger un lapin plutôt que te parler aimablement !
-Déjà , si ça t’arrivait de parler aimablement tout court !
-Hé, vous deux, ça suffit ! »
Aran et Night-Beast se turent, et Nina se recala dans son siège. Durant quelques minutes, les seuls bruits du groupe furent des gargouillements de l’estomac de Wee-Ree-Cat, qui semblait hésiter entre monter, descendre ou exploser littéralement.
« Combien de temps jusquâ€™à  la Sicile ?
-Un peu plus de deux heures, répondit Aran. C’est un direct.
-C’est super rapide, deux heures !
-Gnnh…
-…oui, mais pour certain, c’est encore trop long. »
Aran Valentine prit la main de Nina et se pencha vers elle. Depuis leur départ précipité de chez DragonNoir, ils n’avaient pas eu le temps de parler de tout ce qui allait leur arriver, ni de tout ce qu’il s’était passé depuis le retour des Trauméniens défunts et leur départ.
« Qu’y a-t-il ?
-C’est nous, dit Aran. Le type qui nous suivait dans Paris, nous n’avons pas réussis à  la semer. C’est lui qui a débarqué avec le commissaire.
-Tu crois ? répondit Nina en se rongeant un ongle. Donc ce qui s’est passé dans l’appartement de DragonNoir, ça serait de notre faute ? »
Aran ne répondit pas. En réalité, il se fichait de ce qu’il s’était passé chez DragonNoir, et encore plus de ce qu’il avait pu arriver à  DragonNoir lui-même. Mais ce qui s’était passé avant l’arrivée du policier et ce qu’il avait peut-être vu, ça c’était important.
« Moi j’espère juste que tu ne lui as pas cassé la mâchoire, ajouta Night-Beast d’un faux air navré en se retournant vers eux.
-Qui t’a dit d’écouter, toi ? rétorqua Aran.
-Pas de ma faute si vous parlez trop fort, répondit l’adolescent en lui faisant un clin d’œil. Tu penses que c’est le même commissaire que Draco avait reçu chez lui ? Celui qui était à  la recherche de Magnum ? »
La question était suffisamment pertinente pour que le silence qui la suivit soit empli de réflexions diverses : Night-Beast se demandait vraiment si les deux policiers étaient une seule et même personne, Nina se demandait se qu’il s’était passé une fois leur départ de chez DragonNoir, Aran se demandait si cette nouvelle expédition n’était pas une hérésie, et Wee-Ree-Cat se demandait quel était le meilleur endroit pour vomir entre le sac prévu à  cet effet ou les genoux de son voisin.
Il avait une préférence pour les genoux.
« Dans tout les cas, reprit finalement Aran, je pense que nous avons bien fait de nous échapper. Si nous étions…
-Nous avons fuis, comme des lâches, ouais !
-Night-Beast, tu sais pertinemment que c’était la meilleure chose à  faire. Imagine que tous les autres Trauméniens aient été mis en taule, qui pourrait aller sauver Séphy-Roshou, ainsi que les autres ?
-Et qui va aller les libérer, si nous y restons ? »
Nouveau silence, cette fois-ci lourd de reproches. Nina caressa la main de son compagnon, qui regardait par le hublot. Il se remémorait leurs derniers moments à  Paris…

[center]*
* *[/center]

« Tu ne fais pas le poids, Satana ! » avait menacé DragonNoir en levant la main. En face de lui, Lord Satana lui avait renvoyé un sourire goguenard. Le sourire d’un homme qui savait qu’il avait la raison à  ses cotés, et qui n’en démordra pas. Derrière Lord Satana se trouvaient Fab, TheMaker, RazaëlAurélie et Final Séraphin. En face, tout les autres Trauméniens s’étaient attroupés derrière le trio de tête, à  savoir DragonNoir, Q-Po et Arkh.
« Arrête de vouloir tout gouverner à  toi seul.
-Mais quand ai-je dit que je prenais la charge des opérations ? rétorqua DragonNoir. Je n’ai jamais eu l’intention de…
-Alors pourquoi t’es-tu entraîné dans le secret afin d’obtenir ces pouvoirs ? »
DragonNoir avait serré les dents et avait reprit sa forme normale. Personne n’avait d’ailleurs remarqué sa métamorphose, mais pour un Å“il acéré, de subtiles différences auraient été repérables : Le DragonNoir Trauménien était plus féminin que jamais, et la ligne de démarcation entre le mâle et la femelle était inexistante chez le personnage virtuel.
Mais aucune des personnes présentes n’avait vu la différence. Ils l’avaient remarqué seulement lorsque DragonNoir était redevenu ‘humain’ et que son allure avait reprit une nette tendance masculine. Seul Arkh et Q-Po, qui l’avait déjà  vu sous les deux formes, avaient distingué le vrai de l’imaginaire.
En quelques jours seulement, DragonNoir avait maîtrisé une partie de ses capacités imaginaires avec brio, et ne comptait pas s’arrêter là .
« Vous voyez, avait jubilé Lord Satana en montrant du doigt son ancien collègue. Il s’entraîne en secret pour ensuite pouvoir nous distiller les informations qu’il veut, et simplement celles qu’il veut !
-C’est complètement faux, avait commencé DragonNoir.
-Ce qui est faux, c’est ce que tu nous fait croire depuis qu’Hitomi est morte ! » avait crié TheMaker. Tous s’étaient tournés vers lui. Il avait eu les larmes aux yeux.
« Tu t’es servi de ses connaissances pour tous nous asservir, nous dominer ! Mais Hitomi m’a bien dit qu’il nous faut nous unir et non garder les informations importantes pour certains et laisser les autres dans l’ignorance !
-Alors pourquoi ces groupes ? avait calmement demandé Q-Po. Est-ce ce n’est pas vous qui scindez les Trauméniens en inventant ce genre de querelles ? »
TheMaker n’avait alors rien trouvé à  redire, et Lord Satana, voyant la situation tourner à  son désavantage, avait profité de l’apathie générale pour changer de tactique. Il avait reculé d’un pas et s’était concentré. Puis, avec une rapidité défiant les capacités humaines, il avait envoyé une lame d’énergie vers DragonNoir. La force avait été telle que l’attaque en était devenue invisible.
Immédiatement, DragonNoir s’était changé et il avait réussi tant bien que mal à  renvoyer la lame d’énergie. Ses bras étaient auréolés d’une lumière diffuse, signe qu’il avait utilisé de nombreuses ressources en repoussant l’attaque. Celle-ci alla se ficher dans le sol, réduisant en miettes deux pieds d’armoires qui chutèrent avec fracas. Un hurlement étouffé se fit entendre des décombres.
« Oh merde… » avait dit LeKanar, derrière DragonNoir. Au sol gisait TheMaker, qui avait reçu une partie de l’armoire sur le pied. Pas de sang, mais son genou faisait un angle qui méprisait toute notion d’anatomie. DragonNoir, le poing levé, n’avait pas vu le corps inconscient de TheMaker et avait lancé avec puissance :
« Ne m’oblige pas à  m’en servir à  nouveau, Satana !
-Non mais vous l’entendez ? »
Le petit groupe de Trauméniens avait commencé à  huer DragonNoir. RazaëlAurélie, autrefois une de ses amies fidèles, avait même osé lui lancer un dossier posé sur une chaise. Il l’avait éviter sans même bouger : le dossier s’était arrêté en plein vol et était tombé au sol. Angie avait alors montré Lord Satana et l’avait accusé :
« C’est lui qui est la cause de tout ça ! DragonNoir n’a fait que se défendre ! Regardez-le, lui aussi a des pouvoirs ! »
Lord Satana s’était effectivement mis à  luire légèrement, tout comme l’apparence virtuelle de DragonNoir qui brillait légèrement. La tension avait été à  son comble, à  ce moment là , et Aran Valentine avait même cru qu’ils allaient vraiment en venir aux mains. Et il était sûr que si cela s’était produit, DragonNoir aurait gagné, au péril de vies humaines.
C’était à  ce moment précis que Viper Dragoon, tout juste revenu de l’Atlantide, avait ouvert la porte et les avait dévisagé, complètement hébété. Derrière lui, Gorgon_Roo avait baissé la tête et lui avait dit :
« Il y a une guerre civile qui se joue ici… »
Viper Dragoon avait regardé DragonNoir, qui avait reprit son apparence humaine. Lord Satana avait également cessé de brillé et avait soupirer. Et, alors que DragonNoir s’apprêtait à  expliquer à  Viper Dragoon le pourquoi du comment…

[center]*
* *[/center]

« Tu crois que si le flic n’avait pas frappé à  la porte à  ce moment là , tout aurait pu s’arranger rien qu’en discutant ? »
DragonNoir tourna la tête vers Q-Po. Son ami était toujours aussi sérieux lorsqu’il le fallait, et savait exactement quand sortir un trait d’humour et quand il valait mieux se taire. DragonNoir hocha la tête silencieusement, puis ajouta finalement :
« Peut-être que Satana serait parti en claquant la porte, peut-être que certains auraient suivit, mais ça ne se serait pas déroulé comme ça. Nous ne serions pas SDF actuellement, en tout cas. Et il ne se serait pas passé… …ce que tu sais. »
Q-Po acquiesça à  son tour, puis se tourna vers le groupe de Trauméniens qui marchaient dans les ténèbres des catacombes parisiennes. Avec le peu de lumière généré par les maigres lampes torches, ils avançaient en longeant les murs tatoués de tags en tout genre. En ajoutant à  ça une odeur de renfermé et les rats, il faut avouer que l’état d’esprit des Trauméniens qui fuyaient n’était pas au top.
« Et où est-ce qu’on va aller maintenant ? râla une voix indistincte à  l’arrière.
-Nous garderons profil bas quelques temps en attendant de savoir ce qu’il va ressortir de ces évènements chez DragonNoir, répondit Q-Po. Si tout fonctionne comme convenu, alors nous pourrons réintégrer l’appartement.
-Et si rien de fonctionne comme prévu ? » redemanda la voix.
Q-Po regarda DragonNoir, qui était plongé dans ses pensées. Il se demandait comment ils avaient pu en arriver là , qu’est-ce qui s’était passé pour qu’ils se retrouvent à  déambuler dans les tréfonds de la capitale, quels avait été l’erreur commise pour qu’ils soient condamnés à  cette fuite. Et il revoyait le plafond tomber dans un sinistre mouvement.
Il entendit vaguement Q-Po répondre :
« Alors nous aviserons, comme nous l’avons toujours fait. »
La voix qui avait râlée et semée le doute à  l’arrière de la troupe ne répondit pas, et l’homme cessa de marcher. Personne n’y fit vraiment attention, dans les ténèbres environnantes, et aucun des Trauméniens ne le vit disparaître dans les ombres. Personne ne vit le sourire sur le visage de FireFly, non plus.
Et, à  l’avant, DragonNoir songeait à  ce qu’il venait de se passer.

[center]*
* *[/center]

Tous les Trauméniens étaient restés interdits. Les trois coups avaient semblés résonner dans le silence comme le bourdon de la cathédrale Notre-Dame. Tous avaient regardés la porte comme si elle devenue une sorte de monstre prêt à  attaquer. Derrière elle, Serge Thourn avait à  nouveau frappé, un peu plus fort.
« Commissaire Thourn ! Ouvrez s’il vous plaît ! »
DragonNoir avait regardé le spectacle de l’appartement à  moitié dévasté : Des meubles en miettes, un blessé, et énormément d’explications à  fournir. Lord Satana, en face de lui, avait eu un sourire discret en s’avançant.
« Et maintenant, chef, qu’allons-nous faire ? »
DarKenshin, Dalisc et Pythagore étaient apparus derrière Viper Dragoon et Gorgon_Roo. Les quatre ressuscités avaient contemplé avec affliction le spectacle désolant de la pièce ravagée, et de ses occupants aveuglés par la haine.
Les coups à  la porte d’entrée s’étaient faits plus insistants. Ils avaient ensuite entendu distinctement Thourn demander à  une autre personne s’il était sûr que les deux zigotos étaient entrés dans cet appartement.
« Sûr et certain, avait répondu Détroit dans l’escalier devant chez DragonNoir. Je les ai vu appuyer à  la sonnette correspondant à  cet appartement, j’en suis persuadé !
-Y a intérêt, sinon on est dans la merde. » avait répondu le commissaire. Et immédiatement après, un grand fracas avait retenti contre la porte. Serge Thourn s’était lancé dans une entreprise de démolition sans attendre.
« Il faut fuir, avait déclaré Arkh.
-Fuir ? avait répété DragonNoir. Mais tu n’y penses pas ! C’est mon appartement, celui de mes parents ! Que va-t-il se passer si… »
Nouveau coup sourd contre la porte.
« DragonNoir, il faut qu’on dégage. Nous avions déjà  prévu cette possibilité, tu te rappelles ? Je crains qu’on doive se protéger également de la police, en plus de Mistrophera.
-Mais nous ne sommes pas prêts ! Les congélateurs sont encore ici, et… et…
-Nous viendrons les chercher après. » avait répondu Q-Po calmement.
Lord Satana, en face d’eux, s’était tourné vers sa bande, et avait déclaré :
« Ceux qui ne veulent plus de DragonNoir comme leader me suivent moi. Je ne serais pas un commandant, mais un camarade. Je ne vous dirigerais pas, je serais simplement à  vos cotés, comme vous. »
La porte avait émit un craquement inquiétant.
« Et surtout, avait-il ajouté en se tournant vers les autres Trauméniens, je ne vous cacherai jamais rien. »
Personne n’avait bougé. Fab tenait TheMaker dans ses bras, et ce dernier haletait bruyamment. Sa jambe enflée tendait son jean, et DragonNoir l’avait montré du doigt, commençant à  s’énerver :
« Que vous faut-il de plus ? D’autres blessés ? Des morts ? »
Mais ses injonctions avaient été sans réponses. La porte avait à  nouveau craqué sur ses gonds, menaçant de lâcher prise face aux assauts répétés de Thourn. Lord Satana avait regardé vers la porte et avait tendu le bras. Aran Valentine s’était précipité sur lui en criant :
« Non, Satana ! »
Aran avait été rapide, mais pas assez : la porte avait cédé, et les Trauméniens avaient vu Serge Thourn basculer en avant et tomber sur elle dans un grognement de mécontentement et de douleur. Et ils avaient juste eu le temps de voir le visage de Sylvain Détroit passer par l’embrasure de la porte avant que le plafond ne s’effondre littéralement sur les deux policiers. Lord Satana avait ensuite baissé le bras.
« Tu les as… » avait commencé Aran. Q-Po s’était élancé vers Lord Satana, mais DragonNoir l’avait arrêté d’un geste de la main.
« Il nous faut déguerpir, avait-il annoncé d’une voix morte. Nous ne pouvons rester plus longtemps ici. Mettons en route le plan d’évacuation.
-Les catacombes ? avait demandé Arkh.
-Laissons les congélateurs ici, on ne peut pas les prendre. Nous reviendrons les chercher plus tard. » Il avait jeté un Å“il vers l’entrée de son appartement, ce qui allait devenir son ex-appartement, puis avait ajouté d’une voix plate, éteinte : « Si nous pourrons encore le faire.
-Et les autres ? » avait lancé Q-Po, désignant Lord Satana et sa bande. Ceux-ci s’étaient réunis près de l’ordinateur de DragonNoir, devant la fenêtre, autour de TheMaker qui commençait à  reprendre conscience, à  entendre ses gémissements de douleur. Le regard de DragonNoir s’était à  nouveau attardé longuement sur la jambe distordue et gonflée de son ancien camarade.
« Laissons-les faire ce qu’ils veulent. » avait-il déclaré. DragonNoir avait l’impression que son esprit s’était détaché de lui, et que son corps voguait en mode automatique. Il semblait être maître de lui-même, mais en réalité il ne cessait de ressasser des images du plafond s’écroulant sur les deux policiers.
Encore et encore.
« On ne va tout de même pas les laisser ici ? » avait dit Aran, outré. DragonNoir, toujours en mode automatique, s’était tourné vers lui et avait hoché la tête.
« Si. Et vous, vous allez partir comme prévu vers la Sicile. L’argent est dans ma chambre, sous le matelas. Je pense qu’il y aura assez pour ce que vous allez y faire.
-Pas besoin de prévoir de budget bouffe, ouais ! » avait lâché Night-Beast en s’approchant. Aran avait fait signe à  Nina et Wee-Ree-Cat d’approcher, et les deux Trauméniens s’étaient exécutés. Le Ionisateur Fou s’était ensuite joint à  eux.
« Tiens, DragonNoir, le portefeuille de Mr.Magnum. Tout ce qui est récupérable est embarqué dans les sacs à  dos, nous sommes prêts à  partir. »
DragonNoir avait donné l’argent du voyage, pour les billets d’avions et pour se rendre au volcan, puis il leur avait souhaité bonne chance, ainsi que Q-Po. Arkh, en retrait, était en train de coordonner le départ. Aran Valentine avait mené le groupe vers les décombre de la sortie, puis s’était arrêté et était retourné vers DragonNoir.
Une fois devant lui, il l’avait dévisagé quelques secondes, puis il lui avait envoyé son poing dans la figure. Night-Beast, derrière lui, avait étouffé un « Yeah ! » et avait reçu une gifle de Nina. Aran avait soupiré :
« C’est au cas où je ne revienne pas de là -bas, au moins je n’aurais pas de regrets. »
Puis ils étaient sortit de l’appartement dévasté en marchant sur les gravas. DragonNoir s’était relevé en se massant la joue, puis avait ordonné l’évacuation des lieux. Il était resté à  regarder les Trauméniens passer sur le plafond écroulé, marchant sur deux hommes très certainement décédés, et, non pas pour la première fois depuis le début de cette aventure, il s’était demandé si tout ceci valait réellement le coup.

