Eltanin

Eltanin

Learn Humanity
Nous sommes actuellement le 16 Juin 2024, 04:54

Le fuseau horaire est UTC+1 heure [Heure d’été]




Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 14 message(s) ] 
Auteur Message
 Sujet du message: Navire Sanglant
MessagePublié: 15 Avr 2005, 22:14 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]Raphaël Lafarge


[Final Fantasy VII]

Image






























Prologue[/center]




Le soleil venait de disparaître à  l'horizon. Les nuages violacés avaient viré au gris ; le ciel était devenu d'une couleur uniforme, un bleu sombre et profond. Aucune étoile n'était encore apparue.
Dans la jungle, il se déroulait autant de drames que pendant la journée ; un lézard bleu s'approchait du villageois égaré qu'il venait de pétrifier ; des fauves dévoraient des macaques ; les grenouilles magiques se reproduisaient en embrassant d'autres êtres vivants, les transformant eux aussi en batraciens. Mais l'activité des prédateurs n'empêchait pas le silence de s'étendre progressivement sur la jungle, comme une chape de plomb.
La silhouette sombre, aux angles brutaux, de l'avion se découpait sur le ciel nocturne. Il fendait l'air comme un oiseau mécanique de cauchemar, défi lancé à  la nature, hommage à  la technologie moderne.
Sur le flanc de l'avion, un idéogramme complexe souligné de la mention « SHIN-RA INC. ». En dessous, une marque : « Gelnika ». Il semblait se comporter normalement. Seul un léger panache de fumée sombre que l'engin laissait dans son sillage dénotait qu'il était en difficulté.

A l'intérieur, c'était la panique. Scientifiques engoncés dans des manteaux blancs, gardes en uniformes bleus et techniciens vêtus de gris couraient en tous sens en marmonnant des malédictions.
Carson ne cessait de ressasser une seule et même pensée : L'échantillon a détruit la réserve de parachutes. L'échantillon a détruit la réserve de parachutes. L'échantillon a détruit la réserve de parachutes.
C'était un petit mécano fluet, à  la voix enrouée. Il était d'autant plus inquiet qu'il connaissait leurs chances de survies. Les profs avaient réussi à  maîtriser l'être, mais il avait causé des dommages irréparables au réservoir de carburant et lancé une boule de feu qui avait consumé tous les parachutes. Il aurait voulu saborder l'avion en son âme et conscience qu'il n'aurait pas fait mieux.
Il se hâta vers le poste de pilotage. Andrew, le pilote, avait le visage baigné de sueur. Il lançait de frénétiques appels à  l'aide dans la radio.
- Mayday ! May-day ! May-day ! Nous survolons Gongaga ! Nous souhaitons être repêchés rapidement. Prévoyez d'urgence un stock de Queues de Phénix, parce qu'il y a peu de chances pour qu'un seul d?entre nous survive !
- Andrew, pourquoi « repêchés » ? fit Carson.
Le pilote se tourna vers lui. Il avait les yeux fiévreux.
- Je vais envoyer ce...
Il tira le manche à  balai.
- ... cercueil volant... dans la mer. Près de cette côte, le sauvetage ne devrait pas leur causer beaucoup d'ennuis.
- Mais nous allons nous noyer ! Le Gelnika est beaucoup trop lourd pour flotter !
- Pas de problème, Carson. Dans la soute, j'ai quelque chose qui devrait nous aider. Va le chercher.
Il donna un dernier coup au tableau de bord et saisit à  nouveau le micro de la radio.
- May-day ! May-day !
Un grésillement retentit dans le haut-parleur, mais Carson ne comprit pas les paroles.
- Je m'en fiche ! rétorqua Andrew. Pas dans quatre heures ! Maintenant ! Et je me fiche aussi des problèmes actuels de Shinra Inc. avec ce groupuscule terroriste ! May-day ! Merde, c'est même pas ça ! My-death, connards ! My-death ! My-death !
L'avion subit une brusque secousse. Andrew désigna du doigt la trappe qui donnait sur la soute. Le mécano hocha la tête, souleva le panneau et plongea dans l'obscurité.

Une nouvelle secousse ébranla l'appareil ; la trappe se referma. Carson lança un petit sort de Feu pour éclairer la soute.
C'était une pièce très étroite. Plusieurs caisses de matériel scientifique étaient alignées là . Mais le mécano n'était pas seul.
Un chercheur se tenait devant lui. Il avait un sourire dément et restait pelotonné dans des blocs gris qui ressemblaient à  des matelas miniatures.
- Salut, Carson.
- Qu'est-ce que c'est que ça ?
- Les isolants qui protègent le contenu de toutes ces caisses. Ils suffiront à  amortir le choc. T'es surpris, hein ?
- Ca ne servira à  rien. Nous allons plonger dans l'océan.
- Je sais. Mais tu mourras, pas moi. C'est le pilote qui vous envoie chercher... ça ?
L'homme montra son poignet. Un bracelet argenté y était fixé. Du mithril. Le vif-argent, métal plus dur que le titane, plus malléable que l'or, plus précieux que le platine, totalement inoxydable. Mais Carson se doutait que ce n'était pas là  ce que le scientifique désirait lui montrer.
Dans un renfoncement du bracelet de mithril était fixée une sphère violette, de la taille d'une balle de golf.
- C'est une Matéria Sous-Marin, dit l'inconnu. C'est très rare. Je survivrai donc au choc et à  la noyade. Joli coup, non ?
- Pourquoi restez-vous terré ici ?
- Facile à  comprendre, Carson. Si je sors de cet habitacle, tous ces crétins, pris de panique, se jetteront sur moi pour m'arracher les isolants et la Matéria Sous-Marin. Ils se piétineront, se battront jusqu'à  la mort pour être celui qui survivra, et en fin de compte, tout le monde mourra.
- Vous ramènerez nos corps à  la surface pour les ressusciter ?
- Si je suis le seul à  connaître les résultats des recherches, Shinra m'offrira une petite prime et un nouveau poste. C'est la dernière fois que tu me vois, Carson.
- Vous allez me donner cette Matéria.
- L'existence d'un savant importe davantage que celle d'un mécano minable.
Tandis qu'il se jetait sur le scientifique, Carson sentit que le Gelnika plongeait.
L'avion disparut sous la surface de l'eau, dans un bras de mer entre une large bande de terre et une région ensablée. Il continua sa trajectoire sous les flots et s'écrasa contre la paroi de la plaque continentale, avant de glisser et de sombrer dans les abîmes.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 11 Oct 2005, 20:00, édité 2 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 15 Avr 2005, 22:42 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]1[/center]



Costa Del Sol.
Une ville joyeuse, colorée, et cependant calme et reposante. Partout, les tons chauds du sable, de la brique jaune. Des pêcheurs, des touristes, des enfants, des filles en bikinis.
Le port de Costa Del Sol était à  la mesure de l?ambiance générale. A une extrémité, l?héliport ; à  l?autre, un hydravion rouge qui, pour quelque mystérieuse raison, stationnait là  depuis des années. De grands cargos blancs étaient rangés sur les quais, et les marins s?agitaient en permanence pour charger les vivres et marchandises, débarquer les passagers, s?embarquer dans les bateaux...
Cependant, depuis que des brigands avaient commis une razzia sur les provisions, les embarcations restaient immobiles. Un seul bateau était en état de fonctionner, de s?élancer vivement dans la mer et d?y disparaître : le Giger.
Le véhicule, qui portait le nom d?un obscur artiste de l?aube des temps, tranchait cruellement avec le décor ensoleillé. D?un noir étouffant, anguleux, patibulaire, c?était un grand cuirassé. Un aileron incroyable était fixé à  l?arrière du pont. Le Giger avait l?apparence qui convenait à  sa fonction ; c?était le navire des Turks.
Peter Jackson frissonna. Il était assez gros, avec un visage jovial, entouré d?une barbe noire hirsute. Ses lunettes, bien enfoncées sur son nez, étaient couvertes de sueur. Accoudé au rebord de la coque, il regardait atterrir l?hélicoptère de la Shinra.
Il finit par se décider. Il fallait descendre. C?était lui le capitaine.
Il courut sur la passerelle, se précipita vers l?hélicoptère. Un jeune homme mince, en costume noir tirant sur le bleu, avec une chevelure rouge foncé et une grande barre d?acier attachée au dos, venait de descendre.
- Excusez-moi, monsieur Reno...
Les yeux vifs du Turks le fixèrent.
- ... Je... je n?ai pas pu les retenir...
- Que se passe-t-il ?
Seigneur, pensa Jackson, il n?a pas l?air dans son assiette. C?est bien ma veine.
- Ils... ils... l?équipage du b-bateau...
Saleté de bégaiement ! Il va me tuer.
- I-Ils... la moitié d?entre eux sont... p-pa-pa... p-par-p...
- Articulez, coupa sèchement Reno.
- La moitié de mon équipage est partie !
- Pour quelle raison ?
- L-Les ru-rumeurs selon l-l-l-lesqu-lesquelles... la société Mako Shinra va faire faillite !
Le jeune homme écarta une mèche rouge de ses yeux.
- Vraiment. Bon, personne ne peut les empêcher de s'enfuir. A partir d?aujourd?hui, leurs maisons ne seront plus approvisionnées en Mako. Reste-t-il assez de personnes pour faire fonctionner le Giger ?
- B-Bien assez, monsieur Reno.
Un deuxième homme était descendu. Il était plus âgé et son crâne chauve, au-dessus de ses lunettes noires, luisait au soleil.
Sans rien dire, Reno traversa le port et monta sur la passerelle. Le Turk chauve lui emboîta le pas. Jackson s?empressa de les suivre. En retroussant sa manche pour voir l?heure, il ne fut pas surpris de constater qu?il avait la chair de poule.
Le pont du Giger était froid et fonctionnel. Des peintures malsaines à  l?aérographe, représentant notamment des tuyaux noirs et des bébés à  têtes phalliques, ainsi qu?une jeune femme avec un curieux casque, décoraient les murs, mais c?était bien la seule concession à  l?art. Tout n?était qu?angles, arêtes, portes rectangulaires... Certains bateaux anciens, avec leur bois vermoulu, ressemblaient à  des êtres vivants. Ce navire-là  n?avait rien d?humain, ce n?était qu?une machine noire comme la nuit.
Jackson retrouva les Turks figés près de la poupe. Ils regardaient la mer.
- La journée est belle, Rude, affirma Reno.
- ...
- Par ce temps-là , je n?ai pas envie de travailler. Pourquoi devrions-nous tout sacrifier à  notre boulot ?
- ...
Le capitaine s?avança, mal à  l?aise.
- Où allons-nous, monsieur Reno ?
- Suivez la côte. Un peu plus au nord, du côté du Golden Saucer. Nous cherchons une épave. Prévenez-nous quand vous l?aurez trouvée.
Le Giger démarra et accéléra rapidement. Il était énorme, mais assez aérodynamique, et pouvait atteindre à  l?occasion une vitesse record. Il se stabilisa à  soixante-dix kilomètres/heure.
Tandis que les bateaux habituels étaient parfois accompagnés par des bancs de dauphin, le Giger recevait souvent l'honneur d'une escorte de requins-tigres. Peut-être était-ce dû à  l?aileron noir fixé près de la poupe.

Le navire dut ralentir pour s?engager dans une passe difficile. A l?ouest, une bande de terre retenait une portion de la mer entre elle et le continent. De tous côtés, ce n?étaient que falaises escarpées. Cette formation géographique avait été produite par la dérive des continents ; le bras de mer était situé au-dessus d?une faille dans la plaque tectonique.
Peter Jackson regardait le technicien Dario Argento.
- Vous êtes sûr ?
- Tout à  fait, capitaine. Le radar indique que l?épave est tout au fond, coincée entre les deux murs.
Il appela la salle des machines.
- Ralentissez, les gars ! On y arrive ! On y arrive ! On s?arrête dans ce cul-de-sac.

Juché sur le moteur rugissant, Dean Devlin esquissa un sourire. Il cracha sur la diode verte indiquant que la radio était en fonctionnement.
- On est des pros, mon capitaine ! Mais pas question de ralentir maintenant !
- Vous vous prenez pour qui ? Si on ne s?arrête pas, on va s?écraser sur la falaise du fond !
- Désolé ! On a déjà  modéré la pression il y a à  peine vingt minutes. Si on baisse encore, on va tomber en rade !
- Vous serez virés ! Emmerich ! Raisonnez cet imbécile !
Roland Emmerich apparut près de Devlin dans un jet de vapeur. Il prit une clef à  molette et entreprit d?ouvrir une vanne.
- Il a raison, mon capitaine. Pour prendre le risque de dépressuriser le réacteur, nous aurions besoin d?une petite prime de risque.
- Il faut aussi doser le carburant, rappela Devlin.
- Vous l?aurez, votre prime, fit la voix doucereuse de Jackson dans le haut-parleur. Mais encore une erreur comme ça et je vous jette aux requins.
La diode verte, toujours engluée dans le crachat de Devlin, passa au rouge. Certain que le capitaine ne pourrait pas l?entendre, Emmerich éclata de rire.
- Ce gros lard nous prend pour des idiots. Mais c'est lui qui se fait avoir.
Il tira deux leviers avec ses mains calleuses, pleines de cambouis, pressa un bouton encrassé et le moteur se calma.

- Cette fuite du personnel a des effets néfastes sur tout le monde, rugit Jackson, sa barbe hérissée. Quand je pense que le transformateur, le réservoir de carburant, les accumulateurs et le réacteur Mako sont entre les mains de ces deux dangereux incapables !
Argento hocha la tête. Le capitaine sortit de l?habitacle ; la porte se referma en claquant.

Les deux Turks étaient toujours debout près de la poupe.
- Nous avons trouvé votre épave, leur annonça Jackson. Elle est tout au fond de cette passe.
- Très bien. Arrêtez le navire.

Le Giger possédait un équipement technologique de pointe. Radars, ordinateurs, détecteurs de mouvement, hélicoptère, mitrailleuse à  l?avant, réacteurs Mako d?appoint à  l?arrière. Sur un côté du navire, une petite grue portait un sous-marin de poche de dix mètres de long, pourvu d?un bras mécanique, de plusieurs caméras, d?une torche très puissante et de trois sas circulaires standards : deux sur les flancs et un au sommet. Quatre personnes pouvaient s?y loger.
John Carpenter effectuait avec satisfaction les derniers réglages. C?était un ancien du programme spatial maintenant spécialiste en sous-marins. Il avait un visage ridé et des cheveux d?un blanc neigeux. Le carburant, les batteries, tout était en place. Il vérifia les jointures huilées du bras mécanique, l?étanchéité des trois sas.
- Tout est prêt, annonça-t-il au Turk chauve qui surveillait les préparatifs.
Rude fila vers les cabines.
Reno venait d?enfiler un nouveau costume noir, le précédent étant imbibé d?eau salé. Il referma la garde-robe qui contenait une quinzaine de vêtements semblables à  celui-là  et vérifia son bâton renforcé. Pour une raison inconnue, cette arme s?appelait Garde de Princesse. Il l?avait achetée à  cinq mille gils après avoir perdu son précédent bâton, Contes de Fées, à  Gongaga.
On voyait six orifices associés et un septième isolé. Il avait placé deux Matérias Super HP, une Matéria Restaurer, une Matéria de Feu couplée à  une Matéria Tout. Mais il avait laissé les deux derniers trous reliés par une fente profonde libres pour une combinaison assez plaisante. Une sphère d?un bleu clair et une autre vert foncé brillaient de concert. Une Matéria Effet Supplémentaire et une Matéria Mystifier. Voilà  pourquoi le bâton Garde de Princesse émettait une faible lueur rouge. Le moindre coup asséné avec cette arme rendrait son adversaire fou.
Un sourire cruel déforma sa bouche.
Rude ouvrit lentement la porte et entra dans la cabine.
- Reno, le sous-marin est prêt.
- Tu es plutôt loquace, aujourd?hui, Rude.
- ...
- Je plaisantais.

Ils se glissèrent dans le sous-marin par le sas fixé sur le flanc droit. Reno tira l?écoutille à  lui et activa tous les verrous renforcés. Avec un bruit sourd, le piston central coulissa et s?immobilisa au centre du sas, scellant la fermeture.
John Carpenter tira une molette avec difficulté. La petite grue lâcha le sous-marin. Il tomba en chute libre, pénétra dans l?eau et coula immédiatement à  pic, suivi par des requins curieux.
Dans l'étroit habitacle, Reno ôta un grand panneau métallique pour dévoiler le tableau de bord. Il s?assit et se mit à  siffloter. Ses doigts agiles jouèrent entre les cadrans, abaissèrent un interrupteur. De petites ampoules s?allumèrent. Un projecteur illumina une poignée tout en bas à  gauche des commandes. Il l?abaissa.
L?hélice se mit enfin en mouvement. Le sous-marin de poche se redressa et fila dans les profondeurs marines.

