"Persépolis" a été la première bande dessinée iranienne. Le style était proche de la ligne claire, avec cependant certaines imprécisions, un aspect un rien brouillon qui rapprochait par exemple le trait de celui de Trondheim. Pour le reste, l'intérêt esthétique du récit se limitait à l'utilisation des noirs et des blancs, du contraste, avec peu ou pas de dégradés.
Marjane Satrapi ayant en quelque sorte revu sa copie, le film sublime cette charte graphique. Les personnages sont plus détaillés, définis, les décors sont travaillés, certains passages guerriers se situent à la frontière entre photoréalisme et ombres chinoises. Les effets "buvard" occasionnels sont sublimes, l'utilisation de la couleur est judicieuse - faisant preuve d'une retenue qui nous évoque presque "La liste de Schindler", et, dans l'ensemble, l'animation fluide ne dessert pas le résultat. On peut dire que dans son style, ce long métrage d'animation est agréable à l'oeil.
Comme le dit Morgan, cette autobiographie dépeint impeccablement le totalitarisme iranien, mais parle de bien d'autre chose. C'est un film très drôle, très quotidien et pourtant très digeste, les tranches de vie parsemant une ligne narrative claire (les scènes rétrospectives étant juste assez longue pour bien encadrer le propos, et suffisamment courtes pour ne pas devenir superflues).
Une histoire vraie, ou quasi-vraie, et impeccablement romancée. C'est toujours appréciable, et c'est un très beau film.
Post-scriptum : Une rumeur indique qu'une fatwa a été lancée contre Marjane Satrapi. Même si le gouvernement iranien s'est plaint et inquiété de la vision supposément biaisée du film, la chose est peu probable, tant Marjane est prudente, refusant par exemple des entrevues avec certains journalistes qu'elle juge orientés. Il semblerait que certains éléments de son cheminement véritable soient contradictoires avec son autobiographie.