[center]*
* *[/center]

Le soleil écrasant du sud de l’Italie leur tapait sur le crâne. La végétation, de plus en plus rare, avait complètement disparue depuis une bonne heure à  présent, tandis qu’ils continuaient à  gravir l’immense volcan Etna. L’ascension ne semblait ne jamais en finir, et ils suaient à  grosses gouttes malgré le peu de vêtements qu’ils portaient.
« Rien qu’un repas, papa !
-Ne m’appelle pas comme ça, nom d’un lapin !
-Papa ! Papa ! Papa ! Papa ! PAPA !!
-Je vais me le faire… »
Mais Aran Valentine était trop épuisé pour s’élancer sur Night-Beast, qui sautillait comme un cabri en dépits de la chaleur. Il se contenta de ramasser une caillasse et de lui envoyer dessus. Night-Beast le reçu sur l’épaule, et il grogna.
« Aïe-euh !
-C’est pas un peu fini, vous deux ? claironna Nina en s’interposant. Des vrais gamins !
-C’est pas moi c’est lui qu’a commencé !! » chantonna Night-Beast. Il se rapprocha de Wee-Ree-Cat, qui lui grimpait sans mot dire et ne semblait pas peiner autant que d’autres. Il fixait le sommet du volcan qui se rapprochait.
« Et toi, mon minou, ça va bien ?
-Bien mieux que dans l’avion, c’est clair.
-Difficile de faire pire, en même temps ! rigola Night-Beast.
-Une fois en haut, est-ce qu’on va être obligé de… »
Le silence s’installa entre les quatre compagnons, et ils marchèrent ainsi un moment. Puis Aran Valentine reprit la parole, étrangement moins essoufflé qu’auparavant. Il parla d’une voix calme et bien assurée. La voix d’un meneur.
« Je ne le fais pas parce que DragonNoir m’a dit de le faire, ni parce que j’en ai une envie folle, et encore moins pour doubler Mistrophera au poteau. Je le fais pour une seule et unique personne, une personne qui compte presque autant à  mes yeux que Nina. »
Cette dernière, fut-il encore possible, rougit.
« Je le fait pour Séphy-Roshou. Je le fais parce qu’on a une chance de la sauver de cette façon, et que j’utiliserai la moindre chance qu’il existe pour la faire revenir. Et je sais que je ferais ça pour chacun d’entre vous. »
Ses yeux se posèrent sur Night-Beast, dont le visage souriait bêtement.
« Hmm, sauf pour lui. »
Wee-Ree-Cat, qui marchait devant tout le monde, s’écria alors :
« On est arrivé ! Nous sommes en haut de l’Etna ! Et je vous raconte pas la vue ! »
Les trois autres le rejoignirent en accélérant le pas, et admirèrent l’étendue de l’île qui se trouvait à  leurs pieds. Ils pouvaient voir extrêmement loin, de ce point de vue, et ils restèrent ainsi à  contempler l’horizon de nombreuses minutes. Puis leurs yeux s’abaissèrent presque tous en même temps vers le fond du cratère qui s’ouvrait devant eux.
« Ben merde alors, hoqueta Night-Beast.
-C’est haut, précisa Wee-Ree-Cat d’une voix tremblante. Je crois que j’ai le vertige.
-Un chat qui a le vertige, on aura tout vu ! » s’esclaffa Nina nerveusement. Puis, en revenant au cratère, elle cessa de rire. Aran lui enlaça la taille.
« Au moins, ça fera une mort romantique, non ? »
La tentative d’humour tomba à  plat. Au fond de l’Etna semblait scintiller une ville vue de nuit et de très haut : tout était noir, sombre, mais de multiples étoiles rougeâtres naissaient et mourraient au sein de ces ténèbres. Aran se déplaça sur sa gauche et poussa un grand caillou avec le pied, et avec difficulté. Le rocher bascula dans la vide et disparu. Quelques secondes plus tard, une bouche de feu s’ouvrit en contrebas et avala goulûment la pierre.
Ils entendirent distinctement Wee-Ree-Cat déglutir.
« Bon, et bien il ne nous reste plus quâ€™à  y aller, hein ?
-S… Sans moi, déclara d’une voix tremblante Wee-Ree-Cat. Je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas ! »
Night-Beast se retourna et plissa les yeux vers l’horizon, alors qu’Aran s’approchait de Wee-Ree-Cat pour le rassurer. Ce dernier reculait du bord, s’éloignant à  petit pas de sa destinée. Aran l’empoigna par le bras.
« C’est juste un mauvais moment à  passer ! Je te rappelle que nous avons les pilules de Hilde pour revenir à  la vie, et que…
-Mais nos corps reviennent à  la vie à  l’endroit où ils sont morts, non ? Donc on va se retrouver ressuscités dans le volcan, et on va mourir à  nouveau, sans pilules pour revenir ! »
La remarque fit mouche, et Aran se tourna vers Nina, qui le regardait maintenant avec une appréhension grandissante. Wee-Ree-Cat recula encore d’un pas.
« Sauver Séphy-Roshou, je veux bien, mais pas si c’est pour crever moi-même.
-Sauter ou rester, il va falloir se décider rapidement, dit Night-Beast d’une voix forte. Le mec que tu as mis KO tout à  l’heure, Aran, il a dû prévenir ses petits copains et ils viennent nous chercher… »
Les regards convergèrent sur le point qui grossissait à  l’horizon. Un hélicoptère. Un hélicoptère qui se dirigeait droit sur eux. Et à  son bord, comme l’avait deviné Night-Beast, se trouvait le gardien qui devait empêcher quiconque d’approcher l’Etna sans autorisation ni matériel nécessaire, afin d’éviter les accidents. Le même gardien que Nina avait embobiné tandis qu’Aran l’avait assommé à  l’aide de sa propre matraque.
« Si on saute pas de suite, ajouta Night-Beast, on risque de passer aux infos de vingt heures, ou de retrouver DragonNoir et les autres en taule.
-Plutôt mourir que de revoir DragonNoir aussi tôt ! » déclara Aran. Puis il se tourna vers Wee-Ree-Cat et le regarda dans les yeux. Celui-ci comprit immédiatement ce que le Trauménien allait faire, et hurla. Night-Beast l’empoigna de l’autre coté et s’élança vers le vide. Nina se jeta sur Aran et l’embrassa.
« Peut-être une dernière fois… » risqua-t-elle. Aran vit qu’elle avait les larmes aux yeux, et il sentit qu’il n’était pas loin non plus de craquer. Puis ils s’élancèrent à  leur tour.
Derrière eux, ils entendirent les pales de l’hélicoptère qui tournoyaient, et une faible voix d’homme qui leur criait, en italien et dans un haut parleur, de ne pas sauter. Tout ces bruits, le vent dans leur cheveux, la chaleur du cratère et les souvenirs de toute leur vie, se mélangèrent jusquâ€™à  ce qu’ils percutent et crèvent la fine croûte au dessus de la lave de l’Etna.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 19 Oct 2007, 15:57 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
2. Un accueil chaleureux.
Un bras émergea des décombres et tâtonna à  l’aveuglette quelques instants. La poussière soulevée par l’explosion du plafond était retombée, et les doigts engourdis de Serge Thourn ne firent qu’essuyer la fine couche blanche. Il parvint enfin à  trouver une prise et poussa de toutes ses forces le pan de placoplâtre qui pesait sur son torse. Une fois dégagé, il inspira durant une dizaine de minutes à  longues goulées.
« Bordel de merde, qu’est-ce qui s’est passé ? »
Puis, dans un éclair, il songea à  Detroit qui s’était penché vers lui dans l’intention de le relever, juste avant qu’il ne perde conscience. C’était la dernière image qu’il avait vue. Des bribes d’anciens souvenirs surgirent en lui, alors qu’il sortait péniblement des décombres : son ancien partenaire mort, son sang qui coulait sur la moquette de son appartement, Thourn versant des larmes pour celui qu’il avait considéré comme son fils, et…
…cet homme. Celui qu’il avait cherché durant des années, et dont il avait une fois encore retrouvé la piste. Celui qui avait été François Petit, qui avait été Kurt Magnum, qui avait été l’Agent Hadès, qui avait finalement prit le nom de Mr.Magnum. Et Thourn sentait que cet ultime rencontre scellerait enfin toutes ces années d’attente, et qu’il saurait. Qu’il comprendrait. Qu’il vengerait Justin et donnerait paix à  son âme.
Un grognement le fit sortir de sa rêverie. Justin était mort, et il ne pouvait rien y faire, mais Sylvain Detroit, son nouvel acolyte, était manifestement encore en vie. Il se rua sur les décombres et arracha les débris les uns des autres, pour finir par apercevoir le visage ensanglanté de son coéquipier.
« Justin ! dit-il dans un souffle avant de se reprendre. Sylvain ! Sylvain, réveille-toi ! »
Il le sortit avec peine, ayant en tête des images de profanation de sépulture. Sylvain avait le visage comme recouvert de chaux, mais en même temps maculé d’un sang épais et collé à  ses joues. Thourn ignorait combien de temps ils avaient passé là -dessous, mais il savait qu’il n’était pas trop tard : Detroit respirait encore, et ses blessures paraissaient légères.
« Sylvain, merde ! » brailla-t-il en lui envoyant une gifle. Celui-ci ouvrit les yeux et hurla, avec un retard certain : « Attention, le plafond !!
-T’es à  la bourre. » grommela le commissaire en soufflant intérieurement. Malgré le non professionnalisme de Detroit, malgré son inexpérience, et même malgré son passé de journaliste, Serge Thourn avait fini par s’habituer à  endurer sa présence, même s’il lui arrivait de souhaiter le voir ailleurs plutôt qu’avec lui. Mais en ce moment, Thourn était content de le voir s’essuyer la figure en marmonnant des excuses.
« Mais qu’est-ce qui s’est passé, commissaire ?
-Alors ça, si je pouvais le savoir. » répondit Thourn en faisant quelques pas mal assurés. Ses jambes étaient encore engourdies par le séjour prolongé sous le plafond, et ses vêtements étaient pleins de poussière blanche. On aurait cru qu’il s’était jeté dans un bac de farine, ou de drogue. Un cisaillement au genou lui arracha un début de cri, qu’il réfréna.
« Commissaire ?
-C’est rien, un petit bobo. »
Il se baissa et regarda son pantalon déchiré au genou, qui laissait entrapercevoir une jambe tachée de sang. Un morceaux de bois était planté dans le bas de la cuisse, mais pas très profondément. Thourn l’ôta en serrant les dents, puis jeta le morceau derrière lui. Il inspecta la pièce : rien d’autre ne semblait être tombé, mis à  part ce morceau précis du plafond. À croire que cette chute était quasiment intentionnelle.
Il leva les yeux vers l’endroit où le plafond avait déserté sa place, mais ne remarqua pas aux premiers abords de traces d’un quelconque piège, ni d’explosifs. Mais pourquoi le plafond avait-il cédé exactement au moment où il était entré ? L’espace entre la chambranle de la porte défoncée et le plafond était trop grand, il ne pouvait donc pas y avoir de relation. Et un plafond ne tombait pas intentionnellement sur des intrus.
« Vieille baraque moisie, dit Detroit en époussetant ses vêtements. On a vraiment joué de malchance.
-Je ne crois pas à  la malchance. » répondit Thourn en penchant la tête de coté. Il regardait le bord du plafond resté accroché en hauteur. Son regard s’empara de toute la surface qui semblait avoir fondue, mais il ne comprenait pas comment, ni pourquoi.
« Vous n’auriez peut-être pas dû enfoncer la porte, remarquez.
-Rien à  voir, Just… » Il se retint à  nouveau. Pourquoi songea-t-il à  lui en de pareils moments ? Il se rattrapa rapidement : « …juste une coïncidence. Regarde ! Entre la porte et le plafond, y a au moins un mètre. Et rien n’est fissuré.
-Ah oui, exact. Mais alors comment ça a pu arriver ?
-Peut-être de la même façon que ce meuble est tombé ? »
Serge Thourn faisait maintenant dos à  la porte et au plafond éboulé, et s’était avancé dans le couloir. Il regardait avec attention une armoire qui gisait sur le flanc. Un des pied, ou de ce qu’il en restait semblait fondu. Comme le plafond. Mais le bois ne fondait pas, d’ordinaire. Il s’agenouilla et toucha le pied fondu de l’armoire, s’assurant que c’était bel et bien du bois et non une très bonne imitation en plastique.
Et il s’agissait bien de bois.
« En tout cas, s’il y a eu quelqu’un ici, ils ont profité de la chute du plafond pour s’enfuir. On est seuls.
-Dis plutôt qu’ils ont fait tomber le plafond sur nos tronches pour pouvoir foutre le camp sans problème, Detroit ! Si tu veux mon avis, c’est plutôt ce qu’il s’est passé !
-Mais, rétorqua Sylvain, comment ont-ils pu faire pour…
-On ne sait peut-être pas encore comment, mais on sait pourquoi maintenant. »
Thourn entendit une fenêtre claquer à  l’autre bout de l’appartement, et se releva brusquement. Un peu trop brusquement peut-être, car il sentit son genou lui lancer un message de douleur assez intense. Mais Thourn se contenta de grogner et fonça vers l’endroit d’où était venu le bruit de fenêtre. Au bout du couloir, il s’arrêta. La fenêtre claqua à  nouveau, et Detroit arriva derrière lui, légèrement essoufflé.
« Commissaire, on ne devrait peut-être pas courir partout après ce qu’il nous est arr…
-Ferme-la ! » répondit le commissaire en bousculant Detroit pour repartir dans l’autre sens. Il tourna à  sa droite et pénétra dans ce qui devait être la cuisine. Devant lui, la fenêtre se mit à  claquer à  nouveau, à  la faveur d’un léger vent qui venait de la cour de l’immeuble. Thourn ouvrit la fenêtre et se pencha. Personne.
Il soupira et s’assit sur une chaise.
« Encore trop tard… »
Il se passa une main sur la figure et se sentit soudainement fatigué. La route depuis Brest, puis son arrivée mouvementée dans l’appartement, tout ceci menaçait de lui filer le tournis. Il n’était plus de toute première jeunesse, et il le sentait précisément dans ces moments-là . Il entendit Detroit lui crier quelque chose de l’autre coté de l’appartement.
« Qu’est-ce qu’il y a, encore ? râla-t-il en se relevant avec peine et en se dirigeant vers l’entrée. Tu as trouvé quelque chose ?
-Des congélateurs ! Plein ! »
Qu’est-ce que j’en ai à  foutre, de congélateurs ? songea Thourn en rejoignant son collègue dans le salon. Mais ce qu’il vit le surprit. Il s’attendait à  en voir deux, peut-être même trois et à  la limite quatre, mais il découvrit en réalité plus d’une dizaine de ces engins, tous en parfait état. Il s’avança et en ouvrit un au hasard. Il était vide.
« Vide aussi, ainsi que celui-là , dit Detroit en se dirigeant vers un autre congélateur.
-M’est avis qu’ils sont tous vide, mais pourquoi entreposer tous ces congélos dans un appartement, et plus précisément dans un salon ? »
Thourn se baissa et dénicha une étiquette. Sur celle-ci était marqué au stylo, d’une écriture manuscrite penchée, le mot DarKenshin. Thourn se retourna et vit que sur une autre était noté Hilde. Et que la plupart des appareils portaient un nom. Quatre d’entre eux étaient même en route et ronronnaient furieusement.
« Tu as vu les noms sur les étiquettes ? demanda Thourn.
-Oui. Il y en a plein, mais je ne sais pas ce que ça signifie.
-Sur les quatre congélateurs qui sont en marche, les noms sont DarKenshin, Dalisc, Pythagore et Viper Dragoon. Ça te dit quelque chose ?
-Rien. On dirait des noms de héros, ou de méchants, dans des bandes dessinées. Pythagore, c’était pas un inventeur, ou un truc comme ça ?
-Ah on voit bien que tu étais dans la presse à  scandale et pas dans le journalisme intello, toi. Mais bref. Je me demande si ces noms ont un rapport avec celui-ci… »
Il extirpa de sa poche le morceau de papier fripé qui portait la mention À ma très chère Séphy-Roshou, nous te retrouverons. Séphy-Roshou. Ce nom, ou ce surnom, collait assez bien avec ceux qu’on trouvait ça et là  sur les congélateurs. Tout comme celui de Mr.Magnum. Serge Thourn eut un flash, et une idée lui vint soudainement, comme seules savent le faire les idées surprises :
« Des pseudonymes, dit-il à  voix haute. Ce sont des pseudonymes !
-Des pseudo-quoi ? répéta Detroit, inquiet.
-Des pseudonymes, abruti ! Des sobriquets, des surnoms, des fausses identités imaginées par des adolescent qui… »
Un second éclair de génie s’ajouta au premier, aveuglant presque le commissaire qui se sentit vaciller. Le choc, peut-être la douleur aussi, tout cela contribua à  le faire tituber jusqu’au mur le plus proche pour s’y adosser. Et, tandis qu’il glissait lentement dos au mur pour s’asseoir à  même le sol, alors que ses pensées s’agitaient en tout sens en se souvenant de l’entrevue avec le frère de celui qui se faisait appeler Mr.Magnum, il susurra pour lui-même :
« …qui traînent sur des forums sur Internet… »