Le faisceau blanc de la torche fouaillait l?environnement, lacérant à  grand-peine les ténèbres bleutées. Quatre caméras s?agitaient sur les flancs du sous-marin noir.
Bien au chaud à  l?intérieur, Reno était inquiet. Il n?avait jamais souffert de claustrophobie, mais il était néanmoins perturbé à  l?idée que lui et Rude étaient entourés de milliards et de milliards de litres, d?hectolitres d?eau. Et à  une telle profondeur ! Sans la paroi d?un mètre d?épaisseur du sous-marin de poche, la pression les broierait comme les mâchoires d?un monstre préhistorique, les réduirait en miettes puis en bouillie. Il suffirait qu?il ouvre un des trois sas circulaires pour qu?instantanément l?engin ne soit plus qu?une carcasse remplie de la même eau qu?à  l?extérieur, agrémentée d?un petit nuage de sang vite dissipé, de quelques fragments de chair et de moult os disloqués.
Le plus énervant était le temps qu?ils devaient mettre à  descendre et à  remonter. Avec la différence de pression, il fallait laisser le temps à  leurs organismes de s?adapter. Et ils n?avaient rien. Pas de lecture. Mais Reno ne bronchait pas plus que Rude. Car ils savaient pourquoi ils restaient calmes. Ils étaient des Turks.
Tout était d?un noir bleuté. Etait-ce cette obscurité proche de celle du ciel nocturne, la dernière chose que les passagers du Gelnika avaient vu ?
Il enfonça un bouton, manipula une languette de métal qui coulissait dans une fente du tableau de bord, et les cadrans divers frémirent encore. Enfin, sur l?un des quatre écrans, dans la lueur froide et vacillante de la torche extérieure, apparut une forme grise.
Ils se rapprochèrent. Le pilote avait bel et bien réussi à  faire plonger son avion dans la mer. Sur l?enregistrement qu?on leur avait donné, Reno et Rude avaient pu comprendre la raison de cette action : il ne pouvait pas faire ralentir l?engin, ni atterrir. C?était le meilleur choix. Un petit détail, malheureusement, avait empêché Andrew et les passagers de rester en vie : le Gelnika avait sombré en plein c?ur de la fosse océanique. A demi écrasé contre la paroi rocheuse, une aile tordue levée vers la surface, telle la main désespérée d?un homme qui se noie, l?avion avait une allure peu engageante.
Rude leva son poignet, où étincelait une montre en or incrustée de diamants. Reno s?était toujours demandé comment il avait pu se l?offrir ; il avait dû économiser pendant une vingtaine d?années avant de pouvoir la payer. Son bracelet large et épais comportait huit orifices à  Matérias, et dans l?un de ces renfoncements, brillait une Matéria Jaune. Une Matéria Sentir.
Rude ferma un instant les yeux.
- Alors ? l?apostropha Reno.
- ...
- L?état du Gelnika ?
- Etonnant. Il semblerait qu?il retienne une grande bulle d?air.
- Des survivants ?
- ...
- Nous pouvons respirer ?
- L?air n?est pas vicié, puisqu?il n?y a pas de survivants.
Au moins, on ne peut pas dire que Rude parle trop. Il dit tout ce qu?il peut dire d?intéressant en deux phrases.
- Donc, pas de gaz carbonique, acquiesça Reno. J?ai étudié la conception du Gelnika. C?est typiquement Shinra, cet esprit pratique et prévoyant : les sas de notre sous-marin sont un standard de qualité, chaque véhicule et construction Shinra en a au moins deux. Ca permet la communication entre tous leurs produits.
Un slogan de Shinra Inc. lui revint en mémoire : « ENERGIE MAKO POUR UN MONDE MEILLEUR ». Il réprima un éclat de rire et entama la man?uvre d?approche.
Comme un prétendant prudent, le sous-marin se mit à  faire le tour de l?avion. Comme sur les plans que Reno avait étudiés, les sas circulaires étaient fixés sur les flancs. Il pencha leur submersible pour ajuster les trappes. Les aimants fixés sur le pourtour des sas s?attirèrent mutuellement. Pour clore ce baiser mécanique, Reno déclencha trois pistons qui sortirent du cercle de fer, pénétrèrent dans les orifices correspondant de l?autre côté, enclencha les aimants pour attirer les trois autres pistons du sas du Gelnika. De chaque côté, les extrémités des tiges furent serrées par des étaux implacable. A présent, les deux ouvertures étaient virtuellement la même.
Reno retira le piston central, qui vint se loger dans un rail à  côté du sas, enleva tous les verrous, et poussa l?écoutille. De l?autre côté de l'ouverture, il tira la seconde écoutille.
Ils passèrent par le cylindre métallique constitué des deux sas avec une certaine nervosité et se retrouvèrent dans l?avion. De grandes taches de rouille s?étalaient sur les murs. Des flaques d?eau jonchaient le sol. Ils étaient dans un passage obscur.
- Le couloir de la zone de recherche, fit Reno. Attention !
Rude sursauta et vit derrière lui une sorte de méduse verte qui s?apprêtait à  bondir. Il lui assena un coup de poing et elle glissa sur le sol d?acier, inanimée.
- Un Caniche, commenta Reno. Des créatures marines hostiles ont élu domicile dans le Gelnika.
- Probabilités d'existence de survivants des techniciens ou de l'équipe scientifiques proches de zéro, conclut Rude.
Il s?approcha d?un corps. Le cadavre, couché sur le ventre, était humide, vêtu d?une blouse blanche. Deux Caniches étendaient leurs tentacules palpitants pour aspirer les fluides vitaux du corps, qui devenait déjà  squelettique. La tête... le cadavre n?en avait pas. Le cou était collé contre la paroi, où coulaient une tache rouge et des fragments de matière cérébrale.
Rude essuya ses lunettes.
Le choc a dû le projeter contre le mur, songea Reno. Mais il se rendit aussitôt compte de l?absurdité de cette déduction. Le sang était encore rouge. Il n?était pas mort depuis longtemps. Donc quelque chose avait envoyé le scientifique vers la paroi, à  une telle vitesse que sa tête avait explosé. Ce n?étaient sûrement pas les Caniches.
Ils poursuivirent leur route. Le couloir faisait deux coudes et débouchait sur une pièce pleine de bidons rouillés. Reno y vit une tache de sang. Il s?accroupit pour l?examiner. Une porte claqua derrière lui.
Il se retourna. Un jeune homme à  la tignasse blonde, aux yeux bleus, tenant une énorme épée incrustée de Matérias dans ses mains gantées, venait de pénétrer dans la pièce. Derrière lui, deux autres personnes.
Oh non, pensa Reno, pas eux. Pas AVALANCHE. Pas maintenant.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 06 Juin 2005, 04:47, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 15 Avr 2005, 23:55 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]2[/center]



Wes Craven était assis dans la salle vidéo du Giger. C?était une véritable salle de cinéma, avec écran géant, son en Stelly Surround et une rangée de sièges rembourrées. Sur le papier, elle était réservée aux Turks, mais Craven en profitait régulièrement, sans l?accord des utilisateurs légitimes.
Sur l?écran rectangulaire, on voyait un film en noir et blanc. Un ours avec un bocal à  poissons sur la tête tentait d?étrangler le jeune premier. C?était un Ro-Man.
La fiancée de la victime vint à  la rescousse et se mit à  taper sur le dos du Ro-Man avec ses petits poings. Le monstre se retourna avec une lenteur digne d?un boxeur sur le poing de tomber K.O. et avança, de sa démarche pataude, vers la jeune fille.
Wes Craven était plié en deux de rire lorsque la porte s?ouvrit. Jean-Pierre Jeunet entra au pas de course.
- Wes ! Les Turks reviennent !
- Tu gâches le plus beau moment de ma vie, Jean-Pierre. Regarde un peu... "Robot Monster", le film de science-fiction le plus nul de tous les temps. Mais regarde !
Jeunet se tourna vers l?écran. Le Ro-Man essayait vainement de calmer la fille, prise au piège dans la grotte. Au bout du compte, il lui envoya une bonne mandale, sortit de la grotte un moment.
- Je ne vois pas ce qu?il y a de drôle. C?est juste pitoyable, Wes.
- Attends ! Attends !
L?ours coiffé d?un bocal à  poissons revint dans la grotte ; la fille était à  présent solidement ligoté. Craven et Jeunet s?esclaffèrent.
- Non, sérieusement, Wes, reprit Jeunet, arrête le film et sortons de là  avant que les Turks ne s?aperçoivent que tu squatte leur salle vidéo.
Son ami appuya sur un bouton fixé dans l?accoudoir et le film cessa. Un cube de métal fut éjecté de la machine vidéo surplombée par l?écran. Craven le mit dans sa poche et ils se hâtèrent dans la coursive.
Ils croisèrent un petit homme bien rasé.
- Salut, Columbus, dit Craven. Pourquoi Reno revient-il si vite ?
- Ouais, renchérit Jeunet, j?aurais cru qu?il resterait des heures et des heures dans son épave... Il était aussi pressé d'y entrer qu'un enfant d'aller au Gold Saucer.
- Ce n?est pas à  moi qu?il faut le demander.
Chris Columbus renifla.
Sans lui prêter attention, Craven se tourna vers Jeunet. Ils reprirent leur marche ; Columbus se hâtait pour rester à  leur hauteur.
- Mais comment sais-tu qu?il était impatient ? Reno est inhumain ; il ne dit jamais rien, n?a aucune expression...
- J?ai vu qu?il souriait quand la grue a lâché notre sous-marin, et...
- Ca ne peut pas être un problème du sous-marin, coupa Columbus. Carpenter l?a vérifié plusieurs fois. Malgré son âge, il est encore très compétent.
Ils arrivaient au bout de la coursive. Jean-Pierre Jeunet poussa une porte blindée ornée d?une peinture macabre à  l?aérographe. Ils se retrouvèrent sur le pont.
Le sous-marin était encore à  moitié plongé dans l?eau. John Carpenter secoua ses cheveux blancs et fixa deux chaînes aux flancs de la machine.
Le sas dorsal était déjà  ouvert. Les deux Turks se hissèrent à  bord du navire.
Peter Jackson, la barbe plus hirsute que jamais, surgit en écartant Jeunet, Craven et Columbus de son chemin. Il faillit pousser Carpenter dans l?eau en bondissant sur Reno.
- Que vous est-il arrivé ? Nom d?un petit Balrog...
Les costumes d?un noir bleuté des Turks étaient en lambeaux. Reno avait la joue écorchée et Rude portait plusieurs plaies peu profondes sur son épaule à  découvert.
Sans répondre au capitaine Jackson, ils se précipitèrent vers leurs cabines. Ils en ressortirent cinq minutes plus tard, bien coiffés, dans de nouveaux uniformes.
- Nous n?avons pas le temps de vous expliquer en détail, dit Reno. Nous reviendrons examiner cette épave ; restez sur place, jetez l?ancre, mais ne descendez pas avec le sous-marin de poche avant notre retour. Nous avons rencontré de dangereux terroristes dans l?avion.
- Cette épave, c?est un avion ? lui demanda Craven.
- Ca ne vous concerne pas ; vous êtes le personnel, nous sommes les Turks. Rude, explique-leur.
- ...
- Voilà , ajouta Reno, vous avez compris ? Nous devons partir, les dirigeants de Shinra Inc. nous ont appelés dans le sous-marin pour nous confier une mission urgente.
Il courut vers l?hélicoptère noir au milieu du pont, suivi du Turk chauve. L?appareil décolla rapidement et s?éloigna dans le lointain.
Le soleil allait se coucher.
- Très bien, les gars, gronda Jackson. Nous resterons donc ici.
- Mais? commença Jeunet.
- Nous sommes vingt-sept sur ce navire, vingt-sept personnes pour une réserve de vivres qui peut pourvoir aux besoins d?une cinquantaine de gaillards pendant six mois. Ils ne mettront pas six mois à  revenir, je pense. Jetez l?ancre avant la nuit.
- Mais... répéta Jeunet.
- Matelot Jeunet ! Vous êtes pour l?instant mon assistant officiel, ne voudriez-vous pas le rester ? Alors obéissez sans discuter, ou vous récurerez les toilettes avec votre langue !
Jeunet déglutit. Mais le capitaine avait déjà  repéré un autre bouc émissaire.
- Matelot Carpenter ! Que faites-vous là , je vous prie ?
Le vieil homme fixa les chaînes de titane qu?il tenait à  la grue avant de répondre.
- Une masse quelconque est accrochée au sous-marin. Nous ne pourrons plus le fixer à  la grue pendant qu?il traînera ce poids mort.
- Y a-t-il moyen de déloger la masse ?
- Il faudrait que quelqu?un aille dégager cette saleté.
Jackson avisa le corps squelettique de Carpenter ; il ne semblait même pas capable de rester en apnée dans une baignoire. Il se jeta donc sur Chris Columbus.
- Matelot Columbus ! Prenez une tenue de plongée et allez décoincer le poids mort !
- D?accord, mon capitaine !
Columbus se mit au garde-à -vous ; Craven et Jeunet pouffèrent et s?éloignèrent. Jackson, lui aussi, tourna les talons.
Carpenter désigna le sous-marin à  moitié immergé.
- Gamin, tu sais quoi faire. Ce sont des algues. Un requin tigre ou un poulpe, à  la limite. Dans ce cas, un petit sortilège et voilà .
- Tu ne restes pas pour m?aider ?
- Désolé, gamin, mais Spielberg a défié Lucas à  la boxe ; c?est tout de suite. Tu paries sur qui ?
- George Lucas. C?est un poids lourd.
- Il est beaucoup trop gras ; Spielberg va l?assommer en un seul crochet.
- J?adorerais voir ça.
- Bon, gamin, mon dernier conseil : ne bâcle pas le boulot.
Il s?en alla. Columbus resta seul dans la lumière orange du soleil couchant. Il enfila une combinaison de plongée, attacha deux bouteilles, se cala le tuyau dans la bouche et sauta à  l?eau.
Il vit aussitôt la masse qui s?était accrochée au sous-marin comme un répugnant parasite. Ce n?était pas une pieuvre, encore moins un calamar. Aucun rapport avec un requin...
L?être immonde se tourna vers lui. Trop tard, il réalisa qu?il était en danger. Un organe palpitant se déploya et se referma sur lui. La chose le saisissait, l?étouffait. Il comprit enfin ce qu?elle lui faisait ; il hurla, mais sans espoir, la bouche emplie d?eau. Le monde devint noir.

Il reprit brusquement conscience.
- Quatre, cinq... il est revenu à  lui !
L?arbitre se penchait sur lui. C?était Tim Burton, menton mal rasé, yeux endormis, le tout encadré dans un bouquet de longs cheveux noirs.
- Tout le monde a cru que Monster Steven était au tapis, mais il revient mettre la pâtée à  Big George !
Steven Spielberg frotta sa mâchoire endolorie et fixa son adversaire. George Lucas, le visage déformé par un épouvantable rictus, brassait l?air avec ses gants de boxe. Burton s?écarta prudemment et donna un coup de sifflet.
- Reprise du match !
Spielberg se souvint d?un proverbe idiot : « LA MEILLEURE DEFENSE, C?EST L?ATTAQUE ». Il aurait bien voulu que son auteur essaie de l?attaquer, pour voir ce que c?était qu?une véritable défense qui faisait valser les dents. Malheureusement, il était mort depuis des siècles.
Lui et Lucas se battaient sans protège-dents ; c?était leur premier match de boxe, ils ne respectaient pas du tout les règles et tenaient à  voir, dans les jours qui suivraient, l?effet concret de leur victoire sur la dentition de leur adversaire.
Il cracha. C?était une molaire. Bon, ça n?était pas encore trop visible, mais ça allait se payer. Pour cette molaire, Lucas verrait toutes ses incisives disparaître. S?il croyait que lui, Steven Spielberg, allait tendre la joue gauche...
Il donna un coup de pied. Lucas l?esquiva facilement, mais ce fut pour retrouver le poing fermé de Spielberg. Choc extrêmement douloureux. Le crachat rouge de « Big George » révéla que toutes ses incisives et une de ses canines étaient parties.
Et ce n?est pas le pire, pensa Lucas. J?en ai avalé deux autres. Il veut la guerre, il va l?avoir.
De son côté, Spielberg songeait : Joli coup ! Sa tendre épouse adorera à  coup sûr son nouveau sourire. Le voilà  enfin débarrassé de ces dents de lapin qu?il exhibait si fièrement.
Il éclata de rire à  cette pensée et reçut un coup de pied dans le ventre. Ca lui coupa le souffle ; il tomba, plié en deux.
Lucas lui attrapa le menton et le remit debout. Larmoyant, Spielberg tenta de reprendre ses esprits. Il vit que l?ennemi avait ôté ses gants de boxe.
Au dernier moment, il s?accroupit et évita un direct qui lui aurait offert un aussi beau sourire que celui de Lucas. Il fit un croche-pied à  la brute, elle s?effondra sur lui. Il lui enserra la gorge de ses mains, Lucas fit de même. Il s?apprêta à  presser la pomme d?Adam qu?il sentait sous son pouce de toutes ses forces.
L?arbitre les sépara.
- Halte. La strangulation est interdite.
« Big George » donna à  Tim Burton un coup de poing qui l?étendit pour le compte.
- Ah, ça détend.
Il regarda à  nouveau Spielberg.