[center]*
* *[/center]

Un hurlement sourd fit sursauter les quatre Trauméniens, qui émergèrent d’un sommeil sans rêves. Wee-Ree-Cat se releva le premier et s’ébroua tel un chat. Des cliquetis d’une armure en ferraille résonnèrent. Il s’arrêta de lui-même et regarda autour de lui. Il vit Aran qui détaillait du regard sa nouvelle tenue, intégralement noire, ainsi que sa longue cape qu’il arborait fièrement. Étant donné son sourire, on pouvait être tenté de croire qu’il était satisfait de son passage de vie à  trépas.
Wee-Ree-Cat tourna la tête vers Night-Beast qui, contre toute attente, n’avait pas changé tant que ça. Aran avait parié, dans l’avion, que celui-ci se métamorphoserait en rappeur, ou en jeune des citées sensibles. Mais Night-Beast était resté Night-Beast. Mais alors que son coté obsédé était resté enfoui de son vivant, une fois en Trauménien, il ne se retenait plus : Entre le moment où le hurlement les avait réveillé et cet instant précis, il s’était d’ores et déjà  dirigé vers Nina avec une rapidité stupéfiante et entreprenait de regarder avec avidité sa nouvelle apparence virtuelle.
Et celle-ci était effectivement assez agréable à  contempler. Autant la Nina réelle était craquante, autant son enveloppe Trauménienne aurait fait fondre un iceberg en antarctique en quelques minutes. Un fin pelage beige strié de marron avait poussé sur tout son corps, accompagné d’une queue qui ondulait derrière elle. Ses cheveux noirs bouclés avaient laissé leur place à  une coupe plus courte, presque au carrée, de cheveux roux. De longues oreilles de chat étaient également apparues de chaque coté de son visage félin.
Elle griffa Night-Beast, qui évita la patte de Nina et sautilla un peu plus loin. Wee-Ree-Cat regarda un moment les trois autres Trauméniens. Apparemment, ils avaient réussis à  changer de forme, ce qui signifiait qu’ils étaient bels et bien morts. Wee-Ree-Cat revit brièvement les derniers instants de sa vie, l’Etna, le saut et… …et plus rien. Il soupira, provoquant de nouveaux cliquetis de ferraille. Il ouvrit les yeux, et s’examina alors pour la première fois en tant que nouveau mort.
« Ah mais pourquoi est-ce que je ressemble à  Guidon des Samouraï Pizza Cats, merde ! » Mais avant qu’il ait eu le temps de râler à  nouveau, le même hurlement sourd qui les avait sortit de leur sommeil résonna. Nina frissonna.
« Qu’est-ce que c’est que ce truc ? demanda Night-Beast, en s’intéressant pour la première fois à  autre chose que ce qu’il y avait éventuellement sous la jupe de Nina. Aran Valentine haussa les épaules, épiant le bord de la falaise où ils se trouvaient.
Le décor n’avait pas énormément changé entre le fond du cratère de l’Etna, qu’ils avaient entraperçut avant de mourir, et le lieu où ils se trouvaient, où qu’ils soient. La chaleur était toujours présente, ainsi que l’obscurité ambiante entrecoupée d’éclats de lumières rougeâtres. De la lave, ou du feu, peut-être, se dit Aran en avançant prudemment. En tout cas, nous sommes morts et transformés en Trauméniens, ça c’est sûr !
« Aran, enfant de salaud, tu m’as poussé ! cria Wee-Ree-Cat.
-Et alors, tu as eu mal ? »
Wee-Ree-Cat se passa une main courtaude sur son visage de chat. La vision de chat noir engoncé dans une armure bleutée pouvait faire rire, mais le voir soudainement s’énerver et se jeter sur le grand blond habillé en noir fit éclater Night-Beast de rire.
« J’en suis mort, Aran, c’est tout de même pas rien ! Je suis mort pour sauver une fille que… que je n’apprécie pas plus que ça, en plus.
-Pourquoi tu es venu, alors ?
-J’ai jamais été en Sicile. »
Wee-Ree-Cat croisa les bras – du mieux qu’il put – et ferma les yeux, gardant une image des trois visages Trauméniens amusés qui le regardaient. Il remua comiquement des moustaches et releva le menton.
« De toute façon, j’en ai assez maintenant. Je me barre. Je prends la pilule de Hilde et je me casse. Si ça avait été elle, je ne dis pas, mais Séphy-Roshou, je n’en ai rien à  cirer ! »
Les yeux clos, il ne vit pas les trois Trauméniens changer de tête en regardant derrière leur compagnon, puis en levant peu à  peu les yeux. Il sentit simplement de légers coups de vents dans son dos.
« En plus, je ressemble à  rien comme ça. Si encore j’avais été changé en beau brun ténébreux, mais même pas ! Je suis Guidon ! »
Un grognement derrière lui, aussi bas qu’un grondement de tonnerre, lui fit ouvrir les yeux. Il regarda quelques secondes les faces apeurées de ses compagnons.
« Quoi encore ? Vous allez me dire que je suis bien plus beau comme ça plutôt qu’en vrai ? Je m’en tape, je me casse ! » Il fit demi-tour en terminant sa phrase, rageur : « Et vous ne me retiendrez paaargh ! »
Il se retrouva nez à  nez avec une tête de dragon. Son regard s’adapta, et il remarqua que neuf autres têtes de dragons s’agitaient autour de celle qui le fixait avec ardeur. Puis son regard changea encore et il vit que les têtes étaient rattachées à  deux mains, elles-mêmes au bout de deux bras, tenus par un torse de singe – tête de singe comprise – avec des ailes d’aigle. Wee-Ree-Cat recula d’un pas, la mâchoire pendante, et remarqua que cette abomination avait en outre de multiples tentacules lui servant de membres antérieurs.
Et là , à  ce moment précis, Wee-Ree-Cat oublia toutes ses rancoeurs et hurla, rapidement couvert par le rugissement du monstre qui volait devant lui.

[center]*
* *[/center]

« Il est toujours inconscient, Satana !
-Normal, il souffre trop, son esprit s’est déconnecté pour évincer la douleur. »
Fab se pencha de nouveau sur le genou de TheMaker, qui avait viré au bleu violacé, et dont le diamètre dépassait celui de sa cuisse. Ils l’avaient mit dans le lit de Lord Satana à  peine arrivés chez lui, puis avait retirés précautionneusement son jean qui menaçait de craquer. Ce fut au moment de tirer sur la toile que TheMaker hurla le plus fort, avant de sombrer dans l’inconscience.
« On devrait appeler les urgences, ou le Samu, ou les pompiers. Ou bien l’emmener à  l’hosto pour…
-…pour qu’ils nous posent des questions gênantes ? termina Lord Satana avec un ton méprisant. Bonne idée ! Et qu’allons-nous leur dire, à  ces gens ? Qu’un ami à  nous, chez qui sont morts deux policiers, a lancé une onde d’énergie sur une armoire et qu’elle a chût sur TheMaker ? Puis que nous nous sommes échappés en volant par la fenêtre de la cuisine, et que tout ceci n’est qu’un vulgaire accident ? »
Les trois autres Trauméniens regardèrent Lord Satana avec une once de soumission. Il le remarqua et sourit intérieurement. Mais il n’était pas encore temps pour lui de se lancer, alors il souffla lentement, les yeux fermés, et prit un visage conciliant. Il posa une main sur l’épaule de Fab, à  sa gauche, une autre sur celle de Final Séraphin à  sa droite, et regarda RazaëlAurélie dans les yeux.
« Ne vous en faite pas. Rappelez-vous ce que je vous ai promis : Nous sommes tous égaux, pas de chef ni de leader ! Je vais essayer quelque chose avec mes pouvoirs nouvellement acquis, et si ça ne fonctionne pas, alors nous irons à  l’hôpital. Je ne le laisserai pas dans cet état, ni aucun… »
Il serra l’épaule de Fab.
« …d’entre… »
Il tapota celle de Final Séraphin.
« …vous. »
Il appuya son front sur celui de RazaëlAurélie. Ils restèrent ainsi quelques secondes, puis se séparèrent. Tous se sentaient mieux, plus calmes, moins apeurés par le futur. Lord Satana les fit sortir de la chambre, et referma la porte. Il se tourna vers TheMaker et soupira. Un soupir de fatigue, le soupir d’un comédien qui vient de terminer sa représentation, le sourire d’un clown qui peut enfin cesser de sourire bêtement.
Il s’assit aux cotés de TheMaker.
« Enfin seuls… » dit-il à  voix haute.
[nOn, tU n’Est pAs sEUl, Et tU nE lE sErAs plUs jAmAIs]
Vous pouvez faire quelque chose ?
[tOI sEUl Y pEUt qUElqUE chOsE, lOrd sAtAnA]
Je… Je ne suis pas sûr d’y arriver… Je ne me suis pas encore entraîné assez pour un cas de figure aussi…
[InÉvItAblE ? cEttE OppOsItIOn À drAgOnnOIr ÉtAIt nÉcÉssAIrE… vItAlE, mÊmE… tU As bIEn vU lE rEgArd dE tA trOUpE, nOn ? l’EspOIr rEflEUrIssAIt dAns lEUrs YEUx…]
Mais je ne…
[tOI sEUl Y pEUt qUElqUE chOsE]
Lord Satana se pencha sur TheMaker et, sans réfléchir, posa ses mains sur la jambe enflée du Trauménien évanoui.
Je… je ne suis pas sûr d’y parvenir…
[Il tE sUffIt d’Y crOIrE… tOUt Est pOssIblE sI tU Y crOIs]
Une lumière blanche sembla sortir des paumes de Lord Satana. Celui-ci, légèrement surprit, eut pour réflexe de soulever ses mains.
[n’AI pAs pEUr, cE n’Est qUE tOn pOUvOIr qUI s’ÉvEIllE]
Lord Satana se concentra, comme lorsqu’il voulait prendre son apparence virtuelle. Il fixa son esprit sur ses mains, sur le pouvoir qu’il y sentait, et sur le genou de TheMaker.
Je… Je ne vais…
[tU pEUx lE fAIrE]
Je peux…
L’intensité de la lumière vacilla, puis augmenta soudainement. De l’autre coté de la porte, les Trauméniens virent un flash lumineux, comme celui d’un simple appareil photo, et ils se précipitèrent dans la chambre. Ils ouvrirent la porte avec fracas et ce qu’ils trouvèrent les figea sur place.
TheMaker était debout, face à  eux, et semblait revenir d’un rêve, tandis que Lord Satana était affalé sur le lit et semblait épuisé.

[center]*
* *[/center]

Aran virevolta sur un pied, évitant de justesse deux têtes de dragons qui fendirent l’air et se plantèrent dans le sol. Sa faux trancha les deux cous qui se tortillèrent au sol avant de s’évaporer en des milliers de mouches furibondes. Aran les chassa d’un geste las de la main, tout en regardant la monstruosité volante se débattre avec sa propre douleur.
« Aran, hurla Nina derrière lui. Dépêche-toi !
-Je vais en finir avec ce truc, dit-il d’une voix forte. On n’est pas mort pour reculer à  la première créature qu’on croisera.
-Ton arrogance te perdra, beau blond ! » lui lança Night-Beast avant de prendre Nina par la main. « Laisse-le combattre s’il en a envie, après tout. Et nous, on se barre.
-Mais…
-Pas de main, insista Night-Beast. Et on ferait mieux de rattraper Wee avant qu’il ne se paume dans un coin ! »
Le monstre mugit et s’élança sur Aran, qui bondit au dessus de lui pour éviter le coup. Mais la créature remonta d’un coup d’aile et se retrouva face à  Aran. Ce dernier put voir une ombre de sourire sur le visage grimaçant du singe ailé.
« Merde, dit-il.
-Aran !! » Hurla Nina, échappant à  la poigne de Night-Beast. Elle fit simplement deux pas et croisa le corps de son compagnon qui s’écrasa presque à  ses pieds. La monstruosité rugit en signe de victoire. Nina se jeta à  genoux et secoua Aran, qui hoqueta de douleur.
« Aran ! Aran tu es en vie ?!
-On ne peut pas exactement dire ça, ajouta Night-Beast en levant les yeux au ciel.
-Je… kof… Je ne suis pas encore habitué à  ce nouveau corps… »
Nina le serra tout contre elle. Night-Beast regarda vers le monstre, qui était en vol stationnaire à  quelques mètres d’eux seulement. Et il vit les deux moignons sanguinolents, où s’étaient trouvées les têtes de dragons tranchées par Aran, se mettre à  bouillonner. Et, dans un hurlement bestial, les deux gueules de reptiles repoussèrent en chÅ“ur. Il vit même l’une d’entre elle claquer des dents, comme pour tester si sa mâchoire fonctionnait correctement, avant de regarder dans leur direction et de gronder.
« Euh, les tourtereaux, sans vouloir vous presser, je crois qu’on va avoir quelques menus problèmes si on se bouge pas d’ici une à  deux secondes.
-Mais qu’est-ce que c’est que ce monde de merde !! »
Tous se tournèrent, créature simiesque ailée comprise, vers Wee-Ree-Cat qui courait à  fond de train vers les Trauméniens. Il venait d’apparaître au détour d’une sombre galerie et semblait terrorisé. Plus terrorisé encore que lorsqu’il avait détalé face à  la première créature. Et la raison de cette seconde frayeur déboula juste après lui. Nina hurla.
Un homme d’une stature imposante armé d’un immense marteau galopait à  sa poursuite. Il cavalait à  une vitesse hallucinante malgré une jambe de bois et son âge manifestement avancé. Mais ce qui était réellement terrifiant chez lui, car son apparence se révélait être simplement celle d’un humain standard, c’était la rage folle qui illuminait ses yeux.
Les Trauméniens restèrent pétrifiés lorsqu’il leur arriva dessus, mais au lieu de plonger son marteau sur eux, il sauta sur la créature ailée et s’accrocha à  un de ses bras. Les Trauméniens pivotèrent lentement leurs têtes vers le combat entre l’homme et la bête. Celui-ci assenait de vastes coups de son arme sur l’épaule de la créature, qui hurlait. Entre deux de ces cris, les Trauméniens entendirent l’homme la sermonner :
« Je t’avais pourtant dit de rester sagement dans ton coin, saloperie de bestiole ! »
Le monstre beugla de douleur, mais finit par tournoyer sur lui-même et l’homme tomba sur le dos dans un immense fracas qui secoua tout autour d’eux. Aran regardait le combat avec de grands yeux éberlués.
« Si je dois me farcir l’homme après, je me rend d’office, je fais pas le poids.
-T’inquiète pas, c’est peut-être lui qui va te farcir une fois le combat terminé… »
Nina envoya un coup sur la tête de Night-Beast, tandis que l’homme s’était relevé et qu’il fonçait sur la chose avec rage. Il élança son marteau dans les tentacules du monstre, qui s’avéraient être en réalité des serpents, et en broya une bonne demi-douzaine. La créature gémit et trois de ses dragons crachèrent de jets de flammes sur lui. Il esquiva avec une agilité surprenante et lança son arme sur son assaillant avec force.
Les Trauméniens fermèrent les yeux et grimacèrent lorsqu’ils entendirent le craquement de l’aile défoncée, et la monstruosité tomber sur le sol. Lorsqu’ils les rouvrirent, ils virent l’inconnu arrimer solidement la créature à  l’aide de chaînes dont un maillon faisait facilement la taille d’un adolescent, disons Night-Beast pour exemple. Quand il eut terminé d’attacher la chose, il se tourna vers les Trauméniens.
« Désolé pour l’accueil, dit-il avec gène. Je n’aurais pas dû le mettre en liberté, mais c’est plus pratique de nettoyer son antre lorsqu’il est absent, voyez ! »
L’homme s’approcha d’eux, puis passa une de ses mains devant le regard abasourdi de Wee-Ree-Cat, qui sursauta. Aran déglutit, puis osa finalement prendre la parole, révélant à  voix haute les pensées de tout le groupe :
« Ce… Ce monstre, est-il…
-…mort ? Oh non ! Malheureusement, ce genre de bête légendaire, ça ne meurt pas si facilement. Il faudrait bien plus encore d’une foudre de Zeus pour le tuer ! »
Et il éclata d’un rire gras et retentissant. Les Trauméniens se regardèrent entre eux, perplexes, ne sachant exactement si cet homme était plus ou moins dangereux que la bête précédente. Était-ce comme dans certaine série d’animation japonaise, ou plus l’ennemi avait l’air inoffensif, plus il était cruel et dangereux ?
« C’est moi qui suit chargé de sa garde, en réalité, reprit l’inconnu. Mais comme personne ne vient dans le coin, parfois, je le laisse vaquer ça et là , le temps de nettoyer son chez lui, comme je vous l’ai dit. Je suppose qu’il a vu en vous une occasion de se faire un supplément de dîner ! »
Aran espéra que l’homme ne se remette pas à  rire de cette plaisanterie foireuse, et l’homme ne le fit pas. Il se contenta de sourire, puis de tendre la main :
« Au fait, j’ai oublié de me présenter, je suis Héphaïstos. Ou Vulcain, selon en quoi vous croyez. De toute façon, tout le monde m’appelle le Boiteux, alors.
-Le forgeron des Dieux ? s’étonna Wee-Ree-Cat. Celui qui fabrique les foudres de Zeus, l’armure d’Achille, le trident de Poséidon, les flèches d’Artémis et d’Apollon, le…
-Oui, éclata de rire le Dieu. Tout ça !
-Comment sait-il tout ça sur lui ? » demanda Aran à  voix basse. Nina haussa les épaules. Derrière le Dieu, la créature poussa un rugissement bestial avant de secouer les chaînes brutalement, tentant de se dégager. Héphaïstos se tourna vers le monstre.
« Calme-toi Typhon ! Je vais te dégager, mais seulement quand ces quatre-là  seront partis d’ici ! D’ailleurs, leur demanda-t-il, qu’est-ce qu’il vous a prit de mourir dans un volcan ? C’est un suicide collectif ?
-On peut dire ça comme ça… » gromella Wee-Ree-Cat en regardant Aran méchamment. Ils étaient remis de leurs émotions, et avaient trouvés un allié, et pas des moindre. Un Dieu de l’Olympe. Aran Valentine commença alors à  lui expliquer les raisons qui les avaient tous conduits à  se jeter dans un volcan.
« Tout ça pour sauver une amie, s’étonna Héphaïstos à  la fin du récit. Eh bien, humains, vous êtes bien courageux !
-Certains n’ont pas eu le choix, murmura Wee-Ree-Cat en talonnant le tibia d’Aran. Mais je ne vais pas rester ici plus longtemps ! Je suis ravi de vous avoir rencontré, monsieur le Dieu, mais j’ai la Sicile à  visiter ! Sur ce, ciao ! »
Wee-Ree-Cat sortit la pilule et ouvrit la bouche pour la manger, mais Nina l’arrêta en lui saisissant le poignet. Wee-Ree-Cat ferma la bouche et dévisagea Nina.
« C’est toi qui va m’en empêcher, après ton copain ?
-Tu fais ce que tu veux, Wee… Mais n’oublie pas qu’il reste le problème des corps… »
Wee-Ree-Cat se remémora les derniers instants aux abords du volcan. Il avait demandé à  Aran comment ils allaient ressusciter, puis l’hélicoptère avait déboulé, et ils avaient sauté, et ce problème, sa question, était restée en suspend. Contrairement à  leurs corps qui avaient certainement été avalés par de la lave en fusion, ou s’étaient retrouvés étalés en de nombreuses flaques grumeleuse au fond du cratère.
Il baissa les bras d’un air dépité. Night-Beast sourit.
« En tout cas, reprit Héphaïstos qui n’avait rien saisi de la conversation qui venait de se dérouler et qui ne désirait rien en savoir, je n’ai pas vu votre amie dans les parages, ça non !
-Où pourrait-on commencer les recherches ? » se demanda Aran à  voix haute. S’ils se trouvaient réellement dans l’au-delà  de la Mythologie Grecque, ou Romaine, alors celle-ci était vaste à  en crever, et il leurs faudrait une vie ou deux pour en faire le tour. Restaient deux solutions : Trouver rapidement quelqu’un qui l’avait vu ou une trace de son éventuel passage, ou bien trouver quelqu’un qui savait tout sur tout, passé, présent et futur compris dans le prix de groupe. Il réfléchit, et Héphaïstos le prit de court :
« Je vais vous emmener sur le mont Olympe, là  où sièges les autres Dieux. S’il y a bien des personnes capables de vous renseigner, ce sont eux ! Nous partirons dès que j’aurais terminé de nettoyer les saloperies de Typhon. »
Il leur jeta un Å“il amusé.
« Si ça vous dit de m’aider… »
Et Wee-Ree-Cat s’écroula dans un bringuebalement sonore.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 21 Oct 2007, 15:02 
Hors-ligne
Supérieur
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 01 Mai 2004, 11:57
Message(s) : 1161
Je lis vite, mais c'est bien (<- commentaire hautement inconstructif et assumé), malgré le peu de rapport entre les personnages et les pseudonymes associés. Je t'encourage à  faire davantage de passages "Satana introspection", ça éveille mes sens de fangirl.

"Mais pourquoi je suis contre Mistrophera, dans l'histoire ?"

_________________
Spoiler! :
N'oubliez jamais que vous êtes unique, comme 7 milliards d'autres humains sur Terre.


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 06 Nov 2007, 21:36 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
Oh... J'ai encore un lecteur...

3. L’Olympe.
Le dédale des catacombes parisiennes était impressionnant par son ampleur et sa complexité. Et même avec un plan préalablement imprimé et de nombreuses fois consulté, il était fréquent de connaître, ne serait-ce qu’un instant, le même sort que feu Philibert Aspairt, qui s’était perdu dans les catacombes le 3 novembre 1793 et qui n’a été retrouvé que onze ans plus tard, bien évidemment décédé.
« Donc, on est perdu, en conclut le Ionisateur Fou.
-Mais non, le rassura Q-Po en retournant une nouvelle fois la carte. Voyons, nous sommes arrivés de là  et…
-Tu la tiens à  l’envers.
-Oh ? Ah. Oui. Pardon. »
Il la remit à  l’endroit et l’examina de près. Le Ionisateur Fou soupira, puis jeta un Å“il à  la bande des Trauméniens exilés qui se reposaient dans la Salle du Chandelier. Ils semblaient tous harassés et démotivés. Il était loin, le temps où tous riaient aux éclats en célébrant le retour des premiers voyageurs de l’au-delà .
Dans un coin gisaient piteusement les sacs où reposaient les corps des Trauméniens qui n’étaient pas revenus. Les sacs avaient été doublés à  la hâte avec d’autres isothermes remplis de glace, mais le réchauffement des corps posait toujours un problème assez urgent. Les porteurs, près des sacs, profitaient de la halte pour reprendre des forces.
« Il va falloir faire quelque chose pour les cadavres, DragonNoir, dit Laekh Traumen en se massant les bras. Ils vont finir par se réchauffer, et pourrir.
-Nous irons chercher les congélateurs lorsque nous serons arrivés à  notre nouvelle base. Nous attendrons la nuit et j’irai en compagnie de Q-Po et Arkh. À nous trois, nous les transporterons grâce à  nos nouveaux dons jusqu’ici. »
Ils se turent, laissant passer un groupe de trois jeunes filles qui gloussaient. Le Ionisateur Fou remonta ses lunettes d’un air perplexe.
« En espérant que vous ne rencontriez personne. Sinon, je peux tenter de modifier ma calculette chérie en lui incluant un programme de réfraction neuronale, comme dans Men In Black, et…
-Ça ira, LIF, lui répondit aussi gentiment qu’il le put DragonNoir.
-Ah, j’ai trouvé ! »
Q-Po étendit la carte sur un mur relativement sec et posa son doigt sur la salle où ils se trouvaient. Les autres Trauméniens se rapprochèrent en traînant la patte.
« Nous sommes passé par la Salle du Drapeau, une galerie EDF, nous avons longé l’Avenue du Maine et nous sommes remontés sur le chemin du Pilier Penché, vous vous rappelez ? »
Tous hochèrent la tête silencieusement.
« C’est ensuite que nous nous sommes trompés…
-Hum, dirent deux ou trois Trauméniens dans le fond.
-Oui, euh, que je me suis trompé, admit Q-Po. Au lieu de prendre le Carrefour de l’Octogone, nous avons continué au Nord, et nous avons atterri ici. Mais là , je sais où aller ! On va continuer tout droit jusquâ€™à  la Diagonale du Nord, et la suivre jusqu’au Carrefour des Morts. Ensuite… ensuite…
-Ensuite on sera de nouveau perdu, hein ? » railla Jamic.
Alors que Q-Po déterminait le trajet qu’il restait à  parcourir, Arkh attira DragonNoir à  l’écart. Une fois hors de la salle, il le plaça de telle façon qu’il puisse voir l’ensemble des Trauméniens qui siégeaient dans la Salle du Chandelier.
« Tu les vois, là  ? lui demanda-t-il.
-Oui… Oui, je les vois, mais qu’est-ce que tu veux me montrer ? demanda DragonNoir.
-Je veux te montrer les troupes qui nous restent, par rapport à  celle dont nous disposions au départ. Je veux te montrer l’ardeur qui nous reste, par rapport à  celui qui nous animait au départ. Je veux te montrer que les Trauméniens sont fatigués, et que leur moral est au plus bas. Et plus que tout, DragonNoir… »
Arkh se tourna vers DragonNoir et plongea ses yeux dans les sien. DragonNoir n’avait jamais remarqué à  quel point ce dernier pouvait être mature dans certaines circonstances. Il suivit les conseils de son compagnon et regarda les visages usés par la fatigue et les diverses pertes, par une mission qu’ils n’auraient peut-être pas cru si difficile de prime abord.
Il vit la peur dans certains regards, la peur de l’inconnu, de la Mort, mais aussi de cet ennemi qui avait trouvé une incarnation bien plus terrifiante dans la réalité que sur Traumen. Il vit la colère, la colère de s’être laisser entraîner dans un jeu dont ils ne maîtrisaient pas toutes les règles. En revanche…
En revanche il ne vit presque plus de traces de la détermination première qui avait attisé les passions, les premiers temps de cette grande aventure. Il est temps que tout ceci se termine, disaient certains faciès éreinté. Je veux retrouver ma vie banale d’avant, disaient d’autres. Les Trauméniens n’avaient pas besoin d’exprimer à  haute voix leurs pensées, celles-ci se lisaient sans peine sur leurs visages.
C’est ceci qu’Arkh avait voulu lui montrer, et il comprenait. Il comprenait d’autant plus que lui aussi était fatigué, lui aussi avait peur et était en colère. Il en voulait à  Séphy-Roshou de s’être laisser mourir si facilement, il en voulait à  Mr.Magnum d’avoir osé inventer une méthode aussi tarabustée pour aller la secourir, il en voulait à  Mistrophera de leur mettre des bâtons dans les roues, il en voulait à  Séphira Strife de ne pas être revenue du monde des morts…
…et plus que tout, il s’en voulait à  lui-même, de ne pas être à  la hauteur, de ne pas savoir comment réussir à  relancer cette équipe qui, longtemps auparavant, avait fonctionné du feu de Dieu. Il s’en voulait de baisser les bras après tout ce qu’ils avait vécus.
« …nous sommes en train de perdre la bataille. » acheva enfin Arkh. Il retourna auprès des autres Trauméniens, laissant DragonNoir à  ses sombres pensées. Et celui-ci, dans la pénombre des catacombes parisiennes, retenait à  grande peine son envie de fuir à  toute jambes ce spectacle désolant.