John Carpenter referma la main sur les billets, avec un petit sourire en coin.
- A ton âge, qu?en feras-tu ? lui demanda Jeunet.
- J?irai finir ma vie au Golden Saucer. Je n?ai plus qu?à  encaisser l?argent de Columbus.
Jeunet jeta un regard au combat qui se poursuivait sans arbitre et sans limites. « Monster Steven » avait attrapé deux haltères pour débutants et s?en servait pour assener des coups violents à  Â« Big George », qui brandissait un javelot.
- J?espère que les Turks ne reviendront pas demain, commenta Craven, qui semblait beaucoup s?amuser. Ils feraient une de ces têtes en voyant ces deux énergumènes.
- Spielberg et Lucas ne risquent pas de se tuer ? s?inquiéta Jeunet.
- Penses-tu, Jean-Pierre. Ce sont d?excellents amis.
A présent, les boxeurs amateurs avaient chacun un javelot ; ils s?en servaient comme d?épées. « Monster Steven » Spielberg abattit son arme à  plusieurs reprises sur le dos de « Big George » Lucas, qui tomba à  terre, inanimé.
- D'excellents... amis ? dit Jeunet.
- Il faudrait ranimer l?arbitre pour qu?il compte, fit remarquer le vieux Carpenter en désignant Tim Burton, toujours évanoui.
Un effroyable rugissement retentit.
- Je vais m?en charger !
C?était le capitaine Peter Jackson, qui avait fait irruption dans la pièce.
- Un, pas de primes, poursuivit-il. Deux : les combattants aux fers pour cette nuit. Trois, amenez Burton à  l?infirmerie. Quatre, que Carpenter et les autres escrocs rendent l?argent des paris. Cinq, qu?il soit bien clair que si ça se reproduit, la poiscaille se nourrira de vos tripes. Six, que Carpenter aille voir ce que fiche Columbus, il n?était pas à  l?appel du dîner, alors que lui, il respecte le règlement, et c'est bien le seul sur ce navire ! Sept, qui a organisé ce match de boxe ? Huit, vous paierez les biens immobiliers détruits ! Neuf, avant que les Turks ne reviennent, réparez les dégâts, ou nous nous retrouverons tous au chômage. Et dix, déguerpissez, matelots !
- Mais... commença Jeunet.
- Matelot Jeunet, fit Jackson, vous parlez décidément trop ; vous n?êtes plus mon assistant officiel. Désormais, vous ferez le sale boulot comme avant, mais en plus, ça ne sera plus crédité à  votre compte en banque.
Lucas laissa échapper un gémissement et se redressa.
- Mauvaise nouvelle, mon vieux, dit Craven. Le capitaine a compté, tu t?es réveillé après. Spielberg a gagné.
- Personne n?a rien gagné du tout ! éclata à  nouveau Jackson. Tout ce que vous avez fait, c?est perdre : votre temps, votre argent, mon temps, mon argent.

- Co-o-o-lu-u-u-mbu-u-us... chanta Carpenter de sa voix enrouée. Où es-tuuuu?
Il parcourut le pont du regard. Aucun Chris Columbus en vue. Il ne regrettait pas son absence : il voyait Columbus comme un médiocre, un type qui léchait les chaussures de ses supérieurs dans l?espoir d?obtenir une promotion, un bureaucrate sans ambition, l?antithèse même de ce à  quoi aspirait, pour Carpenter, tout être humain ; la nullité absolue ; cette fascinante recherche de l?idée la plus banale, du raisonnement le plus commun, du Q.I. le plus moyen avait dû commencer le jour où Columbus, à  l?école primaire, avait apporté un plein cageot de pommes à  ses professeurs. Le vieux technicien ne se sentait nullement responsable de cet être terne, à  l?absence d?imagination déconcertante, à  la vision de l?avenir incroyablement limitée, à  la conception du bonheur grotesque et défaillante. Carpenter, depuis son enfance, associait ses semblables à  des couleurs ; dans son esprit, il ne visualisait Columbus que comme un gris sale, uniforme, industriel.
Mais il devait quand même découvrir où Columbus s?était planqué, ou le capitaine lui réserverait une séance de chirurgie esthétique bien dans ses habitudes. Quelle bande d?imbéciles, songea Carpenter, ils ne savent régler leurs problèmes que par la violence.
Il vit que la masse inconnue avait été dégagée du sous-marin. Columbus avait donc fait son boulot. Et puisqu?il n?y avait aucune volute de sang dans la mer, il ne s?était pas fait dévorer par les requins-tigres. Il n'aurait guère manqué à  l'humanité, mais je l'aurais regretté.
Il alla voir dans la cabine de Columbus ; elle était vide. Toutes ses affaires étaient encore là . Il remarqua également quelque chose qui l?inquiéta fort : un des Penthouse du marin était posé sur le lit, grand ouvert. Il avait dû accourir à  l?appel de Jackson, accepter immédiatement de décrocher le poids mort, histoire de revenir le plus vite possible dans ses quartiers ranger le magazine gênant.
Carpenter gratta son front ridé. Il aurait sans doute besoin d?une Matéria Sentir pour retrouver Columbus. Barker en possédait une.
En attendant, il était l?heure de manger.

La salle à  manger du Giger était bien plus sympathique que le reste du navire. C?était la seule pièce qui n?était pas d?un noir d?ébène ; les murs d'un doux saumon détendaient les marins. Au centre, une table classique, au pied central soudé au sol. Pas la moindre trace des malsaines peintures à  l?aérographe, style bio-mécanique, agrémenté de formes phalliques et mammaires, qui régnaient dans le reste du bateau, fixées sur les parois verticales, découpées à  angles froids. Ici, c?était l?inverse : les parois rosâtres rejoignaient le sol dans des courbes harmonieuses, mais aucune peinture, aucune décoration superflue ne venait violer leur tranquillité. Sur la table au pied unique, entourée de tabourets eux aussi soudés, étaient alignées des piles de boîtes de conserve.
- Des sardines, des sardines, encore des sardines, toujours des sardines, se plaignit Wes Craven. Jamais de plats variés.
- Nous sommes vendredi, Wes. Dans deux jours, on passe au poulet à  la crème.
Carpenter fit irruption dans la salle à  manger.
- Je ne trouve pas Columbus, capitaine. Je demande la permission d?emprunter une Matéria du matelot Clive Barker pour le retrouver.
- Entendu, approuva Jackson. Matelot Barker, après le dîner, vous lui remettrez cette fameuse Matéria.
Barker serra les dents et hocha la tête.
Assis en face de Craven, Roland Emmerich le regarda.
- Craven, pourquoi Spielberg et Lucas ne sont-ils pas là  ?
- Jackson les a mis aux fers.
Ce fut à  cet instant que l?événement le plus surprenant jamais survenu sur le Giger pétrifia tout l?équipage.
La porte principale de la salle à  manger claqua. Tous se tournèrent vers le nouvel arrivant.
C?était John Mc Tiernan. Son visage mûr et ses cheveux noirs semblaient, en comparaison de la teinte douceâtre des murs, bariolés de couleurs vives. Il n?avait aucune expression. Ses yeux étaient le seul élément véritablement étrange, horrible. Ils étaient blancs comme un linceul, injectés de sang, et s?agitaient en tous sens.
Jackson l?interpella.
- Matelot Mc Tiernan ! Pouvez-vous justifier votre retard ?
Craven, qui comme tous les autres ne perdait pas une miette de la scène insolite, n?attendait aucune réponse. Et il ne fut pas déçu : comme un zombie, Mc Tiernan reprit sa marche, ignorant superbement le capitaine.
Tous remarquèrent beaucoup trop tard qu?il tenait la trompe métallique de l?aspirateur du navire dans la main droite.
L'aspirateur « Mop » se distinguait des autres par deux détails : il était adapté aux bateaux grâce à  la relative autonomie dispensée par ses batteries et possédait un embout renforcé au titane. Dans son genre, cette trompe métallique en T valait une matraque ; elle devait peser douze kilos.
- John, dit Sam Raimi, pose Mop.
- Je ne crois pas qu?il puisse t?entendre, rétorqua une voix. Il a fondu un câble, sa raison a claqué, il a pété les plombs !
Brusquement, Mc Tiernan brandit le tuyau comme Excalibur elle-même. Sans laisser à  personne le temps de réagir, il l?abattit.
Sur Sam Raimi.
L?embout d'un mètre se releva.
Raimi gémit.
Le tuyau tomba à  grande vitesse.
Rictus enragé de Mc Tiernan.
Le tuyau montait.
Descendait.
Le sang giclait à  petits jets.
Montait. Descendait.
Montait. Descendait.
Montait. Descendait.
John Carpenter donna un bon coup de poing à  Mc Tiernan. Il parut à  peine le sentir et continua à  s?acharner sur Raimi. Le tuyau s?abattait toujours plus brutalement. Montait, descendait. Montait. Descendait. Montait. Descendait. Le visage de Raimi n?était plus qu?un masque rose couvert d?un filet noir à  reflets rouges vermillons.
Tous les marins fonçaient vers Mc Tiernan.
Craven reçut quelques gouttes sur son menton et les essuya machinalement. Il avait toujours vu le sang humain rouge vif, mais quand il coulait, il était déjà  bien plus sombre. Après, lors de la coagulation, il devait virer au brun, non ? Bientôt, Raimi aurait la tête brune comme un vieux pruneau desséché.
Et toujours, le tuyau descendait. Montait. Descendait. C?est pas vrai, songea Craven, ils n?ont pas encore arrêté ce cinglé ?
Le va-et-vient de l?arme improvisée avait quelque chose de mécanique, avec cependant une touche de cruauté humaine indéniable : chaque coup déployait davantage de force que le précédent. La masse sombre formée par le crâne de Raimi tomba sur la table et commença à  y rebondir avec un bruit sourd. Les attaques du dément avaient cessé.
Mc Tiernan parvint à  échapper aux marins assez longtemps pour asséner un dernier coup de tuyau. Les râles de Sam Raimi avaient cessé depuis longtemps, mais cette conclusion acheva de convaincre Craven de la mort de leur compagnon : en effet, la trompe « Mop » s?enfonça dans la chevelure sans rencontrer de résistance.
Wes Craven se détourna du spectacle, se tourna vers la table où plus personne n?était assis et vomit dans une assiette.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 06 Juin 2005, 04:48, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 16 Avr 2005, 21:22 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
Squall GOFSC a écrit:
Tiens, ce n'est que maintenant que tu la balances ici celle-là ?


Comme d'habitude, des commentaires plus constructifs sont attendus. Dans le cas contraire, mon cher Squally, ton message fera l'objet d'une suppression rapide.

Edition du message : Message de Squally supprimé.






Détail : je poste ici une version corrigée de cette ancienne fan-fiction. Attention, "correction" n'est pas "réécriture", aussi ne vous attendez pas à  trouver un texte radicalement différent, ni même situé plus haut sur une échelle de qualité.
Cela dit, voici le type d'améliorations occasionnelles auxquelles j'ai procédé sur cette version de "Navire Sanglant" :




Le jeune DragonNoir, en 2001, a écrit:

- Vous ramènerez nos corps à  la surface pour les ressusciter ?
- Des clous. Si je suis le seul à  connaître les résultats des recherches, Shinra m?offrira une petite prime et un nouveau poste. C?est donc la dernière fois que tu me vois, Carson.
- Donnez-moi tout ça, salopard !
- Viens chercher le matos !
Tandis qu?il se jetait sur le scientifique, Carson sentit que le Gelnika plongeait.
L?avion disparut sous la surface de l?eau, dans une surface en U entre une large bande de terre et la région du désert.



Comparez avec la version corrigée :

DragonNoir, un peu moins jeune en 2005, a écrit:

- Vous ramènerez nos corps à  la surface pour les ressusciter ?
- Si je suis le seul à  connaître les résultats des recherches, Shinra m?offrira une petite prime et un nouveau poste. C?est la dernière fois que tu me vois, Carson.
- Vous allez me donner cette Matéria.
- L'existence d'un savant importe davantage que celle d'un mécano minable.
Tandis qu?il se jetait sur le scientifique, Carson sentit que le Gelnika plongeait.
L?avion disparut sous la surface de l?eau, dans un bras de mer entre une large bande de terre et une région ensablée.



Les modifications mineures, mais néanmoins importantes, à  mon sens, me paraissent s'expliquer d'elles-mêmes. Notamment le remplacement de l'affreuse réplique "Viens chercher le matos !".

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 17 Avr 2005, 22:21, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 17 Avr 2005, 21:49 
Hors-ligne
Premiers pas

Inscription : 13 Avr 2005, 23:35
Message(s) : 6
Un texte très sympathique. On voit bien que ça ne vise pas haut, mais on comprend que l'auteur a voulu se détendre en écrivant ça. C'est une bonne utilisation de la fanfiction: écrire sans prétention une petite histoire semblable à  un film de distraction. Je lirai sûrement la suite!


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 18 Avr 2005, 03:39 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]3[/center]



- Nous devrions tuer ce forcené, décréta Lucas.
- C?est indigne de gens civilisés, répliqua Burton.
- Et ce qu?il a fait à  Raimi, c?est digne de la civilisation ?
- En l?exécutant, nous nous rabaisserions à  son niveau. De plus, les consignes sont formelles : on ne prend aucune décision d?importance sans la présence des Turks.
Jeunet frissonna.
- A présent, nous savons ce qui est arrivé à  Columbus. Mc Tiernan a sûrement jeté le corps à  la mer. Mais pourquoi a-t-il tué deux personnes ?
- Pourquoi ? rugit Lucas. Mais c?est un forcené ! Un timbré ! Il n?y a aucune logique dans ce qu?il a fait ! Peut-être qu?il était convaincu que Raimi et Columbus étaient des extraterrestre, ou bien les voix dans sa tête lui ont dit de les assassiner. Un fou dangereux.
Jeunet baissa la tête. L?explication est plausible.
- Bon, ça règle tout. Mc Tiernan est enfermé dans l?une des cellules blindées, sous vidéo-surveillance.
Ils se séparèrent. Jeunet se mit à  errer lentement dans les coursives, laissant ses pensées vagabonder. Il faillit heurter Craven, qui courait à  vive allure.
- Wes ! Fais un peu attention !
- Où étais-tu ? Je t?ai cherché partout.
- Avec Tim et Lucas. On a sorti Spielberg et Lucas des cellules sur ordre de Jackson ; nous y avons casé Mc Tiernan.
- C?est bizarre, Jean-Pierre. Je n?aurais jamais cru que Mc Tiernan soit un assassin. Et il paraissait tellement équilibré.
- On ne connaît jamais totalement les gens. Ca me rappelle, il n?y a pas longtemps, j?étais allé voir mon cousin à  Gongaga...
- Epargne-moi ta vie de famille.
- A l?auberge, il y avait ce gros type avec une arme à  la place du bras, un grand blond avec une énorme épée et la plus belle fille que j?aie jamais vu...
- Epargne-moi ta vie sexuelle. Et suis-moi. Je dois te montrer quelque chose.
- Enfin, le grand blond s?est réveillé, il était resté dans le coma pendant plusieurs jours...
Ils se hâtaient dans la coursive. Craven semblait très soucieux.
- Et alors, conclut Jeunet, le gros type a dit « Combien crois-tu qu?il y ait de gens dans ce monde qui se comprennent vraiment ? ». Ca m?a trotté dans la tête pendant plusieurs jous...
- Epargne-moi ta vie philosophique. Ecoute, Jean-Pierre, généralement, les gens apprennent qu?ils ne se connaissent pas eux-mêmes avant l?adolescence. Tu veux dire que tu n?y avais jamais pensé avant ?
- Peut-être que nous aussi nous sommes des psychotiques. C?est comme ces malades mentaux qui commettent leurs crimes dans un état second, et qui ne se souviennent pas de ce qu?ils ont fait... C?est de la lycanthropie psychologique.
- Epargne-moi ta vie psychologique.
Craven s?arrêta et considéra Jeunet d?un air soupçonneux avant d'ajouter :
- Tu ne t?es jamais réveillé avec du sang plein les mains ?
- Mais non, répondit Jeunet, que vas-tu chercher là  ? Ca me rappelle que mon cousin m?a dit que sa voisine lui a appris que sa s?ur, qui vit à  Canyon Cosmos, lui a expliqué que son mari lui a raconté...
- Epargne-moi ta vie sociale, fit Craven en reprenant sa route.
- ... que son beau-père lui a confié que son grand-père savait que le voisin de son cousin au troisième degré...
- Comme ça, nous sommes certains que la rumeur est fondée.
- ... disait à  tout le monde ce que sa petite amie lui avait chuchoté : que près de Nibeilheim, elle avait vu un grand échalas se transformer en Bête Galienne.
- C?est quoi, une Bête Galienne ?
- Je crois que c?est un bipède à  poil violet, ça ressemble un peu à  une Canine de Kalm.
Ils arrivaient à  la salle de pilotage. Craven fit signe à  son ami de se taire et s?approcha à  pas de loup de la porte fermée. La voix impérieuse de Jackson retentissait sur le pont.
- Je préférais Kubrick, marmonna Jeunet.
- Ecoute, Spielberg était un ami de Kubrick. Lui, il a une raison de détester Jackson. Mais toi pas. Tu pouvais à  peine sentir Kubrick, et Jackson est plus courageux que lui. Tu verrais son premier bateau... « Bad Taste », c?est son nom. Qui naviguerait sur une épave pareille ?
- Tu m'as amené ici pour qu'on écoute, Wes, nan ? Alors, la ferme.
Le capitaine était de très mauvaise humeur. Il s?adressait d?un ton maussade au technicien Argento.
- Matelot Argento, avez-vous envoyé le message aux Turks ?
- Dario aussi est minable, chuchota Jeunet. D'Amato était mieux.
- Chut !
Les voix pouvaient être entendues clairement : le capitaine et le radio parlaient haut et fort.
- Ils m?ont dit qu?ils ne peuvent pas venir tout de suite, répondait Argento. Une Arme a attaqué Midgar.
- Quoi ! rugit Jackson. Mais j?ai de la famille là -bas !
- Et... un grand drame, capitaine. Un grand homme est mort.
- Quoi !
- D?après les premiers rapports, l?Arme qui a attaqué Midgar était l?Arme Diamant.
- Et alors ?
- Avant de mourir, l'Arme a envoyé une salve de projectiles sur la ville. L?un d?eux... l?un d?eux a percuté l?Immeuble Shinra.
Le capitaine Jackson avala sa salive.
- Le fils Shinra.
- Ils ont enterré un tibia. C'était tout ce qui restait.
- Alors, c?était vrai, dit Jackson. La Shinra n?est plus que ruines. Il ne reste plus que le Directeur général...
- On a perdu sa trace près de Junon.
- Heidegger et Scarlet. Nous ne pouvons rien attendre de ces imbéciles. Très bien. Ne révélez pas ces informations au reste de l?équipage, Matelot Argento.
- Vous n'avez pas envie de devenir un commandant de papier ?
- Ce n?est pas que j?aime particulièrement la charge de capitaine... mais c'est à  moi qu'incombe cette responsabilité. Ah, j?y pense, Matelot Argento, faites un dernier essai avec le détecteur.
Ils entendirent un bip.
- Eh bien, nous avons réussi à  retrouver Columbus ! Et autre chose de très intéressant... Entrez, Matelot Jeunet, Matelot Craven, n?ayez pas peur !
Pétrifiés, ils pénétrèrent dans le poste de pilotage. Jackson sourit en voyant leurs mines dépitées, mais il était très pâle.
- Si vous répétez ce que vous venez d?entendre, je vous jette aux requins.
- Vous ne pouvez pas cacher la vérité à  l?équipage ! s?exclama Craven.
- Et pourquoi pas ? Si je révélais la déchéance de Shinra Inc., la société que nous servons, à  l?équipage, ils contesteraient immédiatement mon autorité, pour le plaisir. Ils voudraient débarquer à  la plage la plus proche et aller s?amuser au Gold Saucer.
- Golden Saucer, mon capitaine.
- Voyez-vous le problème ? Vous faites déjà  preuve d?insubordination. Ecoutez-moi bien, Matelot Craven, Matelot Jeunet, peu importe le nom de ce stupide casino. Que la Shinra tombe ou pas, les Turks reviendront dans quelques jours et s?ils nous trouvent au Wonder Square, nous mourrons, nos têtes incrustées dans les écrans des machines d?arcades. Ce n?est peut-être pas la manière la plus désagréable d?y passer, surtout pour des gens comme le Matelot West, mais je ne veux pas finir comme ça. Nous resterons à  l?ancre ici, et pour ça, le meilleur moyen, c?est que vous teniez votre langue.
- D?accord, capitaine.
Ils allaient franchir la porte, quand Jackson conclut :
- Un dernier mot. Je sais combien il est difficile de tenir sa langue. Je vous demande simplement de le faire jusqu?à  l?arrivée des Turks.
Craven se retourna.
- Pardon, capitaine... Vous avez dit que vous aviez retrouvé Columbus.
- C?est exact, Matelot Craven. Regardez cet écran. Chaque point accompagné d?initiales est un marin. C?est comme ça que j?ai su que vous écoutiez à  la porte.
- Mais comment pouvez-vous nous détecter ? Même avec un radar, pour connaître l?identité de chaque signal ?
- C?est le bateau des Turks. Vous savez, votre visite médicale, chaque année ? Matelot Craven, vous devez avoir dans votre corps une centaine de nano-machines. Et celles de Columbus émettent encore.
Craven s?approcha de l?écran. En effet, il y avait un point estampillé « C.C. » tout près de la poupe.
- C?est la grande soute, gémit-il. Pleine de caisses, de poutres et sans aucune lampe. Vous ne le trouverez jamais là -dedans.
- Exact, Matelot Craven. Vous, par contre, vous avez l?air de savoir à  quoi elle ressemble. Dès demain, vous irez chercher notre ami déserteur.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 06 Juin 2005, 04:50, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 18 Avr 2005, 16:27 
Hors-ligne
Extincteur des ténèbres
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 14 Juil 2004, 15:32
Message(s) : 651
Localisation : Dans le coté obscur de la force.
Distrayant, ce petit texte, dis-moi...
Mais comment a donc bien pu te venir l'idée d'utiliser des cinéastes dans une fan-fic FFVII? C'est déroutant...