[center]*
* *[/center]

Mistrophera éclata de rire. Ça ne Lui était pas arrivé depuis une éternité, et Il savoura cet instant avec délice. Dès qu’Il sentait Son envie de rire se tarir, Il regardait rapidement Son moniteur principal, et repartait de plus belle. Sur cet écran de contrôle, noyé parmi des dizaines d’autres qui remplissaient tout un mur de cette salle sans cesse dans une semi pénombre, on pouvait distinguer une silhouette avachie contre un mur.
Cette silhouette semblait au bord du gouffre. C’était un homme fluet, à  première vue, et dont le moral ne semblait pas vraiment à  un niveau très élevé. Peut-être même pleurait-il, accablé par son sort, seul dans un recoin des catacombes de Paris, à  milles lieux de Lui. Mais Mistrophera le voyait, pourtant, et Il prenait un plaisir magistral à  observer sa déconfiture.
« Incroyable, finit-Il par dire entre deux hoquets. Je le croyais plus fort que ça. Par écrit, il a une verve acérée, mais dès qu’il s’agit de travaux pratiques, DragonNoir n’est qu’une loque sans intérêt aucun ! »
Il détourna Ses yeux de Ses écrans pour les poser sur Ses généraux. Radamenthe, Pasteqman et IL se tenaient devant Lui, immobiles. Lord FireFly était toujours en mission, et il n’avait pu être présent, mais Mistrophera ne s’en souciait pas. Ce dernier avait fort à  faire là  où il était, et sa présence n’était pas indispensable.
Les trois Trauméniens renégats, si on pouvait les appeler ainsi, étaient sous leurs formes virtuelles. Leurs apparences n’étaient pas tellement différentes de leur enveloppe charnelle terrienne, mis à  part IL dont l’allure générale était bien plus svelte et élancé. De plus, IL préférait rester sous sa forme virtuelle, car sa nervosité face à  Mistrophera était bien moins développée qu’en tant que simple humain.
« Bien, dit-Il. Les Trauméniens sont dispersés, et ce de plus en plus. Tout ceci grâce à  Moi et à  Mon sens de l’organisation. Certains sont sous Mon contrôle, mais il en reste bien d’autres. Et c’est maintenant que cela va se jouer. Dorénavant, il nous faut capturer un maximum de Trauméniens pour tous les réunir dans leur nouveau chez eux. »
Acquiescement chez les généraux. IL leva tout de même la main, curieux.
« Que nous vaut l’honneur d’une prise de parole, IL ?
-Je me demandais… Comment allons-nous faire avec le groupe principal ? Celui de DragonNoir ? Ils nous connaissent maintenant, et ils ne se laisseront plus manipuler…
-Mais il n’y a pas besoin de s’occuper d’eux, IL : Nous allons tout simplement attendre qu’ils nous envoient d’autres cobayes, qu’ils se tuent eux-mêmes, et nous les cueillerons lorsqu’ils seront bien mûrs, comme les autres. »
IL recula d’un pas. Les autres restèrent muets. Mistrophera les regarda un moment, admirant Son armée comme on admire des chiens bien dressés. Tout se déroulait comme Il l’avait prévu et, dans un sens, ça Le dérangeait. Il n’aimait pas que tout fonctionne, Il préférait qu’il y ait des accrocs, des problèmes. Des imprévus.
« Voilà  ce que nous allons faire, reprit-Il. IL, tu vas aller rechercher Séphy-Roshou. Je te laisse mener tes recherches à  ta guise, et c’est un privilège, crois-Moi, après ton échec cuisant. Radamenthe, tu vas aller voir Albert Fish et Loki pour les ramener ici. Il faut que Je leur parle. Ensuite, J’aurais une autre mission pour toi. »
Sans attendre plus, les deux Trauméniens concernés s’inclinèrent et se retirèrent. Pasteqman resta seul face à  Mistrophera. Celui-ci sourit, et son général fit de même.
« Lord FireFly devrait être arrivé avec Youfie, et l’avoir enfermé avec les autres. J’irai leur rendre visite après, à  Magnum, Fury, Squall, K-Ro, Erwan, Haschatan, qui doivent se demander ce qu’ils font ici. Enfin… Seuls cinq d’entre eux se le demande, en vérité.
-Vous voulez que j’aille libérer le traître ? »
Mistrophera se retourna vers ses écrans, et en alluma un. Celui de la cellule où était prisonnier le tout premier groupe de Trauméniens décédés. Il les regarda un à  un, et s’attarda sur Fury, en fronçant les sourcils. Celui-ci se frottait la tête.

[center]*
* *[/center]

« Encore des migraines ? » demanda Erwan Linvorge à  un Fury qui, adossé aux barreaux de la cellule, avait les yeux fermés et serrait les dents. Depuis qu’ils étaient arrivés ici, la voix n’avait cessé de lui torturer l’esprit. Il parvint tout de même à  articuler faiblement :
« Ça va… »
Tu te mens encore, éructa mentalement la voix du lutin. Toi et tes compagnons êtes morts, et vos âmes sont perdues à  jamais !
« Comment cet endroit peut-il exister ? » s’étonna Squall. Il passa une main sur le mur, bel et bien réel. Depuis leur incarcération, il avait examiné tout ce qu’il avait pu, sans trouver la moindre faille. Cet endroit, aussi irréel qu’il aurait dû être, était aussi matériel qu’eux-mêmes. Il n’en revenait pas.
« On se trouve peut-être là  où tous les Trauméniens vont lorsqu’il meurent ? hasarda Haschatan. Ce qui n’explique pas pourquoi on a été emprisonné…
-Ni les horreurs qu’on a rencontré en arrivant ici, ajouta Erwan.
-Je continue à  dire qu’on devrait tenter de s’échapper ! »
Ils se tournèrent tous vers K-Ro, qui continuait à  tenter de limer les barreaux avec Kefka. Celui-ci se contentait de geindre faiblement, après avoir passé des heures à  hurler à  la mort. Squall se passa une main sur la figure.
« K-Ro, on t’a déjà  dit que…
-Mais il ne sent plus rien ! Il ne crie même plus !
-Il est à  la limite de l’inconscience, là , remarqua Erwan.
-Au moins, il ne se débat plus, et on ne perd plus de temps !
-Il pourrait nous être encore utile ! En plus, il bave sur les barreaux plutôt qu’autre chose, là â€¦ » dit Haschatan. K-Ro reposa Kefka par terre, et le gifla violemment. Ce dernier sembla émerger de cet état second que son cerveau lui avait imposé pour survivre.
« Gnié ? gémit-il.
-Pourquoi tu baves sur les barreaux ?! s’égosilla K-Ro. Il faut que tu les ronges avec tes dents, ou à  l’usure, mais si tu baves dessus, ça glissera et tu ne les entailleras pas ! »
Squall baissa les bras. Puis il entendit un bruit inidentifiable venant du couloir d’où eux-mêmes étaient arrivés. Il se jeta contre le mur et invita tout le monde à  faire de même.
« Faites attention, on ne sait pas qui va arriver.
-Peut-être est-ce l’un des nôtres venu nous chercher ? dit K-Ro en essuyant distraitement les lèvres de Kefka avec un chiffon sale. Il faudrait peut-être le prévenir que les cellules sont piégées, non ? »
Squall regarda Erwan, qui haussa les épaules. Après tout, s’ils étaient emprisonnés et non morts – une seconde fois – c’est que celui qui avait édifié ce bâtiment les voulait en vie, et ils ne risquaient donc rien à â€¦
« Faites attention à  ne pas entrer dans les cellules, hurla Squall. Elles se referment automatiquement !
-Inutile. » dit simplement Mr.Magnum. Il savait exactement qui venait, il l’avait déjà  vu. Erwan regarda son ami, puis se retourna vers le couloir qui s’étendait derrière les barreaux. Fury y était toujours accolé, en se tenant la tête. Les pas se rapprochèrent, bientôt accompagnés d’une ombre qui se découpait sur les murs bleutés de l’édifice. L’ombre semblait porter un sac dans ses bras.
Fury jeta un Å“il derrière lui, vit l’ombre et la voix s’accapara immédiatement de son imagination pour formuler les pires pensées : Et voilà , on t’apporte le corps décomposé de ta petite amie, et elle sera votre repas pour les semaines à  venir, jusquâ€™à  ce que vous mourriez à  nouveau, encore et encore. Fury essuya les gouttes de sueur sur son front.
« Eh bien, dit la voix, quel accueil ! Vous prenez bien soin de vos ravisseurs, c’est sympa ! Je ne m’attendais pas à  ça. »
Ils virent Lord FireFly s’arrêter devant leur cellule, un sac de toile dans les bras et le sourire aux lèvres. Il posa son sac à  ses pieds, et mit ses mains sur ses hanches, tel un inspecteur devant une classe d’élèves.
« Pardon pour l’attente, mais j’ai été retardé. »
Il poussa distraitement du pied le sac en toile, qui remua.
« Lord FireFly ! s’écria Erwan en fonçant sur les barreaux. Alors c’était bien toi que Magnum avait vu chez les Dames Blanches !
-Tout à  fait. Mais qu’il m’ai vu ou non n’a rien changé : Vous êtes tout de même tombé dans le piège qu’Il vous avait tendu.
-Qui donc ? demanda Squall avec humeur. Je déteste qu’on me manipule ! »
Il s’élança, Gunblade en avant, sur les barreaux entre lui et Lord FireFly. Comme il s’y était attendu, les tiges de métal résistèrent à  son assaut, mais Squall redressa son arme et fit feu sur le Trauménien. Celui-ci leva la main et un filet de feu l’enveloppa. Les balles ricochèrent et terminèrent leurs courses dans les murs autour de Lord FireFly. L’une d’elles frôla le sac et fit un trou dans le sol.
« Oh là , modéro-mégalo, ricana Lord FireFly en faisant disparaître sa protection enflammée. Tu risques de toucher votre précieuse invitée ! »
Sans attendre de réponse, il ouvrit un panneau dans le mur et appuya sur un bouton. Deux barreaux s’enfoncèrent dans le sol en quelques secondes. Fury vit avant tout le monde la brèche et, étant le plus près, prit appui sur son pied pour faire une roulade vers l’extérieur. Lord FireFly se baissa pour attraper le sac.
« Non non, gentil toutou, on reste bien sage ! »
Il appuya le dernier mot en lançant le sac en toile sur Fury, qui le reçu de plein fouet et qui roula à  l’intérieur de la cellule dans un cri de douleur étouffé, accompagné d’un autre gémissement venant du sac en question. Lord FireFly effleura de nouveau le bouton, et les deux barres réapparurent comme par magie.
« Allez, les gars ! À bientôt ! Je dois préparer Sa venue ! »
Et il s’en alla le pas léger, en gloussant doucement. Squall aida Fury à  se relever, mais ce dernier le repoussa avec rage.
« C’est bon, je vais bien ! »
Non tu ne vas pas bien, depuis qu’elle n’est plus là . Tu ne vas pas bien, et tu n’iras plus jamais bien, tout ça parce que tu l’as laiss…
« Ta gueule, putain ! »
Tous se turent, et regardèrent Fury, les larmes aux yeux, s’accroupir au même endroit qu’auparavant et mettre sa tête entre ses mains. Le sac remua encore, et Erwan l’ouvrit fébrilement. Derrière lui, K-Ro s’approcha, affamée :
« C’est du chocolat ?
-Mon Dieu non, s’exclama Erwan en ouvrant le sac. C’est…
-…Youfie ! »
Squall se rua sur elle et la hissa hors du sac, qu’il jeta dans un coin. Il l’allongea sur le sol et lui tapota les joues. Elle était blanche comme un linge et gémissait de temps à  autre. Malgré les tentatives de Squall, elle ne se réveilla pas.
« Dieu sait ce que lui a fait FireFly.
-Il ne perd rien pour attendre, ce salaud…
-Squall, dit Haschatan, on croirait une mauvaise série B.
-Pff, c’est même pas du chocolat. »
Erwan se releva et regarda le groupe. Squall et Haschatan étaient penchés sur Youfie, inconsciente. Fury était prostré dans un coin et semblait souffrir atrocement. K-Ro et Kefka étaient tout deux silencieux de l’autre coté de la cellule, ce qui était relativement inquiétant. Et Mr.Magnum était dos au mur, dans le fond, et semblait réfléchir. Erwan soupira.
Le seul espoir de s’enfuir est de compter sur les Trauméniens restants.