_________________
La vie est faite d'obstacles à  surmonter pour progresser...
...moi je passe à  côté...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 21 Avr 2005, 23:06 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]4 [/center]



Le Giger était un navire extraordinaire, l?équivalent maritime d?un couteau suisse. Au-delà  de la diversité de son appareillage, on pouvait noter trois soutes. La plus importante, fort logiquement appelée « la grande soute », était un cube dont chaque arête mesurait cent mètres.
Des colonnes de caisses reliant sol et plafond, une obscurité permanente, des dizaines de poutrelles métalliques surplombant ce chaos, y laissant pendre d?épais câbles et des tuyaux venus de la salle des machines qui alimentaient les arbres à  hélice, cette salle n?était qu?un labyrinthe titanesque, absurde, où venaient se perdre à  jamais des tonnes de matériel utile.
Les trois marins se tenaient sur le seuil de la grande soute. Devant eux, un gouffre noir, une ouverture sur une autre dimension emplie de passages étroits aux parois incertaines.
Roman Polanski tripotait un gros tube de métal sombre. Ses mains moites trouvèrent le contact et sa torche électrique s?alluma. Un mince faisceau de lumière froide dispersa les ténèbres.
- Je n?aime pas ce silence. Non, je n?aime pas ce silence.
- Fais attention, Polanski, dit George A. Romero.
C?était un vétéran qui officiait sur le Giger depuis trente ans. Son regard assuré, son sourire arrogant semblèrent rassurer Polanski. Wes Craven s?avança.
- On devrait y aller. Columbus doit être planqué dans un coin à  lire un Playboy. On le trouve et on se casse.
- Penthouse, corrigea Romero.
- Hein ? fit Craven.
- Pas Playboy. Penthouse. Chris Columbus n?achète que des Penthouses.
Ils se mirent à  marcher lentement vers la paroi constituée de cubes de bois et de carton, devant eux. Dans le faisceau de la lampe que Polanski tenait d?une main tremblante, ils semblaient bouger. Ce n?est qu?un effet des ombres, se répéta Craven.
Soudain, un claquement sonore.
Ils se retournèrent. La porte de la grande soute s?était refermée sur eux.
- Un courant d?air, dit Polanski. Aucune raison d?avoir peur.
- Le signal était immobile sur le détecteur que réglait Argento, fit remarquer Craven. Peut-être que Mc Tiernan, avant de tuer Sam pendant le dîner, a démoli le crâne de Columbus avec Mop. Il aura planqué le corps dans cette grande soute.
Ses deux compagnons ne lui répondirent pas. L?idée du cadavre du petit marin plié en deux dans une caisse n?était pas particulièrement réconfortante. L?air semblait plus froid que jamais et Craven regretta de ne pas en être resté à  l?image de Columbus caché dans un coin, se livrant à  une lecture des plus intéressantes.
Il n?y avait pas de brouillard, mais des nuages de poussière s?élevaient autour d?eux alors qu?ils marchaient. Ils pénétrèrent entre deux piles de cartons dans le dédale de la grande soute.
Tout était glacial ; les caisses de bois faisaient pensait à  un entassement de cercueils artisanaux. Les boîtes de carton, quand à  elles, semblaient du brun du sang séché ; Craven s?imagina qu?elles étaient imbibées du sang des enfants morts qu?un maniaque aurait dissimulé. Les volutes qui les entouraient ressemblaient plus que jamais à  la brume d?un cimetière dans ces vieux films de la Hammer... Comme dans « Plan 9 from Outer Space ». L?image de Vampira rôdant entre les tombes de carton-pâte, s?efforçant de passer pour une zombie, ne parvint pas à  le rassurer. Certaines de ces caisses prenaient des allures de pierres tombales. Il crut voir des inscriptions funèbres et comprit qu?il ne s?agissait que des étiquettes « FRAGILE ». Les étoffes blanches pendant ici et là  semblaient être des linceuls...
Le labyrinthe était de plus en plus inextricable. Dans un silence lugubre, Romero, Craven et Polanski déambulaient entre les parois de caisses, s?efforçant de trouver leur chemin à  la lueur froide d?une unique torche.
Soudain, ils furent dans un cul-de-sac. Assis contre une pile de petits cartons, un squelette translucide, comme s?il avait été fait de gelée. Quelques restes d?intestins. Une chaussure. Une seule touffe de cheveux plantée à  gauche d?une orbite vide. Des lambeaux d?habits. Ces restes pitoyables étaient enrobés dans une matière gluante et transparente.
- C?est Columbus ? chuchota Romero. Oh... On dirait qu?il a mariné... dans un bac d?acide...
Ils faillirent vomir. L?odeur éc?urante les prenait à  la gorge, les étouffait. Craven réprima sa nausée tandis que Polanski rendait une petite flaque de bile verte.
- Filons vite, souffla-t-il. Dans les films d?horreur, c?est le moment que choisit l?alien pour attaquer.
Un tentacule jaillit entre deux caisses, ratant Romero de peu.
- Craven, à  l'avenir, ferme-la !
Ils s?enfuirent, courant de toute la vitesse de leurs pauvres jambes. Ils n?avaient aucune arme et aucune envie de rester pour voir à  quoi ressemblait l?abomination qui aurait pu faire ça à  Columbus. Craven n?arrivait pas à  croire qu?il vivait réellement cette situation.
Ils tournèrent à  droite et tombèrent sur une pile de vieux papiers, là  où Craven aurait juré que dix minutes plus tôt se trouvait un passage. Ils reprirent leur course sans ménager leurs poumons.
Craven avait entendu parler d?une méthode pour sortir d?un labyrinthe : il fallait suivre une des parois avec sa main, celle de droite ou celle de gauche... Mais ils ne pouvaient faire tout le tour, car ils ne savaient pas du tout où était la chose.
Romero s?arrêta brusquement. Un corps frémissant se dressait devant lui. Sans prendre le temps de détailler le monstre, il fit demi-tour, se précipitant vers un passage entre deux piles de journaux.
Ils couraient, couraient, couraient. Ils ne faisaient pas d?efforts pour rester ensemble ; c?était un miracle qu?ils ne se soient pas séparés. L?abomination avait disparu.
Tout à  coup, ils entendirent un rugissement aigu, et une pile de caisses de bois se sépara d?une rangée, bascula et s?écrasa en travers du passage. Craven l?escalada et reprit sa course, suivi de près par Romero et Polanski. Ils devaient battre tous les records de vitesse. Leurs corps étaient baignés de sueur, ils songeaient au monstre qui les suivait. En tant que prédateur, il devait être plus rapide qu?eux et posséder de meilleures capacités.
Alors qu?il pensait à  ça, Craven entendit un bruit métallique au-dessus de lui.
La chose était perchée sur une poutrelle. Il vit un mince tentacule vert, comme un serpent, descendre vers Romero. Il lui cria trop tard un avertissement. Le membre flexible s?enroula à  la vitesse de l?éclair autour du cou du marin et le hissa dans les hauteurs. Craven sauta, rata la cheville de son compagnon.
- Romero !
Terrorisé, il se pressa dans les couloirs de la grande soute, pendant que la chose ramenait Romero vers elle comme un pêcheur actionnerait son moulinet pour tirer un poisson de l?eau. Par pur miracle, il vit la sortie du dédale de caisses et s?y précipita.
En entendant un hurlement, Craven se retourna. La masse indistincte et grotesque, le monstre, toujours juché sur sa poutre d?acier, maintenant sa proie...
Un bruit de déchirure. Devant la grande silhouette de la chose, quelque chose explosa, répandant des flots de liquide d?un rouge éclatant. Une déflagration sanglante, comme si une bombe à  eau bourrée d?hémoglobine avait éclaté. Le sang retomba sur toutes les caisses de bois, toutes les boîtes de carton, éclaboussant le plafond et les murs, recouvrant le sol.
Wes Craven sortit de la grande soute. Il vit que Polanski était étendu sur le dos, devant lui, dans la coursive, haletant, et referma la porte. Fébrilement, claquant des dents, il chercha les verrous de sécurité du battant en titane et les déclencha tous. Enfin, il tapa un nouveau code sur le clavier numérique à  trois chiffres qui commandait le verrou électronique, sous l?inspiration du moment : « 666 ». Une planche blindée sortit du chambranle, passa derrière la poignée de la porte et s?inséra dans une cavité de l?autre côté, bloquant l?unique accès à  la grande soute.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 06 Juin 2005, 04:51, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 23 Avr 2005, 11:09 
Hors-ligne
Miroir
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 12 Mai 2004, 18:19
Message(s) : 690
J?ai lu le prologue et le chapitre 1 Costa del sol. Simplement dommage que la ville ne soit décrite qu?en deux lignes quasiment « Une ville joyeuse, colorée, et cependant calme et reposante. Partout, les tons chauds du sable, de la brique jaune. Des pêcheurs, des touristes, des enfants, des filles en bikinis. » un aparté sur le Val del sol ( bar des nuits tropicales) ou une petite visite descriptive des gens au sang chaud aurait été la bienvenue. Alors peut être c?est fait exprès. Puis pour dire, elle date cette fic, quand elle avait été postée sur JV en février 2003, nous avions été informés que le texte fut écrit il y a déjà  belle lurette. Tout compte fait ce n?est pas vraiment la construction des phrases ( comme je dis chez moi) qui fait défaut mais je dirais le manque de musicalité (ou l?emploie d?expression mal adaptée au contexte, que sais-je.) comme ici « Dans la jungle, il se déroulait autant de drames que pendant la journée » C'est du français, mais ça sonne abrupte à  l'oreille(Genre Ozma se prend pour un critique avisé...). Sinon comme l?a dit Naminska c?est un début assez sympa ( pour ce que j?en ai lu.)

_________________
Je suis l'incapacité d'aimer de Jack.


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 03 Mai 2005, 01:02 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]5[/center]



Peter Jackson arborait une expression de commisération attristée.
- On attend généralement des dirigeants qu?ils soient bouchés, grossiers, et qu?ils enferment les gens qui font des déclarations comme la vôtre. Dans votre cas, Matelot Craven, vous éprouvez certainement encore plus de méfiance, car dans les films d?horreur de l?aube des temps dont vous vous gavez à  longueur de journée...
- Vous connaissez mon passe-temps, mon capitaine ? Et vous n?en avez pas parlé aux Turks ?
- Même la salle vidéo est sous contrôle de caméras, mais il faut bien laisser l?équipage se délasser. Dans ces films d?horreur, donc, l?autorité est non seulement bafouée, mais méprisée. Vous me jugez obtus, Matelot Craven. Soit. Mais vous vous trompez. A l?aube des temps, la situation était peut-être celle-ci. Mais la sélection naturelle a prouvé que les dirigeants qui vivaient le plus longtemps étaient ceux qui faisaient confiance à  leurs hommes quand ceux-ci leur déclaraient : « Au fait, un gros monstre plein de dents rôde dans le coin ». Je vous crois donc. Ce qui m?aide encore à  le croire, c?est que vous et le Matelot Polanski n?auriez pas trucidé ou séquestré le Matelot Romero juste pour faire un canular, à  moins d?être aussi jetés que le Matelot Mc Tiernan.
- Mc Tiernan va mieux ? intervint Jean-Pierre Jeunet.
- Matelot Jeunet, je croyais qu?il s?agissait d?une conversation privée entre moi et le Matelot Craven. Pour répondre à  votre impudente question, le Matelot Mc Tiernan semble avoir repris ses esprits. Il prétend maintenant qu?un monstre qu?il n?a pas eu le temps de voir l?a mentalement manipulé. A la lumière des récents événements, il va me falloir apporter du crédit à  ses assertions. Cependant, il ne sera pas relâché avant l?arrivée des Turks ; on ne peut exclure le risque qu?il soit un véritable psychopathe. De plus, si je lui rends la liberté, la famille du Matelot Raimi risque de le lyncher dès qu?il débarquera.
Le capitaine Jackson alla jusqu?à  la salle de pilotage.
- Matelot Argento, essayez de joindre les Turks.
Ils entendirent la voix du répondeur.
- Ici Elena. Nous sommes actuellement absents : de dangereux terroristes se sont parachutés à  Midgar et rôdent dans les égouts. Veuillez nous laissez un message après le signal sonore.
Un « bip » retentit.
- Ici Peter Jackson, capitaine du Giger. Plusieurs de mes matelots témoignent de la présence d?un monstre inconnu sur mon bateau. Nous l?avons enfermé dans la grande soute, mais il a eu le temps de tuer le Matelot Romero et le Matelot Columbus. Le Matelot Mc Tiernan est devenu fou et a fracassé le crâne du Matelot Raimi avec un embout d?aspirateur ; il prétend avoir agi sous l?influence du monstre. La seule chose que mes matelots aient pu voir du prédateur est un tentacule vert ; le Matelot Columbus, lui, semble avoir baigné pendant plusieurs jours dans un réservoir rempli d?un liquide à  effet corrosif. J?ai cherché dans mon encyclopédie, mais les m?urs de ce monstre ne correspondent à  aucune créature répertoriée. Fin de transmission.
Le technicien Argento tourna un bouton et la radio s?éteignit.
- Raah, ils sont toujours sur répondeur, dit Jackson. Bon, vérifiez les effectifs, Matelot Argento.
- A vos ordres, mon capitaine.
L?écran du détecteur révéla vingt-sept points étiquetés.
- Voyons, Columbus et Romero, ou plutôt leurs cadavres, sont toujours dans la grande soute où personne n?ira les chercher ; Raimi, qui est mort lui aussi, repose dans son tiroir à  l?infirmerie, et Mc Tiernan est dans le bloc de cellules numéro deux. Nous ne sommes plus que vingt-trois, mon capitaine.
- Je sais compter, Matelot Argento.
- Pouvons-nous partir, mon capitaine ? firent ensemble Craven et Jeunet.
Peter Jackson leur adressa un regard lourd de sens. Ils s?empressèrent de franchir la porte. Dans la salle de pilotage, le capitaine parlait à  un micro.
- Matelot Devlin, Matelot Emmerich, vous n?aurez aucune prime supplémentaire. Discutez encore mes instructions et vous irez jouer avec le monstre de la soute.