[center]*
* *[/center]

Aran se tourna vers Nina et lui décocha un sourire ravi. Cette dernière lui rendit et leurs mains se serrèrent. Ils avaient tout les deux l’impression d’être comme les amis de Peter Pan en route vers le Pays Imaginaire, sauf qu’ils volaient aux cotés du Dieu Hermès et que ce n’étaient pas les enfants perdus qu’il allaient rencontrer, mais les Dieux de l’Olympe. Néanmoins, imagination aidant, il continuaient à  sourire en voyant le paysage défiler à  des kilomètres sous eux.
Derrière eux, NightBeast tentaient de multiples pirouettes et autres chorégraphies aériennes, notant mentalement celles qui lui procuraient le plus de sensations. Il essayait la triple vrille en piqué lorsque Wee-Ree-Cat se mit à  hurler à  nouveau, obligeant NightBeast à  se boucher les oreilles en ronchonnant, et aux deux tourtereaux à  sortir de leur rêverie.
Héphaïstos, après avoir terminé sa corvée avec Typhon, avait appelé Hermès, le messager des Dieux, pour qu’il vienne à  sa forge et conduise les Trauméniens à  l’Olympe. Aran avait expliqué à  Hermès leur but en venant ici, brièvement, et le Dieu avait accepté de les mener au palais des divinités. Il les avait néanmoins prévenu que les Dieux n’étaient pas faciles à  manipuler, et qu’il auraient certainement énormément de difficultés à  obtenir les renseignements qu’ils désiraient :
« J’espère que vous êtes prêts à  tout pour savoir si votre amie est passée ici, avait-il même ajouté.
-Nous avons été jusquâ€™à  mourir pour elle. » avait simplement répondu Aran. Et devant les regards décidés des Trauméniens – Wee-Ree-Cat mis à  part, étant donné qu’il ne cessait de ronchonner dans son coin – Hermès leur avait finalement fait signe d’approcher. Il avait agité son caducée devant eux et s’était tout simplement élevé dans les airs, en leur indiquant de faire de même. Aran, Nina et NightBeast s’était envolé sans trop de mal, mais Wee-Ree-Cat avait encore dû se faire remarquer :
« J’y arrive pas ! avait-il beuglé plein de mauvaise foi.
-C’est pourtant simple, avait rétorqué NightBeast en tourbillonnant sur lui-même. Il suffit d’y croire…
-Ferme-la, toi ! Je ne peux pas, alors on insiste pas et je vous attend sagement avec le gros dingue et le monstre, ok ?
-Hors de question, avait tranché Aran. Si on commence à  se séparer, nous n’y arriverons pas. Fais un effort et décolle, nom d’un chien.
-Miaou. » avait craché Wee-Ree-Cat. Mais il avait finalement fallu l’intervention d’Hermès pour que le groupe prenne son essor. Le Dieu avait employé la manière forte : Après avoir porté le Trauménien au dehors du cratère, il l’avait tout simplement lâché. Wee-Ree-Cat avait hurlé, hurlé encore et encore, puis avait finalement réussis à  ralentir, puis se stabiliser. Il avait crié encore un bon moment avant de s’arrêter.
Mais là , il venait de recommencer.
« Qu’est-ce qu’il y a, le matou ? demanda NightBeast.
-J’ai le vertige, merde ! Je supporte pas la hauteur, tout ça !
-Ferme les yeux, répondit NightBeast avec un clin d’œil. Et profites-en pour fermer ta bouche. »
Wee-Ree-Cat envoya un coup de griffe vers NightBeast, mais l’adolescent était déjà  loin et se bidonnait avec application. Mais au moins, Wee-Ree-Cat cessa de hurler. Quelques minutes plus tard, Hermès leur annonça qu’ils étaient en vue de l’Olympe, et qu’il fallaient qu’il amorcent leur descente.
« Tout d’abord, commença Hermès, laissez-moi vous introduire…
-Bigu ! gloussa NightBeast derrière lui.
-…auprès des Dieux. Ne dites rien, je vous présenterais et leur expliquerais. Ils ont la sale manie de tout embrouiller, et de se jouer des mortels. »
Les Trauméniens et Hermès se posèrent aux pieds d’un immense escalier au sommet duquel se tenait le plus grand et le plus luxueux palais qui n’ait certainement jamais existé. Nina se retourna mais le sol où reposaient les marches ne s’étendait pas à  plus de cent mètres autour d’eux. Ils se trouvaient sur une sorte d’îlot volant qui surplombait une vaste étendue de plaine. Était-ce la Terre des hommes, ou autre chose ? Elle l’ignorait.
« Et vous, finit par demander Nina, est-ce que vous ne risquez pas de vous jouer de nous ? »
Le Dieu sourit et répondit calmement « Qui sait ? », avant de monter les marches.

Le temps s’écoula rapidement jusquâ€™à  ce que Hermès réapparaisse en haut de marches. Il était tellement haut qu’il dû leur faire signe de venir, car crier n’aurait même servit à  rien. Mais avant que les Trauméniens se mettent à  escalader les premières marches, une superbe femme apparut à  leur cotés.
Elle était d’une beauté sans pareil, surpassant même celle des Dieux – le peu que les Trauméniens en avaient vu. Son corps parfait n’était voilé que du strict minimum, à  savoir une simple toge moirée à  demi transparente qui faisait bien plus que laisser entrevoir la physionomie avantageuse de la femme. Et elle souriait, le plus beau sourire de la création très certainement, adressé aux quatre humains qui n’osaient plus remuer d’un pouce, subjugués par tant de magnificence. Même Nina, pas particulièrement attirée par la gente féminine, se sentit troublée par cette apparition.
« Bienvenus, illustres humains aux cÅ“urs courageux… » dit-elle. Sa voix était mélodieuse et insufflait à  ceux qui l’entendaient un sentiment de bonheur et d’amour sans fin. Wee-Ree-Cat soupira de concert avec NightBeast.
« Votre quête est noble et sans nulle autre pareille, je suis impressionnée de découvrir après ces milliers d’années passés à  contempler vos frasques, des humains qui ont un tel sens du devoir et du don de soi.
-Ça, le don de soi, tu connais… N’est-ce pas Aphrodite ?
-Je me passerais de tes réflexions, Mercure, rétorqua la déesse de l’amour.
-Je n’aime pas qu’on m’appelle ainsi.
-Je sais. »
Les Trauméniens, toujours immobiles, regardaient avec un peu d’appréhension la tension qui grimpait en flèche entre les deux êtres divins, redoutant le moment de l’explosion. Mais il n’en fut rien : Aphrodite finit par disparaître de la même façon qu’elle était venue et Hermès les conduisit sans un mot jusqu’en haut des marches.
Une immense porte de marbre noir, de cinq ou six mètres de hauteur au bas mot, les séparait encore des Olympiens, et Hermès leur recommanda une dernière fois, avant de pénétrer dans le domaine des Dieux :
« N’oubliez surtout pas que ces personnages ne sont pas de votre coté : S’il peuvent vous mettre des bâtons dans les roues, ils le feront dans le simple but de se divertir. Nous sommes apparus il y a des milliers d’années, et les moyens de se divertir se font rares…
-Mais alors pourquoi vous nous aidez, vous ? demanda Nina.
-Que vous ayez confiance en moi ou non, je ne fais qu’énoncer une vérité immuable. Les Dieux sont ainsi faits, mais pour ma part, je préfère égayer ma longue vie en vous aidant. Si vous êtes méfiants à  mon égard, je ne vous en voudrais pas, au contraire : C’est cette paranoïa qui est nécessaire lorsqu’on entre au palais de l’Olympe. »
Hermès poussa ainsi la porte, sur ces quelques mots, et les Trauméniens entrèrent dans la demeure des Dieux.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Traumenschar
MessagePublié: 17 Août 2008, 22:58 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
4. Première épreuve : Athéna.
Le rire tonitruant de Bacchus, dont les vapeurs d’alcool s’étendaient encore plus loin que sa bouche encore pleine de restes de nourriture à  peine mâchée, résonna dans la demeure des Dieux. Résonna ‘encore une fois’ devrait-on dire, étant donné que ce Dieu n’arrêtait pas de rire dès qu’une occasion se présentait, et même lorsqu’il n’y avait rien de drôle. Il faisait un peu penser aux rires enregistrés qu’on trouve dans les sitcoms et qui se mettent en route dès que Lola hausse les épaules ou que Justine refait ses lacets.
Zeus lança un regard noir à  Bacchus, qui s’essuya les yeux et termina son verre qui ne cessait de se remplir tout seul. Puis il se tourna vers NightBeast et fronça les sourcils, tel un père réprobateur, avant de reprendre la parole :
« Comme je viens de vous le dire avant cette interruption : Pourquoi devrions-nous vous aider à  retrouver votre amie ?
-Si vous ne voulez pas, on se débrouillera sans vous, c’est tout… »
Nina envoya son coude dans les cotes de son compagnon, qui roula des yeux. Si on ne peut plus dire la vérité, alors, songea-t-il. Zeus frotta sa barbe immaculée pensivement, un sourire se dessinant sous son visage de marbre. À ses cotés, les autres divinités trônaient, toutes rassemblées pour l’occasion. Des humains qui viennent de leur propre chef rencontrer les Dieux pour leur soumettre une requête, c’était un bon moyen de se distraire, et aucun d’entre eux n’avait voulu manquer à  l’appel.
Zeus, au centre, présidait l’assemblée. À sa droite siégeaient Héra, la Déesse du Mariage, Arès, le Dieu de la Guerre, et Poséidon, le Dieu des Mers et des Océans. De l’autre coté se tenaient Artémis, la Déesse de la Chasse, et Athéna, la Déesse de la Sagesse, accompagné de Déméter, la déesse de l’Agriculture, et de Bacchus, le Dieu de la Vigne et du Vin. Hestia était aux pieds du maître des Dieux, semblant attendre patiemment quelque chose. Derrière eux se trouvaient également Apollon et Aphrodite, respectivement Dieu des Arts et Déesse de l’Amour. Aran remarqua qu’Apollon semblait quelque peu mal en point.
« Ce que veux dire mon ami, ô grand Zeus, c’est que nous sommes vraiment déterminés à  retrouver notre amie, reprit Nina en faisant un pas en avant. Et nous serions honorés que vous nous prêtiez main forte dans cette tâche.
-Tsss, lèche-bottes, chuchota Wee-Ree-Cat.
-Et qu’est-ce que cela nous apporterait ? répondit Zeus en haussant un sourcil.
-Nous vous en serions infiniment reco… »
Nina se retrouva tirée en arrière par Hermès, qui secoua la tête. Les Trauméniens se réunirent autour du Dieu, le seul qui manquait au panthéon de l’Olympe avec Héphaïstos, et il leur dit :
« Vous n’obtiendrez rien sans leur donner quelque chose en échange.
-Mais c’est justement ce que je leur disais, commença Nina.
-Ça ne leur suffira pas. Ils sont pervers, je vous l’ai dit, et ils ne vous aideront pas s’ils n’obtiennent pas quelque chose de plus intéressant en retour. De plus intéressant, pour eux.
-Mais nous n’avons rien à  leur donner, répondit Aran en perdant patience. Nous aurions peut-être dû apporter de quoi les contenter, c’est ça ? Des pierres précieuses et autres conneries de ce genre ?
-On n’a quâ€™à  se barrer, et puis voilà , râla encore Wee-Ree-Cat.
-Ils peuvent créer tout ceci, rétorqua le Dieu messager. Ils n’ont que faire de ces richesses. Ce qui les intéresse se situe bien au-delà  de ces choses bassement matérielles. Ils ne veulent qu’une chose de vous :
-…Que vous nous distrayiez. » termina le maître des Dieux en se levant. Les autres Dieux s’écartèrent pour laisser passer Zeus, qui s’approcha des Trauméniens. De près, son allure était encore plus imposante que lorsqu’il était assis majestueusement sur son trône. Son regard passa sur Aran, Nina et Wee-Ree-Cat, qui étaient forcés de lever les yeux pour pouvoir apercevoir son visage. Nina se rendit soudainement compte d’un détail, et jeta un Å“il vers NightBeast qui s’était, subrepticement, éloigné du groupe et s’approchait dangereusement d’Aphrodite. Ce dernier dut sentir le regard appuyé de sa ‘mère’ et il les rejoignit sans un mot, un sourire niais greffé sur son faciès.
« Nous savons si cette Séphy-Roshou est passée ou non dans le royaume des Dieux. Mais nous ne vous le dirons qu’après une épreuve bien spéciale.
-Bah voyons, maugréa Wee-Ree-Cat. On se croirait dans un mauvais Rpg…
-Après douze épreuves, même, reprit Arès avec un sourire. Vous serez nos nouveaux Hercules et vous aurez de nouveaux travaux à  abattre pour parvenir à  vos fins.
-Mais nous sommes généreux, ajouta Déméter, et vous pourrez les passer ensemble, tous les quatre.
-Et si nous refusons ? »
Tout les Dieux se tournèrent vers Aran Valentine, qui fixait d’un regard sévère le maître des Dieux. Hermès, derrière lui, n’osa même pas lui dire de baisser les yeux. Seule Aphrodite plissa les yeux et eut un léger sourire. Ce garçon lui plaisait.
« Vous n’avez pas le choix, humains, clama finalement Zeus d’une voix lourde. Vous n’avez aucun moyen de repartir d’ici, dorénavant.
-Ah ouais ? » grogna Wee-Ree-Cat en sortant les griffes. Aran Valentine fut immédiatement à  ses cotés, sa longue faux dans les mains. Nina voulu s’interposer, mais NightBeast l’en empêcha en la retenant par le bras.
« Laisse, il faut qu’ils le fassent, sinon ils ne seront pas contents. »
Les autres Dieux, amusés, se reculèrent comme les deux Trauméniens restés à  l’écart. Zeus, impassible, écarta les bras pour les inviter à  attaquer en premier. Aran et Wee-Ree-Cat se regardèrent l’un l’autre une seconde, et s’élancèrent de concert sur le maître des Dieux en hurlant.

*
* *


« Aïe-euh !
-Je suis désolée, monsieur, mais il faut désinfecter. Le morceau de bois a laissé des écharpes, et il y a de la poussière de plâtre sur…
-Oui, je sais encore où est-ce que je suis tombé, merci ! »
L’infirmière fronça les sourcils et se tut, interdite. Le commissaire Thourn soupira. Pourquoi est-ce qu’il fallait toujours que tout le monde sache tout mieux que lui ? Évidemment qu’il y avait des échardes dans sa blessure, vu que c’était un morceau de bois qui l’avait faite. Il se frotta la tempe alors que l’infirmière lui faisait son bandage, et sursauta lorsque la porte de la petite salle s’ouvrit avec fracas.
« Mais aïe-euh, merde !
-Je… j’ai sursautée !
-Commissaire ! hurla Détroit en s’asseyant de l’autre coté de Serge Thourn. Je crois que j’ai compris ce que vous vouliez dire avec les pseudonymes, tout à  l’heure !
-Et il t’a fallu tout ce temps ? C’est de pire en pire…
-J’ai demandé aux policiers de relever tous ces pseudonymes, après que nous soyons partis, et j’ai la liste, là  !
-Donne-moi ça.
-Arrêtez de remuer, ça fait deux fois que je dois refaire ce bandage ! »
Serge Thourn avala la réplique cinglante sur l’incapacité du personnel hospitalier d’ici et se concentra sur la liste. La dizaine de pseudonymes était courte et ils semblaient tous complètement inintelligibles pour le commissaire. DragonNoir, Q-Po, DarKenshin, Pythagore, Viper Dragoon, Dalisc, Arkh, Séphira Strife, Hilde… Ça n’avait aucun sens. Il eut beau tourner en tout sens ces pseudonymes, aucun ne lui faisait écho d’une manière significative. Il rangea le feuillet dans sa poche et demanda à  Détroit s’il avait trouvé d’autres choses intéressantes :
« Je suis parti en même temps que vous, commissaire, répondit le jeune homme. Je n’ai pas pu trouver autre chose et je…
-Mais pas toi, évidemment ! Je parle des policiers qui sont venus après !
-Oh ! Non, ils n’ont rien trouvés pour le moment, mais ils commencent tout juste à  dépiauter les papiers du propriétaire de l’appartement, un avocat apparemment… Ils n’ont pas finis, ça je peux vous le dire…
-Ils ont jusquâ€™à  ce soir.
-Mais c’est impossible, commissaire ! Ils n’y arriveront jamais ! »
Serge Thourn regarda Sylvain de haut en bas, puis ajouta d’un ton mielleux :
« Tu n’as rien eu de casse dans l’accident ?
-Oh non, commissaire ! Rien du tout ! Coup de bol, hein ?
-Ouais, comme ça tu vas pouvoir aller filer un coup de main à  l’appartement. Allez, magne-toi ! »
Sylvain Détroit resta une seconde de trop à  réfléchir sur le sens des paroles du commissaire, ce qui lui valu une gifle sur le haut du crâne, puis il partit sans demander son reste. Thourn se passa une main sur la figure, puis se leva. Sa jambe résista au niveau de la cuisse et il manqua de s’étaler sur le carrelage.
« Mais vous avez pas encore fini, vous ?
-Non, et je dois recommencer, maintenant que vous venez de tirer dessus comme un fou ! Asseyez-vous ! »
Le commissaire Serge Thourn, cinquante ans passés, serra les dents et fit un grand sourire à  l’infirmière avant de s’approcher d’elle. Celle-ci ouvrit de grands yeux lorsqu’il prit la paire de ciseaux sur la desserte et qu’il découpa la bande qui dépassait encore de son bandage. Il replia rapidement le morceau découpé à  l’intérieur et reposa l’outil sur les genoux de l’infirmière avant de la remercier.
« Mais vous ne pouvez pas…
-Je peux, et je le fais. Maintenant, si vous voulez bien m’excuser, mais j’ai autre chose à  faire que d’attendre que vous ayez terminé. Bonne soirée ! »
Le commissaire Thourn sortit de la salle en claudiquant. Depuis quand fallait-il trois heures pour faire un simple bandage ? Depuis quand est-ce qu’il fallait désinfecter toute la jambe lorsqu’on avait un petit bobo ? Depuis quand les hôpitaux avaient cette odeur horrible ? Depuis toujours. Seulement là , il n’avait pas la patience d’attendre gentiment que sa momification partielle soit achevé. Il avait peu de route à  faire jusqu’au domicile qu’il avait visité au début de son enquête, mais il lui fallait y arriver le plus rapidement possible.
Son irruption dans l’appartement n’était certainement pas passée inaperçue, et si jamais ce qu’il avait dans la tête était vrai – à  savoir la relation qui était établie entre ces pseudonymes et certains forums dont avait parlé le frère de son principal suspect – il fallait à  tout prix qu’il retourne à  Linas pour l’interroger à  nouveau.
« Et si jamais celui-ci n’est plus présent, ça ne fera que l’accuser encore plu… Hé ! »
Le commissaire évita de peu la collision avec les deux hommes baraqués qui lui barraient littéralement le passage. L’un des deux colosses leva devant lui sa carte stipulant qu’il faisait partie de la police des polices, et lui dit d’un ton doux mais menaçant :
« Est-ce que nous pourrions vous parler quelques minutes, commissaire Thourn ? »