Craven et Jeunet marchaient vers la cabine de Carpenter quand ils virent trois personnes passer dans la coursive. C?était Ronny Yu, George Lucas et Tom Savini. Ils chuchotaient, l?air mauvais ; Lucas, en particulier, un sourcil gris levé sur son ?il vicieux, regardait en tous sens. Il aperçut Craven et Jeunet, les montra du doigt. Les trois comploteurs partirent au pas de course.
- Je n?aime pas ces messes basses, dit Jeunet. Ils préparent certainement un sale coup. « Big George », c?est celui qui m?inquiète le plus. Seul le fric l?intéresse.
- Il en a déjà  tellement, répondit Craven. Pourquoi travaille-t-il encore sur ce rafiot ?
- C?est comme Spielberg : un contrat le liait à  Stanley Kubrick. Notre nouveau capitaine a récupéré le contrat et s?en sert pour le forcer à  bosser : Lucas sait que s?il rompt l?accord, il y perdra.
- Mais Ronny m?étonne. Je le croyais sympa...
- Peut-être que le projet de Lucas est dangereux. Ronny a toujours été un casse-cou, Wes.
- Allez, vas-y, Jean-Pierre.
- Quoi ?
- Tu en meurs d?envie. De me demander si cette histoire de monstre est vraie.
- C?est le cas, Wes ? Ou c?est un canular avec Columbus, Polanski et Romero ?
Craven le regarda.
- Romero et moi sommes des plaisantins... Mais crois-tu que Columbus et Polanski nous aideraient à  monter une blague ? Non, Jean-Pierre, c?est la vérité ; crois bien que j?en suis désolé.
Ils étaient devant la cabine de Carpenter. Jeunet frappa à  la porte. Aucune réponse.
- Il doit se sentir coupable d?avoir envoyé Columbus à  la mort, dit Craven.
- Il me faut quelqu?un à  qui parler, fit Jeunet. J?en ai assez... Tu n?es pas allé changer ton code, Wes ?
- A quoi bon.
- 666, n?importe qui le trouve ! C?est comme si tu avais entré 007.
- Jean-Pierre, qui serait assez bête pour libérer le monstre ou aller le voir ?
- Beaucoup de gens.
- Ecoute, Jean-Pierre. De toute façon, je ne retournerai pas là -bas. Au moment où on rentre un autre code, la porte est déverrouillée. Imagine si le monstre guettait cet instant précis ? Tu veux que je finisse comme Columbus ?
- Tu es trop tendu. Fais quelque chose qui te détends... Va voir un film à  la salle vidéo, par exemple.
- Bonne idée.
- Je viens avec toi, Wes. Moi aussi, j?ai bien besoin de me changer les idées...
Craven et Jeunet repartirent par une autre coursive. Ils croisèrent Clive Barker :
- Qui m?a volé ma Matéria Sentir ? Bande de pickpockets...
Sans les regarder, Barker poursuivit sa route, dans une rage folle contre cet équipage de menteurs, de voleurs et de tueurs.
En passant devant la cabine de Takashi Miike, ils entendirent une voix inquiète se parler à  elle-même.
- J?étais pourtant sûr d?avoir un Shrapnel, un Shrivel et une Dent de Feu sous mon matelas !
Craven se gratta la tête en pressant le pas. Il se tourna vers son ami Jeunet.
- Jackson voulait que le bruit ne filtre pas, tu parles ! Je n?ai jamais vu un tel chaos depuis que les Turks ont réglé l?affaire Isch-Boscheth.
- Les rumeurs courent toujours, Wes. Miike a sans doute entendu dire qu?une centaine de méduses géantes prenait d?assaut le Giger.
Ils poussèrent les grandes portes de la salle vidéo. Un homme aux cheveux ébouriffés approchait de l?écran.
- Salut, Tim !
Tim Burton se retourna. Il paraissait plus endormi que jamais et portait toujours un petit tampon blanc dans la narine gauche, qui ne cessait de saigner depuis que Lucas l?avait assommé.
- Bonjour, Wes, bonjour, Jeunet.
- Ta tête va mieux ?
- J?ai toujours la migraine, mais je pense que Lucas aurait pu cogner encore plus fort. Ah, au fait, j?allais regarder « Glen or Glenda » pour me distraire.
Craven sourit jusqu?aux oreilles.
- Tu aimes Ed Wood, Tim ?
- C?est mon réalisateur préféré ! Ah, « Plan Nine From Outer Space » !
- Te souviens-tu de cette scène géniale où la soucoupe prend feu ? Et quand Lugosi déploie sa cape ?
- Oh, quelle merveille !
Craven s?assombrit.
- Il avait déjà  le visage torturé par les ravages de la morphine. Le pauvre homme est mort au cours du tournage.
- Lugosi a demandé qu?on l?enterre dans sa grande cape de Dracula, poursuivit Burton.
- Un grand homme est parti.
Gêné, Jeunet toussa. Craven et Burton parurent le remarquer pour la première fois.
- Eh bien, regardons « Glen or Glenda » ! s?exclama joyeusement Craven.
- J?ai aussi « la Nuit des Goules »...
- Génial ! Tim, connais-tu « Robot Monster » ?
Burton avait les yeux exorbités.
- Tu l?as ?
- Je l?ai !
- Vite, Wes, regardons toutes ces ?uvres d?art...
Jeunet soupira et baissa la tête.

Seul dans la salle à  manger aux murs bleu azur, John Carpenter buvait bière sur bière. Il s?adressa à  un barman invisible...
- Quelque part, je crois que je l?ai toujours souhaité. Je détestais Columbus, vous comprenez ? Il représentait pour moi le gris, le moyen, l?informe, ce qui ne se dépasse pas, sans aucune ambition. Columbus, c?était le nivellement par le bas... Comme le sport et la télévision. Abaisser le niveau mental des gens, voilà  quelque chose que je ne peux accepter. Quand il a disparu, je me suis dit : bien fait. Qu?un requin le bouffe, qu?une pieuvre l?étrangle, qu?une méduse l?empoisonne ! Mais quand j?ai appris ce qu?il était devenu...
Il décapsula une autre canette de bière et passa la main dans ses cheveux blancs.
- Ce n?est pas que je n?aie jamais vu de mort. Jim ? je peux vous appeler Jim ? ? , vous devez comprendre que j?en ai vu pas mal. A mon âge, on sait bien que la Grande Faucheuse vient tous nous attraper. Eh, Jim, elle vous aura vous aussi. Vous êtes jeune, vous pensez avoir toute la vie devant vous...
Carpenter rota. Un des avantages d?un interlocuteur imaginaire, c?était qu?il ne vous fixait pas d?une expression scandalisée si vous laissiez tomber toute politesse. Il poursuivit :
- Méfiez-vous, Jim. La vie, elle passe vite. Et plus on vieillit, plus on s?en aperçoit. Vous croyez savoir ce qu?est la mort, mais vous ne le découvrez vraiment que lorsqu?un beau matin, dans votre miroir, vous voyez ce vieux type décati, et alors vous vous dites... vous vous dites...
Il s?aperçut que l?alcool lui avait fait oublier ce qu?il voulait dire que Jim se dirait quand il se verrait vieillard, qu?il saurait que la vie était vraiment incroyablement courte, qu?on n?en profitait jamais trop et que tout ça était vraiment absurde et injuste. Qu?est-ce qui est absurde et injuste, déjà  ? se dit-il. Et quel est le prénom de ce barman, déjà  ? Il ingurgita deux autres canettes de bières pour changer sa perception des choses, clarifier son raisonnement, renforcer son argumentation. Il devint alors assez intelligent pour comprendre que le meilleur moyen de connaître le prénom de Jim, c?était de lui demander. Se félicitant intérieurement d?une aussi brillante et rapide déduction, qui prouvait bien que l?alcool aidait à  réfléchir, il dit au jeune homme :
- Alors, comment vous appelez-vous, Jim ? Jim ? Je croyais que vous vous appeliez Jim G-Y-M, pas J-A-I-M. Si j?avais su que vous étiez un Jim qui s?écrit J-A-I-M, je vous aurais dit que... On ne sait vraiment ce que sont les choses qu?après avoir bu une bonne bière.
En effet, John Carpenter était déjà  dans un tel état d?ébriété qu?il divisait le nombre de canettes par douze. Deux packs de six bières étaient vides. Il sortit de la salle à  manger pour aller en chercher d?autres, convaincu que seul l?ingurgitation d?une quantité d?alcool supplémentaire lui permettrait de comprendre la réalité, d?atteindre le fond de sa pensée et d?appréhender la vérité.

Peter Jackson caressait le gigantesque aileron de métal noir fixé à  l?arrière de son navire.
Le Giger. Superbe bâtiment. Il se souvenait encore du jour où l?administration de Shinra Inc. l?avait nommé capitaine du navire des Turks. Une merveille d?architecture navale, qui accumulait les innovations technologiques de la Société Mako sous les cinquante dernières années. L?équipage, encore sous le choc de la mort du précédent capitaine, ne l?avait pas accueilli avec les honneurs dus à  son rang. Et voilà  que la multinationale à  laquelle il avait voué sa vie se trouvait balayée par des événements terribles : un groupe terroriste qui mettait Reno lui-même à  genoux, des monstres énormes venus du grand nord, et ce Météore qui surplombait Midgar tel une épée de Damoclès. Ce n?était pas une belle époque : tout le monde critiquait Shinra Inc., la formidable puissance financière et énergétique qui avait unifié le monde, rendu obsolètes les gouvernements, fait cesser toute guerre, mis en place un ambitieux programme spatial et offert à  chacun l?Energie Mako à  bas prix. Tant d?ingratitude ne pouvait le laisser froid. Et voilà  que ces prémices d?un holocauste imminent parvenaient jusqu?à  lui sous la forme de ce monstre inconnu, pour l?heure enfermé dans la grande soute. Malgré tous les gadgets qui élevaient la valeur totale du Giger à  plusieurs centaines de millions de gils, il avait été incapable d?anticiper le désastre, de protéger son équipage. Si tous les employés de la Société faisaient leur travail aussi mal que lui, il n?y avait rien d?étonnant à  ce que Rufus lui-même soit tombé sous le feu nourri d?une Arme. C?était la fin d?un monde.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 06 Juin 2005, 04:52, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 04 Mai 2005, 22:18 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]6[/center]



Deux jours plus tard, la situation était pire que jamais. Polanski s?abandonnait totalement à  ses penchants paranoïaques et se promenait à  toute vitesse, chaussé de Baskets et armé de Canons 203 mm jetables volés dans l?armurerie. Le capitaine Jackson, dans une phase de dépression, avait cessé d?appeler ses hommes « Matelots » et ne leur donnait même plus d?ordres ; Jeunet était désolé de le voir dans cet état. Wes Craven et Tim Burton organisaient en permanence des séances de projection de séries Z ; ce jour-là , ils passaient et repassaient le grotesque « Battlefield Earth » devant un public de huit marins qui ne cherchaient qu?à  se changer les idées. On ne voyait plus Lucas, Ronny Yu ni Tom Savini ; Jeunet soupçonnait qu?ils tramaient quelque chose, mais ne pouvait en parler à  Craven. Spielberg montait la garde devant la porte blindée de la grande soute, Argento tentait en vain de joindre les Turks, Takashi Miike cherchait désespérément son arsenal égaré, Roland Emmerich et Dean Devlin dormaient dans la salle des machines, et Clive Barker tentait de découvrir qui avait volé sa Matéria Sentir.
Personne ne faisait plus son boulot, y compris le cuisinier ; ils pillaient la chambre froide et se confectionnaient eux-mêmes leurs propres sandwiches. L?équipage ne se rasait plus, ne se coiffait plus, ne travaillait plus ; rien n?était nettoyé, entretenu.
Mais d?une certaine façon, se dit Jeunet en allant se faire une petite salade de fruits dans la salle à  manger, tout ceci est bien agréable. Nous sommes délivrés de la tension habituelle. Hier collègues, aujourd?hui amis.
En entrant dans la grande pièce aux murs bleu ciel, il vit qu?il n?y avait qu?une seule personne dedans. Affalé au bout de la table, au milieu de montagnes de canettes de bières, gisait John Carpenter.
- Je comprends pourquoi on ne te voit plus, John... fit Jeunet.
- Ca va très bien, Sim, répondit Carpenter d?une voix rauque. Sers-moi encore quelques verres.
- Mon nom est Jean-Pierre. Et je crois que tu as assez pris d?alcool.
- Ca ne s?écrit pas G-Y-M, hein Jim ?
Le c?ur de Jeunet se serra. On sous-estimait les effets de cette drogue.
Carpenter ouvrit la bouche à  nouveau... et vomit sur la table. Cela ne l?empêcha pas de secouer ses cheveux blancs (il ne les avait heureusement pas maculés de vomi) et de décapsuler une nouvelle canette. Jeunet lui saisit le poignet.
- Tu as assez bu, John.
- Jim, tu es dur avec moi.
- Je ne m?appelle pas Jim.
- Je sais, toi, tu t?appelles Apple.
- Non, Jean-Pierre.
- Si, Apple. C?est lui, Jim.
- Où est-il ?
- Qui ça ?
Jeunet regarda le vieillard dans les yeux et se promit de ne plus toucher un seul verre de panaché, de bière, de vin, de cidre ou de champagne.
- Jim !
- Oui, c?est son nom. Ca s?écrit J-A-I-M, m?sieur. Et ça se prononce M.O.O.N., hein, Nick ?
- Tu confonds avec Stephen King, John. Tu dois aller dormir, maintenant.
- Hallorann ! C?est son nom. Il m?a dit que les Tommycknockers allaient frapper à  ma porte. Il sait ça, Hallorann. C?est parce qu?il a...
- Je sais, le Shining. John, si tu fais ça quand tu es bourré, qu?est-ce que ça doit être, ton delirium tremens. Et j?aimerais bien voir l?effet des drogues dures sur ton vieux cerveau tordu...
Carpenter s?arracha à  sa prise et commença à  boire la canette de bière. Jeunet n?eut pas besoin de l?assommer : il le mit simplement sur son dos, tandis que le malheureux chuchotait que CA allait venir le chercher pour partager ses tripes avec un nommé Marten. Le vieillard ne pesait pas bien lourd, mais empestait l?alcool. Il le porta péniblement jusqu?au deuxième bloc de cellules.
Steven Spielberg y jouait avec une Matéria Verte.
- C?est quoi ? lui demanda Jeunet.
- Sceller. Je l?utiliserai pour neutraliser complètement ce cinglé de Mc Tiernan s?il s?avise de sortir de sa geôle. Et pour le détritus qui repose sur tes épaules ?
- Je dois te confier John.
- Tu l?appelles par son prénom, maintenant ?
- On est des potes, si, si. Enfin, c?est John qui a dit à  Columbus de plonger pour déloger le monstre qui alourdissait le sous-marin de poche. Il n?a pas cessé de culpabiliser depuis l?aventure de Wes, Roman et Romero dans la grande soute, et a voulu noyer les soucis dans l?alcool. Sois sympa, Steven, mets-le dans une de ces cellules, surtout pas la même que Mc Tiernan.
- Me prendrais-tu pour un salaud, Jean-Pierre ?
Un bruit de rotors les interrompit.