*
* *


Nina soupira en essuyant une nouvelle fois le sang sur la lèvre enflée de son petit ami, qui grimaça. Aran fixait droit dans les yeux le maître des Dieux, qui lui souriait fièrement. Un peu plus loin, Wee-Ree-Cat repoussa une énième fois NightBeast qui tentait de faire la même chose. La nymphe qui avait apporté une coupe d’eau et le linge se retira sans un bruit, alors que les Trauméniens se réunissaient de nouveau face aux Dieux.
« Alors, tonna Zeus avec un sourire en coin, acceptez-vous notre offre ou décidez vous de vous mesurer à  moi une nouvelle fois ? »
Aran Valentine soupira. Il avait en horreur de se soumettre, même si la partie était perdue d’avance. Il ferma les yeux une seconde, et se concentra pour faire apparaître de nouveau son arme. Même s’il devait se battre pour le restant de ses jours, il se…
« Nous acceptons. » dit Nina avant que qui que ce soit ne puisse bouger. Aran la regarda, stupéfait, alors que NightBeast pouffait sous cape.
« Très bien, clama Zeus en reprenant un peu de son sérieux. Alors que ces épreuves commencent immédiatement !
-Ne me dites pas que vous avez déjà  réfléchit aux sujets des épreuves ? demanda NightBeast, pensant qu’ils allaient peut-être pouvoir se reposer un jour ou deux.
-Bien sûr que si, humain, minauda Aphrodite. Nous sommes des Dieux !
-Athéna, reprit Zeus. Conduis les humains à  ta chambre.
-Très bien, suivez-moi. »
La déesse Athéna, superbe dans sa toge blanche immaculée et coiffée d’un polos, précédait les Trauméniens qui lui emboîtaient le pas à  vive allure. Pendant qu’ils traversaient une partie du palais pour rejoindre la chambre de la déesse, Aran demanda à  voix basse à  Nina pourquoi elle avait acceptée si rapidement.
« Si tu m’avais laissé récupérer un peu, j’aurais pu…
-…recommencer à  te faire casser la figure ? termina-t-elle. C’était inutile, Aran, ils sont bien plus forts que nous, même avec nos tout nouveaux dons.
-Papa s’est fait laminer-euh ! Papa s’est fait laminer-euuuh !!
-J’ai accepté pour pouvoir retrouver Séphy-Roshou plus vite, expliqua Nina. Nous avons suffisamment perdu de temps avec tout ça. Vous oubliez que nous sommes ici pour elle, et non pour nous battre avec des Dieux !
-Ouais, bah j’ai pas demandé à  venir, moi, je vous rappelle. »
Athéna finit par s’arrêter devant une immense porte, qui s’ouvrit toute seule à  son approche. Elle pénétra dans sa chambre, et les quatre Trauméniens la suivirent. Les autres Dieux étaient déjà  là , et les attendaient.
« Ils pouvaient pas faire comme eux et nous éviter de marcher pendant deux heures ? grogna Wee-Ree-Cat.
-Si vous êtes déjà  fatigués par ce trajet, ricana Bacchus, alors il est inutile que nous poursuivions ces douze travaux.
-Non, c’est bon, allons-y ! » se hâta de récupérer Nina, en lançant un regard noir à  Wee-Ree-Cat qui lui tira la langue en feulant (exercice pas forcément évident, d’ailleurs).
« Parfait, clama alors le maître des Dieux. Je déclare la première épreuve des douze nouveaux travaux commencée. »
Athéna se dirigea vers un immense métier à  tisser et s’y installa. Il invita, sans un mot, les Trauméniens à  rejoindre le second appareil qui trônait majestueusement de l’autre coté de la chambre, et ceux-ci s’exécutèrent. Le métier à  tisser était un peu trop grand pour les Trauméniens, mais il n’était pas aussi impressionnant que celui qu’aurait utilisé Zeus. La taille de la déesse Athéna surpassait légèrement celle d’un humain moyen, mais elle n’était pas aussi grande que le maître des Dieux.
« Vous allez faire une broderie, dit Zeus. Une broderie dont le sujet est libre, et que nous jugerons une fois terminée. Si vous parvenez à  faire une meilleure broderie qu’Athéna, alors vous pourrez passer à  l’épreuve suivante. Il n’y a évidemment pas de limite de temps, vous pourrez ainsi nous divertir sans fin. »
Les Dieux partirent d’un immense rire guttural avant de s’évaporer, littéralement, sous les yeux des Trauméniens. Au même instant, les portes de la chambre se fermèrent sur eux, les cloîtrant dans la chambre de la déesse. Celle-ci avait déjà  commencé à  tisser sa toile, toujours sans un mot.
« Faire une broderie, grogna Wee-Ree-Cat. Pff, tu parles d’une épreuve.
-Est-ce que quelqu’un sait se servir de ce truc ? demanda Aran.
-Pas moi, répondit immédiatement NightBeast en examinant rapidement l’engin. Nina ?
-Non plus.
-Pourtant, c’est un truc de femmes, la broderie… »
NightBeast se frotta la joue – et Nina la main – tandis qu’Aran s’approcha d’Athéna pour la regarder faire. La déesse maniait l’outil à  la perfection, avec une dextérité et une précision sans pareille. Les autres le rejoignirent, sauf Wee-Ree-Cat qui préféra faire le tour de la chambre, et ils regardèrent la déesse broder pendant un bon moment, tentant d’apprendre la technique.
« Je pense que j’ai compris. » dit finalement Nina au bout d’une heure. Elle se dirigea vers l’autre métier à  tisser et s’installa. Aran vint avec elle et l’aida à  se lancer. La jeune femme maniait la navette, l’outil qui permettait de passer le fil à  tisser dans les trames tendues, et commençait son ouvrage lentement, mais sûrement. Aran l’assistait sans savoir exactement quoi faire pour l’aider, mais contrairement aux autres, il était avec elle. Wee-Ree-Cat s’était mis dans un recoin de la pièce et roupillait, tandis que NightBeast était restée aux cotés d’Athéna, regardant plus la déesse que son ouvrage.
Ils s’attelèrent malgré tout à  la tache du mieux qu’ils purent. Le métier à  tisser grinçait, de plus en plus rapidement, du coté des Trauméniens. Nina prenait de l’assurance et bientôt, elle eut achevé une frise assez réussie. Elle poursuivit son ouvrage en prenant de l’assurance, tandis qu’Aran examinait la porte de sortie. Il tenta de l’ouvrir, sans résultat. Ils étaient donc bel et bien coincés ici, jusquâ€™à  ce qu’ils trouvent une façon de battre Athéna. Celle-ci, justement, terminait sa broderie.
Autant le début de la broderie de Nina était splendide, autant les Trauméniens furent littéralement éblouis par l’ouvrage de la déesse de la sagesse. Le travail d’Athéna était remarquable de finesse, de beauté et de régularité. Les scènes de la vie des Dieux s’enchaînaient admirablement, formant une sorte d’immense représentation fidèle et détaillée du quotidien divin. On se serait presque attendu à  voir la tapisserie s’animer.
« Je crois que le choix sera facile. » ricana Bacchus.
Les Trauméniens se retournèrent sur les Dieux qui étaient réapparus dans la pièce. Ceux-ci arboraient tous, sans exception, un visage réjouit. Ils savaient pertinemment que de simples humains ne réussiraient jamais, même après des millénaires d’entraînement, à  égaler les dons de la déesse. Les Dieux emportèrent l’ouvrage d’Athéna et leur demandèrent de recommencer, s’ils désiraient toujours poursuivre leur quête.
« Nous n’abandonnerons pas, clama Aran Valentine. Ce n’est pas parce que nous sommes désavantagés que nous laisserons tomber. Nous réussirons cette épreuve, et les autres également, et nous repartirons de votre royaume avec les informations que nous sommes venus chercher.
-Très bien parlé, humain, reprit Zeus. Nous attendrons votre prochaine broderie avec… …impatience. »
Les Dieux disparurent de nouveau. NightBeast rejoignit Nina et Aran autour du second métier à  tisser, et ils regardèrent Athéna qui s’était déjà  remit à  l’ouvrage. Aran pesta.
« On a aucune chance.
-Mais où est passé ton engouement de tout à  l’heure, papounet ?
-Je m’y remet, déclara Nina. J’ai bien assimilé la technique de base, mais il faut que je comprenne comment elle fait pour mettre autant de détails dans sa broderie. Il est hors de question que nous passions le reste de notre éternité dans la chambre de cette déesse.
-Ça ne me dérangerais pas, moi, ricana NightBeast. Dans la chambre de cette jolie nénette, c’est intéressant…
-Où est Wee ? »
Nina et NightBeast se tournèrent vers Aran, qui regardait les alentours. Dans le recoin où il s’était allongé en boule, Wee-Ree-Cat avait disparu.

*
* *


[tU vOIs qUE tU pEUx lE fAIrE, sAtAnA]
…
[rEstEr mUEt nE nOUs dOnnErAs pAs tOrt, tU sAIs]
Que m’avez-vous fait ?
[mAIs rIEn, rIEn dU tOUt, lOrd sAtAnA. cE pOUvOIr, tU l’AvAIs En tOI dÈs lE dÉpArt, dEpUIs tA nAIssAncE. nOUs n’AvOns fAIt qUE t’AIdEr À l’ExplOItEr]
Mais je n’ai jamais, jamais eu connaissance de ces dons. Je n’ai aucunement été le témoin de phénomènes mystiques provenant de ces dons durant des années… Pourquoi là  ? Pourquoi maintenant ?
[prEndrE cOnscIEncE d’UnE chOsE Est bIEn sOUvEnt lA mEIllEUrE fAçOn dE l’ApprIvOIsEr]
Qui êtes-vous ?
[nOUs tE l’AvOns dÉjÀ dIt : nOUs sOmmEs tEs fAn-gIrls qUI…]
Qui êtes vous vraiment ?
[nOUs sOmmEs tEs fAn-gIrls…]
ARRÊTEZ ÇA !! Nous savons pertinemment, vous et moi, que ce n’est pas possible. Je suis prêt à  croire à  cette affluence subite de paranormal dans ma vie, mais vous n’existez pas. Vous n’étiez pas des êtres de chair et de sang derrière un écran, mais le pur produit de mon imagination, et… et…
[tU cOmmEncEs À cOmprEndrE]
Je vous ai… …créées ?
[dE tOUtEs pIÈcEs]
Et si je décide de vous faire réintégrer le néant dont vous n’auriez jamais dû émerger ?

On ne répond plus, n’est-ce pas ? Hein ? Pourquoi ne poursuivez-vous pas à  me prodiguer vos fameux conseils ?

Vous avez peur ? Peur de ce que je pourrais faire ?

Vous êtes réellement en colère, n’est-ce pas ? À moins que je vous ai fait disparaître réellement, ha ha ha !

Répondez-moi si vous êtes encore là  !

Vous m’entendez ? Je sais que vous êtes encore là  ! Revenez ! REVENEZ !!!

[nOUs vOIlÀ, lOrd sAtAnA]
Mais où étiez-vous donc passées ?
[dAns lE nÉAnt dOnt nOUs n’AUrIOns jAmAIs dÛ sOrtIr]
I… Impossible…
[tU dEvrAIs sAvOIr mAIntEnAnt qUE rIEn n’Est rÉElEmEnt ImpOssIblE]
Alors pourquoi vous ne m’obéissez pas lorsque je vous intime de vous taire ?
[pArcE qU’AU fOnd dE tOI, tU nE lE vEUx pAs vrAImEnt]
Inimaginable. J’ai généré des êtres dans mon esprit. C’est peut-être une forme de schizophrénie ? Ou bien je suis tout simplement entrain de perdre la tête ? Ce qui expliquerait le fait d’avoir prit le commandement d’un groupe que je ne sais pas où mener…
[tU lE sAUrAs lE mOmEnt vEnU, nE pErd pAs cOnfIAncE]
Quand ? Comment le saurais-je ?
[nOUs tE mOntrErOns lE chEmIn, cOmmE tOUt À l’hEUrE]