Jeunet arriva sur le pont au pas de course. Un hélicoptère noir approchait du Giger. Il se posa rapidement ; les hélices ralentirent. Jeunet inspecta les alentours et vit que le capitaine Jackson accourait. Dans la bourrasque, ils se précipitèrent ensemble vers le petit héliport qui s?étendait derrière la mitrailleuse spéciale fixée au navire.
Trois Turks descendaient de l?appareil. Reno, Rude et Elena, une nouvelle recrue. Rude était vêtu du costume noir habituel, mais ses deux collègues... Jeunet éclata de rire en voyant le capitaine bouche bée.
Elena portait un jean moulant et un T-shirt blanc ; visiblement peu habituée à  cette tenue, elle jouait avec ses cheveux blonds. Reno, par contre, était très décontracté, aussi à  l?aise dans sa chemise bariolée hawaïenne et son short multicolore qu?il l?avait été en uniforme traditionnel des Turks. Il souriait, exhibant de superbes dents blanches, étincelantes.
- Q-Q-Que vous est-il a-ar-arrivé ? bégaya Jackson.
Reno secoua sa chevelure rouge sombre dénouée, qui retombait à  présent sur ses épaules.
- Nous sommes au chômage, capitaine. La Shinra n?est plus. Ses derniers représentants sont tombés : Reeve s?est échappé de son pénitencier, Heidegger et Scarlet ont grillé dans un robot géant qu?ils avaient conçu eux-mêmes. Le Directeur Shinra demeure introuvable. Le Q.G. est en miettes. La moitié des Réacteurs Mako de la planète sont déjà  hors service, et tous ceux de Midgar sont kaputt. Hojo est mort près du poste de commande de S?ur Ray. Bref, c?est la fin de la Société Mako Shinra Inc.
- Et vous ?
- Les Turks dépendaient de la Compagnie. Nous n?avons plus de travail. Moi et Elena, nous avons abandonné ces uniformes trop serrés.
- Mais Rude en fait encore partie, objecta Jackson en désignant l?homme au crâne chauve.
- Vous n?avez pas remarqué ? Il a enlevé sa cravate. Hein, Rude, toi aussi, tu es libre !
- ...
Le capitaine était atterré.
- Alors, que venez-vous faire ici ?
Reno prit Elena par la taille.
- D?abord, nous avions envie d?une croisière. Et puis, nous voulions vous revoir, pour vous informer des derniers événements. Capitaine, connaissez-vous un bar appelé le « Turtle Paradise » ? On y sert un vin délicieux.
- Je ne suis pas amateur de saké.
L?ancien Turk reprit son sérieux.
- Enfin, dernière raison : il paraît que vous avez des ennuis avec un certain monstre. Et protéger le Giger, ça fait partie de notre boulot.
- Mais vous n?êtes plus des Turks ?
- Je déteste laisser le boulot inachevé. Nous avons fait la paix avec AVALANCHE, il nous reste une dernière chose à  faire... Détruire une créature que nous avons apparemment ramenée avec nous du Gelnika, accrochée au sous-marin de poche.
- Vous réussirez ?
- Nous sommes des pros.
Elena se tourna vers Rude. Jeunet s?amusait trop des réactions de Peter Jackson pour parler ou s?en aller.
- On va se reposer dans nos cabines, dit la jeune femme. On se revoit au dîner, Rude.
- Vous ne pouvez pas quitter les Turks ! protesta Jackson.
La main de Reno se referma sur le bâton toujours accroché dans son dos.
- Et qui va nous en empêcher ?
- Je suis le capitaine Peter Jackson ! C?est moi, le maître à  bord !
- Réveillez-vous, mon vieux. Vous avez été nommé par l?administration de Shinra Inc. : c?est elle qui vous paie. A bord de ce navire, nous sommes tous au chômage. Autant profiter de la vie, à  présent.
Reno et Elena s'éloignèrent main dans la main.
Jeunet fut pris d?un fou rire impossible à  réprimer.
- Ah, vous vous marrez ! rugit Jackson. Vous récurerez les toilettes, Matelot Jeunet !
- Que non ! Qu'est-ce qu'elle devient, votre belle autorité ?

Au dîner, ils constatèrent que Jesus Franco, le cuisinier, leur avait préparé du poulet à  la crème accompagné d?une salade verte. L?équipage était divisé en deux camps, les optimistes qui comptaient profiter de la nouvelle situation et les pessimistes convaincus que tout cela allait très mal finir. Le ventre plein, les marins allèrent se coucher.
Le lendemain, un meurtre avait été commis.

- On voit ce que devient un équipage sans discipline, dit Jackson.
Elena fronça les sourcils, mais ne répondit rien. En compagnie de Reno, elle examinait la macabre scène qui avait le mérite d?être claire : Tom Savini était étendu dans son lit, le visage tordu par une expression de douleur insoutenable, un coutelas enfoncé dans chaque ?il. Deux rubans de sang séché partaient de ses orbites, contournaient les pommettes et se perdaient dans les draps.
- Il avait des ennemis ? demanda Reno à  Craven et Jeunet, qui restaient à  l?écart.
- Aucun, répondit Craven, du moins, pas à  notre connaissance. Ces derniers temps, il complotait avec George Lucas et Ronny Yu.
- Très bien. Elena, prends des échantillons de sang et relève les empreintes sur les draps, le corps et les manches des couteaux. Vous trois, accompagnez-moi maintenant à  la grande soute.

L?immense porte blindée était toujours recouverte de tous ses verrous de titane. Le cadran numérique brillait dans la pénombre. Reno saisit son bâton Garde de Princesse.
- Craven, entrez le code d?accès.
Tremblant, Jeunet regarda son ami taper « 666 ». Le verrou principal rentra dans le chambranle ; il ôta les loquets secondaires. D?un coup de pied, Reno poussa la porte.
La grande soute était plongée dans son habituelle obscurité. Elle paraissait plus froide que jamais, un véritable cimetière.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 06 Juin 2005, 04:54, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 25 Mai 2005, 00:01 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]7[/center]



La créature inconnue aperçue par Craven lorsqu?elle avait mis en pièces Romero n?était visible nul part. Mais de nombreux signes de sa présence pouvaient être relevés. En réalité, la grande soute ne ressemblait plus du tout à  ce qu?elle avait été. Toutes les caisses de bois et boîtes en carton qui constituaient un inquiétant dédale lors de la précédente visite de Craven avaient disparu de la vaste réserve ; elles étaient à  présent empilées contre les murs, les dissimulant complètement, leurs ouvertures tournées vers l?intérieur de la pièce. On aurait dit des casiers, ou plutôt des alvéoles, comme dans une ruche d?abeilles. Le reste de la pièce? Les différentes machines que contenaient les caisses auparavant étaient agglomérées en piliers, en poutres absurdes, qui se fixaient au plafond, aux murs, au sol, aux poutrelles métalliques.
Cette toile d?araignée technologique était maintenue en place par les journaux. Les piles de vieux papiers rangées dans la cale avaient été mâchées, transformées en un immonde ciment gris et gluant qui enveloppait, recouvrait les parois trouées de centaines d?alvéoles et les épaisses arêtes traversant la pièce. La grande soute n?était plus qu?une immense ruche remplie d?un entrelacs absurde de piliers et de poutres d?acier baignée dans du papier mâché.
Tels des astronautes explorant une planète lointaine, Reno, Craven, Jeunet et Jackson avancèrent à  pas prudents.
- Un nid, murmura Craven.
Aux bouts de filins de papier mâché pendaient deux cocons blancs. Reno brandit sa torche électrique. Le premier cocon contenait un squelette disloqué. Le second... le visage en bouillie, le corps démembré, éventré, sanguinolent, il était pratiquement impossible à  reconnaître.
- Reno, vous êtes sûr de pouvoir détruire cette horreur ? fit Jeunet.
- J?étais un Turk. Malgré tout, je ne promets rien : l?une des premières consignes que j?ai apprises, c?est qu?on ne doit jamais sous-estimer l?adversaire.
- Maintenant, nous savons pourquoi la chose a fait toutes ces poutres, dit Jackson. Elle y suspend sa nourriture. Mais à  en juger par le nombre de poutres, elle envisage un véritable festin.
Il s?approcha d?une paroi. Toutes les caisses avaient leur ouverture tournée vers lui. Il regarda dans l?une d?elles...
- Il y a des oeufs dans les alvéoles !
Craven s?approcha à  son tour. Une sphère parfaite, d?un pourpre violent, grosse comme une tête humaine, reposait dans la caisse.
- C?est bien un nid. S?il y a un oeuf dans chaque caisse et carton, la chose prépare une véritable invasion de la planète.
- Atchaa !
Après s?être assuré que le monstre ne les espionnait pas, Reno sortit tous les oeufs de leurs alvéoles. Lorsqu?il les transportait, ils palpitaient doucement dans ses bras. Il les déposa au centre de la pièce et leva son bâton. Sept sphères brillantes y étaient incrustées. Mais celles qui étincelaient étaient une Matéria Feu où dansaient quatre lumières, et une Matéria Tout. Une fumée jaune monta autour de Reno.
Le grand amoncellement d'oeufs violets s?enflamma. Les répugnantes sphères battirent comme des coeurs tout en se consumant.
- J?ai pu constater que vous disiez la vérité, Jackson. Mais il s?agit de retrouver votre monstre.
- Il n?a pas pu sortir, la porte était fermée !
- Il n?y en a pas d?autres ?
- Au-cune ! La grande soute n?a qu?une seule porte, et elle est restée verrouillée.
- Dans ce cas...
Reno se concentra à  nouveau et les caisses de bois, les boîtes en cartons qui cachaient les parois se recroquevillèrent dans les flammes.
Les alvéoles avaient dissimulé une gigantesque déchirure. Le monstre avait confectionné une dernière « étagère » de casiers improvisés et l?avait tirée derrière lui lorsqu?il était sorti, pour les empêcher de découvrir l?ouverture.
- Quelle est cette direction, Jackson ? fit Reno.
- Oh... Les conduits d?aération. Ils parcourent tout le bateau. Ce monstre peut être n?importe où.
- Atchaa !
Tous se tournèrent vers Craven. Il sortait un Mouchoir de sa poche.
- J?ai le droit d?être enrhumé, non ?
Reno esquissa un étrange sourire, comme s'il avait entrevu une porte de sortie.

En remontant sur le pont, ils entendirent un bruit d?hélices bien familiers. Ils coururent et virent que l?hélicoptère avait été remis en marche.
- Votre pilote s?affole, Reno ? lui demanda Craven.
- Nous n?avons pas de pilote. C?est moi qui contrôle cet engin, d?habitude.
Elena se précipita à  leur rencontre.
- Reno ! Les empreintes digitales sur les manches des couteaux ! Ce sont celles de Yu !
- Comment ? Alors, c?est le monstre qui l?a manipulé...
En plissant les yeux, Craven parvint à  distinguer quelles personnes étaient dans l?hélicoptère noir : c?était George Lucas et Ronny Yu.
- Lucas ! Yu ! Non !
Le marin obèse hurla pour couvrir le bruit assourdissant des rotors.
- Désolé ! Moi, je suis riche ! Je me tire de ce bateau de merde ! Bye, bye ! Et regardez...
Lucas brandit une grosse valise, un sourire aux lèvres.
- L?argent de la drogue ! Crétin de Jackson ! Pendant des années, il n?a pas vu que je restais sur le Giger simplement pour l?héroïne !
- L?héroïne ? fit Jackson, stupéfait.
- Ouais, mon cochon, l?héroïne ! Le contrat qui me liait au capitaine Kubrick était une invention ! Je l?ai fabriqué en un week-end ! Je me doutais que tu allais me virer et aussi que si tu acceptais, par miracle, de me garder, tu ne comprendrais pas pourquoi, malgré ma fortune, je restais à  bosser sur ce bateau de merde ! Alors, j?ai imaginé ce contrat à  double tranchant ! Des siècles que je te nique ! Quelle belle couverture... le Giger, le célèbre bateau des Turks, qui voguait d?un coin du globe à  l?autre !
Jackson avait le visage rouge et le regard haineux. Il serra les poings tandis que l?hélicoptère décollait.
- Et le capitaine Kubrick ?
- Imbécile ! Tu ne comprends pas ? Il était de mèche avec moi ! Spielberg avait tout compris, mais il ne pouvait rien révéler car nous gardions sa femme en otage ! Voilà  pourquoi il me hait ! Et la drogue, c'est la raison pour laquelle Yu a dû tuer Savini !
- Pourquoi ?
- Nous croyions qu?il était de notre côté, mais hier soir, il a menacé de nous faire chanter, clama Ronny Yu. Les couteaux...
Ses phrases suivantes furent couvertes par le bruit des rotors.
Jackson dit à  Reno :
- Pourquoi ne l?arrêtez-vous pas ?
- Les hélicoptères des Turks sont blindés. Ils résistent aux armes à  feu, aux missiles et à  la magie.
Pendant que l?appareil noir s?élevait lentement, Craven remarqua que quelque chose de bizarre était fixé en dessous. Il reporta son regard vers le petit héliport et vit que le métal du pont était déchiré à  cet endroit.
Il ne put que pousser un cri étranglé.
Il plissa les yeux, mais ne parvint pas à  distinguer l?abomination. Elle était un peu moins volumineuse que l?hélicoptère avec lequel elle montait, et on pouvait voir divers membres, semblables à  des coudes et à  des mains, s?agiter dans l?ombre sous l?engin. Trois tubes roses couraient près de la queue de l?appareil. Si la chose était humanoïde, ils devaient être fixés à  son crâne.
Soudain, un membre énorme jaillit. On aurait dit un tentacule épais comme un tronc d?arbre. Il s?enroula autour de l?hélicoptère ; Lucas et Yu hurlèrent. Leur véhicule volant se balança un instant et tomba dans la mer, près du Giger.
L?épave noire flottait. Ses pales brassaient désespérément l?eau de mer. Rugissement de prédateur. Pas de sang, pas de membres qui volaient, rien.
Ce fut Jackson qui rompit le silence :
- Journée de merde.
Comme en réponse au capitaine, l?hélicoptère explosa. A côté de lui, quelque chose bondit hors de l?eau et y replongea. A une vitesse terrifiante, la créature fendit la mer en direction du navire.
Jackson bondit dans la salle des commandes et vociféra dans le micro :
- A fond de train, vite !
Il entendit la voix nonchalante d?Emmerich répliquer :
- Une minute... faut réordonner le réacteur numéro trois, dépressuriser une fois pour toutes et dévier la vapeur vers une zone en sous-tension pour l?alimenter... C?est un boulot qui prendra bien, pfou ! ... un quart d?heure.
- Vous avez trente secondes avant la mort !
Cette fois, ce fut Devlin, éternel compagnon mécano d?Emmerich, qui répondit.
- Les menaces n?arrangeront rien.
- Fous dangereux, vous ne comprenez pas ? Le navire est attaqué !
Jackson n?entendit jamais la réponse des deux paresseux. Une secousse ébranla le Giger, suivie d?une déflagration.
Il se remit sur pied et se précipita hors de la salle de pilotage. Le tentacule épais comme un tronc d?arbre qu?il avait vu s?enrouler autour de l?hélicoptère s?agitait à  présent sur le pont. Le reste du monstre devait être derrière le grand aileron, près de la poupe.
Takashi Miike courait sur le pont. Il portait tout son matériel militaire ; il avait apparemment tout retrouvé juste à  temps. Sur son épaule couverte de chargeurs, il tenait un Bazooka Solide incrusté de diverses Matérias.
- Tu vas te faire tuer, Takashi ! s?exclama Craven.
- J?ai gagné une Matéria Attaque Finale au Golden Saucer, lors de mon dernier congé. Avec un sort de Vie, j'ai une bonne assurance.
Miike bondit derrière l?aileron. Un membre semblable à  une patte de dinosaure surgit à  côté de lui. Il parut un instant pétrifié par ce qu?il voyait, mais se reprit et visa soigneusement. Une roquette grise fila droit sur sa cible.
- J?aurais aimé au moins voir à  quoi ressemblait cette chose... gémit Jeunet alors qu?une explosion retentissait.
- Takashi épaule encore son Bazooka Solide ! fit Craven.
Un tentacule vert aussi mince qu?un doigt humain surgit. Il se tortilla et se planta dans la poitrine de Miike, qui laissa échapper un petit cri. Le bazooka tomba à  terre tandis que le petit appendice se rétractait.
Le tentacule apparut à  nouveau, enlaça Miike, qui restait paralysé, et l?entraîna derrière le grand aileron noir. Reno sursauta et se mit à  courir.
Un râle. Craven, Jeunet et Jackson emboîtèrent le pas à  Reno. Redoutant de deviner ce qu?il allait découvrir, Craven se hâta encore davantage.
Il n?y avait plus de monstre. Il n?y avait pas de cadavre. Dans l?acier noir et blindé de la coque du Giger avait été creusé un nouveau trou, apparemment sans le moindre effort. La chose avait emporté Miike.
- Qu?y a-t-il en dessous ? dit Jeunet.
Jackson blêmit.
- Un tas de conduits d?aération et puis? la grande soute.
- Ce monstre possède apparemment une capacité d?adaptation rare, conclut Reno. Il utilise au mieux l'environnement. Et il a une chance de démon... Miike a lâché son arme, la combinaison de résurrection des Matérias ne peut faire effet.
- J?ai l?impression que vous en savez plus que ce que vous ne voulez bien nous révéler, fit Craven. Nous sommes dans le même bateau. Parlez.
- Nous ne sommes plus des Turks, lui rappela Elena. Mais pour résumer, Reno a découvert qu?il avait commis une gaffe en laissant tomber le Giger.
Reno baissa la tête. Elena serrait les dents, les mains sur les hanches. Elle finit par parler.
- L?avion Gelnika contenait toutes sortes de choses, essentiellement du matériel anti-Armes. C?était une véritable station de recherches volante. Au moment du crash, un parasite des plus dangereux s?est échappé
- Un parasite ? grogna Craven. Mais quel genre de scientifiques...
- Des subordonnés d?Hojo : ils faisaient des recherches sur des armes biologiques et ont fini par conclure qu?il suffisait de créer une créature capable de contrôler et de faire muter n?importe quel être vivant, en faisant fusionner leurs systèmes nerveux. Ils ont appelé ça l?Hermès. L?Hermès devait être lâché sur une Arme, par exemple celle qui parcourt actuellement les océans, l?Arme Emeraude. En se fixant à  elle, il aurait dévoré son ADN et l?aurait réutilisé pour la métamorphoser, faire évoluer son corps à  une vitesse incroyable. Le monstre serait parti à  la recherche de proies à  sa taille ? les autres Armes ? et les aurait tuées les unes après les autres.
- Très bonne idée ! s?esclaffa Craven. Et après ? Ils espéraient faire disparaître ce monstre d?un coup de baguette magique ?
Reno lui lança un regard noir et répliqua :
- L?Hermès a une faille. Il la transporte dans son système nerveux protéiforme et doit la transmettre à  toutes les cellules du corps de son hôte, puisqu?il ne fait plus qu?un avec lui. Cette faille rend son organisme entier vulnérable à  une souche mutante du rhume. Nous avons appelé ce virus « l?Anti-Mercure ». En aspergeant n?importe quelle partie du corps de l?Hermès d?une solution contenant de l?Anti-Mercure, on provoque sa désagrégation immédiate.
- Génial ! Pourquoi n?avez-vous pas amené l?éprouvette avec vous ?
- Il n?y en avait qu?une dizaine de doses et elles ont toutes grillées avec le Bâtiment Shinra. Cependant, il reste un mince espoir.
- Lequel ? hurla Craven. Cette saloperie d?Hermès est faite pour casser la gueule à  des Armes !
- Le parasite était supposé acquérir une telle puissance en se fondant dans une Arme. Jusqu?à  preuve du contraire, il n?y a aucune Arme près du Gelnika, et le monstre que nous avons vu serait beaucoup plus grand s?il avait atteint ce but ; en fait, il ferait près de mille mètres de haut. En proportion, je dirais que l?Hermès s?est fixé à  la nuque d?une créature d?environ trois mètres de haut ; les proportions correspondent.
- Quelle créature ?
- Il y avait des monstres dans le Gelnika. Des Caniches, des Serpents de Mer, mais aussi des monstres inconnus, dérivés d?êtres humains, produits des expériences. A en juger par les « tubes roses » que j?ai cru entrevoir quand l?Hermès était fixé sous notre hélicoptère, je dirais que le parasite a choisi un « homme-fleur ».
- C?est bien, Reno ?
- C?est cauchemardesque, Craven. Les « hommes-fleurs » comptent parmi les pires monstres créés par manipulations génétiques. Si l?Hermès s?est allié avec l?organisme d?un « homme-fleur », il devrait pouvoir nous paralyser, nous démembrer... et nous manipuler mentalement.
- Mc Tiernan, fit Craven.
- Mais certaine de ses caractéristiques physiques me sont inconnues, ajouta Reno. Il a dû les dénicher en pillant l?ADN de l? « homme-fleur ». Columbus, par exemple, semble avoir été digéré vivant.
- Les étoiles de mer font ça, dit tristement Jeunet. Elles ouvrent de force la coquille des mollusques, fixent leur estomac dessus et attendent que leurs sucs digestifs les dissolvent.
- Appelez tout le monde dans la salle des commandes, conseilla Reno à  Jackson. Il est temps d?agir.
Le Turk désigna Craven.
- Et ce bonhomme-là  pourrait bien nous sauver.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 09 Juin 2005, 22:57, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 01 Juin 2005, 02:17 
Hors-ligne
Pamplemousse Panchromatique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 01:00
Message(s) : 6475
Localisation : Paris, France.
[center]8[/center]



Ils se rendirent au poste de commande. La nuit tombait. Dario Argento mit en contact tous les haut-parleurs et Jackson commença à  hurler dans le micro.
- Matelots ! Tous au rassemblement ! Immédiatement ! Le monstre s?est échappé de la grande soute ! Il a tué Miike, Yu et Lucas ! Amenez toutes vos armes ! Je sais que vous n?avez plus aucune raison de m?obéir, je fais appel à  votre bon sens !
Il reprit son souffle et caressa sa barbe.
Une demi-heure plus tard, tout l?équipage était là . Dans le ciel noir, on apercevait à  présent les lumières cruelles des étoiles. Le dernier marin qui arriva était Jésus Franco, le cuisinier. Il était d?une pâleur cadavérique ; son visage était baigné de sueur.
- Où sont Bass, Loncraine, Hooper et Robbins ? s?avisa Jackson.
- Loncraine a voulu rester dans sa cabine, Robbins et Bass ont disparu...
- Et Tobe Hooper ?
- Il était derrière moi dans la coursive, haleta Franco. Une forme noire... c?était sûrement cette sale bête... elle l?a chopé.
Reno distribua à  tous les marins de petites bagues brillantes et prit la parole.
- Ce sont des Anneaux de Paix ; ils empêcheront le monstre de vous manipuler comme Mc Tiernan. Le monstre qui a commencé une élimination méthodique de tous les êtres vivants de ce bateau s?appelle l?Hermès. Nous l?avons ramené du Gelnika par erreur. Il n?a aucune intelligence : c?est un simple prédateur. La substance destinée à  le dissoudre entièrement après sa mission, l?Anti-Mercure, qui sert de vecteur à  une souche mutante de la grippe contre laquelle il n?est pas immunisé, était dans le Bâtiment Shinra, près du Président Rufus, et a été détruite.
- Où est le problème ? dit Spielberg. Nous n?avons qu?à  fuir le Giger.
- Impossible : l?hélicoptère a explosé. Vous pouvez toujours essayer de filer par la mer, avec un de nos bateaux à  moteur, mais l?Hermès semble fendre l?eau plus vite qu?un requin, raison pour laquelle il est également déconseillé de se barrer à  la nage. Nous pourrions demander du secours à  Shinra Inc. par radio, malheureusement... Shinra Inc n?existe plus. L?unique moyen de nous en tirer : tuer l?Hermès.
- Il est puissant, mais pas invincible, rappela Craven. Evitez seulement de trop vous en approcher ou il vous paralysera.
Polanski réagit.
- Vous êtes complètement cinglés ? Vous voulez que nous allions gratter le nez à  ce truc ?
- Auriez-vous une autre solution, Matelot Polanski ? rétorqua Jackson d?un ton glacial.
- Ouais. Faisons filer le Giger jusqu?à  une plage où nous débarquerons.
- Hors de question ! protestèrent Devlin et Emmerich. Nous refusons de descendre seuls dans la salle des machines pour faire redémarrer le navire !
- On vous accompagnera...
- Le nombre ne changera rien, dit Craven. Ce monstre a à  plusieurs reprises déchiré la coque, le pont ou les parois du Giger ? dois-je vous rappeler qu?elles sont d?acier doublé de titane ? Une force pareille? Nous serons massacrés en quelques instants.
- Alors pourquoi sommes-nous vivants ? répliqua Jeunet.
Craven posa son index sur l?écran du détecteur.
- La réponse est là . Regardez, les points étiquetés « Tobe Hooper » et « Saul Bass » se déplacent vers la poupe pour rejoindre « George Lucas », « George A. Romero », « Chris Columbus », « Ronny Yu », « Takashi Miike ».
- Je croyais qu?ils étaient tous morts ! s?exclama Jeunet.
- Ils le sont. L?Hermès doit transporter leurs cadavres vers la grande soute pour les enfermer dans des cocons. Ainsi, la nourriture sera conservée au frais.
- On dirait une araignée... fit Burton.
- Je ne sais pas quels gènes ces savants attardés ont implantés à  leur foutu parasite et à  leur foutu « homme-fleur », moi ! Ce monstre digère les gens vivants comme une étoile de mer ou un anaconda, il se fait une ruche comme les abeilles...
- Il n?a encore fait qu?une couveuse, affirma Reno. Au final, je pense qu?il est prévu que le Giger tout entier se transforme en nid flottant... voguant vers divers quais pour répandre cette si douce espèce sur notre belle planète.
Craven frissonna dans l?air frais de la nuit. Une idée terrible lui vint à  l?esprit.
- A propos, Reno... Combien de temps faudra-t-il pour que les ?ufs éclosent ?
- Vous avez la mémoire courte, Matelot Craven, dit Jackson. Nous les avons tous brûlés.
- Et vous êtes bien naïf, « capitaine » Jackson. Il a sûrement repris la ponte.
Sans prêter attention à  l?intervention du barbu, Reno se gratta la tête.
- Impossible à  savoir. L?Hermès n?était à  l?origine pas censé pouvoir se reproduire : il devait simplement se greffer sur une Arme et la transformer en monstre invincible afin qu?elle extermine tout l?Arsenal. Il a dû dérober le moyen de reproduction dans le code génétique de l? « homme-fleur ». Pour une créature de cette taille, je dirais qu?il faudrait plus d?un an avant la naissance des premiers bébés.
- Ouf !
- Le problème, c?est que l?Hermès a été fabriqué de manière à  pouvoir optimiser toutes les ressources de son ADN, de celui de son hôte et de ceux de ses proies. A chaque espèce ingérée, il augmente son intelligence, renforce sa musculature, diminue le temps de ponte et d?éclosion.
- Alors... nous, les hommes ?
- Pour exploiter toutes nos possibilités, il a dû remonter au stade du génome de rongeur. Combien de temps met un lapin pour accoucher ?
- Reno !
- Envisager le pire, c?est ce qu?on nous apprend chez les Turks. Mais là , c?est une hypothèse optimiste : l?ADN humain est l?un des plus malléables qui soient. Dès qu?il a digéré Columbus...
John Carpenter s?avança. Inquiet, Craven remarqua que les points signalant les victimes du monstre, sur le détecteur ronronnant, s?étaient immobilisés dans la grande soute depuis déjà  dix minutes. L?Hermès allait bientôt se remettre en chasse.
- Steven m?a sorti de ma cellule, fit Carpenter. Depuis que j?ai dessaoulé, j?ai beaucoup réfléchi. Nous avons trois solutions : mettre le feu au stock d?explosifs de la troisième soute...
- Vous n?y pensez pas ! Le Giger vaut...
- Capitaine, personne n?ira vous donner la facture : la Shinra n?existe plus, combien de fois faudra-t-il vous le répéter ? La seconde solution : aller nous-mêmes démolir ce monstre.
- Pas question ! vociféra Polanski.
- Enfin, poursuivit Carpenter, la troisième solution : tous nous réunir sur le pont, à  portée de tir de notre grosse mitrailleuse. Le monstre viendra nous chercher, et je doute qu?il fasse encore le malin avec une tonne de balles dans le derrière.
- La première option me semble idéale, dit Craven. Mais elle est trop risquée. Nous quittons le bateau en mettant le feu aux explosifs, et si l?Hermès nous suit, il sera détruit pour rien, et nous serons bouffés quand même. Je vote donc pour la troisième solution : la mitrailleuse.
- Alors, nous allons servir d?appâts ?
- J'ai d'autres plans, gronda Reno. Synthétiser l'Anti-Mercure...
Tout s?effondra. Le plancher métallique de la salle des commandes fut réduit en lambeaux par des griffes grandes comme le bras de Craven. Un immense trou au centre de la pièce. Clive Barker disparut en hurlant dans le gouffre obscur ; deux mâchoires terribles, gigantesques, pleines de muscles saillants, dégoulinantes de bave, se refermèrent sur lui.
Le cri de Barker s?éteignit. Les mâchoires trônaient, surgissant du plancher déchiqueté, au milieu de la pièce. Plusieurs appareils explosèrent ; Argento s?en éloigna en gémissant. L?énorme gueule de dinosaure se rouvrit, laissant passer un tentacule vert. Craven le reconnut : c?était cet appendice qui avait immobilisé Miike. Plaqué contre le mur, comme tous ses collègues, il était déjà  pétrifié par la peur.
Sans hésitation, le tentacule fila hors de la gueule grande ouverte et écorcha le bras de James Cameron.
Les muscles du visage de Cameron se figèrent et il se raidit. Surmontant sa terreur, Craven bondit jusqu?à  la porte et s?enfonça dans l?obscurité. Devant lui, il vit Reno, Elena, Rude, Carpenter, Spielberg et Franco courir dans la nuit. Après avoir accéléré l?allure, il s?aperçut que Jeunet, Burton, Polanski, Emmerich et Devlin le suivaient. La poignée de marins restés trop longtemps dans le poste de pilotage poussaient des hurlements atroces.
De l?extérieur, en courant toujours plus vite, ils virent que la cabine se dilatait, comme si toutes les parois étaient soumises à  une incroyable pression. Elle explosa et l?Hermès en sortit.
La nuit noire ne dissimulait pas son corps massif, bleu argenté comme celui d?un poisson, recouvert de tentacules blancs, qui se tordait horriblement. Il était prolongé d?une queue presque aussi épaisse, une queue de dinosaure, qui devait bien faire huit mètres de long. C?était ce membre volumineux qui s?était enroulé autour de l?hélicoptère. Sous le ventre distendu, deux jambes titanesques, bardées de muscles gonflés à  bloc, ressemblant à  celles d?un tyrannosaure mais sans genoux ; elles étaient repliées vers l?arrière comme des bras humains géants ou des pattes de sauterelles. Au-dessus du crâne, six tubes roses achevés par des épines noires, sans doute les pétales de l? « homme-fleur ». Mais le plus terrible restait la tête. C?était la gueule innommable armée de crocs acérés qui avait surgi dans la salle des commandes, surmontée d?une paire d?yeux blancs qui cherchaient, motivés par un appétit insatiable, de nouvelles proies. Des mâchoires gigantesques, qui laissaient passer le tentacule buccal paralysant dont avaient été victimes Miike et Cameron. Ce membre vert était en fait une sorte de langue.
Les affreux yeux blancs, sans iris ni pupilles, se fixèrent sur eux, et l'abomination se lança à  leur poursuite. Chacun de ses pas ébranlait le pont. Craven se demandait comment une créature d?une telle taille avait pu être entièrement cachée par l?hélicoptère ; il conclut finalement que tous les hommes qu?elle avait ingérés avaient participé à  une croissance stupéfiante qui n?allait pas faciliter les choses... Il tenta d?accélérer encore, mais ses jambes fournissaient déjà  un effort surhumain. Elles étaient transpercées par les crampes. Quelle hauteur faisait l?Hermès ? Il manquait de références pour évaluer la taille du monstre, mais il semblait démesuré, à  croire que son poids allait faire basculer le Giger comme une vulgaire barque. C'était grotesque, cauchemardesque. Douze mètres ? Dix-huit mètres ?
Craven vit que Reno et Carpenter avaient atteint la mitrailleuse qui se dressait devant l?héliport. Dans la nuit noire, elle acquérait des reflets bleutés. Elena, Rude et Spielberg les rejoignirent, rassurés par la présence imposante de l?arme à  feu.
Craven se précipita vers eux.
Reno tripota les mécanismes de contrôle de l?arme. Les ténèbres l?empêchaient de distinguer les commandes. Il saisit une poignée, appuya sur un interrupteur. Le canon de deux cent kilos pivota sur sa base. Il mania encore quelques leviers et s?empara d?un guidon semblable à  celui d?une moto.
A la traîne, les mécanos Roland Emmerich et Dean Devlin étaient presque à  portée de la gueule rugissante de l?Hermès.
- Aidez-nous !
- Promis ! Plus jamais nous ne laisserons de cambouis dans le...
Devlin ne put finir sa phrase ; une patte de dinosaure l?écrasa comme un insecte, répandant une flaque de sang sur le pont. Les étoiles se reflétaient dans cette mare noire. Fou de terreur, Emmerich fit un dernier effort musculaire. La langue paralysante de la créature lui transperça la jambe. S?égosillant, il fut ramené entre les mâchoires avides par ce diabolique tentacule vert.
L?Hermès mâcha, et des torrents de sang frais se répandirent aux alentours, dans un bruit d?éclaboussures écoeurant. Une main coupée, toujours engoncée dans un gant crasseux, retomba sur l?épaule de Craven qui sursauta.
En maniant le guidon, Reno prit le contrôle des mécanismes hydrauliques qui permettaient le déplacement de la lourde mitrailleuse. Il la dirigea droit sur le monstre, visa et appuya sur la gâchette avec un cri de joie.
Le canon déversa une fontaine de feu. La première rafale rata de peu la créature et se perdit dans l?acier du pont. Reno serra les dents, décrocha son bâton et l?utilisa pour maintenir la gâchette enfoncée. La mitrailleuse se mit à  tirer en continu ; il tira sur le guidon et la seconde rafale alla frapper le flanc de l?Hermès.
L?effet fut dévastateur. La peau écailleuse du monstre se déchira, répandant du sang transparent. Quelques tentacules blancs, sectionnés, tombèrent à  terre. L?abomination poussa un épouvantable rugissement et se débattit. Le feu nourri la fit reculer. Son flanc était en bouillie. Alors elle s?accroupit et bondit.
L?espace d?un instant, le firmament disparut au-dessus du Giger. Reno recula juste à  temps ; l?Hermès retomba là  où il se tenait quelques instants plus tôt. Le monstre prit la mitrailleuse dans sa gueule dégoulinante de sang noirâtre et la déchiqueta. Il recracha quelques fragments de métal.
Toutes les personnes réunies près de Reno s?enfuirent à  leur tour. Carpenter ne fut pas assez rapide ; la créature l?avala tout rond.
Craven était horrifié. La chose allait digérer Carpenter vivant. Il parcourut des yeux les alentours. Jesus Franco nageait dans la mer invisible, en direction d?une falaise que l?on voyait à  peine, pâle tache de craie dans l?encre de la nuit. Reno, Rude et Elena faisaient face à  l?Hermès. Steven Spielberg et Peter Jackson s?étaient enfuis en direction des cabines. Roman Polanski, Jean-Pierre Jeunet et Tim Burton étaient debout, paralysés, à  côté de lui. En comptant les Turks, ils avaient été trente. Neuf survivants. Et bientôt, ils flotteraient tous dans l?estomac de l?Hermès.
- Elena ! rugit Reno. Tu as des Matérias Rouges ?
- Non, mais j?ai ça.
Elle lança quelque chose et le monstre fut pris dans un tourbillon de feu. Il se recroquevilla en position foetale ; les flammes s?éteignirent.
- Quelque chose de plus puissant !
Deux hommes arrivèrent, portant des cartons dans leurs bras. Jackson s?arrêta et se retourna.
- Loncraine ! Robbins ! Où étiez-vous passés ?
- Nous sommes allés dans la seconde soute, capitaine !
- On a ramené du matériel !
La créature se releva. Ses flancs semblaient en ébullition.
- Qu?est-ce qu?il fait ? demanda Craven à  Reno.
- Il se régénère ! Je ne vous l?avais pas dit ?
- Si on m'offre une occasion de tuer ces crétins de savants !
Sans prêter attention au gigantesque monstre, Loncraine et Robbins tirèrent des objets divers de leurs cartons. Plusieurs Matérias, un Mouchoir, trois Dents de Dragons et un drap blanc cassé. Ils commencèrent par agiter le linge qui s?évapora dans la nuit noire.
- C?est quoi ? fit Jeunet.
- Un Rideau Clair, répondit Robbins. Ca va nous protéger un moment... comme un champ magnétique.
L?Hermès donna un grand coup de queue à  Polanski. Le membre s?arrêta un instant dans l?air, puis vint à  bout de la résistance et envoya le marin contre une paroi de métal noir. Il retomba, inerte, la nuque brisée.
- Je vois, dit Craven.
- De la camelote, ajouta Jeunet.
- Mais non, au moins, sa famille n'aura pas besoin d'un plan pour le placer dans le cercueil.
Le monstre avança d?un pas et rugit.
- Elena, remue-toi ! s'exclama Reno.
- Que veux-tu que je fasse ? Ah si...
Elle arracha la chemise bariolée de Reno et la jeta droit dans la gueule du monstre qui l?avala sans se poser de question.
- Ca va encore nous faire gagner quelques secondes. J?ai mis une Grenade dans une poche.
Reno fouillait dans les cartons. Loncraine et Robbins avaient pris chacun une Dent de Dragon. Craven fouilla à  son tour dans une boîte, tandis que la gueule de l?Hermès était secouée par une violente déflagration. Il trouva un tas de Mouchoirs, une troisième Dent de Dragon très endommagée et... une poignée de poudre. Elle étincelait dans la nuit noire.
Jeunet se précipita sur la poudre.
- C?est à  moi, Wes ! Je l?ai gagnée au Battle Square?
- De la cocaïne ?
- De la Poussière d?Etoiles, ignare.
- Cette revue des mille objets que l?on peut trouver, avec un peu d?acharnement, dans notre merveilleux monde, est fort intéressante, Jean-Pierre. Je suggère néanmoins que nous nous occupions un peu de ce...
Craven désigna l?immense monstre, qui s?était remis de la Grenade dissimulée dans la chemise de Reno. La créature éventra d?un bon coup de griffe Tim Burton.
- Tiiiiiim !
Le marin cracha un flot de sang noirâtre qui se mêla à  sa chevelure hirsute. Il retomba, face contre terre, dans sa vomissure. Ses viscères dégoulinantes se déroulaient autour de lui, à  peine visibles dans les ténèbres. La chose poussa un nouveau rugissement et engloutit les restes de sa victime.
Craven et Jeunet se mirent à  chercher dans les cartons avec encore plus d?empressement. Loncraine et Robbins utilisèrent leurs Dents de Dragons. L?Hermès fut soudain englouti par une bourrasque. L?électricité déchaînée frappait sa gueule avec une haine et une célérité folle. Il se débattit un instant dans les éclairs, redressa la tête. La tempête cessa. Les brûlures disparaissaient déjà .
Craven et Jeunet trouvèrent l?objet souhaité.
- Quelle chance !
Ils jetèrent l?accessoire à  Reno qui avait enfin fixé les nouvelles Matérias à  son bâton Garde de Princesse.
- Un Anneau Maudit ? fit Reno. Je n?en ai pas besoin !
Deux mâchoires titanesques se refermèrent sur lui. Le monstre déglutit. Elena hurla. Rude lui prit le bras.
- Il faut courir... et accomplir le plan de Reno à  sa place !
Ils s?enfuirent ensemble à  travers l?obscurité, dans la direction d?un escalier qui descendait en dessous du pont. Craven les suivit, alors que Loncraine et Robbins étaient pulvérisés en un jet de sang noir par un effroyable coup de pied du monstre. Leurs intestins, rouge sombre dans la nuit, se déroulèrent sur les peintures à  l?aérographe d?H.R. Giger.
En se précipitant sur les marches qu?il ne voyait pas dans l?obscurité, Craven gémit.
- Jean-Pierre, es-tu là  ?
- Ne te retourne pas, continue à  courir.
- Il va nous poursuivre ?
- L?escalier est trop petit pour lui. Naturellement, en défonçant le métal... Mais je crois qu?il va d?abord traquer Franco, Spielberg et Jackson. Le premier fait de la natation, et les deux autres veulent s?enfermer dans leurs cabines.
- Ils sont fous, Jean-Pierre ?
- Nous avons tous trop peur pour raisonner convenablement, Wes. Puisque ces trois-là  vont y passer... Nous ne sommes plus que quatre.
- Es-tu sûr qu?il va préférer... ?
Un râle inquiétant interrompit Craven.
- C?était Jesus Franco, dit Jeunet. Un de moins.
- Tu crois que Rude et Elena ont un plan ?
- Il y a quelques jours, c?étaient encore des Turks. Ils sont formés pour résister à  la mort d?un collègue. Oui, ils ont probablement un plan. Je ne vois pas lequel...
- Que comptent-ils faire dans la salle des machines ? Et pourquoi dois-je les y suivre ?
- Peut-être qu'ils vont faire exploser les réacteurs Mako. Wes, ça détruirait le Giger et l?Hermès avec.
- Je ne veux pas mourir, Jean-Pierre !
- Moi non plus. Mais si nous sommes foutus... nous pouvons au moins sauver d'autres que nous.