*
* *


« Qu’est-ce que c’est que ce délire ? » chuchota Wee-Ree-Cat après avoir longuement baillé et s’être frotté les yeux. Il s’était endormi dans un coin de la chambre de l’autre déesse, là , et maintenant qu’il s’éveillait, il était dans un autre endroit qui lui était inconnu. Il s’était alors étiré avant de se planquer aussi silencieusement qu’un chat sous un immense guéridon. Il n’y avait aucun Dieu en vue, mais on n’était jamais trop prudent.
« Pourquoi je me retrouve là , moi ? »
Ce qu’ignorait Wee-Ree-Cat, c’était que les Dieux étaient apparus de nouveau dans la chambre de la déesse, très près de lui. Et lorsqu’ils s’étaient de nouveau évanouis dans les airs, ils l’avaient emportés par mégarde avec eux, sans s’en rendre compte. Une fois réapparus dans un autre endroit du palais, ils s’étaient séparés, laissant là  le Trauménien endormi, qui s’était réveillé un peu désorienté.
« Voyons voir, murmura Wee-Ree-Cat à  lui-même : Les autres étaient en train d’essayer de faire une broderie plus belle que celle de la déesse, quand je me suis endormi. Je me rappelle aussi qu’on ne pouvait pas sortir de la chambre, car la porte était hermétiquement close. Mais moi, je suis dehors. Je pourrais peut-être en profiter pour me barrer tranquillement ? »
Mais au fond de lui, Wee-Ree-Cat ne désirait pas plus que ça laisser les trois autres Trauméniens aux prises avec les Dieux, et comme il était relativement rancunier – trait de caractère accentué par les sentiments félins que son corps Trauméniens lui conférait – il décida de mettre à  profit cet avantage pour visiter le palais et essayer de trouver quelque chose qui pourrait être utile.
Quittant sa cachette, il fonça sous un autre meuble immense, et écouta. Son ouïe avait également été amplifiée par son changement d’apparence, et il n’entendit personne approcher. Parcourant rapidement le couloir sans embûche, il poussa la porte doucement pour pénétrer dans un autre couloir, immense, et lui aussi vide. Mais il reconnu le passage dans lequel il se trouvait pour l’avoir déjà  emprunté, du moins en partie. Il se souvenait qu’en prenant l seconde porte sur sa gauche, il se retrouverait dans un grand hall où il lui faudrait prendre la porte d’en face pour retomber sur le couloir où se trouvait la porte de la chambre d’Athéna.
Wee-Ree-Cat se rua sur la porte et l’ouvrit, puis s’arrêta en pleine action. Quel pourrait être l’intérêt de retourner dans la chambre d’Athéna alors qu’il n’avait rien déniché de susceptible de les aider ? C’était ridicule. Il referma la porte derrière lui et, depuis le grand hall, examina les alentours. Ses moustaches se mirent soudainement à  vibrer, alors qu’il entendit le bruits de pas. Les pupilles dilatées, il courut jusqu’au banc le plus proche et tenta de s’y cacher un maximum.
Et il tendit l’oreille.
« …vraiment ? Tant que ça ? dit une voix de femme.
-Oui, tant que ça, répondit une voix d’homme légèrement tendue. Et si quelqu’un doit la retrouver, alors ça sera moi, pour ce qu’elle m’a fait subir !
-Oh, voyons, dit la femme d’une voix mielleuse. Tu vas me faire croire que tu t’es laissée faire sans rien dire ?
-Non, au départ, c’était même agréable, mais dès qu’elle eut commencée à  avoir le dessus, elle… »
Les voix sortir du hall, et l’écho des dernières paroles de l’homme restèrent suspendues quelques instants. Wee-Ree-Cat n’avait pas pu voir les personnes qui avaient parlées, mais il se doutait que c’était des Dieux. De toute façon, il n’y avait que ça, dans ce palais. Il risqua un oeil pour sortir de sa cachette et, ne voyant personne, se mit à  courir vers la porte qui menait au couloir suivant. Il la referma le plus rapidement possible et se retourna vers… …l’obscurité.
« Hein ? »
Soit son sens de l’orientation l’avait trompé, soit il s’était trompé de porte dans l’affolement de sa fuite. Curieux, tel un chat, il plissa les yeux pour habituer rapidement ses pupilles à  l’obscurité. Décidément, songea-t-il, être à  moitié chat n’a pas que des désavantages. Bientôt, il arriva à  distinguer les détails de la pièce où il se trouvait. Une petite pièce sans bougie ni éventuelle lumière, même éteinte. Les meubles étaient peu nombreux et, manifestement, anciens. Des toiles d’araignées étaient étalées partout au plafond, sur les chaises et sur les murs. Même au sol.
Wee-Ree-Cat leva la jambe en grimaçant, soulevant une toile collante de sa semelle.
« Mais où est-ce que je suis tombé... »
Un bruit lui fit dresser le poil alors qu’il allait sortir de la pièce. Immobile, il se retourna lentement vers la source du froissement qu’il venait d’entendre, et vit quatre yeux rouges qui brillaient dans un coin du plafond. Des yeux qui le regardaient.
Des yeux d’une araignée géante.

*
* *


« Vous vous améliorez, humains. » consentit Zeus en examinant la troisième broderie faite par Nina. Il l’exposa aux coté de la nouvelle broderie créée par Athéna, lumineuse, et les trois Trauméniens comprirent immédiatement que ce n’était encore pas pour cette fois. Ils avaient pourtant mis tout leur cÅ“ur pour faire ce portrait de Séphy-Roshou, assez ressemblant soit dit en passant, mais il ne semblait pas faire l’effet escompté aux Dieux. Le seul qui semblait avoir eu une réaction sensible était Apollon qui était resté de longues secondes subjugué par la beauté glaciale qui se dégageait du portrait tissé.
Les Dieux disparurent à  nouveau, accompagnés du rire de Bacchus. Aran frappa du poing contre le mur.
« Si je le tiens entre mes mains un jours, ce Dieu qui se marre, je l’égorge.
-Agaçant, hein ? ajouta NightBeast. J’ai encore beaucoup à  apprendre…
-Je n’en peux plus… »
Nina s’assit à  même le sol, et soupira longuement. Elle avait passé plus de temps que d’ordinaire sur cette ultime ouvrage, mais le résultat avait été encore une fois nul. Devaient-ils donc rester définitivement ici ? Elle se passa une main sur la figure, découragée, alors qu’Aran vint lui masser les épaules.
« Courage, nous allons bien réussir…
-Tu le penses vraiment ? répondit Nina en levant les yeux vers lui.
-Nan, il ment pour te rassurer, voyons ! » ricana NightBeast avant d’éviter une baffe de son papa virtuel. Il s’éloigna en sautillant vers Athéna et continua d’admirer ses formes qu’il devinait sous la toge.
« Nous n’y arriverons jamais, Aran. Elle est trop douée. Nous pourrions y passer des siècles que nous n’égalerons jamais son talent…
-Mais il le faut, pourtant. Je vais m’y mettre, et tu vas m’expliquer. Une fois que nous maîtriserons la technique, nous…
-Oui ? insista la jeune femme. Nous quoi ? Nous ferons des toiles et des toiles, à  n’en plus finir, et celles de cette déesse seront toujours plus belles ! Toujours !
-Nous trouverons bien un moyen, tenta de raisonner Aran.
-Nous devrions défoncer cette porte et essayer de trouver des informations nous-même, comme le groupe de Gorgon_Roo, Hilde et LIF. »
Elle avait consciemment omit de nommé Radamenthe, le traître, dans l’équipe. Mais le souvenir des trois autres voyageurs lui rappela la disparition d’Hilde, et celle de leur propre compagnon, Wee-Ree-Cat. Elle sentit les larmes de l’impuissance commencer à  luire sous ses yeux, et se retint pour ne pas éclater en sanglots.
« Athéna remarquera notre absence si nous parvenions à  nous enfuir de sa chambre, rétorqua Aran. Et si elle est aussi forte que Zeus…
-Aucun problème de ce coté là , hurla NightBeast. Elle ne remarque rien du tout tant qu’elle tisse ! »
Aran et Nina levèrent les yeux sur NightBeast qui était accroché à  la toge de la déesse et qui s’amusait à  la soulever pour regarder en dessous. Il grimpa même sur sa cuisse et sautilla pour attirer son attention. Mais Athéna, imperturbable, ne semblait même pas remarquer l’humain qui dansait sur sa jambe. NightBeast poussa même le vice jusquâ€™à  baisser son pantalon pour lui montrer ses fesses, avant de redescendre en riant.
« Vous avez vu ? Elle ne voit rien du tout, on pourrait tous s’entretuer qu’elle ne bougerait pas d’un poil. »
Les deux autres Trauméniens échangèrent un regard, puis s’élancèrent d’un commun accord vers la porte, prêts à  la réduire en poussière. Mais ils durent freiner avant de lancer leur assaut, car celle-ci s’ouvrit en laissant passer un Wee-Ree-Cat hors d’haleine, en nage, qui se jeta aux pieds de Nina en haletant.
« Wee !! s’exclamèrent en chÅ“ur les Trauméniens en retrouvant leur compagnon.
-Putain, je l’ai échappé belle, moi. » lâcha-t-il en se redressant. Devant lui, Aran, Nina et NightBeast reculèrent. Leurs yeux fixaient quelque chose de plus grand et de plus gros que Wee-Ree-Cat, qui poursuivait :
« C’est qu’elle a failli me voir, et là  j’étais cuit.
-Euh, Wee ? » risqua NightBeast en levant encore les yeux. La porte derrière lui se ferma doucement dans un léger ‘clac’, alors que la chose se rapprochait de Wee-Ree-Cat par derrière. Celui-ci s’essuya le front.
« Qu’est-ce que vous avez ? Vous n’êtes pas content de me revoir ?
-Si, répondit Nina en se forçant à  sourire. Mais tu aurais pu revenir seul, ça aurait été…
-…mieux ! termina Aran. Wee !! Derrière toi !! »
Wee-Ree-Cat se retourna et vit l’araignée. Aran, sa faux d’ores et déjà  à  la main, fonça sur elle en la brandissant, mais il fut arrêté par son compagnon avant d’avoir porté son attaque. Wee-Ree-Cat lui bloqua le bras et les deux Trauméniens tombèrent au sol devant l’araignée géante.
« Arrête, Aran, ce n’est pas une ennemie !
-Et qu’est-ce que c’est alors ? » répondit Aran en roulant sur lui-même pour se remettre d’aplomb. Sans même qu’il ne s’en rende compte, ses aptitudes et ses réflexes étaient décuplés depuis son passage dans l’au-delà  des Olympiens.
« Je m’appelle Arachné, répondit la principale intéressée. Et je peux vous aider. »
Wee-Ree-Cat et Arachné leur expliquèrent les circonstances de leur rencontre, pur fruit du hasard, ainsi que les explications concernant son apparence peu commune. En effet, bien longtemps avant l’arrivée des Trauméniens dans ce monde, Arachné était une jeune fille de Lydie, province de l’empire romain, qui voulu rivaliser de son talent de tisseuse avec la déesse Athéna. Mais lors de l’affrontement, Arachné eut la mauvaise idée de tisser des scènes de la vie des Dieux qui ne leur convinrent pas, et en guise de châtiment, elle fut changée en araignée pour tisser sa toile indéfiniment.
« Elle m’a dit qu’elle acceptait de tisser la broderie pour nous, reprit Wee-Ree-Cat. Mais à  une condition.
-Laquelle, demanda Aran, méfiant.
-Qu’on la fasse sortir du palais et qu’on l’emmène avec nous. »
Aran réfléchit quelques secondes. Il ignorait s’ils devraient sortir du palais ou non, dans leurs épreuves à  venir. Et si Arachné comptait sur leur soutient une fois les douze travaux achevés et leur renseignement obtenu, elle allait être déçue, car ils repartiraient avec leurs pilules en la laissant choir. D’un autre coté, elle seule arriverait à  broder assez bien pour qu’ils puissent espérer passer l’épreuve.
« Si jamais les Dieux te découvrent avec nous, c’en est terminé de toi, je suppose, dit Aran d’un ton neutre.
-Oui, répondit Arachné. Mais je peux me cacher, devenir aussi petite qu’une véritable araignée et me cacher sur vous.
-Si tu penses vouloir risquer le tout pour le tout en nous aidant, alors allons-y, conclut finalement le Trauménien. Mais est-ce que le jeu en vaut la chandelle ?
-Je suis coincée ici depuis plus de quinze milles ans, à  tisser des toiles sans fin. Je veux un peu d’action, dussé-je y perdre ma piètre vie. »
Aran hocha la tête, puis fit disparaître sa faux. Wee-Ree-Cat conduisit Arachné jusqu’au métier à  tisser, et celle-ci se mit à  l’ouvrage, sous les indications de Nina qui lui représentait verbalement le modèle. La broderie prit rapidement forme, sous les regards émerveillés des Trauméniens qui voyaient enfin une issue à  cette épreuve qui n’avait que trop durée. Athéna avait achevé la sienne, mais elle ne sembla pas se rendre compte de l’invité surprise dans le camp adverse, tant et si bien que lorsque leur ouvrage fut achevé, Arachné rapetissa et se glissa dans la fourrure de Wee-Ree-Cat, qui protesta, bien entendu.
« Tu peux pas te mettre ailleurs ? Je hais les araignées !
-Chut, Wee ! rétorqua Nina. Ils sont là . »
Les Dieux, en effets, étaient apparus quelques secondes après que la seconde broderie fut achevée. Zeus avança sa main immense vers l’ouvrage d’Athéna, le représentant entrain de donner naissance à  chacun de ses fils et filles, dans une aura de splendeur indescriptible. Le maître des Dieux, ravi, sourit à  la déesse avant de se tourner vers les Trauméniens. Ceux-ci virent le changement dans le regard de Zeus lorsqu’il prit leur broderie pour l’examiner. Un murmure général accompagna l’observation de la toile, puis une question :
« Qu’est-ce que cela est censé représenter ?
-Une bataille, répondit Nina en s’avançant. La bataille entre les humains et un Dieu mauvais, qui n’a de cesse que de leur faire du mal par toutes les façons possibles et imaginables. Une grande bataille qui ne signa pas la fin du Dieu mauvais, mais la première tentative des humains de réagir face à  lui.
-Hmm, je vois. »
Zeus était légèrement surprit s’entendre parler de ce Dieu si mauvais, alors que chacun savait que tous les Dieux étaient mauvais, d’un certain coté. Ils étaient manipulateurs, calculateurs, égoïstes, arrogants et souvent bien plus méchant que les monstres qu’ils sont censés combattre. Mais entendre parler d’un Dieu mauvais, sans autre qualité que représenter le Mal, il en était quelque peu étonné.
Mais la jeune humaine avait raison, et plus il regardait la représentation de ce Dieu mauvais, plus il sentait l’aura de Mal qui rayonnait autour de lui. Il était entouré de quatre autres Dieux mauvais, mais mineurs, qui combattait un groupe d’individus manifestement dépassés, mais qui continuaient à  combattre sans lâcher prise. Et autant le Mal tournoyait autour des quatre Dieux, autant Zeus pouvait percevoir le courage t la bravoure qui animait les humains combattant le Mal.
Cette toile, songea-t-il. Elle a une âme.
« J’ignore comment une telle avancée dans votre art de broder est possible, mais je dois me rendre à  l’évidence : Vous avez remporté la première épreuve, humains. »
Cris de joie du groupe de Trauméniens, sauf Wee-Ree-Cat qui préféra faire un pas de coté. NightBeast embrassa Nina et sauta dans les bras d’Aran avant que celui-ci ne puisse lui coller la baffe qu’il avait préparée.
« Suivez-nous jusquâ€™à  votre seconde épreuve. »
Zeus et le groupe de Dieux ouvrit la porte et s’en allèrent dans le couloir. Athéna avait retrouvé sa place auprès de Zeus, et les deux broderies flottaient devant elles. Un peu plus loin dans le couloir, elle s’arrêta et se tourna vers le mur. Elle leva les bras et les deux broderies allèrent se coller contre deux cadres vides, sur le mur. Les cadres scintillèrent une seconde et retrouvèrent leur apparence d’origine.
C’est ainsi qu’on raconte que la représentation de la bataille entre les Trauménien et Mistrophera trône toujours majestueusement dans les couloirs du palais des Dieux.

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages publiés depuis :  Trier par  
Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 132 message(s) ]  Aller vers la page Précédent  1 ... 5, 6, 7, 8, 9

Le fuseau horaire est UTC+1 heure [Heure d’été]


Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 2 invité(s)


Vous ne pouvez pas publier de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum

Recherche de:
Aller vers :  
cron
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction et support en françaisHébergement de site