La salle des machines, contrairement au pont, n?était pas plongée dans le noir total : Rude avait actionné un interrupteur et une ampoule jaunie répandait une faible lueur parmi les fils électriques et les tuyaux. Un gros cylindre et trois plus petits étaient regroupés au centre de la pièce. Ils laissaient filtrer une douce lumière bleue et sur leur surface métallique était peint « SHIN-RA Inc. ». Un gouffre s?ouvrait à  droite de la grande pièce ; il laissait entrevoir une gigantesque masse d?appareils noirâtres et fumants. Craven se baissa pour éviter de cogner son crâne à  une rangée de vannes immenses fixées à  l'étendue de tuyaux qui dissimulait le plafond.
- Vous avez un plan, Rude ? dit Jeunet.
- Craven a toujours le nez bouché ?
La voix de Rude était sèche et dissimulait mal son chagrin.
- C?est une plaisanterie ?
- Pour créer le virus, Hojo a fait muter un spécimen de rhume, fit Rude. Pour obtenir une transformation de la souche, il l?a exposée à  de l?Energie Mako presque pure.
- Ah, vous voulez... ?
Sans un mot, Rude tendit un Mouchoir à  Craven.
Dans un silence respectueux, Craven prit une grande inspiration et se vida le nez. Il tendit le Mouchoir gluant à  Rude.
Religieusement, Elena ouvrit une valve du grand réacteur Mako et son collègue y déposa le Mouchoir. Il regarda sa précieuse montre où brillaient toujours des Matérias. Après deux minutes, il sortit "l'arme".
- Voilà .
- Bravo, Rude, fit Elena.
- ...
- C?était bien joué, Rude, renchérit Jeunet.
- ...
- Nous sommes sauvés, fit Craven.
- ...
- Mais maintenant, reprit Jeunet, nous devrions aller à  la rencontre de l?Hermès, non ?
Rude daigna enfin parler.
- Non.
- Non ?
- Non. Il faut l?attendre ici.
- Mais il va dévorer Jackson et Spielberg ! protesta Craven.
- Pourquoi croyez-vous que ce monstre n?est pas encore ici ? dit Rude, sarcastique.
- Alors, pourquoi l?attendre ?
- ...
Des pas se firent soudain entendre. Terrible brouhaha ; l?acier et le titane étaient froissés et déchirés par les muscles invraisemblables de la créature. Enfin, dans la lumière vacillante de l?ampoule, apparut la gueule abominable.
Rude avança, ouvrit le sachet de plastique et le jeta vers les mâchoires de la chose. Il fut harponné par la langue-tentacule et ramené dans les profondeurs de la gorge. L?Hermès poussa un grognement et avança encore ; il était presque sur eux.
- Rude, ça ne marche pas !
- ...
L?homme chauve se tourna vers le réacteur Mako principal et commença à  examiner les commandes. Craven comprit qu?il projetait de se sacrifier avec eux pour éliminer l?abomination.
Soudain, le monstre bondit, se redressant de vingt mètres, heurtant la tuyauterie qui courait au plafond de la salle des machines. Un jet de vapeur roussit ses écailles argentées, mais il ne lui prêta pas attention, il n?avait d?yeux que pour ses futures victimes, qu?il allait éventrer, éviscérer, démembrer, décapiter, réduire en bouillie... Il voulait éliminer lui-même ses derniers ennemis, ridicules petites choses qui pensaient pouvoir l?arrêter, et se repaître de leurs entrailles. Il retomba et ouvrit grand sa vaste gueule ; à  l?intérieur, un gouffre, un véritable précipice, dégageant une haleine chaude, épicée, qui s?introduisait dans leurs narines, sur le point de les faire vomir.
D?épais filets de bave se mirent à  dégouliner, noyant les crocs. La gueule les surplombait, laissant chuter sur eux des flots neigeux. L?abomination s?était immobilisée. Elle s?effondra sur le flanc, sa queue se souleva une dernière fois, puis retomba, marquant sa défaite. Le grondement s?éteignit dans ses entrailles humides. L?Hermès était vaincu.
- Il est mort ! dit Craven. Rude, tu l?as eu !
- ...
- C?est grâce à  ton rhume, Wes, fit remarquer Jeunet.
- Il est encore vivant, fit finalement Rude. Son incroyable capacité de régénération le maintient au bord du gouffre, entre la vie et la mort. A présent, toutes ses cellules recherchent la clé qui leur permettra de sortir de cette inertie. Elles la trouveront, probablement dans l?ADN humain, en créant un système immunitaire semblable au nôtre, puis en le renforçant. Alors, l?Anti-Mercure n?aura plus d?effet, et l?Hermès se relèvera, plus fort que jamais.
- Mais comment s?en sortir ?
- Pour pallier à  une possible explosion des réacteurs Mako, cette pièce est doublée de mithril, seul matériau capable de résister à  une telle déflagration. Nous allons provoquer une réaction en chaîne qui déclenchera cette explosion. Enfermé dans une pièce étanche à  l?explosion, l?Hermès sera le seul à  être détruit, avec les machines. Le Giger sera intact, et nous pourrons encore nous en servir.
Le flanc écailleux, hérissé de tentacules, se mit à  remuer. Il se fendit et Reno en sortit, vêtu d?un simple slip blanc, recouvert de liquides infâmes, mais arborant un grand sourire.
Ils hurlèrent son nom.
- Merci d?avoir dégommé ce monstre, dit Reno. Il m?a gobé tout rond, voulant me digérer vivant, comme Carpenter ou Columbus. Dès ma chute dans son estomac, j?ai senti des brûlures.
- Comment... ?
- Heureusement, j?avais trouvé la Matéria Restaurer en niveau ultime dans le matériel de Loncraine et Robbins. J?ai lancé Regen sur moi-même : ses acides stomacaux ont bien faillit l?emporter, mais heureusement, le sortilège me régénérait en permanence. J?aurais aimé faire profiter les autres occupants de son ventre du sort, mais il était trop tard.
- Et ton slip ? fit Elena.
- Je l?avais dit à  Rude : les slips du Secteur 5, c?est de la qualité !
- ...
- Allez, arrête de te taire. Nous ne sommes plus chez les Turks.
Rude resta encore quelques instants sur sa défensive, avant de sourire.
- Je préfère les caleçons.
- Chacun ses goûts, reprit Reno. Et comment avez-vous vaincu ce monstre ?
- Rude a fabriqué un Anti-Mercure avec le gros réacteur Mako et les végétations de mes narines, dit Craven.
Elena tirait tranquillement leviers et manettes autour des réacteurs. Elle se frotta les mains.
- C?est fini ! Cette salle sera victime d?une explosion Mako dans cinq minutes !
- L?Hermès ne risque pas de survivre ? s?informa Craven.
- Même Sephiroth, dans le réacteur du Mont Nibel, n?a pas survécu à  une explosion Mako. Sais-tu ce que ça veut dire ? Toute l?Energie Vitale de chaque particule est sublimée pour devenir une masse de désintégration. Un levier de physique quantique. Cette saloperie sera pulvérisée.
Craven et Jeunet regardèrent, sans la moindre sympathie, l?immense corps qui reposait, dans le coma, à  l?entrée de la salle des machines. Ils se dirigèrent vers la sortie en même temps que Rude, Elena et Reno, qui portait toujours son slip blanc.
- Et il ne pourra pas s?échapper ?
Elena referma les portes blindées.
- S?il franchissait ces portes, il y arriverait... Mais elles sont non seulement doublées de titanes et d?acier (on sait que cette créature peut les déchirer), mais aussi de mithril et de plomb. Seule la salle des machines explosera, et le monstre avec.
Ils sortirent sur le pont. Le ciel nocturne était plus beau que jamais, dans l?obscurité complète.
Craven bâilla.
- Que vas-tu faire, maintenant, Reno ?
- J?aime la nature. Il faudrait que je songe à  retrouver ce groupe d?écologistes... Je ne les appréciais guère mais en fin de compte, c?était eux qui avaient raison.
- Tu veux que nous rejoignions AVALANCHE ? lui demanda Elena, incrédule.
- Pourquoi pas ? Shinra Inc. n?existe plus. Il va bien falloir des gens pour reformer des gouvernements et détruire les réacteurs Mako restants dans le monde...
Un rugissement les fit sursauter.
- L?Hermès s?est réveillé plus tôt que prévu, constata Rude avec nonchalance.
Bruit d?explosion étouffé.
Jeunet et Craven eurent un sourire cruel. Reno frissonna.
- Etre en slip, dehors, la nuit... C?est un coup à  attraper un rhume.
- J?apprécie beaucoup les rhumes, maintenant, rétorqua Craven. Je vous suggère à  tous d?attraper de bons gros rhumes et de garder votre nez bouché.
- Va t?habiller, Reno, lui conseilla Elena. Nous avons une dernière chose à  faire avant d?aller nous coucher.
- Tu penses aux oeufs de la grande soute ? dit Reno. Oui, je crois qu?après que je les aie brûlés... l?Hermès a pondu à  nouveau.
- On ne connaît jamais vraiment la vie, conclut Craven. Qui parlerait assez des plaisirs simples procurés par l?air frais de la nuit, le parfum de la mer...
Il se dirigea vers l?escalier qui menait à  la grande soute.
- ... Et par-dessus tout, l?appétissant fumet d?une bonne omelette.

_________________
Image


Dernière édition par Raphychou le 09 Juin 2005, 22:58, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message:
MessagePublié: 07 Août 2005, 19:53 
Hors-ligne
Parabole Cataclysmique
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 28 Avr 2004, 02:15
Message(s) : 467
Localisation : Baie-Comeau, Québec (No wait juste Québec)
Alors, monsieur Deus ex Machina ? Je sais que je te l'ai dit il y a une éternité, mais les végétations ne sont pas synonymes d'un rhume éternel ! Te sens-tu le masochisme de modifier cette fin à  la con ? Tu as déjà  réussi à  réunir tout le courage et la connerie nécessaire à  modifier le début de tu-sais-quoi. (Alias chose horrible faite par un jeune Raphaël et dont il ne faut pas parler sous peine de dépression carabinée de ce cher admin.)

Sinon, pour critique complète, il faudrait que je relise toute cette histoire. Mais je peux tout de suite te dire que les Queues de Phénix, ça tue déjà  la crédibilité.

_________________
"Donc finalement je pourrais juste aller, par exemple, sur le thread de judo, et traiter tout le monde de tapettes avec sept ans de retard ?"


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages publiés depuis :  Trier par  
Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 14 message(s) ] 

Le fuseau horaire est UTC+1 heure [Heure d’été]


Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 1 invité


Vous ne pouvez pas publier de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum

Recherche de:
Aller vers :  
cron
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction et support en françaisHébergement de site